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Vertou dans la tourmente en août et septembre 1793.

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Pour venir à bout de la résistance vendéenne, le Comité de Salut Public chercha d'autres moyens de réussite et plaça toutes ses espérances dans l'armée de Mayence, devenue disponible par suite de l'évacuation de cette ville. Par décret du 1er Août 1793, la Convention décida que cette troupe d'élite serait dirigée au plus vite vers la région de l'Ouest vers la ville de Nantes. Canclaux allait-il enfin pouvoir réaliser son rêve, celui de marcher en force de cette ville vers le Sud par la route des Sables pour ensuite converger à gauche vers le Bocage. Il chercherait ainsi à isoler les Vendéens de la mer. Pour cela, il fallait établir au plus vite une tête de pont au sud de la Loire, où les forces militaires pourraient se concentrer avant d'engager leur opération offensive. Il importait de réaliser ce projet au plus vite avant l'arrivée des Mayençais. On devait prendre pour cela aux rebelles une bande de terrain située entre les Naudières et les Sorinières, à l'est de la commune de Vertou.

Guerre de Vendée : le général Kléber Jean-Baptiste. Guerre de Vendée : le général La Roche Jacquelein Henri.
     

26 AOUT : L'affaire fut menée par Canclaux lui-même en l'absence de Beysser. Il quitta Nantes le 26 Août au matin à la tête de 5.000 hommes. Voici le rapport qu'il écrit à 9 h du soir sur le déroulement des opérations : " J'avais aujourd'hui pour mission d'enlever le poste des Sorinières pour y établir le bastion avancé du camp des Naudières. Avant midi ce poste était entre nos mains sans avoir tiré le moindre coup de feu. La colonne composée de Grenadiers sous les ordres de l'adjudant Général BLOSSE a fait fuir les brigands, qui se sont repliés assez loin vers sud. Deux autres petites colonnes les ont attaqués sur les flancs. Elles ont tué quelques rebelles et fait des prisonniers.

Une demi-brigade commandée par Radermacher a encerclé le château de la Maillardière, qui passait pour être un des postes les mieux défendus des rebelles. On trouva là en effet une sérieuse résistance. Mais le feu opiniâtre des Grenadiers, renforcé par les soldats des deux régiments de Paris faisait espérer qu'on viendrait vite à bout des brigands. La fusillade se prolongea jusqu'à la nuit. Les rebelles recevaient des renforts venant de Vertou, ce qui leur permettait de tenir plus longtemps.

En fin d'après-midi, on aperçut sur les deux routes de la Rochelle et des Sables des contingents ennemis qui voulaient sans doute nous reprendre du terrain. Une fusillade intense reprit. On dut même user du canon. Les rebelles ne devaient pas utiliser cette arme au cours de la journée.

L'engagement sur la route des Sables fut très vif. Les Dragons commandés par la Général Grouchy durent charger à plusieurs reprises la cavalerie ennemie. Nous avons éprouvé des difficultés à vaincre. Nous avons subi des pertes importantes, entre autres celle du lieutenant Dupin des Chasseurs de Charentes. De leur côté, les Brigands ont été malmenés. Ce soir nous cherchons à rester sur nos positions pour établir dès demain le camp des Naudières - CANCLAUX, Général en chef des forces républicaines " (Archives Départementales de Loire-Atlantique, L524).

28 AOUT : Tandis que les Républicains s'abandonnaient à la joie de leur facile victoire, les chefs de l'armée vendéenne Charette et Lyrot préparaient un vaste regroupement de leurs forces. Ils savaient en effet que cette expédition du 26 allait permettre à leurs adversaires d'établir aux Sorinières le camp projeté, et cela les inquiétait pour l'avenir. Aussi étaient-ils décidés de multiplier leurs escarmouches dans les jours qui devaient suivre, pour tenter de retarder ainsi ce projet. Des le 28 prenant sur ses réserves campées à la Croix Moriceau et à la Louée, Lyrot lança un premier coup de main. Ceux de la Croix Moriceau marcheraient vers Château Thébaud espérant rencontrer quelques soldats de Charette dans la forêt de Toufou. Ceux de la Louée viendraient renforcer les attaquants du 26, qui avaient pris position à Vertou et sur la rive gauche de la Sèvre aux environs de la Barbinière. Crouchy qui commandait depuis vingt-quatre heures le camp des Naudières fut averti très tôt de ces mouvements possibles des troupes royalistes. (SAVARY, Guerre des Vendéens contre République, T2, p. 76).

Dans une lettre qu'il écrira le 30 Août à Canclaux, il fera l'historique de cette journée du 28 : " Avant-hier, on m'a informé dès l'aube que les troupes de Lyrot allaient passer la Sèvre et venir attaquer le camp dus Naudières. Je vous ai fait savoir la nouvelle et vous n'avez demandé de m'emparer au plus vite de la chaussée de Vertou et de prévoir ensuite les opérations nécessaires pour repousser l'ennemi. Pour réaliser ce projet, j'ai pris sous mes ordres le 77ème Régiment d'Infanterie et le 2ème Régiment de Paris, celui-ci occupant depuis le 26 les positions avancées de la Roulière et de l'Herbraye. Tandis que Redermacher interceptait près de Vertou, le passage de la Sèvre, je dirigeais mes forces vers les Pégers et Château-Thébaud, où on m'avait signalé une concentration plus importante des ennemis. En fait cette colonne des rebelles se trouvait près du Château de la Bretèche. Dans notre avancé vers cette demeure, elle a attaqué notre avant-garde, qui l'a d'ailleurs ensuite repoussée jusqu'au second château entouré de murs crénelés. Là s'est engagé un dur combat. Nos troupes ont dû charger plusieurs fois à la baionnette. L'ennemi s'est replié sur de nouvelles positions plus au nord entre le Maine et la Sèvre en direction de Saint Fiacre. Avant notre départ, nous avons mis le feu au château. Nous sommes revenus harcelant les brigands en direction de Vertou pour voir où en était la position de nos forces face au Chêne. Nous n'avons pas essayé de franchir la rivière, n'en ayant pas reçu l'ordre, et surtout n'ayant pas les soldats nécessaires pour attaquer dans ce pays découvert, ou chaque haie, chaque fossé servent de repaires à l'ennemi.

Sur le chemin du retour nous avons essuyé à nouveau les harcèlements des fanatiques. Un certain nombre de nos soldats ont été blessés, pris dans une embuscade. Nous avons dû avant de rentrer au camp reprendre le combat pour conduire les brigands au-delà de la Sèvre, qu'ils venaient de franchir tout près sur la chaussée des Moines. - Général Grouchy à Canclaux ".

Lorsqu'il rentra de cette opération militaire il devait trouver au poste de commandement le Général Beysser. Celui-ci avait dû s'éloigner momentanément de Nantes pour mener à bien d'autres missions de défense. Il revenait ici pour prendre le Commandement des Naudières où se trouvaient rassemblés 5 à
6.000 hommes. Quant à Grouchy il héritait du poste avancé des Sorinières, où se trouvaient 2.000 hommes, dont les fameux grenadiers de Blosse.

29 AOUT : La journée du 29 Août fut assez calme. Un grand nombre de réfugiés venant de Vertou et des paroisses voisines se présentèrent au contrôle des Sorinières pour obtenir l'autorisation de se réfugier à Nantes. Au cours des semaines précédentes, bien des personnes avaient vu leurs demeures pillées où incendiées. Elles cherchaient ailleurs un refuge, prévoyant sans doute les durs combats qui allaient suivre. (SAVARY, Guerre des Vendéens contre République, T2, p.73).

30 AOUT : Au matin du 30 Août, 5 à 600 brigands partis de Vertou sont venus inquiéter le camp de Grouchy aux environs des Sorinieres. Le Chef de Brigade Radermacher fut chargé de repousser l'attaque. Pendant une partie de la matinée, il a poursuivi l'ennemi l'obligeant à repasser la Sèvre. (SAVARY, Guerre des Vendéens contre République, T2, p.79).

31 AOUT : Charette cantonnait ce jour-là, avec ses soldats dans la forêt de Toufou. Il dépêche ce matin-là une estafette qui devait rejoindre Lyrot se trouvant avec ses hommes sur les hauteurs de la Louée et de Tournebride. Il lui demandait de se joindre à lui pour mener à bien une attaque importante qu'il voulait entreprendre contre le camp des Naudières.

La réponse de Lyrot à Charette fut : " Monsieur nous n'avons que le temps de vous marquer qu'il est impossible de faire ce que vous nous demandez ni ce soir, ni demain à la pointe du jour. Il nous faut le temps nécessaire de rassembler nos gens et de communiquer ce projet à tous nos voisins pour que de leur côté ils puissent s'occuper comme nous de l'affaire, et au besoin nous aider à la mener à bien. Donnez-nous la journée de Dimanche pour que tout puisse se préparer. La nuit suivante nous serons à votre disposition...". Cette attaque fut repoussée au 5 Septembre. (SAVARY, Guerre des Vendéens contre République, T2, p.111).

5 SEPTEMBRE : Le 2 Septembre eut lieu à Saumur un conseil de guerre, pour permettre eux Chefs des Armées Républicaines de mettre sur pied un plan de bataille capable de venir à bout de la résistance Vendéenne. Deux solutions furent proposées. Celle de Canclaux prévalut et fut adoptée. Elle consistait à lancer de Nantes une offensive importante vers Machecoul et la Vendée maritime pour ensuite se retourner vers le Bocage. Cette opération militaire ne pouvait avoir lieu qu'après l'arrivée de l'armée de Mayence, pas avant le 8 ou le 10 Septembre.

Quand il rentra à Nantes au soir du 4 Septembre venant de cette réunion, on l'informa qu'une attaque importante des rebelles était prévue pour le lendemain dans la région des Sorinières et de Vertou. On savait que Charette et Lyrot étaient décidés à s'emparer du camp des Naudières. Pendant la nuit, vers deux heures du matin Canclaux se rendit sur place pour y faire une visite d'inspection et se rendre compte de la situation. Il apprit par Beysser que l'ennemi avait fait de grands préparatifs et qu'on s'attendait pour le 5 à un rude coup de main. Vers  6 h. du matin, Canclaux décide de monter à cheval pour faire une reconnaissance en direction de Vertou. C'est alors qu'il aperçut des centaines de rebelles descendre du Bourg vers la Sèvre, franchir le rivière et prendre le chemin des Sorinières. On lui signalait par ailleurs un mouvement de troupes plus au Sud dans le région de Toufou. (SAVARY, Guerre des Vendéens contre République, T2, p.112).

Rentré précipitamment aux Naudières, il demanda à Beysser d'engager immédiatement les opérations. Beysser prit la tête du 77ème Régiment d'Infanterie et de la 5ème compagnie de Grenadiers commandée par Boussard. Ils se portèrent directement vers la Rousselière pour essayer en suivant la Sèvre de prendre à revers l'ennemi. Canclaux ordonna par ailleurs qu'une pièce de 12 ouvrit le feu. Les hommes de Lyrot résistèrent, les gars du Loroux étaient là à la pointe du combat et profitant des haies et des moindres accidents de terrain face aux Républicains, ils cherchaient à faire un mouvement d'enveloppement en direction du Drouillay. Un feu très vif de mousquetterie s'engagea. Sous la pression des Royalistes les "Bleus" reculèrent. C'est alors que Canclaux ordonna à d'autres troupes républicaines de passer à l'attaque. Le 13ème Bataillon de la Seine, reconnu pour sa valeur militaire et la Légion Nantaise arrivèrent au secours des soldats bousculés. Ils prirent l'ennemi à revers aux environs de la Bourrelière et l'obligèrent à reculer. Un violent combat s'engagea sur les hauteurs qui dominent le Chêne. Les Royalistes crurent encore à une victoire possible, mais sous la pression ennemie dans une lutte corps à corps ils durent repasser la chaussée de Vertou et s'établir en état de défense de l'autre côté de la rivière, avant de regagner le soir leurs camps respectifs. Ce fut pour les uns et les autres une dure journée, un grand nombre de maisons furent détruites ou incendiées La nuit venue chacun des opposants dut soigner ses blessés et enterrer ses morts.

Attaque de Nantes par les Vendéens, le 29 juin 1793.

Le soir même de ce jour Kléber entrait à Nantes avec ses Mayençais. Qu'était cette armée de Mayence que Canclaux se faisait fête d'accueillir. Une armée d'élite, l'une des meilleures troupes que possédait le République. Elle avait déjà fait ses preuves sous des chefs prestigieux Aubert - Dubayet, Kléber - Vimeux - Beaupuy et le colosse Haxo, brave et loyal soldat dont la mort héroïque aux Clouzeaux, six mois plus tard, provoquera la colère et le chagrin de Charette qui voulait l'épargner. Le 5 Septembre Kléber arriva à Nantes avec son avant-garde soulevant l'enthousiasme de la cité girondine, félicité, embrassé par de galantes citoyennes. Qu'était-ce Général ? Un fils de l'Alsace qui appartenait à une famille chrétienne et qui avait reçu une éducation très soignée près d'un prêtre de son village dont il gardera un souvenir reconnaissant. Il avait tout jeune de la vie militaire et entra à l'école des cadets de Munich. Au moment de la Révolution il adopta avec enthousiasme les idées nouvelles. Il ne devint pas cependant un exalté, ni un sectaire. Il se montra toujours respectueux de la religion et il n'hésita pas à venir en aide au cours de cette douloureuse période au clergé persécuté, prouvant ainsi le générosité de son coeur. Ce qui dominait chez lui c'était surtout sa flamme guerrière. N'allait-il pas par sa venue rendre la confiance aux Républicains tant de fois vaincus. C'est dans cette intention qu'il fut envoyé dès le 8 par Canclaux aux camp des Naudières où il venait renforcer les forces diminuées de Beysser. Ce dernier était comme Kléber originaire de l'Alsace. Il était brave, actif et aimé du soldat, mais aussi débauché et souvent oublieux de ses devoirs militaires. Kléber son compatriote l'appelait avec indulgence un "Roger Bontemps". Ces deux chefs, qui devaient dans les jours à venir commander l'avant-garde de l'armée des Côtes de Brest, forte désormais de 45.000 hommes, firent placer leurs brigades respectives l'une en face de l'autre. Dans un vibrant appel Canclaux vint les engager à fraterniser ensemble avant d'aller combattre. (Colonel Balagny, Kléber et les Mayencais, année 1937).

Kléber Jean Baptiste (1753-1800).

Note : Né le 9 mars 1753 au n° 8, Fossé-des-tanneurs à Strasbourg, baptisé en l'église Saint-Pierre-le-Vieux, Kléber Jean-Baptiste est fils de Jean-Nicolas Kléber, qui meurt 3 ans après sa naissance, et de Reine Bogart. Il est élevé par son beau-père, Jean-Martin Burger et fait des études à Jean-Sturm de Strasbourg. Kléber s'engage une première fois dans l'armée à l'âge de 16 ans en 1769, dans le 1er régiment de hussards. Engagement de courte durée, car il est très vite rappelé à Strasbourg par sa mère, pour reprendre ses études. De 1770 à 1771, il est étudiant à l'école de dessin pour les arts et métiers, installée au Poêle de la Tribu, tout près du logement de Goethe qui y habitait à la même époque. Kléber intègre ensuite l'atelier de l'architecte Chalgrin à Paris, de 1772 à 1774. En 1777, Kléber s'engage à nouveau, cette fois comme cadet à l'académie militaire de Munich (armée bavaroise). Lors de la déclaration de guerre de 1792, Kléber s'engage dans l'armée du Rhin et s'illustre dans la défense de la forteresse Mayence assiégée en 1793. Devenu général de brigade le 17 août 1793, il est envoyé en Vendée à la tête de la provisoire armée de Mayence pour y écraser le soulèvement. Il décède le 14 juin 1800, à l'âge de 47 ans, au Caire, en Egypte. Les restes de Kléber, rapportés à Marseille, étaient oubliés dans le château d'If, lorsque Louis XVIII ordonna en 1818, qu'ils fussent transférés dans sa ville natale, Strasbourg. Ils reposent aujourd'huy dans un caveau construit au milieu de la place d'Armes, et au-dessus duquel Strasbourg et la France entière ont fait élever une statue en bronze, inaugurée le 14 juin 1840.

     
Kléber Jean Baptiste (1753-1800). Strasbourg : statue de Jean-Baptiste Kléber.

Dans une lettre écrite au Commandant Terrien le 7 Septembre 1793 Lyrot fait le point de la situation militaire de l'armée royaliste à la veille des furieux engagements qui vont suivre. Tout le sud de la Loire est aux mains des insurgés. Lescure, d'Elbée, Bonchamps, de la Roche Jacquelin sont maîtres de l'Anjou et du Poitou. Roirand tient la région de Saint Fulgent et de Chantonnay. Charette règne à Legé d'où il pousse de fréquentes incursions jusqu'aux portes de Nantes. Les abords immédiats de le ville sont tenus par la division du Lorux que commande Lyrot. (Archives Peigné, Loroux-Bottereau).

François Jean Hervé Lyrot, sieur de la Patouillère et de le Gibraye en Saint Sébastien, où il est né, est une des plus belles figures de l'armée vendéenne. Agé de 61 ans en 1793, il se révèle un chef éminent ; respecté et aimé de ses hommes pour sa grande bonté et sa valeur militaire. La position qu'il occupe n'est pas de tout repos, car il doit chaque jour repousser les coups de mains des troupes républicaines. De son poste de commandement établi aux Cléons, avec une grande clairvoyance il dirige les opérations cherchant à ménager le plus possible la vie de ses "gars".

10 SEPTEMBRE : Le mouvement offensif de l'armée des Côtes de Brest commence le 10 Septembre en direction du Sud. Nous nous éloignerons momentanément de Vertou pour suivre cette opération militaire, car elle aura des ramifications fréquentes avec l'histoire qui nous occupe. (Colonel Balagny, Kléber et les Mayencais, année 1937).

L'armée de Mayence, environ 20.000 hommes, sous les ordres d'Aubert Dubayet prend la tête de la colonne, précédée de deux avant-gardes, Beysser à droite, Kléber à gauche. Le reste de l'armée s'établit en position de soutien sur une ligne défensive allant du Château de Villeneuve à la Bourrelière en Vertou, prête à intervenir en cas de besoin. Le mouvement s'exécute comme prévu. Le 10 Septembre Kléber marche sur Port-Saint-Père où il rencontre près de la rivière l'Acheneau, les gars du Pays de Retz que commande Cathelinière, un des lieutenants de Charette. L'affaire est menée rondement par la légion de Marigny. L'adversaire s'enfuit vers Machecoul abandonnant 7 canons poursuivi par Beysser. Le lendemain Kléber poursuit sa marche en avant autour du lac par Saint Lumine de Coutais. Le 12, il pénètre à Saint Philbert sans avoir rencontré la moindre résistance sérieuse. Le 13, il doit affronter à Saint Etienne de Corcoué la cavalerie de Couëtus, autre lieutenant de Charette, envoyé là pour lui barrer la route de Legé. Une fusillade nourrie épouvante les chevaux des Vendéens qui font en désordre demi-tour et qui entraînent avec eux l'infanterie qui les suit. Le 14, Kléber s'attendait à une vive résistance à Legé, dans le fief de Charette. Aussi avait-il demandé à Beysser qui était passé par Machecoul de le rejoindre pour l'aider à réaliser cette tâche difficile. Précaution inutile. Ils ne trouvent personne à Legé évacué par la population civile qui a suivi dans sa retraite vers Montaigu, l'armée de Charrette. Beysser et Kléber décident de poursuivre les fuyards pour les écraser.

Le 15 ils arrivent dans cette ville défendue seulement par une arrière-garde de Charette, car le gros de sa troupe est déjà à Tiffauges. Beysser et Kléber encerclent la ville et coupent ainsi, aux résistants qui sont là, toute retraite possible. Entassés dans des rues encombrées ils combattent vaillamment et tombent en grand nombre. Plus de 600 d'entre eux restent sur le terrain. Pour se venger de cette résistance qu'il n'avait pas prévue et qu'il attribue sans raison aux habitants de cette ville, Beysser autorise le pillage. La brigade de Kléber suit cet exemple perniceux. Voulant désapprouver Beysser et lui montrer son écoeurement Kléber se sépare de lui, quitte Montaigu pour aller camper seul avec son état-major sur le chemin de Remouillé à Aigrefeuille où il attendra qu'on lui ramène ses soldats. Passent de longues heures d'attente. Il les voit arriver sous l'influence de l'ivresse. Vite il met fin à cette mascarade et rétablit la discipline. Le 17 au matin il marche sur Clisson espérant y trouver selon les ordres reçus, une partie de l'armée de Lyrot. Celle-ci manquait au rendez-vous. Elle était ce jour-là occupée ailleurs.

17 SEPTEMBRE : Canclaux arrive à Clisson le 17 au matin satisfait de la marche des opérations. Il craint cependant que ces mouvements de troupes soient contrariés par les rebelles qui occupent toujours la rive droite de la Sèvre et contrôlent ainsi la route qui mène à Nantes. Aussi ce même jour ordonne-t-il au Bataillon de Haute Saône, cantonné au château de Villeneuve, sur la route de la Rochelle, de prendre position face à la forêt de Touffou et d'assurer ainsi les communications possibles entre Aigrefeuille et les Sorinières.

Recevant cet ordre, le Général Grouchy décide de combiner un autre mouvement de troupes en relation avec le premier. Tandis que le bataillon de Haute-Saône fouille la forêt de Touffou, il forme une seconde colonne qu'il divisera en deux tronçons. Le premier est formé par une demi-brigade du 47ème Régiment d'Infanterie. Il a pour chef Jordy et pour mission de gagner Vertou en suivant les rives de la Sèvre, en partant de Beautour. Le second est composé d'un bataillon de Grenadiers commandé par Blosse et qu'on réserve toujours pour les opérations difficiles. Il prend position face au bourg de Vertou sur les hauteurs du Chêne pour s'emparer de cette localité, après avoir franchi la rivière. Le bruit court en effet que les soldats de Lyrot sont occupés ailleurs dans la région de Clisson. (Archives Départementales de Loire-Inférieure, L1008).

La prise de Vertou sera rendue d'autant plus facile. Le Général Grouchy se joint à Blosse. Le Général Haxo accompagne Jordy. Sur le coteau du Chêne on place des obusiers et un canon de 12. La bataille s'engage vers 9 H. du matin. Les soldats de Lyrot, renforcés au dernier moment par un contingent venu de la Croix Moriceau résistent et cherchent malgré leur infériorité en nombre à passer la rivière. Des obus sont lancés sur Vertou ; ils atteignent la partie centrale du bourg et la tour de l'Eglise. Plusieurs maisons sont en feu et l'église brûle à son tour. Les Grenadiers reçoivent l'ordre de se porter en avant et de franchir la rivière. Ils engagent un dur combat corps à corps sur le chemin qui monte vers le bourg. Ils enlèvent à la baïonnette maison par maison, tout cela au milieu des flammes. C'est alors qu'on signale l'arrivée des premiers éléments de l'autre colonne, celle de Jordy près de la Croix Saint Pierre. D'un côté comme de l'autre les pertes sont sérieuses. L'armée royaliste recule au-delà du bourg pour se regrouper dans les bois de la Mortallière. Elle devait se retirer ensuite sur les hauteurs da la Louée. " Une grande joie nous attendait, écrit Grouchy, celle d'avoir libéré un certain nombre de patriotes que les Rebelles retenaient dans les fers à l'intérieur de la maison des ci-devant moines ". (SAVARY, Guerre des Vendéens contre République, T2, p.134 à 139).

De Nantes, ce même jour Le Sant écrivait à son ami Danet qui demeurait à Vannes : "Tu attends, me dis-tu, des nouvelles de l'armée de la République campée aux Morinières. Cinq ou six mille hommes sont encore là au camp sous les ordres de Grouchy. Il a fait ces jours-ci de fréquentes attaques sur Vertou pour inquiéter les sept ou huit mille Brigands qui se trouvent sur les hauteurs de la Louée et de Tournebride. Au moment où je t'écris, j'apprends que le bourg de Vertou est en feu ainsi que son église. Triste chose que la guerre". Qu'était Le Sant, le gendre de Delhuy, qui habitait à cette époque le château de la Gramoire en Vertou.

Dans le rapport qu'il envoie à Canclaux au soir de cette journée tragique, Grouchy écrit ceci : " Sur la place de Vertou, nous avons découvert un canon abandonné par les brigands. Toutes les barques, qui se trouvaient sur la Sèvre et qui facilitaient leur passage, ont été incendiées ou coulées par nos soins. La brigade de Jordy a dû intervenir dans l'après midi près de Portillon ou des royalistes ont tenté de traverser la rivière aux abords de la Ville Bachelier. Pour enrayer ce passage, on a fait installer sur la butte des moulins de Portillon deux obusiers. Un grand nombre de maisons tant au bourg qu'à la campagne ont été détruites, maisons qui servaient le plus souvent de repaires aux brigands. C'est ainsi que nos soldats ont dû mettre la feu à la Frémoire, à la Salmonière et à la Roberdière, avant de pouvoir repousser l'ennemi en direction de Château Thébaud " (SAVARY, Guerre des Vendées contre République, T2, p.139-140).

Il y eut ce jour-là des excès. Grouchy le reconnaît et il ajoute ceci : "Ces excés ne doivent plus exister. Ils compromettent la renommée de nos soldats et nuisent à notre oeuvre de liberté".

18 SEPTEMBRE : Ce matin là, Vertou pleure ses morts et contemple ses ruines. C'est l'exode de la population à la recherche d'un gîte. Aux Archives Départementales de Loire Atlantique se trouvent trois longues listes de Familles Vertaviennes qui demandent au District de Nantes un secours. Elles sont plus de 400 à exprimer leur misère. Deux tonneliers, Jean Saupin et Pierre Burban ont eu leurs maisons incendiées et ont tout perdu. Un autre tonnelier, Pierre Tillé, qui a été grièvement blessé en Mars, lors du soulèvement de Saint Fiacre n'a réussi à sauver de son avoir que l'habit qu'il porte sur lui. Julien Gendron, un des boulangers de Vertou, a eu ses deux maisons brulées. Son four a été détruit et il doit désormais faire son pain au village de la Ramée. Le farinier Gabriel Godefroy a son moulin qui a perdu ses ailes, Pierre Menard tisserand et Jean Guillon jardinier se plaignent de n'avoir plus rien à donner à leurs enfants, nombreux au foyer. Pierre Aguesse et Jean Dubigeon, gabariers sur la Sèvre ont vu leurs bateaux incendiés et coulés. Guy François receveur des contributions est depuis plusieurs semaines en chomage. Pierre Lemerle et Auguste Bahuaud laboureurs ont été volés de tout leur bétail. Il y a parmi les autres des malades ou des blessés qui demandent qu'on les aide. Il faudrait des pages et des pages pour les signaler tous. On attendra de longs mois avant qu'un peu de vie ne revienne sur les coteaux de la Sèvre, aux abords de Vertou. (Archives Départementales de Loire-Inférieure, L.840 Secours).

Ce même jour, à Clisson, Canclaux donne ses ordres aux chefs de l'armée républicaine pour mener à bien l'opération qu'il convoite de faire. Grouchy et Haxo contiendront les bandes à Lyrot menaçantes toujours sur les hauteurs de la Louée. La brigade de Kléber se portera de Clisson sur Torfou pour reconnaître les concentrations ennemies. Les forces de Beysser viendront de Montaigu vers Tiffauges. Le reste de l'armée se tiendra prête à intervenir soit à Clisson, soit au camp des Naudières.

19 SEPTEMBRE : Mais ici se détraque la trop savante machine. On attendait Rossignol et l'armée des Côtes de la Rochelle et l'armée ne vient pas au devant des Mayençais. Le comble, Beysser au lieu de se porter sur Tiffauges préfère rester à festoyer à Montaigu, où il fait si bon vivre. Aussi Kléber se trouve seul sur le plateau de Torfou avec 2.400 hommes en présence d'une concentration vendéenne dix fois plus forte.

Nous ne reviendrons pas sur les épisodes de ce combat. Après une lutte acharnée, menacé de se voir tourné sur sa gauche par les Angevins de Bonchamps, qui débouchent par le route de Cholet, Kléber décide de reculer en direction de Clisson. Il le fait au prix de très lourdes pertes, abandonnant sur le terrain toute son artillerie. Il évite de justesse d'être coupé dans son repli par les troupes de Royrand, accourues sur la rive gauche de la Sèvre. Il doit pour son salut faire appel au dévouement de Chevardin. Il lui demande de courir au plus vite avec son bataillon de Saône-et-Loire et deux pièces de canons jusqu'au pont de Boussay pour y arrêter à tout prix l'ennemi. "Meure, s'il le faut lui dit Kléber, mais sauve tes camarades". Chevardin accepte. Il tiendra le temps voulu pour que les Mayençais en déroute puissent atteindre Gétigné. Mais cette action héroïque sera payée par sa mort et celle d'une centaine de ses hommes. Pour sauver Kléber d'un désastre toujours possible Canclaux dépêche en toute hâte vers Gétigné la brigade de Vimeux qu'il tient en réserve. C'est elle qui recueillera là-bas les Mayençais épuisés et stoppera pour un temps l'avance des Vendéens.

Certes Kléber a fait tout son devoir, mais l'échec pour lui a été cuisant et les pertes considérables. Mais ce qui est pire encore, c'est le découragement des Républicains. Voyant qu'il ne peut compter que sur lui-même en face d'une armée vendéenne toute gonflée d'orgueil après le succès de Torfou, qu'elle prend avec raison pour une grande victoire, Canclaux décide de réunir ses forces pour aller les mettre à l'abri au camp des Naudières. Ce même jour il demande à Beysser de revenir directement de Montaigu aux Sorinières, ordre que Beysser une fois de plus refuse.

Pendant ce temps les chefs Royalistes ont tenu un conseil de guerre à Tiffauges dans la soirée du 19. Il décident d'exploiter à fond leur succès et de combiner un plan d'attaque pour les jours à venir.

Charette et Lescure attaqueront Beysser à Montaigu, où il se trouve encore, puis se rabattront sur la route de Clisson vers Monnières pour prendre de flanc l'armée de Canclaux dans sa retraite. Bonchamps avec ses Angevins attaquera par l'est à la hauteur du Pallet. Quant à Lyrot il devra s'efforcer en tenant solidement les camps de la Louée et de la Plée de barrer la route à tout renfort venant de Nantes. C'était un plan bien combiné, mais comment sera-t-il exécuté ?.

21 SEPTEMBRE : Le 21 Septembre Charette et Lescure attaquent à Montaigu Beysser, lui prennant 14 canons et le poursuivent dans sa retraite vers Remouillé. Pour leur malheur ils décident d'aller cueillir de nouveaux lauriers aux environs de Saint Fulgent en Vendée, où ils écrasent à son tour Mieskowski. Si brillante que soit cette seconde victoire, ils ont fait une faute importante. En manquant au rendez-vous du Pallet, ils ont privé Bonchamps d'une opération militaire.

22 SEPTEMBRE : Canclaux quitte Clisson le 22 au matin. Dès le 17, il a demandé à la Division de Beaupuy de nettoyer des rebelles la route qui mène de cette localité à Nantes, en direction du Pallet et au besoin jusqu'à la Louée. Elle a pour mission de s'emparer du Château de la Galissonière, qui est aux mains des soldats de Lyrot. Elle devra dès le 20 attaquer les rebelles signalés en grand nombre aux abords de la Louée et de la Croix Moriceau. Grouchy venant de Nantes avec une colonne importante l'aidera dans sa tache.

Celui-ci écrit à Canclaux le 20 au matin : "Hier soir pour pouvoir mettre aujourd'hui vos ordres à exécution, j'ai fait bivouaquer mes troupes à Saint Jacques de Nantes. Il nous a fallu ce matin partir de bonne heure. Une première colonne composée de Grenadiers et de deux bataillons du 57ème Régiment de l'Ain, a suivi la route de Clisson pour attaquer de front les rebelles dans leurs repaires de la Plée et de la Louée. Une seconde colonne, comprenant l'autre moitié du 57ème est passée par le bourg de Vertou pour prendre l'ennemi sur la droite entre le Ville au Blanc et les Mortiers et renverser au passage de nombreux réduits où se cache l'ennemi. Dans les bois de la Mortallière de même qu'aux abords des Canteries cette colonne a rencontré une certaine résistance, mais vite les brigands ont reculé. Haxo les a poursuivis en direction de Tournebride et de la Chapelle Heulin. Ce même jour la légion Nantaise a fait une expédition militaire sur les bords de la Loire vers Haute et Basse Goulaine - GROUCHY".

Guerre de Vendée : la colonne de Torfou.

Ainsi la retraite des troupes prévue par Canclaux semble assurée du succès. Mais voilà que soudain aux abords du Pallet une fusillade crépite. Les vignes grouillent d'une nuée hurlante de paysans, armés de faux, de piques et de fusils pris à l'ennemi. Ce sont les Angevins de Bonchamps, qui débouchent de Vallet pour prendre de flanc l'armée des Mayençais. Leur pression refoule le brigade d'Haxo qui depuis la Chapelle Heulin cherche à les contenir. Mais voici qu'apparaît sur la route venant de Clisson, la colonne d'Aubert Dubayet, uniformes blancs et plumets rouges de l'ancienne infanterie ou habits bleus des volontaires de la République. Ils encerclent un immense convoi de 1.200 voitures, ou s'entassent munitions matériel et blessés, sans compter les prélèvements opérés par eux après douze jours de campagne et de pillages.

Au Pallet les Angevins bousculent la tête du convoi, pillent les véhicules et vont jusqu'à massacrer des blessés. Mais ils sont refoulés par Aubert Dubayet accouru en personne. Bonchamps, souffrant d'une blessure récente qu'il a reçue au combat, attend avec anxiété l'arrivée de Charette et de Lescure. Mais Charette et Lescure ne viendront pas. Bonchamps s'accroche pourtant avec un espoir tenace. Lyrot est là à ses côtés avec une partie des siens, mais tous deux ne comptent que 7.000 soldats contre 15.000 aux Mayençais. Ce combat, qui durent depuis plus de huit heures, est fait pour les uns et pour les autres, de victoires partielles et de reculs. Bonchamps lance une ultime tentative aux abords de Tournebride. Repoussé par les Mayençois il perd tout espoir de voir surgir Charette. Découragé, maudissant son infidèle allié, il se dégage de sa dangereuse position et par les chemins creux et les vignes, il se replie hâtivement en direction de la Chapelle Heulin et de Vallet, pour ensuite gagner l'Anjou. Les pertes de l'armée républicaine ont été sérieuses. La route qui mène à Clisson est jonchée de cadavres et de matériel détruit. N'en pouvant plus les Mayençais doivent prendre un jour de repos dans les prairies qui sépare Tournebride des Canteries, avant de regagner le 24 le camp des Naudières près de Pont Rousseau.

En ce début d'Octobre 1793, l'orage sur Vertou a pris fin (A. Jarnoux).

Note : L’abbé Alfred Jarnoux (1900-1991), ordonné prêtre en 1925, a occupé divers postes de vicaire avant d’être chargé de la paroisse de Vertou en 1950 et de l’aumônerie du collège du Loquidy en 1960. A côté de sa charge pastorale, l’abbé Jarnoux, nommé chanoine honoraire en 1954, s’est toujours intéressé à l’histoire et a mené à terme diverses études qui ont connu l’édition.

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