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SAINT-POL-DE-LEON SOUS LA REVOLUTION (CHAPITRE 4).

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CHAPITRE IV.

SOMMAIRE.

Assemblée générale et extraordinaire de la communauté de Saint-Pol. — M. le maire prie Mgr de La Marche de faire chanter un « Te Deum » solennel et demande au corps municipal de fixer un Jour de réjouissance publique, à l'occasion des travaux de l'Assemblée nationale. — Institution d'un « Conseil permanent ». — Les Jeunes gens et la milice bourgeoise, chargés à tour de rôle de monter la garde. — Démission des membres du Conseil permanent. — Election de nouveaux membres. — Attributions que s'arroge le Conseil permanent.

LE 25 juillet 1789, il se tint à l'hôtel de ville, à Saint-Pol, une assemblée générale et extraordinaire à laquelle assistèrent MM. les officiers municipaux, Mgr l'évêque, comte de Léon et MM. du noble et vénérable chapitre de la cathédrale, MM. les recteurs et curés de la paroisse du Minihy, M. Chantrel, supérieur du séminaire, les religieux Carmes et Minimes, MM. de la noblesse de Saint-Pol, de Roscoff et lieux circonvoisins et tous les soussignants députés des corporations, arts et métiers tant de la ville que des campagnes voisines.

« M. le maire dit qu'informé le matin de l'arrivée du Seigneur Evêque, absent depuis plusieurs jours, il s'était rendu sur le champ au palais épiscopal, à l'effet de lui manifester ses sentiments personnels et ceux de la municipalité, tendant à faire éclater leur joie commune sur l'événement le plus heureux pour la nation, résultant de l'union parfaite des Etats Généraux du royaume et des démarches ultérieures de Sa Majesté, à la grande satisfaction de ses sujets; que le témoignage le plus éclatant et le plus religieux à ce sujet étant de faire chanter un Te Deum solennel à l'église cathédrale, il s'était mis en devoir de solliciter l'agrément du dit Seigneur Evêque à cette fin ; qu'il lui a été répondu par le prélat que le vœu des citoyens de sa ville épiscopale et le sien était tellement un qu'il avoit avant ce jour donné son approbation à la même demande des habitants de Landerneau et applaudi à la même cérémonie de la part des habitants des villes de Brest et de Lesneven, ajoutant même que vu l'intempérie affligeante de la saison, à la veille de la récolte, sa sollicitude pour ses ouailles l'avait déjà déterminé à ordonner des prières publiques dans tout son diocèse ; que ces premières dispositions du prélat n'étant pas les seules qu'exigent les circonstances présentes de la joie et de la satisfaction publique, mon dit sieur maire auroit cru de son devoir de convoquer le matin de ce jour le corps municipal pour aviser à un plan plus convenable de réjouissances et d'allégresse de la cité, et spécialement pour consommer un acte d'union de tous les ordres de citoyens déjà voté dans le cœur de la Nation ; que tel a été le plan proposé et admis verbalement dans cette première assemblée de la municipalité ; savoir qu'à l'issue du Te Deum en l'église cathédrale, tous les corps séculiers et réguliers préalablement invités ainsi que Messieurs de la noblesse, « il auroit été convenu de faire élever un bûcher sur la Grande Place pour être allumé au son des tambours, et toute la milice bourgeoise sous les armes, avec des cris redoublés de : Vive le Roi ! Vive la Nation ! que la police ayant accédé avec transport à cet acte public de réjouissance, elle était disposée à ordonner le soir du même jour une illumination générale ; qu'enfin le pauvre habitant devant plus que personne se ressentir des effets de l'yvresse nationale et patriotique, il auroit été arrêté de lui départir une quantité notable de pain, par chaque quartier, sous l'inspection des Dames de charité et la manutention des officiers de police. Sur tout quoi, M. le maire invite l'assemblée à délibérer actuellement, ajoutant que le dernier sceau de ce témoignage de religion et d'allégresse générale étant l'acte d'union proposé, c'était le moment de se promettre réciproquement foi et fidélité pour le maintien de la chose publique, pour la conservation de notre monarque bien-aimé et de son auguste famille, et pour l'exécution et parfait accomplissement du grand œuvre de la félicité publique ».

Lecture faite de la remontrance de M. le maire, l'assemblée déclara y donner son entière adhésion, notamment à l'acte d'union que tous et chacun de ses membres ont formellement et solennellement adopté, chargeant M. le maire d'adresser une expédition en forme de la présente délibération à toutes les villes et municipalités de la province et spécialement au président de l'Assemblée nationale, séante à Versailles, lequel sera humblement supplié de transmettre aux Etats Généraux l'hommage de profond respect et d'éternelle reconnaissance (!!!) dû à leur persévérante émulation pour le Bien et la Gloire de la patrie.

A la suite de ce dithyrambe, voici ce qui fut arrêté par le corps municipal :

« L'Assemblée, pénétrée du désir d'assurer la tranquillité publique et de resserrer de plus en plus le nouveau lien d’union, formé entre les différents ordres, a nommé, à l'exemple des autres villes de la province, un conseil permanent, composé de Mgr l'Evêque, comte de Léon, de M. l'abbé de Troërin, grand chantre et vicaire général, de M. Corre, recteur du Minihy, de M. le comte de Keranveyer, maréchal des camps et armées du Roi, de M. le marquis du Dresnay, chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis et mestre de camp de cavalerie, de M. le comte de Trédern, de M. de Chef du Bois, sénéchal et maire, de M. de Kernoter, procureur fiscal et subdélégué de l'Intendance, de M. de La Tête, avocat, de M. Le Joyeux, doyen des procureurs, de M. Guillaume, notaire royal et du sieur Yves Le Bihan, marchand, les quels seront spécialement chargés de veiller au maintien de la sûreté publique, et de former à cet effet une milice nationale qui sera commandée et dirigée par le dit conseil, suivant l'exigence des cas ».

Fait et délibéré les dits jour et an : + J.-F. Ev. C. de Léon, Hervé Chef du Bois, maire, du Dresnay, Pascal de Keranveyer, Ponsin, curé de Roscoff, Pascal de Châteaulaurent, Kersauson de Coëtbizien, Jouan de Kervénoael, Le Squin, J...e, sindic et négociant, Gérard Méga, l'abbé de Troërin, grand chantre de Léon, de Mathézou, chanoine, Prigent, chanoine pénitencier, Hardy, chanoine de Léon, de Puyferré, chanoine Turquet, supérieur des Minimes, l'abbé de Kéroulas, vicaire général, A. de Poulpiquet de Coatlez, Kermenguy de Roslan, Niquet, chanoine Mézanjeau, chevalier de Saint-Louis, le C.-D. Dandrieu, de Poulpiquet-Kérisnel, de Poulpiquet, comte de Coatlès, de la Livre (?), Michel de Kerhorre, frère Gervais-Gautier, supérieur des Carmes, Riou de Kersalaün, avocat, de Limoges, chanoine, Geffroy du Roc'hglas, de Lestang du Rusquec, Le Hir, Joguet, Le Gall de Kerven, Le Floch, Lateste, avocat, Rageul, Gélébart, Henry, de Trédern, Kernoter-Le Coat, procureur fiscal, Coroller, avocat, Le Joyeux, Chantrel, supérieur du séminaire, Corre, recteur du Minihy, Villeneuve, docteur-médecin, Fr. Le Fèvre, prieur des Carmes, Conversy, procureur du roi-syndic, Laugée, Figuière, Yves Le Bihan, marchand, Miorcec, Kergeffroy Guillaume, Le Cam, Guillaume, Desteenne, Lucas, François Cam, Nicolas Martin, Guilmer, Yves Derrien, menuisier. Le Pen, Jean Morel, Louis Bolloré, Hervé Guyader, Masson, H. Lhostis. — J. Jac, greffier [Note : Reg. 18. Fol. 10-11].

M. le maire de Saint-Pol et les membres du conseil, lorsqu'ils célébraient avec tant d'enthousiasme l'Acte d'union de tous les Français, savaient-ils au juste ce qui s'était passé à Versailles le 20 juin 1789, à l'occasion du serment du Jeu de Paume ? Ce jour, six cents députés, sous l'impulsion de Bailly, président de l'Assemblée nationale, jurèrent la formule suivante : « Vous prêtez le serment solennel de ne jamais vous séparer, de vous rassembler partout où les circonstances l'exigeront, jusqu'à ce que la constitution du royaume soit établie et affermie sur des fondements solides ? ». Savaient-ils ce qui s'était passé à Paris le 14 juillet, lors de la prise si facile de la Bastille, défendue seulement par quelques Suisses et trente invalides ? Avaient-ils eu connaissance des massacres perpétrés à l'occasion de cette prétendue victoire populaire ? Il est à croire que non. La Révolution était faite et dès lors tout allait plier sous elle. Encore trois mois, et Louis XVI sera son prisonnier aux Tuileries.

Depuis la formation de la milice bourgeoise, les jeunes gens de la ville s'étaient prêtés volontairement à monter seuls la garde jusqu'au 13 août 1789. Il fut alors arrêté par le conseil municipal que ce service serait rempli, à l'avenir, alternativement par la milice bourgeoise et par les dits jeunes citoyens. En conséquence, M. Laugée, échevin et major de la ville, donnerait ses ordres pour que la milice bourgeoise fournît la première garde le dimanche suivant et continuât de la fournir ainsi, à tour de rôle.

Dans cette même séance du 13 août, il fut arrêté qu'on fournirait à la troupe nationale des jeunes citoyens de Saint-Pol un drapeau, monté en tafetas des trois couleurs, blanc, bleu et rose, avec la devise en banderolle : Fervet amor Patriae. Les frais du drapeau seraient pris, sous le bon plaisir de Mgr l'Intendant sur le fond des deniers d'octrois de la ville.

Procédant ensuite à la nomination des places vacantes dans le corps des officiers de la milice bourgeoise, le conseil nomma pour lieutenant de la compagnie de Saint-Jean, M. Kéromen, et pour lieutenant porte-drapeau, le sieur Guilmer, avec tous les droits aux honneurs préséances et prérogatives, attribués aux dites places, et sous le bon plaisir de S. A. Mgr le duc de Penthièvre qui sera supplié humblement d'approuver la présente délibération [Note : Reg. 18. Fol. 15-16].

Trois jours après, le 16 août, il se tint à l’hôtel de ville une seconde assemblée générale et extraordinaire à laquelle assistèrent MM. les officiers municipaux, MM. les recteur et curés du Minihy, les religieux Carmes et Minimes et tous les soussignants députés des communautés, corporations, arts et métiers de cette ville et des campagnes voisines.

M. le maire donna lecture à l'assemblée d'une lettre de MM. les membres du conseil permanent, établi par délibération de la commune du 25 juillet dernier, lesquels déclaraient par les motifs de délicatesse y exprimés ne pouvoir continuer ultérieurement leurs fonctions. Voici la lettre dont il est question :

« Messieurs,
Vous nous aviez fait l'honneur de nous nommer d'un conseil permanent, chargé de maintenir le bon ordre et la sûreté publique et vous nous aviez revêtus de tous vos pouvoirs à cet effet ; notre plus ardent désir était de remplir vos intentions ; mais instruits qu'il s'était élevé un tribunal indépendant de celui que vous aviez formé, nous avons compris que notre nomination pouvait n'être pas conforme au vœu de tous les citoyens et que de la diversité des pouvoirs, il pouvait résulter des obstacles au bon ordre et à la tranquillité publique. Ces motifs, Messieurs, nous ont déterminés à remettre entre vos mains des pouvoirs qui nous étaient honorables, parce qu'ils étaient un témoignage flatteur de votre confiance ; nous ne pouvons plus les conserver dès qu'ils cessent d'être utiles. Nous n'en serons pas moins dévoués au bien général ; mais il ne peut s'opérer que lorsqu'il n'y aura qu'une seule autorité, et il vous sera désormais plus facile de former un tribunal unique qui sera reconnu de tous les citoyens et auquel ils seront tous soumis. Nous sommes avec respect, Messieurs, vos très humbles et très obéissants serviteurs.

Signé : + J.-F., évêque de Léon, du Dresnay, de Trédern, Pascal de Keranveyer, Hervé Chef du Bois, Kernoter-Le Coat, La Teste, Le Joyeux, de Troërin, chanoine de Léon, Quergeffroy Guillaume, Corre, recteur de Saint-Pol-de-Léon, Yves Le Bihan, marchand » [Note : Reg. 18. Fol. 17, recto].

L'assemblée prit acte de cette délibération de l'ancien conseil permanent, et arrêta qu'elle serait enregistrée et déposée au greffe. Mais vu la très grande affluence du peuple qui ne permettait pas de discuter en ce moment, la séance fut remise au lendemain, 17 août, à deux heures de relevée, après qu'on eut recueilli les procurations de tous les députés des divers corps et corporations dont le dépôt avait été fait pareillement au greffe.

En conséquence, le corps municipal se réunit le lendemain 17 août et les mêmes membres se trouvèrent à la séance. M. le maire proposa à l'assemblée, qui reconnaissait l'utilité d'un conseil permanent, lequel conseil assurerait la prompte expédition des affaires, d'ouvrir immédiatement un scrutin pour la nomination de vingt-huit membres qui composeront le dit conseil et détermineront dans leur première assemblée le plan et les règlements qu'ils jugeront les plus convenables pour rendre leurs opérations fructueuses et utiles au public.

Voici quel fut le résultat de ce scrutin.

Furent élus membres du conseil permanent, comme ayant réuni la majorité des voix : MM.

Chef du Bois, maire.
Kernoter-Le Coat.
Le Joyeux.
Laugée.
Le Hir.
Guillaume.
Le Floch.
Lorin.
Verchin.
Raoul.
Yves Le Bihan.
Michel Le Vot.
Jean-Marie Le Gall.
Jean-Marie Le Cam.
Le Prieur des Minimes.
La Teste.
Joguet.
Conversy.
Yves Derrien.
Joseph Le Fers.
François Mazéas.
Jean Kerrien.
Yves Perrot.
Yves Quéré.
Ollivier Grall.
Jean Le Bihan.
Rolland Le Deroff.
Paul Le Néna.

M. Chef du Bois ayant déclaré qu'il était obligé de s'absenter pendant un mois, devant se rendre aux eaux, à cause de sa santé, ce qui l'empêcherait de s'acquitter de ses fonctions de membre du Conseil permanent, l'assemblée choisit pour le remplacer M. Miorcec, qui avait obtenu le plus grand nombre de voix après les sus-dénommés.

Signèrent : Hervé Chef du Bois, maire, Conversy, La Teste, Kernoter-Le Coat, Turquet, supérieur des Minimes, Le Floch, Quergeffroy Guillaume, Le Hir, Laugée, Joguet, Yves Le Bihan, marchand, Le Vot, Le Joyeux, Verchin, Lorin, Ollivier Grall, J. Bian, Yves Quéré, Jean-Marie Le Gall, Lucas, François Mazéas, Rolland, L. Caroff, Paul Lhostis, Jean Kerrien, Yves Perrot, Le Cam, Yves Derrien, P. Creismeas, Paul Néna, Le Floch, Joseph Le Fers, Charles L..., Hervé Guiader, Yves Bellour, J. Jac, greffier [Note : Reg. 18. Fol. 17, recto].

M. Le Hir avait été élu président du Conseil général permanent et M. Laugée, secrétaire. Trois bureaux étaient formés pour l'expédition des affaires journalières, dont les séances étaient fixées aux dimanches, mercredis et vendredis de chaque semaine, à 8 heures du matin, à l'hôtel de ville.

Ce Conseil s'était arrogé les pouvoirs les plus étendus :

1° Il avait le pouvoir d'ordonner seul et régler au nom de la généralité des habitants toutes matières qui intéresseraient le salut public et l'administration publique jusqu'à ce que l'Assemblée nationale eût statué sur un nouvel état de choses et prescrit de nouveaux règlements ;

2° MM. les officiers municipaux auraient seuls le droit de délibérer sur les affaires particulières de la municipalité ;

3° Tout ce qui serait ordonné par le Conseil général permanent aurait le même effet et la même valeur que s'il avait été délibéré par l'Assemblée générale des communes ;

4° Aucune délibération ne serait décrétée par le Conseil que lorsqu'il se trouvera quinze membres présents ;

5° Le président donnerait à la milice des volontaires nationaux, et à la milice bourgeoise les ordres nécessaires pour le bien général et la sûreté publique ;

6° Tous les aubergistes, cabaretiers et logeurs seraient tenus et obligés d'avoir un registre pour y insérer les noms des étrangers qui logeraient chez eux, et qu'immédiatement après l'arrivée des étrangers, ils en donneraient avis à M. le président, à peine d'être cités devant le dit Conseil pour être punis suivant l'exigence des cas ;

7° Que défense serait faite aux dits aubergistes et cabaretiers de donner à boire passé dix heures du soir à peine d'emprisonnement vers eux et les buveurs.

M. le président fit ensuite le serment d'être fidèle au roi, à la nation, de respecter la religion, son culte et ses ministres et de veiller de tout son pouvoir et zèle à la sûreté publique sur son honneur, ses biens et sa vie.

L'assemblée lui décerna acte de son serment.

Le président reçut ensuite le serment de chacun des membres de l'assemblée, tous répétant la formule du président.

Il fut arrêté que copie de la présente séance serait imprimée et expédiée dans les différentes villes de la province.

Signé : Le Hir, président, Kernoter-Le Coat, Conversy, etc., etc. [Note : Reg. 19. Fol. 1, verso]

Il faut le reconnaître, il y avait du bon dans le règlement précité.

(abbé J. Tanguy).

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