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La Constitution civile du Clergé - Les Evêques intrus du Finistère.

L'abolition des Ordres de la Noblesse et du Clergé et les décrets de la nuit du 4 Août 1789 avaient enlevé à l'Eglise les privilèges dont elle jouissait sous l'Ancien Régime. La rage niveleuse des législateurs révolutionnaires ne s'arrêtera pas en si beau chemin. Après les privilèges succomberont les droits. Il ne sera pas permis à l'Eglise de vivre dans le droit commun et la liberté, de peur que par son emprise sur les âmes, elle ne constitue une puissance indépendante, capable de contrebalancer l'action de la puissance civile. Condamnée à disparaître, tout au moins comme société autonome, l'Eglise devra se résigner à vivre sous la tutelle de l'Etat et ne jouira d'autres libertés que de celles dont on ne se croira pas encore en mesure de la dépouiller. Les lois d'exception et de proscription remplaceront les anciens Concordats. Pour arriver à leurs fins, ces proscripteurs mèneront habilement leurs travaux d'approche. On ne pouvait songer à jeter bas en un jour un édifice que quatorze siècles avaient solidement bâti. On procédera d'une façon plus lente et plus sûre. La marche de la destruction se fera par étapes, et chacune de ces étapes sera marquée d'une infamie nouvelle.

La loi du 13 Février 1789 avait déjà frappé l'Eglise dans ses Ordres monastiques. D'autres mesures savamment graduées allaient la dépouiller de ses immenses biens qui tout naturellement feraient retour à la Nation. En plaçant les biens ecclésiastiques sous la surveillance de l'autorité civile. l'Assemblée Nationale avait fait les premiers pas dans la voie de la confiscation. Deux décrets portés en Juillet et en Octobre 1790 autorisèrent puis imposèrent l'aliénation générale des biens du clergé.

L'Eglise était pauvre, mais elle restait encore debout, appuyée sur l'intégrité de ses dogmes et sur sa hiérarchie sacrée. Les législateurs se sentant impuissants à l'atteindre dans ses dogmes, se résolurent à l'attaquer dans sa hiérarchie et sa discipline. Avant tout, il fallait séparer l'Eglise de France de l'Eglise de Rome. Tel fut leur but en votant la Constitution civile du Clergé qui fut inscrite au rang des lois de l'Etat le 24 Août 1790 et affichée, dans les départements, au courant des mois de Septembre et d'Octobre.

Cette loi supprimait les Chapitres, remaniait les Diocèses, appliquait le système électif au recrutement du clergé et enlevait au Pape l'institution canonique des Evêques. Elle avait pour prétention de restaurer l'Eglise primitive, et sous couleur d'affranchir l'Eglise de France de l'autorité romaine, elle ne réussit qu'à l'asservir au pouvoir civil. Par un reste d'honnêteté, que n'ont pas su garder les Assemblées délibérantes de nos jours, elle affectait, à l'entretien du clergé, un salaire inscrit sur le Livre de la Dette publique, en compensation des biens qu'elle lui avait enlevés. Le 26 Décembre 1790, Louis XVI céda aux instances de l'Assemblée et sanctionna la loi du serment, votée le 27 Novembre précèdent. La Constituante ne voulut pas attendre la réponse du Pape Pie VI pour faire exécuter sa loi.

Mgr Conen de Saint-Luc, évêque de Quimper, était mort le 30 Septembre 1790, non toutefois, sans avoir protesté « contre les atteintes portées contre l'Eglise de Jésus-Christ », et avoir déclaré, qu'en cas de retour à la santé, il refuserait le serment. Le Chapitre avait déjà pris en mains l'administration des affaires diocésaines lorsqu'il fut dissous par le Directoire du Département. Le gouvernement du diocèse, d'après la nouvelle législation, revenait aux Vicaires épiscopaux, personnages importants avec lesquels l'Evêque lui-même devait compter, mais il n'avait guère été possible, jusque là, de procéder à leur nomination. Le Directoire départemental vit que, pour prévenir l'anarchie. Il était nécessaire de pourvoir rapidement à la succession de l'évêque défunt. Les électeurs furent convoqués, à Quimper, le 28 Octobre, et la réunion eut lieu à la Cathédrale. Malgré la belle protestation du Chapitre contre cette élection schismatique, neuf recteurs du diocèse, parmi lesquels nous trouvons : M. Grall, recteur de Pleyber-Christ, paroisse du canton actuel de Saint-Thégonnec, crurent pouvoir y prendre part. Ce recteur ne dut cependant pas voter pour Expilly, puisque, plus tard, nous le voyons refuser le serment de la Constitution civile. A la séance du Lundi, premier Novembre, il fut élu comme scrutateur et il prit la parole contre le serment exigé des électeurs. L'assemblée refusa de l'écouter, sous prétexte que le but de la réunion était de procéder rapidement à l'élection d'un candidat au siège épiscopal de Quimper. Au troisième tour de scrutin, sur 380 votants, 231 votèrent pour Expilly, 125 pour Mgr de la Marche, et 22 éparpillèrent leurs voix.

Expilly fut donc élu évêque du Finistère. Il remplaçait à la fois, et Mgr de Saint-Luc, qui venait de mourir, et Mgr de la Marche, évêque de Léon, dont le diocèse avait été supprimé. Pour échapper au mandat d'arrestation lancé contre lui, l'évêque de Léon dut prendre le chemin de l'exil. Il se réfugia en Angleterre d'où il continuait à gouverner son diocèse. Apprenant que plusieurs de ses prêtres étaient détenus au Château de Brest, il écrivit, le 20 Avril 1792, au Directoire du Département, pour réclamer leur liberté et se constituer prisonnier à leur place. Sa noble déclaration à été gravée sur son tombeau, dans la cathédrale de Saint-Pol. Elle est ainsi conçue : « S'il faut une victime, voici la compensation que je vous prie d'agréer... Rendez à tous (mes prêtres) une liberté entière et inviolable, et je m'engage à traverser les mers pour aller me remettre entièrement à votre discrétion ».

Louis-Alexandre Expilly, né à Brest, le 24 Février 1742, était recteur de Saint-Martin de Morlaix, lorsqu'il fut élu évêque par l'assemblée électorale du Département. Son élection ne lui conférait, en réalité, ni caractère épiscopal, ni même juridiction sur son diocèse. Il lui fallait trouver un prélat consécrateur, et d'après la loi, c'était à l'évêque de Rennes, son métropolitain, qu'il devait s'adresser. En cas de refus de ce dernier, il devait avoir recours à l'un ou l'autre des évêques suffragants de la province. L'évêque intrus du Finistère ne fut pas heureux dans ses multiples démarches. Mgr de Girac, de Rennes, avait déclaré, par avance, qu'il ne prêterait son concours à aucune consécration d'assermenté. Les autres évêques de la Bretagne montrèrent la même intransigeance. Réduite aux abois et constatant, par expérience, l'insuffisance de son décret, du 15 Novembre, l'Assemblée Nationale s'empressa de porter, le 25 Janvier suivant, un autre décret qui autorisait l'évêque, nommé par les électeurs du Département, à s'adresser en dernier ressort au Directoire. Les administrateurs du Département désigneraient à l'élu, en quête d'un prélat consécrateur, un évêque français assermenté, qui procèderait à la consécration d'où dériverait le caractère épiscopal. Quant à l'institution canonique attributive de juridiction, il n'était pas au pouvoir de l'autorité civile de la conférer à un prélat quelconque, désigné par elle.

Expilly se mit à la recherche d'un évêque assermenté. Des cent-trente-cinq évêques, quatre, seulement, pour l'honneur du clergé français, avaient prêté serment à la Constitution civile. C'étaient : le cardinal de Brienne, archevêque de Sens, Jarente, évêque d'Orléans, Lafont de Savine, évêque de Viviers et Talleyrand, évêque d'Autun. De Savine fit plus tard tant d'extravagances qu'on a pu mettre en doute sa responsabilité. Quant aux deux premiers, ils se récusèrent, donnant comme raison ce joli mot forgé sans doute après coup : « Je jure, mais je ne sacre pas » ( P. de la Gorce, Histoire religieuse de la Révolution, Tome I, p. 104). Il ne restait plus que Talleyrand qui, par politique, se dévoua pour sauver l'Église constitutionnelle. Expilly fut sacré, le 24 Février 1791, dans la chapelle de l'Oratoire du Louvre, à Paris ; mais l'évêque d'Autun s'il pouvait lui conférer le caractère épiscopal, ne pouvait lui donner sur le diocèse de Quimper une juridiction qu'il ne possédait pas lui-même.

L'évêque intrus resta trois ans à la tête de son diocèse. Arrêté pour fédéralisme, en vertu d'un décret de la Convention, il fut écroué au Château de Brest, en même temps que vingt-cinq de ses collègues, Administrateurs du Département. Condamné, le 22 Mai 1794, « comme auteur ou complice d'une conspiration contre la liberté du peuple français, tendant à rompre l'unité et l'indivisibilité de la République », il dut monter à l'échafaud le soir du même jour. L'exécution des vingt-six Administrateurs eut lieu entre six et sept heures du soir, à la vue d'un peuple immense qui, à la chute de chaque tête, lançait d'une voix formidable, le cri de : « Vive la République ».

Expilly monta le dernier à l'échafaud. Il aurait dit après le prononcé du jugement : « C'est beaucoup de paraître devant le tribunal des hommes et devant celui de Dieu le même jour » (Abbé Tresvaux. — Histoire de la persécution révolutionnaire en Bretagne. — Nouvelle édition, tome II, p. 18). On dut attendre quatre ans pour lui donner un successeur. Yves-Marie Audrein, né en 1741, à Goarec, en la paroisse de Plouguernével, diocèse de Quimper, fut élu, le 22 Avril 1798, évêque constitutionel du Finistère. Intrigant et ambitieux, il était complétement acquis aux idées nouvelles. A Paris, il excitait ses amis les Jacobins, à poursuivre les prêtres réfractaires. Comme député de la Convention, il avait pris part au procès de Louis XVI et avait voté la mort du roi avec sursis. Il était vicaire épiscopal de Le Masle, évêque intrus du Morbihan, lorsqu'il fut élu évêque du Finistère. Audrein se doutait de l’accueil hostile qui l’attendait dans son diocèse d’origine. Il n’ignorait pas les difficultés qu’avait éprouvées son prédécesseur, de la part des populations catholiques du diosèse de Quimper et de Léon, et rien ne l’autorisait à croire que ses nouveaux diocésains se départiraient de leur intransigence à son égard.

Il ne tarda pas à constater en quel discrédit était tombé le clergé officiel. Il comptait sur ses visites pastorales pour ramener la population à de meilleurs sentiments, et pour consolider la situation des prêtres intrus. Appelé à prêcher l’Avent, à Morlaix, il se mit en route, le 19 Novembre 1800 ; mais la diligence, dans laquelle il se trouvait, fut arrêtée aux environs de Briec, par une bande de royaliste. Le chef de la bande fit descendre tous les voyageurs et, avisant l’évêque, il lui demanda si c’était lui, Audrein, le député qui avait voté la mort du roi. « Oui, c'est moi », répondit fièrement Audrein. A peine avait-il prononcé ces mots qu'il tomba fusillé à bout portant. Ainsi périt le régicide Audrein, le second et dernier évêque constitutionnel du Finistère.

Références — Peyron. — Documents — tome I. p. — Histoire Religieuse de la Révolution, par P. de la Gorce — tome I et tome II, p. 109 — L'Eglise de Bretagne, par l'Abbé Tresvaux, p. 141.

(F. Quiniou).

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