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LA PAROISSE DE SAINT-THÉGONNEC SOUS LA RÉVOLUTION

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Les Municipalités et la liberté religieuse.

Le canton de Saint-Thégonnec comprend actuellement les communes de Pleyber-Christ, de Plounéour-Menez, du Cloître et de Loc-Eguiner. Pendant l'époque révolutionnaire Saint-Thégonnec était chef-lieu de canton, mais une seule commune en dépendait, celle de Guiclan qui se vit plus tard, pour des raisons purement électorales, attacher au canton de Taulé. Plounéour-Menez dont Loc-Eguiner n'était qu'une trêve faisait partie du canton de Pleyber. Cette sujétion froissait l'amour-propre des citoyens de Plounéour, et c'était, à leur avis, une injustice flagrante que d'accorder à Pleyber un honneur qui leur était dû à plus d'un titre. Ils se chargèrent de faire valoir leurs réclamations dans une lettre adressée, le 5 août 1793, aux Administrateurs du département à Landerneau. Cette lettre rédigée en termes insinuants et habiles était écrite, par le maire Yves Coat en collaboration avec son curé Guillaume Charles. Entre les citoyens de Plounéour et ceux de Pleyber, y était-il dit, l'entente n'est guère possible à cause de la divergence d'opinions politiques. « Il y a toujours entr'eux des contradictions à chaque assemblée primaire ». Il est à croire que si leurs réclamations avaient été écoutées, ces contradictions auraient cessé comme par enchantement, car la sagesse proverbiale des habitants de Pleyber se serait facilement accommodée avec la turbulence de ceux de Plounéour (Pleyber ar furnez — Pleyber la sagesse — vieux dicton). Les autres arguments allégués à l'appui de leur requête auraient pu, en d'autres circonstances, faire pencher la balance de leur côté, mais en ce moment, les Administrateurs du département qui venaient d'établir leur résidence à Landerneau, avaïent sur les bras d'autres affaires autrement importantes (voir la note qui suit).

Note : Arguments. 1° Plounéour a plus d'étendue que Pleyber ; 2° La population y est plus nombreuse (Plounéour, y compris Loc-Eguiner comptait 3.249 habitants, tandis que Pleyber n'en avait que 2.765) ; 3° Les habitants ont plus de civisme que ceux de Pleyber ; 4° Les partisans de la nouvelle Constitution y sont en plus grand nombre ; mais quand bien même Plounéour n'aurait pas ces avantages sur Pleyber, il ne tiendrait qu'à vous d'y transférer le chef-lieu du canton, ou du moins de faire tenir, à l'instar des assemblées électorales, les assemblées primaires alternativement à Plounéour et à Pleyber. — Signé : Coat. maire ; Charles, curé. (Lettre aux Administrateurs du département). Arch. départ. Série L. Liasse 229, n° 27. — Domaines nationaux.

Plounéour faisait valoir à juste titre son civisme. Ses officiers municipaux avaient, à plusieurs reprises, montré le plus grand zèle pour l'application des lois révolutionnaires, et l'on n'ignorait ni au District de Morlaix ni au Directoire départemental leurs sentiments sincèrements républicains. Ils avaient dénoncé au Procureur général leurs prêtres insermentés et avaient demandé à ce que les sieurs Briand et Floc'h, leurs ci-devant curé et vicaire fussent, pour cause de tranquillité publique, éloignés du territoire de la commune. Ils ne tenaient pas cependant à être privés de tout service religieux, car, tout en épousant les idées du jour, il leur répugnait de renoncer à leurs pratiques cultuelles. La preuve en est qu'ils réclamèrent un prêtre pour administrer leur paroisse ; mais il leur fallait un prêtre en règle avec la loi civile, espérant ainsi concilier leurs croyances religieuses avec leurs sentiments patriotiques. Ils firent bon accueil à leur nouveau recteur Guillaume Charles, moine défroqué et ancien vicaire assermenté de Saint-Thégonnec. La population dans son ensemble ne bouda pas son pasteur et recourut assez volontiers à son ministère. Si Guillaume Charles rencontra quelques difficultés dans sa paroisse nous verrons qu'elles ne lui vinrent ni de la part de la municipalité, ni de la part de ses paroissiens.

Les prêtres de Pleyber, comme ceux de Plounéour refusèrent le serment à la Constitution civile du Clergé, et durent ou se cacher, comme Léveyer, ou prendre avec Jean Grall le chemin de l'exil. Leurs successeurs nommés par l'assemblée électorale, gens d'ailleurs d'une vie exemplaire, ne réussirent pas à gagner la confiance de la population et laissèrent aux prêtres réfractaires le soin des intérêts spirituels de la paroisse. Le maire, François Madec ainsi que ses officiers municipaux montrèrent peu de zèle dans la défense des curés intrus ou dans la poursuite des prêtres proscrits qui avaient préféré à l'exil le séjour dangereux de leur petite patrie. Accusés de favoriser l'ancien culte, et de susciter des troubles dans leur commune, dans le seul but de discréditer le clergé officiel, ils devaient s'attendre à voir leur civisme suspecté par les autorités du District et du Département. Leur recteur Jean Graal était considéré « comme le centre de la coalition formée dans ce pays contre les prêtres conformistes ». Après le départ du recteur pour l'Angleterre, la paroisse ne demeura pas sans prêtre. Il restait encore le vicaire Léveyer qui avait refusé d'émigrer. D'autres ecclésiastiques, comme Toussaint Costiou et Nicolas Moal, n'ayant pas de paroisse à administrer, exerçaient ça et là leur ministère, selon les circonstances, et faisaient de temps à autre une apparition sur le territoire de cette commune. Les préférences de la population et de la municipalité étaient acquises à ces prêtres.

La paroisse de Guiclan n'était guère pour les curés intrus un objet de convoitise. Il fallut convoquer à plusieurs reprises les électeurs avant de trouver un successeur au vénérable recteur, Hyacinthe Autheuil. Ce n'est qu'au bout de deux ans qu'on pût dénicher un prêtre qui consentit à poser sa candidature. La municipalité resta fidèle à ses anciens pasteurs, Elle réclama le libre exercice du culte dans la paroisse et défendit son église contre la violence des mesures révolutionnaires.

Nous avons vu l'attitude énergique de la municipalité de Saint-Thégonnec à l'égard des prêtres intrus et les faveurs dont jouissaient auprès d'elle les prêtres réfractaires. Avec les municipalités de Guiclan et de Pleyber, elle essaya de revendiquer pour eux et leurs administrés la liberté religieuse. Elle s'adressa aux autorités civiles et ecclésiastiques, dans le but d'obtenir pour les prêtres fidèles l'autorisation de se servir des chapelles pour l'exercice du culte, puisque l'église paroissiale était réservée aux assermentés.

Sa demande fut rejetée par le chef-lieu du district.

L'évêque du Finistère approuva ce refus, ajoutant même qu'on ne réclamait l'ouverture de ces chapelles que pour en faire « des foyers de division et perpétuer le trouble dans les paroisses ».

Les officiers municipaux étaient excessivement jaloux de leurs prérogatives et ils n'entendaient pas que le Directoire du district se permit, dans ses relations avec une municipalité de son ressort, de violer la légalité. Aucune arrestation de prêtre insermenté ne devait se faire sans qu'ils en fussent prévenus et sommés de prêter main forte aux agents de l'autorité. Le district de Morlaix avait cependant, le 13 janvier 1792, fait procéder à l'insu des autorités municipales, à l'arrestation de l'abbé Guy Cras, à Saint-Thégonnec. Les officiers municipaux protestèrent contre l'illégalité de cette mesure, mais leur protestation leur attira, du district cette réponse qui ne leur permettait plus d'ignorer en quelle estime on les tenait en haut lieu. « Si l'Administration était tenue d'aviser les municipalités des campagnes toutes les fois qu'il est nécessaire d'y maintenir l'ordre et d'exécuter les arrêtés du Département, il en résulterait que, dans les paroisses comme à Saint-Thégonnec, où le germe du fanatisme a pris racine, qu'ils ne sortiraient jamais leur plein effet ; car comment espérer que des officiers municipaux qui n'ont d'autres dieux que des prêtres fanatiques donnent la main à leur arrestation, puisqu'ils sont les premiers à les soustraire et à autoriser la résistance à la loi ».

Cette verte remontrance n'eut pas le don d'émouvoir outre mesure les officiers municipaux de Saint-Thégonnec. Le reproche qu'on leur faisait de leur négligence dans la poursuite des prêtres insermentés, ils le savaient justifié. Toutes les fois que l'ordre leur venait du District de faire des perquisitions dans la paroisse, ils se gardaient de désobéir ouvertement, mais ils avaient également soin de répondre. « Malgré toutes nos recherches, nous n'avons rien découvert ». Ils se contentèrent, cette fois, de répondre que, dans leur commune, l'ordre ne serait jamais troublé si on laissait à leurs administrés la liberté de suivre le culte qui avait leurs préférences. Ils osèrent même ajouter : « Nous le disons avec confiance ; on y est véritablement porté pour la Constitution ».

Le chef-lieu du district qui n'avait pris, en l’occurence, aucune sanction contre la municipalité de Saint-Thégonnec, se fit à son tour rappeler à l'ordre par le Directoire du département. Cette lettre des Administrateurs centraux, si elle constituait un blâme pour le district de Morlaix, n'était guère flatteuse pour les Municipaux de Saint-Thégonnec.

« Des arrêtés de douceur, y lisons-nous, sont bien propres à ramener les citoyens éduqués qui peuvent quelquefois s'égarer, mais des hommes pour la plupart sans éducation, gagnés par le fanatisme et à qui l'on prône tous les jours le retour à l'ancien régime et qui se le persuadent, demandent des arrêtés de rigueur, et vous ne leur montrez que de l'indulgence qui les enhardit de plus en plus ».

Ces paysans pour qui l'administration centrale avait si peu d'estime, restèrent aussi placides sous cette averse d'injures que sous une ondée de grêle en plein champ. Ils continuèrent tranquillement leurs travaux ordinaires tout en se disant. « Qu'ils nous insultent, mais qu'ils nous laissent le libre exercice de notre religion ». Ils ne cesseront de revenir à la charge, même en plein régime du Directoire. Ils feront signer par les habitants de la commune une pétition en vue d'obtenir le rétablissement du culte catholique, et cette pétition, ils l'adresseront au citoyen Moal, membre du Conseil des Cinq-Cents.

Références. — Arch. départ. — Série L. Liasses 44, 68, 69, 117, 220, n° 27 et n° 1.773, Comité n° 3. — Archives municipales de Saint-Thégonnec, Lettre 80ème.

(F. Quiniou).

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