Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

LES RECOLLETS DE CUBURIEN

  Retour page d'accueil       Retour Ville de Saint-Martin-des-Champs      Retour "Saint-François de Cuburien"  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Nous avons parlé des Cordeliers de Saint-François. Le mot « Cordeliers » n’est qu’une désignation populaire d’origine française. Quand les Franciscains commencèrent à se répandre en France, les gens, ignorant leur vrai nom de Frères Mineurs, et les voyant ceints d’une corde, dirent : « Voilà des religieux cordeliers » ; d’où le nom de Cordeliers.

En France, comme ailleurs, tous les Franciscains ne gardèrent pas, dans la suite des temps, la ferveur première ; c’est l’histoire de toutes les institutions humaines ; les religieux, soucieux de pratiquer parfaitement leur règle, furent appelés « Observants ».

Vers la fin du XVIème siècle, des Observants trouvèrent bon d’introduire plus d’austérité dans la pratique de la règle ; peu à peu, ils eurent des adhérents et formèrent le groupe désigné par le nom de « Frères Mineurs de la plus stricte observance », et leur façon de vivre les fit appeler vulgairement « Récollets », du mot latin recollectus, « recueilli ».

Les Récollets sont donc des Cordeliers Observants, suivant un genre de vie plus austère, tout en restant sous la juridiction du même Supérieur général que les Observants. Cordeliers et Récollets eurent leurs provinces distinctes, tout en étant gouvernés par le même Supérieur général ; les uns et les autres formaient l'Ordre des Frères Mineurs.

Les provinces des Observants étaient divisées en Custodies. Chaque Custodie groupait plusieurs couvents, sous la direction d’un Supérieur appelé Custode. Chaque province avait donc plusieurs Custodes. On élisait, en outre, le Custode des custodes, dont le rôle consistait à représenter les custodes de sa province au Chapitre général de l'Ordre.

Les provinces des Récollets n’étaient pas divisées en Custodies ; mais si elles n’avaient pas plusieurs custodes, elles avaient conservé l’usage d’élire un religieux qui, avec le Provincial, assistait au Chapitre général de l'Ordre, et lui avaient laissé son titre de Custode des custodes ; ce religieux faisait partie du Conseil de la province, ou définitoire. Le définiteur est donc un des religieux élu par le Chapitre provincial pour former le Conseil du Provincial, dans le gouvernement de la province. Différents cas sont prévus où le Provincial doit prendre l’avis de son Conseil.

Ce fut le Père Guillaume Bréhault, religieux Observant de la province de Bretagne, qui introduisit en cette province la réforme des Récollets. Elle commença par le couvent de Césambre, près Saint-Malo (1618), et continua en 1622 par ceux de Cuburien et de Tréguier, dont les religieux adoptèrent, sans conflit, le nom et la réforme des Récollets. En cette même année fut constituée la Custodie bretonne des Récollets, confirmée, le 13 Août 1627, par un Bref d'Urbain VIII.

A partir de 1623, cette Custodie tint chaque année ses petites assises. En 1624, le 1er Août, eut lieu au couvent de Cuburien une réunion capitulaire, sous la présidence du Père Guillaume Bréhault, gardien de ce couvent, qui fut à l’unanimité maintenu dans sa charge de Custode (Jouve, Notes sur les Frères Mineurs de la Province de Bretagne, pp. 10-18).

Le 8 Mars 1628, les Récollets de Cuburien obtinrent du gouverneur de Morlaix une chapelle de l’église Saint-Jacques, près la même cité, pour catéchiser les enfants et confesser (Archives départementales, 23 H 19).

Lors de la peste qui ravagea Morlaix et ses environs, de 1638 à 1642, les Récollets de Saint-François se signalèrent particulièrement dans cette ville par les secours spirituels et les soins temporels qu’ils donnèrent aux malades qu’on avait réunis dans un dépôt placé à la Ville-Neuve, et avec lesquels ils eurent le courage de se renfermer. Plusieurs périrent victimes de leur zèle. Le registre du lazaret de Saint-Mathieu en signale deux, l’un le 14 Août, l’autre le 24 Août 1640. On se souvient du Père Boniface Boubennec qui dirigeait les moines et s’était placé à leur tête au milieu des pestiférés (Courtecuisse, Tables capitulaires..., p. XIX).

Au début de 1642, la direction de la province bretonne fut effectivement confiée aux Récollets. La chose avait été décidée par Urbain VIII, trois ans plus tôt, le 25 Mai 1639.

Les 19 et 20 Septembre 1642, le Vicaire provincial visita le couvent de Cuburien. Voici quelques-unes de ses ordonnances.

Il est interdit aux religieux, Custodes et définiteurs exceptés, d’envoyer ou de recevoir une lettre qui n’ait été ouverte, lue et marquée du cachet du couvent. Ordre est donné au « supérieur ou président du choeur » que « si quelqu’un s’endort à l’oraison mentale d’après vêpres et d’après matines, il l’aille éveiller et qu’il le fasse faire indispensablement le reste de l’oraison debout proche du pupitre, devant le très saint sacrement, et s’il y retombe que, le lendemain, il le fasse dormir au commencement de la réfection et manger à terre le reste » ; — « que les religieux travaillent une heure ou deux le jour au travail corporel, au jardin ou ailleurs » ; « que les jeunes et novices ne parlent aux prêtres et anciens profès, ne les entretiennent de discours à peine de manger à terre les uns devant les autres pendant toute la réfection ». Le document qui contient ces ordonnances est daté du 26 Février 1643 et signé : fr. Basile Hervé, vicaire provincial de la province de Bretagne (Archives départementales, 23 H 4).

A la Congrégation de Cuburien qui se tint du 29 au 31 Août 1663, les Récollets sont nommés d’abord, et les Observants ensuite. Les capitulaires proclament que les Récollets et les Observants de la province composent un seul et même corps et sont soumis au gouvernement d’un même chef. Désormais, les défunts des sept couvents de Récollets sont nommés à part, et ceux des quatre couvents de Cordeliers à part. Ceux-ci ne possédaient plus que Sainte-Catherine de Blavet, Landerneau, Les Anges (Landéda) et Saint-Brieuc. Les difficultés qui avaient surgi entre Récollets et Observants n’existent plus, et la Congrégation de Cuburien renouvelle l’accord signé à cet égard au Chapitre de 1642. Le calme et la paix vont durer seize ans (Jouve, op. cit., p. 31).

René de Kergroadez avait fait ôter du couvent de Saint-François les armes de la Maison de Rohan et les armes des familles alliées de cette maison. Il fut obligé de les rétablir de par une sentence des Requêtes du Palais à Paris, le 15 Septembre 1657 (Archives de l’évêché).

Quelques années plus tard, le même marquis avait fait couper les arbres de la rabine jeunes et vieux et outragé en d’autres façons les religieux de Cuburien. Ceux-ci s’en étaient plaint au Chapitre de Bernon qui eut lieu les 26 et 27 Juin 1662. On y décida que le Provincial serait supplié de commander au gardien de Cuburien de recourir aux voies nécessaires pour soustraire son couvent aux violences du marquis (Archives départementales, 23 H 4).

En Mai 1671, Clément IX, à l’occasion de la canonisation de saint Pierre d'Alcantara, accorda une indulgence au monastère de Cuburien. Elle fut publiée dans le diocèse par Guy de Kerscao, vicaire général de Léon, qui invita tous les recteurs de l’archidiaconé à se ren­dre en procession à Cuburien, le jour de la fête de la canonisation (Archives départementales, 23 H 20).

Au chapitre de 1708 à Cuburien, voici ce qui fut prévu :

1. Les supérieurs exerceront les jeunes prédicateurs en les faisant prêcher souvent devant la communauté. — 2. Dans les communautés où on ne donne point de vin, on donnera aux religieux pour portion ordinaire trois demi-chopines de bière ou de cidre. — 3. Tous les vocaux [Note : Les « vocaux » sont ceux qui, dans une province, ont droit de vote au Chapitre provincial. Sont vocaux le Provincial sortant, les définiteurs et les supérieurs des couvents de la province] de cette province de Bretagne, d’un consentement unanime, ont établi pour loi immuable et statut municipal que, pendant que le concordat subsistera (Concordat au sujet des langues bretonne et française), tous les religieux seront censés être de la nation dans laquelle ils auront fait profession, exceptés les religieux ordinaires du diocèse de Vannes, qui ne pourront jamais être réputés de la nation de Basse-Bretagne, n’importe où ils aient fait profession ; et les religieux des trois évêchés : Quimper, Tréguier et Léon, qui ne pourront également jamais être censés de la nation de Vannes, n’importe en quel couvent ils ayent pris l’habit et font leurs voeux.

Ce décret sera publié dans toute la province.

Le 10 Juin 1728, les moines de Saint-François eurent l’honneur de recevoir l’un des bienfaiteurs du couvent, Louis de Bretagne de Rohan, prince de Léon, duc et pair de France et son épouse, Françoise de Roquelore, marquise de Biran. Voici en quels termes la Chronique de Saint-François retrace cette honorable visite :

« Le neuvième jour de Juin 1728, le T. R. P. Provincial (Saturnin Dirop) ayant été averti que Mgr. le prince et Madame la princesse de Léon devaient arriver ce jour-là à Morlaix, se rendit en ville, accompagné du Vén. P. Gardien et des principaux religieux de la Communauté, au nombre de quinze, et eut l’honneur de faire la révérence à leurs Altesses et de les inviter de venir au couvent recevoir leurs hommages. A quoy Madame la Princesse répondit gratieusement qu’elle contait d’y venir le lendemain entendre la messe. En effet, le dixième du même mois et an, leur approche ayant été annoncée par le son des cloches environ les sept heures du matin, elles arrivèrent à la porte de l’église où la Communauté les attendoient, ayant à sa tête le T. R. P. Provincial revestu et accompagné de ses officiers, comme il est marqué dans le Cérémonial. Sa Révérence, après avoir présenté la croix à adorer, complimenta le Prince et la Princesse. Le compliment fini, les chantres entonnèrent le Répons et ensuite le Te Deum, et on les conduisit au prie-Dieu qu’on leur avoit préparé du côté de l’évangile dans le sanctuaire. Après le Te Deum, le T. R. P. Provincial chanta les oraisons, et la messe fut dite par le Vénérable P. Anastase Le Lodu, lecteur actuel de Théologie et cy devant gardien de ce couvent de Cuburien. A la fin de la messe, Sa Révérence vint prendre leurs Altesses à leur prie-Dieu et les conduisit au choeur où elles considérèrent la beauté des vitres et les armes de la maison de Rohan. De là elles entrèrent dans la sacristie, montèrent jusqu’à la bibliothèque qu’elles louèrent beaucoup, descendirent dans le dortoir du premier étage et firent l’honneur au T. R. P. Provincial d’entrer dans sa chambre. Ensuite elles descendirent au réfectoire où il y avoit un déjeûner assez propre qu’elles eurent la bonté d’accepter, et de saluer la santé du T. R. P. Provincial et de toute la communauté, et Monsieur le Prince celle d’engager Sa Révérence de saluer la sienne et de Madame la Princesse. Le Prince avoit à sa suite Messieurs La Boulaye conseiller au Parlement, du Faou gouverneur de Pon­ivy, des Roches du Dresnay, Tréoudal du Plessis Penfao, Jouan lieutenant de la maréchaussée, du Parc le Brigant, maire de la ville de Morlaix, Richemont directeur de la manufacture, etc. Madame la Princesse avoit Madame la marquise de la Rivière et Mesdames du Faou, de Richemont, etc. Après le déjeûner, leurs Altesses firent beaucoup de gratieuseté à la Communauté et furent conduis à leurs carrosses et prirent la route de Landerneau » (Courtecuisse, op. cit. pp. 168-169).

Le 15 Novembre 1728, Jean Mével, de la paroisse de Berrien, est reçu oblat de Cuburien. On le nourrira et on l’entretiendra ; il servira la communauté « sans salaire et avec édification » (Courtecuisse, op. cit. p. 170).

Une discussion eut lieu, en 1737, entre les religieux de Saint-François et la ville de Morlaix, au sujet de la propriété de l’allée qui conduit de Morlaix à Cuburien. Les Pères avaient planté des arbres, le corps de la ville « vint en triomphe les arracher ». Plainte fut portée au Roi par les religieux, mais le Conseil royal jugea en faveur de la ville. Par un acte du 1er Mai 1778, Cuburien se décida à céder à la communauté de ville la propriété de l’allée depuis la manufacture de tabac jusqu’au détour de l’ancien chemin de Saint-Pol de Léon.

Quelques années plus tard, le 20 Décembre 1782, le seigneur de Penzé fut substitué aux seigneurs de Rohan comme fondateur du monastère.

Au cours du XVIIIème siècle, le relâchement s’introduit dans les couvents franciscains de Bretagne. Les mandements des Pères Provinciaux signalent les abus et désordres qui s’y produisaient. C’est ainsi par exemple que Guillaume Gaultier, le 12 Octobre 1768, relève les abus suivants :

1. Omission de la retraite annuelle. — 2. Omission de l’oraison mentale et de la lecture des livres de piété. — 3. Omission des Matines à minuit. — 4. La violation du jeûne. — 5. La paresse et l’oisiveté. — 6. Exemption de la vie commune. — 7. Amitié particulière et esprit de parti. — 8. L’intempérance. — 9. L’indépendance. — 10. Trop de familiarité et trop de confidence avec les séculiers. — 11. Les actes de propriété. — 12. La précipitation, l’indécence et la négligence dans l’administration et la réception des sacrements et dans l’accomplissement des cérémonies liturgiques (Courtecuisse, op. cit. pp. 204-221).

Le couvent de Cuburien avait des revenus qui lui permettaient de faire face à ses obligations.

Une première source de ces revenus venait des rémunérations que les religieux touchaient à l’occasion de leurs prédications. 

C’est ainsi, par exemple, que le 21 Mai 1636, l'assemblée municipale de Saint-Pol de Léon vote des remerciements au Père Pierre Joseph pour avoir prêché l'Avent et le Carême dans la cité. En considération de ses grands mérites et du fait que le couvent de Cuburien a besoin de réparations, on lui donne pour ces réparations 120 livres (Pondaven, Saint-Pol de Léon, p. 28).

Le 11 Mars 1641, il est mention des deux Pères Pierre Joseph et Alain Le Du, récollets de Cuburien, comme ayant prêché « les Avent et Carême derniers » et réclamant le paiement de la somme de six-vingt livres qu’on leur avait promis (Pondaven, Saint-Pol de Léon, p. 48).

En 1654, ce sont les Pères Gilles Espivent et Philippe du Crechquéraults, récollets de Cuburien, qui prêchent à Saint-Pol de Léon (Pondaven, Saint-Pol de Léon, p. 246).

Plus tard, en 1768, le Père Dominique, pour avoir prêché la station de Taulé, reçoit de M. le Recteur 155 livres 17 sols en argent et en effets, 400 livres de lard, 7 à 8 livres de fil et de lin, et un quartier d’orge. La même année, le Père Hilarion prêche la station de Plouvorn. Il reçoit en retour 33 livres en argent, 25 livres de fil blanc, 56 livres de fil cru et 27 livres de lin. En 1772, c’est le Père Définiteur du couvent qui prêche l'Avent à Lesneven et touche de ce fait 54 livres (Archives départementales, 23 H 6).

Il y avait ensuite l’aumône reçue par les religieux, et le produit de leurs quêtes.

Après les Cordeliers, les Récollets de Cuburien continuèrent d’avoir part aux libéralités de la ville de Morlaix, à ce que l’on appelait « l’aumône » qui était d’abord de 60 livres, puis fut portée à 100 livres. Ils reçurent aussi d’elle des dons en nature, tels que « 35 pots de vin pour leurs messes » et des gratifications extraordinaires pour les réparations de leurs maisons ou en cas de pressantes nécessités. Ils étaient encore payés pour assister aux processions.

Dans certaines paroisses, nos Récollets jouissaient du droit de faire des quêtes en nature. Si parfois à cet égard, ils franchissaient les limites qui leur étaient assignées, on les rappelait bien vite à l’ordre. C’est ainsi que le 17 Juillet 1665, défense est faite au Gardien de Cuburien de faire des quêtes dans la paroisse de Plougar, réservée au couvent de Lesneven (Archives départementales, 23 H 11). Au sujet de ces quêtes, on note quelques traits assez curieux. Le frère Dosithée Richou, du couvent de Saint-François, quêtait un jour à bord d’un corsaire en relâche dans le port de Morlaix. Agacé de ses importunités, le capitaine lui appliqua un soufflet retentissant : « Voici pour moi, dit le Récollet sans se démonter. Maintenant donnez-moi aussi quelque chose pour mon couvent ». L’à-propos fut goûté et le bissac rempli. Un autre religieux demandait une aumône à un négociant du quai de Tréguier : « Voyez-vous ce baril de vin, répliqua celui-ci. Il est à vous, si vous pouvez l’emporter jusqu’à Cuburien ». « Pourquoi pas ? », riposta le moine, qui, chargeant bravement la pièce sur ses épaules, retourna d’une seule traite à son couvent (L. Le Guennec, dans La Résistance).

Une autre source de revenus étaient les donations et fondations pieuses.

Nous savons, par exemple, que le 19 Avril 1665, Françoise Le Gendre, dame douairière de Launay Blanchart, fait don à Saint-François de deux maisons à Morlaix pour servir d’hospice. Plus tard, le 15 Juin 1718, le couvent reçoit de Pierre Sales, marchand, et de Marie Berthaud, son épouse, une chasuble et deux dalmatiques, en exécution d’un voeu fait à sainte Catherine de Bologne.

La Confrérie du Tiers-Ordre de Saint-François, établie à Cuburien, attirait les offrandes des fidèles qui en faisaient partie. A ce Tiers-Ordre appartenait la vénérable Françoise de Quisidic, demoiselle de Morlaix, morte en odeur de sainteté le 29 Octobre 1659, « ayant vécu soixante ans avec une ferveur et contenance inébranlable dans l’observance de la règle du Tiers-Ordre de Saint-François » (H. Pérennès, La vie du vénérable D. Michel Le Nobletz, par le vénérable Père Maunoir, pp. 119-125).

Par testament du 16 Janvier 1728, Jacquette Le Gac, tertiaire de Saint-François, gardienne de l’hospice de Cuburien, donne ses meubles au couvent, à condition d’être enterrée dans l’église de Cuburien et que son enterrement soit payé à la paroisse de Saint-Martin (Archives départementales, 23 H 25 : cf. Courtecuisse, Tables capitulaires..., pp. 164-167).

Les ressources du couvent étaient encore alimentées par des honoraires de messes reçues de paroisses, de communautés religieuses ou de particuliers, et par des services chantés pour les défunts.

En 1767, par exemple, on reçoit à Saint-François des Ursulines de Léon, de particuliers et du recteur 90 livres pour 150 messes, de M. de Pennelé 174 livres 12 sols pour 50 messes [Note : Le même donne 125 livres « pour la desserte de la chapelle et l’audition de la messe tous les jours de l’année ... ». Il offre d’autre part 12 livres pour un Te Deum]. En 1768, c’est Mme de Cadeville qui solde 219 livres un annuel de messes, c’est le prieur du Ponthou qui fait offrir une messe de 3 livres, c’est la paroisse de Saint-Thégonnec qui paie 361 livres 4 sols pour 602 messes. L’année suivante, le couvent reçoit 219 livres de Mme de Kerannot pour un annuel de messes (Archives départementales, 23 H 26).

Les retraites faites à Saint-François fournirent aussi quelques émoluments aux bons religieux.

En 1767, le curé de Plouvorn ayant fait à Cuburien quatre jours de retraite, y laisse 6 livres. La même année, un acolythe de la même paroisse ne verse que 3 livres pour quatre jours de récollection. En 1768, c’est M. Lange qui paie 12 livres pour quinze jours de retraite (Archives départementales, 23 H 26).

La période révolutionnaire, au début de 1790, trouva présents à Saint-François 13 religieux, dont 11 prêtres.

Le 24 Septembre de cette année, ils adressent au Département une pétition tendant à ce que les 19 prêtres et les 10 frères Récollets des maisons de Cuburien, Landerneau, Lesneven et Landéda soient tous réunis à Cuburien qui serait la seule maison de Récollets dans le Finistère. Cette pétition fut rejetée.

Le gardien du couvent était Dominique Nouël, né en 1724, entré en religion en 1742, ancien lecteur de théologie, ex-provincial. Il refusa le serment à la Constitution civile du clergé, et se retira vers la fin de 1791 à Kerserho, à Morlaix, chez M. Barrère [Note : Le 17 décembre 1791, le district de Morlaix lui demanda d’aller dire la messe à Plouézoc'h. Il prendra un cheval aux frais du district et le curé de Plouézoc'h le logera. Nouël refusa « pour incommodités aux pieds »]. Il fut interné au Château de Brest le 18 Juin 1792 [Note : Comme dépenses extraordinaires, nous avons relevé à la date de 8 Janvier 1780, 400 livres pour réparation de la toiture du couvent et de l'hospice] et déporté en Espagne le 12 Août suivant (Manuscrit Boessière).

François-Marie Laviec, né à Plouigneau, en 1765, sortit du couvent le 15 Mai 1790, et prêta le serment à la Constitution. Après avoir résidé au manoir de Kervanon, en Plouigneau, il fut nommé vicaire constitutionnel de Garlan, le 18 Mars 1792. Il quitta la paroisse le 16 Avril suivant, laissant par écrit deux déclarations qui furent déposées l’une à la municipalité, l’autre à la sacristie. Par la première de ces pièces, il prend congé des municipaux, les conviant à faire revenir leur pasteur légitime, M. Derrien. La déclaration remise à la sacristie était une vraie confession publique, en voici le texte :

« Moi, frère Zacharie Laviec, originaire de Plouigneau, paroisse de Tréguier, indigne prêtre et récollet de Cuburien, près Morlaix, je m’accuse publiquement et à ma honte :

1° D’avoir, en sortant du cloître, suivi l’exemple des plus grands scélérats, tels qu’ont été Luther, Calvin et Buker ;

2° D’avoir, en changeant d’habit, donné le plus grand scandale dont on puisse parler ;

3° Après le crime d’apostasie, d’avoir par un serment fait en l’église de Lannéanou, coopéré à abolir la religion catholique ;

4° D’avoir, par un second serment, fait au club de Morlaix, approuvé la nouvelle inquisition de la religion nationale ;

5° D’avoir reconnu Expilly pour mon évêque légitime ;

6° D’avoir dressé un procès-verbal en l’église de Plouigneau contre MM. Pen et Nigeou, prêtres, à cause qu’ils m’avaient empêché de faire le malheureux serment.

En conséquence de ce, je signe Frère Zacharie LAVIEC, prêtre récollet » (Peyron, Documents pour servir... I, pp. 319-320).

Cette formule de rétractation était accompagnée des treize premiers couplets d’une chanson bretonne contre la Constitution civile du Clergé (Archives départementales).

Saisi à Pontivy par la gendarmerie lancée à sa poursuite, Laviec fut interné au Château de Brest, en Mai 1792. Sous le Concordat, il fut vicaire de Garlan, de 1804 à 1837.

François Le Gall, né en 1752, profès de 1787, sortit de Cuburien le 1er Janvier 1791.

Raymond Raoult, 40 ans d’âge et 8 de profession, et Marc Belloeil, né le 25 Janvier 1763, profès de 1786, quittèrent le couvent le 26 Janvier 1791. Celui-ci prêta serment et devint, le 1er Avril suivant, vicaire constitutionnel de Morlaix. Nommé par l’intrus Jacob, vicaire à Dinan, le 5 Octobre 1791, il fut transféré à Bodéo le 4 Décembre 1792.

Simon Le Cuziat, né à Tréguier, 45 ans d’âge et 21 de profession, prêta serment et quitta Saint-François le 10 Janvier 1791. On le retrouve, en 1793, dans le district de Lannion.

Guillaume-Michel Charlès, né le 19 Avril 1761, à Saint-Thégonnec, profès de 1786, et prêtre deux ans plus tard, prêta serment le 14 Février 1791. Vicaire assermenté à Saint-Thégonnec en Août 1792, il fut nommé, le 4 Novembre suivant, par les citoyens électeurs, curé constitutionnel de Plounéour-Ménez (Peyron, Documents pour servir... I, p. 141). Il est à Saint-Martin de Morlaix en 1804 (Archives de l'Evêché).

Hippolyte-Joseph Eslien, lecteur de théologie, né en 1756, entré en religion en 1772, prêta serment le 14 Février 1791 et quitta le couvent le 1er Avril suivant. Le 10 Avril, il fut installé curé constitutionnel de Taulé, au traitement de 2.400 livres. Deux chansons bretonnes le tournèrent en dérision [Note : En Septembre 1792, Isidore Rolland. Provincial, demeurant chez un sieur Le Moal, à Carhaix, lui adressa une lettre de reproches]. Il mourut à Morlaix, le 8 Avril 1794, dans la rue des Ruines.

Joseph-François Le Goff, 57 ans d’âge et 38 de profession définiteur, prêta serment et passa dans le district de Lannion, le 28 Juin 1791. Il y est pensionné aux 2ème et 3ème trimestres de 1793 et se trouve alors comme vicaire à Ploemeur-Bodou.

Nicolas-Mathurin Macé, 66 ans d’âge et 42 de profession, ancien lecteur de théologie, prêta le serment constitutionnel le 11 Juillet 1792, au bureau municipal de Morlaix, et devint vicaire à Plouézoc'h au mois d'Octobre suivant.

Cyprien Baudou, 38 ans d’âge et 3 de profession, se retira dans sa famille à Kerourien, en Plouigneau. Il y fut arrêté le 2 Juin 1793 et conduit à l’hôpital de Morlaix, où le district versa, en Octobre, une somme de 110 livres à valoir sur son traitement.

Deux religieux de Cuburien étaient laïcs : Isidore Chevalier et Dosithée Richou. Le premier, qui avait 66 ans d’âge et 37 de profession, mourut en Juin 1792 et fut inhumé à Saint-Martin-des-Champs. Le second, 58 ans d’âge et 36 de profession, sortit du couvent le 17 Juillet pour aller résider à la Roche-Derrien, district de Pontrieux (Le Guennec, dans La Résistance).

A la date du 9 Mars 1791 apparaît, à Saint-François, Jacques Guernigou, récollet, âgé de 39 ans et comptant 19 de religion. Il demande ce jour-là à la municipalité de Châtelaudren de rentrer dans sa famille à Roscoff. En Juillet 1791, il est toujours à Cuburien.

A ce moment arrive de Tréguier à Saint-François le Père Simplicien (Pierre Abgrall), né à Landivisiau le 10 Novembre 1754. Le 11 Juillet 1792, ce religieux prête serment au bureau municipal de Morlaix et, le 6 Août, il déclare aller demeurer aux Sept-Iles, d’où il revient le 4 Juin 1793, pour devenir aumônier vo­lontaire, sans traitement, au château du Taureau (Le Guennec, dans La Résistance).

Le dernier discrétoire (conseil) eut lieu à Cuburien, le 20 Mai 1791, et les comptes furent clos à la fin de Mai 1792.

L’Etat s’empara alors de Saint-François et le monastère fut vendu, comme bien national, le 25 Avril de cette année à deux citoyens, Heurteaux et David, pour la somme de 30.400 livres. Ce David était le vicaire intrus de Saint-Martin de Morlaix. La belle bibliothèque du couvent fut dispersée et détruite, le monastère ravagé, on alla même jusqu’à abattre le clocher pour en fondre le métal (Le Guennec). La ville acquit ensuite l’établissement, et conformément au décret de la Convention du 14 Frimaire de la même année (4 Décembre 1793) y installa, le 26 Pluviose (14 Février 1794) une fabrique de salpêtre. Mais comme la production n’était pas en rapport avec la dépense, la municipalité en demanda la suppression le 24 Frimaire an III (14 Décembre 1794), Bientôt il ne resta de Cuburien qu’un cloître dégradé, une église déserte, et des tombes brisées. Plus tard, l’industrie s’en empara, on y lamina du plomb et on y scia du bois pour la marine.  

(Archives de l'Evêché).

 © Copyright - Tous droits réservés.