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Histoire de la BRETAGNE ou de la vieille ARMORIQUE |
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PRÉFACE.
De toutes les provinces dont se compose aujourd'hui la France, il n'en est pas une dont l'histoire offre au lecteur plus d'intérêt que la Bretagne ou la vieille Armorique. Indépendante avant la conquête des Romains, elle se gouvernait par ses propres lois, comme les autres provinces de la Gaule dont elle faisait partie. Jules-César arrive à la tête des légions romaines, attaque les habitants de cette contrée, remporte la victoire et impose à la nation le joug de la servitude. Indignée de la perte de son indépendance, l'Armorique se roidit contre l'esclavage, se soulève différentes fois, brise enfin ses fers, et chasse pour toujours de son sol natal l'aigle superbe de ses odieux conquérants, tandis que les rois de France sont obligés, longtemps après, de disputer leurs états aux généraux romains.
Libre encore au prix de son sang et par son courage, elle se donne des rois, des comtes et des ducs ; dispute son territoire à de nouveaux usurpateurs, et, malgré les guerres civiles qui la déchirent parfois, résiste l'espace de douze cents ans aux forces des nations qui veulent l'envahir ; elle envoie même des secours aux unes pour combattre les autres, et voit les monarques proclamer sa valeur sur le champ de bataille, en présence des armées qu'elle a rendues victorieuses. Elle traite avec les souverains comme avec des alliés, se révolte à la seule idée de l'hommage lige et proteste hautement contre les concessions arrachées à ses princes par la force ou par la terreur. C'est avec cette énergie de caractère qui ne se démentit jamais que la Bretagne marcha, tête levée, jusqu'à l'époque où, voulant terminer ses guerres, elle offrit à Louis XII sa couronne et ses armes, mais non ses droits et ses franchises.
Telle fut en un seul trait la célèbre nation dont j'entreprends de donner l'histoire après bien des recherches. Je parlerai de ses exploits et de sa gloire, et je ne tairai pas non plus ses humiliations et ses revers. Mais avant d'entrer en matière, je crois devoir citer quelques-uns des auteurs que j'ai consultés en composant cet ouvrage : d'Argentré , Mézerai , Dom Morice, Froissart, Lobineau, Irail, Ogée, Daru, Desfontaines, Déric, Fréminville, Habasque, Kerdannet, etc., ont le plus de droits à ma reconnaissance pour les lumières qu'ils m'ont prêtées.
Cependant, quels que soient le mérite et les connaissances de ces historiens, il a été nécessaire de se tenir sur ses gardes en marchant sur leurs traces. Embarrassés sans doute par la confusion des matériaux relatifs aux premières époques, et par la similitude de quelques noms propres, portés par différents princes, ils sont quelquefois partagés de sentiments. Dans cette diversité d'opinions, j'ai suivi celle qui m'a semblé la meilleure, sans pourtant condamner les autres. Je me contente d'en prévenir le lecteur, pour ne pas surcharger l'ouvrage de renvois et de remarques. Au reste, les personnes qui ont fait de l'histoire des Bretons une étude approfondie, remarqueront aisément que je me suis toujours appuyé sur une autorité quelconque. Pourtant, malgré cette attention et le soin que j'ai pris pour m'assurer de la vérité des faits, je suis loin de la prétention de donner ici un ouvrage à l'épreuve de toute critique.
Je prie donc les personnes instruites qui y découvriront quelques fautes en me lisant avec indulgence, de vouloir bien m'en donner avis. Déjà des hommes d'une capacité reconnue, ont eu la bonté de me rendre ce service. Encouragé par eux et rassuré surtout par le profit que j'ai fait de leurs observations, j'ose mettre au jour ce qui s'est passé de mémorable dans notre petite Bretagne, qui n'est pas sans célébrité. Admirée du grand César , remarquée dix-neuf cents ans après par Napoléon lui-même, mais décriée de nos jours par des jalousies nationales, elle va de nouveau se faire connaître, si je le puis, par son antique valeur, les vertus et les faits d'armes de ses grands capitaines.
Annibal, Alexandre et Pompée sont parmi nous connus de tous les gens instruits, et nous ignorons peut-être les grands hommes de notre patrie, qui, par leurs talents, leur courage et leur grandeur d'âme, se sont élevés à la hauteur des étrangers célèbres qui recueillent le tribut de notre admiration. Honneur au valeureux Beaumanoir, au brave Clisson, à l'intrépide du Guesclin, à la célèbre Anne de Bretagne , à l'immortel du Guay-Trouin !
NOTIONS PRÉLIMINAIRES.
ORIGINE DES BRETONS. — L'origine des Bretons, comme celle de la plupart des autres peuples, est enveloppée de ténèbres. Si nous en croyons les premiers écrivains de notre nation et quelques savants des derniers siècles, les Bretons tirent leur origine de Japhet, fils de Noé, qui en se séparant de ses frères, vint s'établir dans le nord. Namnès, un de ses descendants, qui régnait environ 1245 avant Jésus-Christ, envoya une colonie qui s'arrêta dans un pays très-étendu et fort abondant en pâturages, sur les bords de la Loire, au bas des côteaux qui bordaient cette rivière.
Telle est, prétendent ces écrivains, l'origine de la nation bretonne.
Il existe néanmoins une autre tradition touchant la même origine. Amien Marcellin, Diodore de Sicile, et Parthénius, auteur grec, nous assurent que, dès l'an 3100 de la création, les Gaules étaient gouvernées par un roi, nommé Britannus, qu'Hercule vint visiter, lorsqu'il passa dans ce pays pour aller en Espagne combattre Gérion ; que le héros demanda et obtint Celtine, fille du roi, et qu'il en eut un fils appelé Celtes. Diodore dit qu'il en eut un autre encore nommé Gulathes. De-là les dénominations de Bretons, de Celtes et de Gaulois. Bretons viendrait de Britannus, Celtes, du fils de sa fille Celtine, et Gaulois de Galathes. Suivant cette opinion, les Celtes et les Gaulois auraient même origine, et ceci du moins paraît vraisemblable. Quoiqu'il en soit, le mot Celtes signifie brave, puissant, guerrier. On prétend que les Bretons d'Angleterre étaient Celtes d'origine et qu'ils sortaient de l'Armorique.
ANCIENS NOMS DU PAYS. — Un des noms les plus anciens que l'on connaisse à la contrée, habitée par les peuples répandus sur les côtes occidentales de la Gaule, est celui d'Armorique. Ce mot appartient à la langue celtique et signifie côtes maritimes : néanmoins il s'appliquait aussi à des pays assez éloignés de la mer. En effet l'Armorique comprenait non-seulement la Bretagne actuelle mais aussi le Maine, l'Anjou, la Touraine et une partie de la Basse-Normandie [Note : Quelques historiens donnent même une plus grande extension à l'Armorique]. L'Armorique a aussi porté le nom de Domnonée et de Létanie. Domnonée était le nom que les indigènes donnaient à leurs pays. Létanie était un nom générique que les Romains donnaient aux pays dans lesquels ils plaçaient des colonies de lètes, c'est-à-dire, des peuples vaincus et transplantés hors de leur patrie pour aller cultiver des territoires ravagés par la guerre. Plus tard l'extrémité occidentale de l'Armorique reçut le nom de Cornouaille, qu'on fait dériver de Cornu Galliœ, pointe de la Gaule.
LANGUE CELTIQUE. — La langue commune aux Celtes, aux Gaulois et aux Bretons insulaires, était à peu près la même que celle qui se parle encore aujourd'hui dans la Basse-Bretagne, dans le pays de Galles (Angleterre), et même, prétend-on, sur la rive du Maduga (Amérique septentrionale), chez une peuplade, sortie de la Grande-Bretagne, il y a plus de dix siècles. (K.) On la parlait dans les Gaules à l'époque où César en fit la conquête : quelques savants en font remonter l'origine à une antiquité bien plus haute ; d'autres même la regardent comme la première, la plus ancienne et la mère de toutes les autres langues.
Je n'insisterai pas sur le plus ou le moins de vraisemblance de cette opinion ; mais je fais observer, après des auteurs très-instruits, qu'on ne voit nulle part que la langue des Celtes dérive de quelqu'autre langue. Je soutiens également contre ceux qui la déprécient sans la connaître. qu'elle n'est point une langue barbare, qu'elle n'est ni aussi pauvre, ni aussi rude qu'on se plaît à se l'imaginer, et que, quant à l'accent, elle n'offre d'embarras que dans les syllabes ach, ech, och. Elle a trois auxiliaires et neuf ou dix lettres rouables qui concourent tant à l'euphonie. Si, comme les autres langues, elle a ses imperfections, comme elles aussi, elle a ses tours heureux, ses figures hardies, ses grâces, ses images, sa douceur, son énergie. Elle se divise en quatre dialectes principaux ceux de Léon, de Tréguier, de la Cornouaille et de Vannes. Celui de ces dialectes qui passe pour le meilleur, c'est le Léonais, parce qu'il s'y trouve moins de mots français bretonnisés. Des auteurs distingués qui possèdent cette langue, assurent que, si elle était restée celle des Gaulois et si elle avait été maniée par d'habiles écrivains, elle eût au moins égalé les langues les plus estimées de nos jours. Une assemblée, tenue à Reims, en 813, déclara inhabiles aux fonctions publiques, ceux qui s'obstinaient à la parler ; mais les Bretons ne tinrent aucun compte de cette mesure injuste, et, grâce à leur constance, la langue des vieux Celtes vit encore en Europe.
CULTE. — DRUIDES. — La contrée dont nous allons donner l'histoire, offrait dans l'origine le spectacle d'une nation pauvre, simple, peu sauvage et superstitieuse. Confondue longtemps avec le peuple gaulois, elle avait la même religion et presque les mêmes usages. Ainsi pour faire connaître les Celtes sous ces deux points de vue, il faut parler du culte et des mœurs des Gaulois. Ceux-ci avaient des prêtres et des prêtresses qui portaient le nom général de Druides et de Druidesses. Les Druides étaient nobles et jouissaient de la plus grande considération. Partagés en différentes classes, ils portaient des noms distinctifs selon les emplois qu'ils exerçaient. Les précepteurs de la jeunesse s'appelaient sarronides, les orateurs bardes et les ministres de la religion vacces. Le chef des Druides résidait dans l'île de Bretagne. Ceux qui se destinaient aux fonctions de vacces y allaient pour s'instruire et y passaient quelquefois vingt ans à apprendre de longs poèmes que la mémoire seule confiait à la mémoire.
Le premier et le plus puissant des dieux, selon les Druides, les Celtes et les Gaulois, était Esus : ils lui rendaient tous les honneurs que nous rendons au vrai Dieu. Ils célébraient aussi les mystères de la déesse Isis dont le nom était très-connu en Bretagne. C'était une vierge apparue et si conforme à ce que dit l'Écriture sainte de la mère du Sauveur des hommes, que quelques auteurs ont pensé que les premiers Druides avaient quelque connaissance du mystère de l'incarnation. Ce qui paraît prouver le sentiment de ces historiens, c'est la chapelle qu'on a trouvée à Chartres avec cette dédicace : Virgini pariturœ.
Les points fondamentaux de leur religion consistaient à adorer Dieu, à ne jamais faire le mal, et à être braves dans toutes les occasions. Ils admettaient le dogme précieux de l'immortalité de l'âme, vérité consolante pour les mortels. Mais ce premier culte ne fut pas de longue durée. Les liaisons que les Gaulois eurent avec les autres peuples du monde, et la force de l'exemple, effacèrent peu à peu de leurs cœurs leurs premiers sentiments, et ils adoptèrent la religion des païens. Cependant ils ne se dégradèrent point jusqu'à reconnaître et adorer les divinités monstrueuses des Grecs et des Romains, tels que Vénus, Cupidon et d'autres semblables que le déréglement des mœurs avait divinisés ; mais ils reçurent toutes ces divinités sous des attributs différents, et c'est alors qu'ils formèrent des statues et bâtirent des temples. Auparavant ils se retiraient pour adorer l'Etre suprême sur les montagnes et dans les bois dont l'Armorique était couverte alors, et c'est peut-être de là que vient la vénération qu'ils avaient pour le chêne, surtout pour le gui dont la recherche était une fête nationale qui s'annonçait par cette formule : au gui l'an neuf. Un Druide coupait cette plante avec une serpette d'or. On croyait qu'elle était un antidote contre les maladies et les maléfices. On regardait aussi comme choses sacrées l'œuf de serpent et la verveine (louzouen ar groas).
SACRIFICES. — Les Gaulois et les Celtes offraient à plusieurs divinités du paganisme des sacrifices d'animaux, et même des victimes humaines, pour obtenir la victoire, la guérison de leurs chefs, ou d'autres faveurs particulières. Dans les cérémonies religieuses les vacces portaient des robes blanches, rayées de pourpre.
DOLMÉIN (ou Dolmen). — Les autels des Druides étaient des tables de pierres (Dolméin, en langue celtique), et se formaient de plusieurs pierres, posées horizontalement ; quelquefois elles étaient soulevées seulement à l'une de leurs extrémités, quelquefois aux deux bouts, par des pierres verticales. C'était sur ces autels informes et massifs que les Druides offraient le sacrifice de leurs victimes, souvent humaines [Note : On appelle aussi les Dolméin, pierres de géants, tables de fées, tables du diable. (Dol an diaoul)].
MÉINHIR (ou Menhir). — Les Méinhir (pierres longues) étaient des monuments funèbres, érigés pour honorer la mémoire des personnages importants, ou pour transmettre à la postérité le souvenir de quelque grand évènement, d'une bataille, d'une victoire, ou d'un traité, etc.
CROMLEC'H. — Les sanctuaires ou temples druidiques se composaient de plusieurs masses de pierres, posées à nu sur le sol, ou plantées verticalement, et rangées dans un certain ordre. Il y en avait qui figuraient un cercle, et dans ce cas on les appelait Cromlec’h (pierres courbées , arquées.) (Frém.).
CARNEILLOUX. — Les Carneilloux étaient des cimetières, formés d'un assemblage d'énormes pierres informes, simplement posées sur le sol, et dispersées sans ordre dans une lande ou dans une plaine.
PIERRES VACILLANTES. — Les pierres vacillantes étaient destinées (croit-on) à rendre des oracles, ou à consulter le sort. Celui qui consultait la pierre vacillante, la mettait en mouvement, et d'après le nombre d'oscillations, un Druide interprétait la réponse faite aux questionneurs. (F.) La pierre vacillante de Perros-Guirec, près de Lannion (Côtes-du-Nord) est une des plus curieuses à voir. (40 pieds de long, et 20 d'épaisseur).
PRONOSTICS. — ORACLES. — Les Celtes formaient leurs pronostics sur le hennissement et le trémoussement de quelques chevaux blancs qui étaient nourris dans les forêts. La corneille, la fresaie et l'orfraie étaient leurs oiseaux de mauvais augure. Ils avaient aussi des oracles : un des plus célèbres était celui de Sein.
TENUE DES ASSEMBLÉES. — Les Druides, comme juges de tous les différents , tenaient tous les ans une assemblée générale à Chartres, capitale de la Gaule Celtique, et jugeaient là toutes les controverses des grands et du peuple. Les affaires de l'état ne se traitaient jamais que dans les assemblées extraordinaires que l'on convoquait exprès. Les femmes y étaient admises et y donnaient leurs avis. On élisait là un général d'armée et un intendant universel dont les pouvoirs cessaient au bout d'un an. Il était d'usage que celui qui se rendait le dernier à l'assemblée, fût mis en pièces par les autres. Ceux qui avaient la charge d'imposer silence, pouvaient couper un morceau des habits de ceux qui faisaient trop de bruit. Ils s'acquittaient si bien de leur devoir, que plusieurs retournaient chez eux avec des hardes qui ne pouvaient plus leur servir.
GOUVERNEMENT. — L'Armorique faisait partie de la Gaule Celtique et formait une république fédérative avant la conquête des Romains. L'empereur Auguste, dans la distribution qu'il fit des provinces de la Gaule, comprit l'Armorique dans celle qu'il appela Lyonnaise. L'empereur Adrien partagea depuis la province lyonnaise en deux, et l'Armorique ne forma plus qu'une partie de la seconde. Enfin cette seconde fut encore divisée en deux pour former, sous un gouvernement particulier, une troisième province lyonnaise, dont Tours devint la métropole et qui était composée de la Touraine, du Maine, de l'Anjou et de ce qu'on appelle aujourd'hui Bretagne.
SERVICE MILITAIRE. — Ni l'âge ni la condition ne dispensaient les Gaulois et les Celtes d'aller à la guerre. Les vieillards couraient aux armes avec la même ardeur que les jeunes gens. Il y avait toujours dans la Gaule un nombre considérable de militaires prêts à partir au premier signal. Les Celtes et les Gaulois combattaient presque nus et ne se retranchaient jamais dans leur camp. Leur ordre de bataille était confus, leur tactique peu savante, mais le courage y suppléait. Leurs armes étaient la hache [Note : Faite de pierre dure ; on en a souvent trouvées creusant sous les Meinhir], l'épée, la flèche. Ils excellaient à tirer de l'arc. Ils avaient une cavalerie légère et une pesante : celle-ci se couvrait de fer. Prompts à courir aux armes, ils perdaient courage lorsque quelque revers venait les assaillir. Du reste ils étaient d'une audace extraordinaire et ne craignaient que la chute du ciel, disaient leurs ambassadeurs, envoyés complimenter Alexandre sur ses victoires. (Strabon).
FUNÉRAILLES. — Les funérailles se faisaient avec pompe et magnificence. On brûlait le corps du défunt et l'on jetait avec lui dans le bûcher tout ce qu'il avait de plus précieux, ses armes, ses chevaux, des esclaves pour le servir dans l'autre monde, un compte exact de ses affaires et même des lettres dans la persuasion qu'il les lirait dans ses moments de loisir.
Tels étaient les Celtes avant l'arrivée des Bretons d'Angleterre, lesquels, pour échapper aux ravages que des pirates germains faisaient dans leur pays, vinrent se réfugier dans l'Armorique où ils devinrent les maîtres. (284-364-383).
Des évêques, des prêtres et des moines avaient accompagné les Bretons fugitifs. Remplis de zèle pour la religion du Sauveur des hommes et pour le salut des âmes, ils travaillèrent utilement à déraciner les vices et les superstitions parmi les Armoricains [Note : Guillaume de Malestroit, évêque de Nantes. assure que plusieurs églises de Bretagne sont fort antérieures à la venue des Bretons insulaires]. Enfin le christianisme, propagé par les successeurs de ces hommes apostoliques, civilisa peu à peu le peuple en adoucissant ses mœurs, balaya ce qui restait de vieilles erreurs et se mit à leur place [Note : On prétend que le culte druidique était en crédit dans les Gaules six cents ans avant Jésus-Christ, et qu'il ne s'éteignit tout-à-fait qu'au septième siècle, ou sous le règne de Charlemagne].
RÉSUMÉ.
L'Armorique faisait partie de la Gaule Celtique et comprenait non-seulement le pays qu'on appelle aujourd'hui Bretagne, mais encore le Maine, l'Anjou, la Touraine et quelques cantons de la Basse-Normandie. Ces petits états formaient une république fédérative à l'époque de l'invasion des Romains, avaient mêmes mœurs à peu de chose près, même religion, même langue que le reste des Gaulois, et s'appelaient Armorique. Les peuples de ces contrées se donnaient à eux-mêmes le nom de Celtes. Les Romains les appelaient Gaulois. Ceux qui habitaient les côtes se distinguaient plus particulièrement par la dénomination d'Armoricains. Plus tard la partie la plus considérable et la plus occidentale des petits états dont on vient de parler, s'appela Bretagne du nom des Bretons, ses hôtes, venus d'Angleterre. C'est de cette grande portion de la vieille Armorique que nous allons donner ici l'histoire ; mais auparavant, nous disons qu'elle se divisait en six tribus indépendantes l'une de l'autre :
Les Redons, habitants de Rennes. Ille-et-Vilaine.
Les Diablintes, habitants d'Aleth et de Dol.
Les Nannettes, habitants de Nantes. ( Loire-Inférieure).
Les Curiosolites, habitants de Tréguier et de Saint-Brieuc. (Côtes-du-Nord, aujourd'hui Côtes-d'Armor).
Les Venètes ou Vannetais, habitants de Vannes. (Morbihan).
Les Ossismiens, habitants de Léon. (Finistère).
*** HISTOIRE DE BRETAGNE. ***
Voir
" Histoire
de Bretagne, ses premiers rois, comtes et ducs
".
Voir
" Histoire
de Bretagne : faits remarquables passés en Bretagne, sous certains rois, comtes et ducs
".
Voir
" Informations
diverses sur l'histoire de la Bretagne
".
GÉOGRAPHIE MODERNE ABRÉGÉE DE LA BRETAGNE VERS 1840.
Cette province, appelée Petite-Bretagne, pour la distinguer de la Grande-Bretagne (Angleterre et Ecosse), forme une presqu'ile, environnée de tous côtés par la Manche et l'Océan, excepté à l'est où elle confine avec la Normandie, le Maine, l'Anjou et le Poitou.
ANCIENNE DIVISION.
Avant la révolution la Bretagne se divisait
en deux parties, la haute et la basse.
La haute comprenait les diocèses de Rennes, de Nantes, de Saint-Malo, de Dol et de Saint-Brieuc.
La basse renfermait les diocèses de Vannes, de Quimper, de Saint-Pol-de-Léon et de Tréguier.
NOUVELLE DIVISION.
En 1789 la Bretagne fut divisée en cinq départements,
savoir : Ille-et-Vilaine, Côtes-du-Nord, Finistère, Morbihan, Loire-Inférieure.
Ces départements se subdivisent en arrondissements, et les arrondissements en
cantons, etc.
GEOGRAPHIE DÉPARTEMENTS.
1. ILLE-ET-VILAINE, population,
547 mille habitants (année 1840).
Ce département, situé à l'est de celui des
Côtes-du-Nord, et de celui du Morbihan, prend son nom de l’Ille et de la
Vilaine, qui l'arrosent, et se divise en six arrondissements, subdivisés en 43
cantons.
ARRONDISSEMENTS.
1. Rennes. 10 Cantons :
Hédé. - St-Aubin
d’Aubigné. - Liffré. - Mordelles. - Rennes 4 c. - Château-Giron. - Janzé.
2. Montfort. 5
Cantons :
Bécherel. - Montauban. - Saint-Méen. - Montfort. - Plélan.
3. Redon. 7
cantons :
Guichen. - Maure. - Lesel. - Pipriac. - Redon. - Fougeray. - Bain.
4. Vitré. 5
Cantons :
Châteaubourg. - Vitré. 2 c. - Argentré. - La Guerche. - Rétiers.
5
Fougères. 6 Cantons :
Antrain. - Louvigné. - Saint-Brice. - Fougères. 2 c. -
St.-Aubin-du-Cormier.
6. Saint-Malo. 9 Cantons :
Cancale. - Saint-Malo. -
Saint-Servan. - Pleurtuit. - Dol. - Châteauneuf. - Pleines-Fougères. - Combourg.
-Tinteniac.
VILLES ET OBJETS REMARQUABLES.— Rennes, (Condate, chef-lieu des anciens Redones), ville belle et grande, au confluent de l’Ille et de la Vilaine, à la tête du Canal d'Ille-et-Rance, siége de la préfecture, d'un évêché, d'une cour royale, de plusieurs tribunaux, d'une académie avec une faculté de droit, etc. Le nouveau quartier de la ville est de toute beauté, et contraste avec l'ancien. On remarque à Rennes le palais de justice, deux belles promenades, et les tours de Saint-Pierre auprès desquelles on a bâti une cathédrale. En 1720 cette ville fut la proie d'un affreux incendie qui brûla neuf cents maisons. Population, 35 mille habitants.
Saint-Malo, ville maritime et très-commerçante, située sur un rocher, dans la petite île d'Aaron, et jointe à la terre-ferme par une chaussée, nommée le Sillon, a un bon port, mais l'entrée en est difficile. Population, 12 mille habitants. Saint-Malo est la patrie du célèbre Cartier, de Maupertuis, de Dugay-Trouin, de Mahé de la Bourdonnaye, de Châteaubriand, des deux Lamennais, etc.
Saint-Servan, qui n'est séparé de Saint-Malo que par un bras de mer, est situé à l'embouchure de la Rance, et a une rade et deux ports que sépare le rocher de la tour de Solidor. L'embouchure de la Rance est défendue par un fort, bâti sur la pointe de la cité. Cancale, située sur une hauteur, a une belle rade, protégée par un fort.
PRINCIPALES RIVIÈRES. — La Vilaine qui se décharge dans l'Océan, au sud-est du Morbihan ; le Couesnon qui a son embouchure dans la baie de Cancale ; l’Ille qui se jette dans la Vilaine ; la Rance qui forme, à son embouchure, le port de Saint-Malo.
PRODUCTIONS. — Une partie de ce département est couverte de landes ; dans le reste on cultive du blé, du lin, du chanvre, des châtaignes, des poires, des pommes qui fournissent d'excellents cidres ; il y a aussi de très-bons pâturages. On exporte beaucoup de beurre et d'huîtres. Le beurre de la Prévalaye, ferme près de Rennes, et les huîtres de Cancale son très-estimés.
CURIOSITÉ. On voit dans la commune d'Essé, canton de Rétiers, la Roche-aux-Fées, monument druidique qui se compose de quarante-deux blocs énormes de schiste, qui forment deux chambres. La grotte a neuf mètres de long sur environ quatre de large et autant de haut.
2. CÔTES-DU-NORD, pop., 598 mille
872 habitants (année 1840).
La Manche borne ce département au Nord, l'Ille-et-Vilaine à
l'est ; il a pour limites au sud le Morbihan, et à l'ouest le Finistère. Le
département des Côtes-du-Nord se divise en cinq arrondissements, subdivisés en
48 cantons.
ARRONDISSEMENTS.
1. Lannion. 7 Cantons :
Perros-Guirec. -
Lézardrieux. - Tréguier. - La Roche-Derrien. - Lannion. - Plestin. - Plouaret.
2.
Guingamp. 10 Cantons :
Pontrieux. - Bégard. - Guingamp. - Belle-Ille-en-Terre.
- Plouagat. - Bourbriac. - Callac. - Bothoa. - Maël-Carhaix. - Rostrenen.
3. Saint-Brieuc.
12 Cantons :
Paimpol. - Plouha. - Lanvollon. - Étables. - Châtelaudren. - Pléneuf.
Saint-Brieuc, 2 c.
- Lamballe. - Quintin. - Moncontour. - Plœuc.
4 Dinan. 10 Cantons :
Matignon. - Ploubalay. - Plancoët. - Dinan. 2 c. - Plélan.
- Jugon. - Evran. - Broons. - Saint-Jouan-de-l’Isle.
5. Loudéac. 9 Cantons :
Corlay.
- Collinée. - Plouguenast. - Uzel. - Gouarec. - Mûr. - Loudéac. - Merdrignac. - La Chéze.
Villes et objets remarquables.
ARR0NDISSEMENT DE SAINT-BRIEUC. Saint-Brieuc, siège de la préfecture, d'un évêché et de plusieurs tribunaux. Cette ville est située près de la baie qui porte son nom, et près de la rivière de Gouët, à l'embouchure de laquelle se trouve le Légué. Elle a de beaux édifices et deux belles promenades sur l'une desquelles a été érigée La statue de Duguesclin. Populat., plus de 11 mille habitants. On remarque aussi à Saint-Brieuc le pont de Couédic, construit en 1744, et celui de Gouët en 1806.
ARRONDISSEMENT DE DINAN. — Dinan dont le port est sur la Rance, est une ville importante. Du temps de la ligue elle devint une des principales places d'armes du duc de Mercœur, qui pour devenir souverain de la Bretagne, sous prétexte de combattre les réformés, y organisa la ligue qu'il fit éclater en 1590, et y appela les Espagnols.
En 1758 une escadre anglaise, commandée par l'amiral Howe, et portant un corps d'armée de dix mille hommes d'élite, sous lus ordres du général Malborough, parut sur les grèves de Saint-Cast (arrondissement de Dinan) et débarqua sans obstacles. A la nouvelle du débarquement des Anglais, toute la noblesse des environs, un grand nombre de bourgeois des villes voisines et d'habitants de la campagne s'armèrent et marchèrent au-devant des Anglais, arrêtèrent la marche d'une colonne qui se dirigeait vers Dinan, et donnèrent ainsi le temps au duc d'Aiguillon d'accourir avec un corps de troupes. Alors Malborogh, rassembla ses troupes et se replia sur la plage de Saint-Cast où s'engagea un combat meurtrier. Les Anglais, mis en pleine déroute, laissèrent deux mille morts sur le Champ de bataille. Les états de la province firent frapper une médaille pour perpétuer la mémoire de cette action célèbre.
ARRONDISSEMENT DE LANNION. — Tréguier, autrefois ville épiscopale, a un bon port, fait commerce de blé, lin, chanvre, etc., et possède un banc d'huîtres très-estimées. Au temps de la ligue cette ville fut saccagée par les troupes du duc de Mercœur, parce qu'elle tenait pour le roi, et quelque temps après (1592) par une escadre espagnole, soutenue des ligueurs du pays qui y brûlèrent sept cents des plus belles maisons. On remarque à Tréguier la cathédrale dont le clocher est surmonté d'une flèche, percée à jour, haute, belle et hardie. L'évêque de cette ville, Richard du Poirier, posa en 1339, la première pierre de cette cathédrale dont la longueur, dans œuvre, depuis le portail de l'orgue jusqu'à l'extrémité de l'autel de la Croix, est d'environ 72 mètres ; sa largeur, de l'extrémité d'un croisillon à l'autre, est de 40 mètres, et sa hauteur, sous voûte, d'environ 18 mètres. La hauteur du clocher, flèche et base réunies, est d'environ 66 mètres. On remarque aussi à Tréguier le pont suspendu sur la rivière. La travée de ce pont a 100 mètres, et le tablier 2 mètres au-dessus du niveau des plus hautes marées. — Un autre pont suspendu, et plus considérable que celui de Tréguier, a été construit sur la rivière de Lézardrieux. La travée de ce pont a 150 mètres entre les piliers, et quatre arches, présentant de chaque côté de la travée suspendue, une ouverture totale de 20 mètres. Le tablier est à 30 mètres au-dessus de la basse marée, et à 15 mètres 50 centimètres au-dessus de la haute marée d'équinoxe. Le pont est suspendu par le moyen de six câbles en fil de fer dont trois de chaque côté, soutenus sur deux colonnes en granit.
Parmi les objets les plus remarquables du département, il faut citer encore: 1° le château de Lorges, dans la commune de l'Hermitage, an milieu d'une vaste forêt. (Arrondissement de Saint-Brieuc). 2° L'abbaye de Bégard, vaste édifice d'un grandiose et d'un style imposant. (Arrondissement de Guingamp). 3° Le château de Tonquédec. (Canton de Plouaret). Ce château offre les plus belles ruines de l'architecture féodale et militaire qui nous reste actuellement en Bretagne.
PORTS. - Le département possède un grand nombre de ports, dont l'entrée est éclairée pendant la nuit, sur les points les plus dangereux par les phares : 1° des Sept-Iles ; 2° du cap Fréhel, phare tournant du premier ordre, à quatre lieues nord-ouest de Saint-Malo. L'élévation de ce phare est de 75 mètres au-dessus du niveau des pleines mers d'équinoxe (Habasq.) ; 3° des Héaux ou Hern, phare à feux fixes, l'un des plus remarquables en ce genre de tous ceux que possède la France sous le rapport du poli et la solidité de la construction. Ce phare est situé entre l’île de Bréhat [Note : La petite île de Bréhat appartient au canton de Paimpol. Les habitants de cette île sont d'une propreté remarquable] et l'embouchure de la rivière de Tréguier, en face de l'Armor de Pleubian. La hauteur de l'édifice, jusqu'au sommet de la muraille, est de 49 mètres 376 millim. (152 pieds). La lanterne, posée sur le sommet de la muraille, a 3 mètres 248 millimètres (10 pieds) de diamètre, et 7 m. 471 mil. (23 pieds) de hauteur.
PRINCIPALES RIVIÈRES. — La Rance, l'Arguenon, le Fremur, dans l'arrondissement de Dinan ; le Jaudy et le Guindy, ou Rivière de Tréguier ; le Trieux, le Guer, dans celui de Lannion ; le Leff, le Gouët, dans celui de Saint-Bricuc ; l'Oust, le Lié, le Doré, le Blavet, dans celui de Loudéac.
CANAUX. — 1° Le canal d'Ille-et-Rance qui est tout à la fois dans les Côtes-du-Nord et dans l’Ille-et-Vilaine : ce canal est alimenté par trois rigoles qui reçoivent les eaux des étangs et des ruisseaux voisins. Il joint la Rance à la Vilaine, et a de Rennes à Dinan 8 myriamètres de long. 2° Le canal de Bretagne, ou de Nantes à Brest : ce canal porte, dans le département, le nom de canal de Glomel, et débouche dans la mer par la Loire, la Vilaine, la Rance, le Blavet, et la rade de Brest.
PRODUCTIONS. — Il y a dans le département des cantons qui offrent des landes et des montagnes ; ailleurs le sol est en général fertile, surtout dans la partie littorale que le peuple a honorée du nom de Ceinture d'or, à cause de sa richesse et de sa fécondité. Le département fournit toutes sortes de blés, de bons pâturages, beaucoup de fruits, d'excellents cidres, du chanvre, du lin dont on fait d'excellentes toiles, dites de Quintin ou de Bretagne. Il y a aussi dans le département des carrières de beaux granits, des usines, des mines de fer, etc.
FORÊTS. — Arrondissement de Guingamp. — La forêt de Coat-an-Nos et celle de Coat-an-Nay, qui n'est séparée de la première quepar le Guer. — Arrondissement de Loudéac. — La forêt de Loudéac et celle de Catelun ou de la Hardouynaie. — Arrondissement de Dinan. — La forêt de Broons. — Arrondissement de Saint-Brieuc. — La forêt de Lorges ou de l'Hermitage. (L'ancienne forêt de Broceliande, prétend-on). Là résidaient des fées bretonnes ; on y voyait aussi le perron du fameux Merlin qui naquit dans la Grande-Bretagne, et que saint Colomban convertit au christianisme.
FORGES REMARQUABLES. — La forge de la forêt de Coat-an-Nos, celle du Vaublanc qui n'est pas loin de la forêt de Loudéac, et celle du Paz, près de la forêt de Lorges.
3. FINISTERE, population, 524 mille 396 habitants (année 1840).
Ce département,
appelé Finistère parce qu'il termine la presqu'île qui forme la province, est
situé à l'ouest du département des Côtes du-Nord et de celui du Morbihan. Il se
divise en cinq arrondissements, subdivisés en 43 cantons.
ARRONDISSEMENTS.
1. Brest. 12 Cantons :
Lannilis. - Lesneven. - Ploudalmézeau. - Ile d'Ouessant.
- Plabennec. - Landerneau. - Saint-Renan . - Ploudiry. - Brest. 3 c. - Daoulas.
2. Morlaix.
10 Cantons :
Saint-Pol-de-Léon. - Plouescat. - Lanmeur. - Plouzévédé. - Taulé.
- Le Ponthou. - Morlaix. - Saint-Thégonnec. - Landivisiau. - Sizun.
3. Châteaulin. 7
Cantons :
Huelgoat. - Le Faou. - Carhaix. - Crozon. - Châteaulin. - Pleyben.
- Châteauneuf.
4. Quimper. 9 Cantons :
Douarnenez. - Briec. - Ponteroix.
- Plougastel. - Quimper. - Rosporden. - Fouesnant. - Pont-l'Abbé. - Concarneau.
5.
Quimperlé. 5 Cantons :
Scaër. - Bannalec. - Pontaven. - Arzano. - Quimperlé.
Villes et objets remarquables.
— ARRONDISSEMENT DE QUIMPER. — Quimper (Corisopitum), ville importante, agréablement située sur la rivière de l'Odet, siège de la préfecture, d'un évêché et de plusieurs tribunaux. On y remarque la cathédrale. Quimper est la patrie des jésuites Hardouin et Bougeant ; de Fréron, célèbre critique, etc., population. 10 mille habitants.
Douarnenez est célèbre dans les annales de la Bretagne pour avoir été le principal repaire de Guy-Eder de Beaumanoir, surnommé Fontenelle, de la paroisse du Vieux-Bourg-Quintin, devenu lui-même célèbre par ses déprédations infâmes. — La petite île de Tudi, à peu près à l'entrée de l'Odet , dépend du canton de Pont-l'Abbé. — Le bon petit port d'Audierne et l’île de Sein appartiennent au canton de Pontcroix. C'est dans cette petite île, suivant la croyance générale, que se trouvait le principal collège des druidesses : on y entretenait un feu perpétuel en l'honneur d'un dieu que les Druides appelaient l'Inconnu, Dianaf.
— ARRONDISSEMENT DE BREST. — Brest, sur l'Océan, à l'embouchure de la petite rivière de Benfel (ou Penfeld) ; son port, l'un des plus beaux, et des plus sûrs de l'Europe, forme un canal étroit et long, et divise la ville en deux parties dont l'une s'appelle Recouvrance et l'autre Brest. Sa rade peut contenir cinq cents vaisseaux. On admire à Brest les quais, les casernes de la marine, l'arsenal, la place d'armes, l'hôtel de la marine, etc. Brest est la patrie de Lamotte-Piquet, et de Kersaint, célèbres marins. — L'église de Notre-Dame du Folcoat, située non loin de Lesneven, est un des plus beaux édifices gothiques du département. — L'île d'Ouessant, à l'ouest de l'arrondissement de Brest, paraît être l'Uxantes des anciens ; il y avait là un Collège druidique. — Le phare, établi sur l’abbaye de Saint-Mathieu, est un point de reconnaissance très-important pour diriger les navigateurs au passage du Four. — Au nord de Lannilis, sur la rive droite de l'Abervrach, était située, suivant quelques auteurs, la fameuse ville de Tolente, capitale du pays qu'on appelait alors Aginense. Abervrach s'appelait le Port de lamentation, du temps du paganisme, parce qu'on y sacrifiait, dit -on , des enfants à une fausse divinité.
— ARRONDISSEMENT DE MORLAIX. — Saint-Pol-de-Léon, petite ville, autrefois épiscopale, possède deux églises remarquables. Le clocher de celle de Creisker est surmonté d'une flèche, travaillée à jour et flanquée de quatre clochetons d'une admirable légereté : c'est le plus bel ouvrage de ce genre que nous possédions en France. Vauban, qui le vit, fut frappé de la beauté de ses proportions et de l'élégance de toutes ses formes. L'église de Saint-Thégonnec mérite aussi d'être citée [Note : Il y a dans le Finistère tant d'édifices remarquables que nous ne pouvons les mentionner tous dans cet abrégé : nous nous contentons de faire observer que de tous les départements dont se compose la France, celui du Finistère occupe le premier rang pour le nombre et la beauté des monuments religieux]. Au canton de Saint-Pol-de-Léon appartiennent la petite île de Baz (ou Batz) et le port de Roscoff. Il y a dans l'île de Baz un phare, très-important pour la navigation.
CURIOSITÉS. — On remarque dans le Finistère les grottes de Crozon, l'abîme, appelé l'Enfer, à Plogoff (canton de Pontcroix) ; les rochers de Penmarch, à peu près au sud de l'arrondissement de Quimper. Là les vagues de la mer viennent se briser avec un fracas épouvantable ; les Meinhir ou Menhir (pierres longues), près de Plouarzel, à peu près au nord-ouest de Brest.
PRINCIPALES RIVIÈRES. — L'Aulne qui traverse l'arrondissement de Châteaulin , et va se jeter dans la rade de Brest. La rivière de Landerneau qui se décharge aussi dans la rade de Brest. L'Odet qui arrose l'arrondissement de Quimper, et a son embouchure dans l'Océan, au sud du département.
PRODUCTIONS. — Le sol de ce département produit du froment, du seigle, de l'avoine, du sarrasin , des fruits à cidre, du lin, du chanvre, etc. On y trouve des carrières de granit, des mines de fer et deux belles mines de plomb argentifère, celle de Poullaouen et celle de Huelgoat. (Arrondissement de Châteaulin). Il y a des terres de bruyères ou de landes, et des forêts. Deux chaînes de collines traversent le département ; ce sont les Montagnes Noires qui se dirigent de l'est vers l'ouest, et les Montagnes d'Arée, qui se terminent à la rade de Brest.
4. MORBIHAN, population, 433 mille 520 habitants (année 1840).
Ce
département tire son nom d'une espèce de golfe qui se trouve au-dessous de
Vannes. Morbihan signifie petite-mer, en langue celtique. Ce département, situé
au sud de celui des Côtes-du-Nord, se divise en quatre arrondissements,
subdivisés en 37 cantons.
ARRONDISSEMENTS.
1. Pontivy. 7
Cantons :
Gourin. - Cléguerec. - Guéméné. - Le Faouet. - Pontivy. - Baud. - Locminé.
2.
Ploërmel. 8 Cantons :
Rohan. - La Trinité. - Mauron. - Josselin. - Ploërmel.
- Saint-Jean-Brevéley. - Guer. - Maléstroit.
3. Lorient. 11 Cantons :
Plouay.
- Pont-Scorff. - Hennebond. - Lorient. 2 c. - Pluvigner.
- Port-Louis. - Belz. - Auray. - Quiberon. - Belle-Isle.
4. Vannes. 11 Cantons
:
Grand-Champ. - Carentoir. - Elven.
- Vannes. 2 c. - Rochefort. - Questembert. - Allaire.
- Sarzeau. - Musillac. - La Roche-Bernard.
Villes et objets remarquables.
— ARRONDISSEMENT DE VANNES. — Vannes, ville ancienne, dans une position très-avantageuse pour le commerce, siége de la préfecture, d'un évêché et de plusieurs tribunaux. Cette ville communique avec la mer par le canal du Morbihan, et tire son nom des anciens peuples Veneti que César eut beaucoup de peine à subjuguer [Note : On prétend que Locmariaker (Darioric) (lieu de la belle Marie, la sainte Vierge), aujourd'hui simple village, était, du temps de César, la métropole de la belliqueuse peuplade des Vénètes, et non la ville de Vannes actuelle].
Pont de la Roche-Bernard. — Le pont de la Roche-Bernard est un monument admirable. Ce pont traverse la Vilaine presque à son embouchure, à l'endroit où elle coupait la communication entre trois départements de la Bretagne. La travée unique du pont a 194 mètres d'onverture entre les parements des piliers qui supportent les câbles de suspension. Six arcades (trois de chaque côté) de 9 mètres 50 cent. d'ouverture chacune, servent à rattacher le pont aux rives du fleuve. L'élévation du tablier est de 33 mètres, au-dessus des plus hautes marées, et 59 mètres au-dessus des plus basses mers. Les piliers qui supportent les câbles de suspension s'élèvent à 61 mètres. Il est difficile de voir rien de plus colossal et de plus hardi.
— ARRONDISSEMENT DE LORIENT. — Lorient, jolie ville, bâtie en 1719, par la compagnie des Indes, au fond de la baie de Port-Louis, à l'embouchure de la Scorff. Son port vaste et sûr, est précédé d'une rade où les plus fortes escadres peuvent mouiller en sûreté. Lorient offre de beaux quais, des rues larges et très-régulières, de très-belles maisons, de superbes magasins, etc. Population, 18 mille habitants. — Auray sur la rivière de ce nom, a un joli port. A peu de distance de cette ville est le village de Sainte-Anne, très-fréquenté par les pélerins. — L'île de Groaix ou de Croix, fertile en blé et en légumes, fait partie du canton de Port-Louis. On prétend que le mot Groaix vient du celtique Groac’h le (vieille, fée), nom que les anciens donnaient souvent aux druidesses dont il y avait un collége dans cette île. — La presqu'île de Quiberon est au sud-est de l’île de Croix. Des émigrés français y débarquèrent en 1795. Hoche, général de la république, promit la vie et la liberté même à ceux qui mettraient bas les armes. Sombreuil, signa le traité, et n'excepta que lui-même de la capitulation, mais la convention, au mépris de cette capitulation, donna l'ordre de fusiller tous les émigrés, et Hoche n'eut pas le courage de protester contre une disposition qui déshonorait sa victoire.
Dans la commune de Carnac, près de Quiberon, se trouve un moument celtique qui mérite d'être vu ; on l'appelle Debout-de-Carnac. C'est un composé de plus de douze cents meinhir ou menhir (pierres longues), rangées en ligne droite, sur onze files parallèles. Ces énormes pierres, rongées de mousse et chargées de siècles, offrent de loin l'aspect d'une armée, rangée en ordre de bataille, et de près, l'apparence de géants pétrifiés [Note : On comptait près de quatre mille meinhir à Carnac, fin XVIIIème siècle]. — Belle-Isle (Vindilis), île fertile, chef-lieu le Palais, est au sud de Quiberon.
— ARRONDISSEMENT DE PLOERMEL. — Entre Ploërmel et Josselin se livra, en 1351, le célèbre combat des Trente, si glorieux pour la nation bretonne. En mémoire de cette action une croix fut élevée sur le champ de bataille ; renversée à la révolution, elle a été remplacée par un obélisque de granit d'une forme élégante.
— ARRONDISSEMENT DE PONTIVY. — Pontivy (Napoléon-Ville, sous le règne de Bonaparte, ville que protégeait cet empereur), bâtie sur la rivière de Blavet : on y remarque la prison, la sous-préfecture et surtout la caserne.
PRINCIPALES RIVIÈRES. — La Vilaine qui arrose le canton de la Roche-Bernard, etc. (Arrondissement de Vannes), et se jette dans l'Océan ; le Blavet qui a aussi son embouchure dans l'Océan, auprès de Port-Louis ; l'Ellé qui arrose les cantons du Faouet et de Gourin (arrondissement de Pontivy) ; l'Oust qui traverse l'arrondissement de Ploëmel ; la Scorff qui arrose le canton de Guéméné , etc. (arrondissement de Pontivy).
PRODUCTIONS. — Le département du Morbihan fournit toutes sortes de blés, du chanvre, du lin, des fruits à cidre, d'excellents pâturages ; il y a des marais salans, des bois et des landes. Les mines et les carrières fournissent du fer et des pierres de taille. Il y a aussi des forêts considérables ; entr'autres celle de Lanouée où se trouve une forge importante.
5. LOIRE-INFÉRIEURE, pop., 470 mille 93 habitants (en 1840). Ce département, situé au sud d'Ille-et-Vilaine, prend son nom de la Loire qui le traverse de l'est à l'ouest, il se divise en cinq arrondissements, subdivisés en 45 cantons.
ARRONDISSEMENTS.
1.
Châteaubriant. 7 Cantons :
Rougé. - Châteaubriant. - Derval. - St.-Jules-de-Vouvante.
- Moisdon-la-Rivière. - Nozay. - Nort.
2. Savenay. 11 Cantons :
Guéméné.
- Saint-Nicolas-de-Redon. - Saint-Gildas-des-Bois. - Blain. - Herbignac. - Pont-Château.
- Guérande. - Le Croizic. - Savenay. - Saint-Nazaire. - St.-Etienne-de-Monluc.
3.
Ancenis. 5 Cantons :
Riaillé. - Ligné. - Ancenis. - Saint-Marc-la-Jaille. - Varade.
4. Paimbœuf. 5 Cantons :
Paimbœuf. - Saint-Père-en-Retz. - Le Pélerin. -
Pornic. - Bourg-Neuf.
5. Nantes. 17 Cantons :
Chapelle-sur-Erdre. - Carquefou. - Nantes. 6 c.
- Loroux-Bothereau. - Verton. - Vallet. - Bouaye. - Aigrefeuille. - Clisson. - Saint-Philbert.
- Machecoul. - Légé.
VILLES ET OBJETS REMARQUABLES. - Nantes (Nannetes) sur la Loire, au confluent de l'Erdre et de la Sèvre-Nantaise dans ce fleuve, siége de la préfecture, d’un évêché et de plusieurs tribunaux. C'est une des villes les plus considérables et les plus riches de la France. Elle est l'entrepôt d'un grand commerce d’exportation et d'importation par terre et par mer. On y remarque la cathédrale, hôtel de ville, le palais de la préfecture. Plusieurs quartiers, entr'autres celui de la Fosse, et l'île de Feylan font un commerce considérable, et sont bâtis avec élégance. Nantes est célèbre par l'édit de tolérance qu'y donna Henri IV, en 1598, et que révoqua Louis XIV en 1680. Mercœur établit dans cette ville le siége de son parlement, lorsque la ligue éclata en Bretagne. Un homme sanguinaire, CARRIER, y commit, pendant les terreurs de la révolution, beaucoup de cruautés. Nantes est la patrie d'Anne de Bretagne, de Jacques Cassar, célèbre marin, et du ministre Fouché. (Pop. 87 mille habitants vers 1840). — Les îles d'Indret et de Basse-Indre, sont situées sur la Loire à une bonne distance de Nantes. — Paimbœuf, sur la rive gauche de la Loire, a un port où se déchargent les vaisseaux qui ne peuvent remonter ce fleuve jusqu'à Nantes.
FLEUVE. — La Loire qui traverse le département de l'est à l'ouest, et se décharge dans l'Océan. C'est un des fleuves les plus considérables et les plus importants de la France.
PRINCIPALES RIVIÈRES — Le Don et l'Issac qui arrosent l'arrondissement de Savenay.
PRODUCTIONS. — Le sol de ce département produit froment, seigle, sarrasin, pommes à cidre, châtaignes, beaucoup de vins blancs dont les meilleurs sont ceux de Varades, de Montrelais et de la Chapelle. Il y a d'excellents pâturages et du bois de construction. On y trouve fer, étain, marbre, beau granit, houille. Il y a de grands marais salans qui sont une ressource importante pour les habitants. Dans ce département l'industrie rivalise avec le négoce.
(Abbé Brouster, 1840).
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