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SAINT-POL-DE-LEON SOUS LA REVOLUTION (CHAPITRE 36).

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CHAPITRE XXXVI.

SOMMAIRE.

Procès-verbal de la vérification des comptes de décimes. — Serment de haine à la royauté et à l'Anarchie. — Procès-verbal de l'assemblée primaire du 14 germinal. — Désordres à Saint-Pol, défense de donner à boire après 10 heures du soir. — Discours prononcé à l'occasion de l'anniversaire de la prise de la Bastille. — Mesures prises pour prévenir la rentrée des émigrés et arrêter les gens sans aveu. — Défense de toute assemblée s'occupant de politique. — Revue générale de toutes les troupes de la République. — Arrestation de René Le Borgne, surpris faisant du catéchisme à Kerestat. — L'élection de trois membres de la municipalité est frappée de nullité. — Poursuites contre le citoyen Bourguays, accusé d'avoir gardé l'argent provenant de la vente d'effets appartenant à la République. — Théâtre établi aux Carmes.

Nous ouvrons ce chapitre par un extrait de la séance tenue par le conseil municipal, le 22 frimaire, an V, — 12 décembre 1796. — Ce passage met en pleine lumière les actes si nombreux de bienfaisance accomplis par Mgr de La Marche, dernier évêque de Léon, dans son diocèse, tant qu'il y a séjourné. On ne le lira pas, nous le croyons, sans intérêt, ni sans une réelle émotion.

« Procès-verbal de vérification des comptes de décimes par MM. les commissaires du Directoire du district de Morlaix :

L'an mil sept cents quatre-vingt-onze, le 21ème jour de mars, à 9 heures du matin, en conséquence des ordres du Directoire de Morlaix, département du Finistère, en date du 16 du présent mois à nous adressé le jour d'hyer, nous Hyacinthe Le Gall sr de Kerven, procureur de la commune de la municipalité de Léon, et Louis Georges Boutin, commis en chef du bureau des impositions et finances du district, rapportons qu'ayant préalablement exhibé un Extrait en forme de notre commission au sr Clet de Kernoter, dernier receveur en exercices des décimes du cy-devant diocèse de Léon, nous nous serions tous transportés au lieu des archives du clergé du même diocèse étant en la demeure du cy-devant évêque, où étant et ouverture faite des dites archives, au moyen de la remise des trois clefs destinées à cet effet, nous nous serions fait servir et aurions procédé successivement à l'examen des divers comptes des décimes et droits accessoires de l'exercice du dit receveur, avec quittances comptables, acquits et décharge et au soutien pour les années 1784-85-86-87-88-89 et partie de l'année 1790. Et par le résultat avons trouvé le dit sieur Le Coat absolument quitte, tant envers le clergé diocésain qu'envers le bureau de la recette générale à Paris, même avec un excédent de 315 livres, 15 sols, un denier par lui avancées à la dite recette générale, aux fins de la lettre missive du sieur Quinton, cy-devant receveur du clergé de France, datée à Paris du 22 mai 1790, à nous représentée par ledit sr Le Coat, suivie depuis asolde par le sr de Quinton aux fins du mandat du 20 juin dernier, procédant ensuite à la visite du coffre-fort Ginaut dans les mêmes archives, dont ouverture nous a été faite, il ne s'y est trouvé aucuns deniers comptant ni autres valeurs, et que nous estimons provenir de l'acte de délibération du cy-devant bureau ecclésiastique de Léon dans sa séance du 12 octobre 1790, dont copie pour extrait cy-joint portant que les deniers d'épargne du clergé montant à un capital de 4,646 livres, 4 sols, neuf deniers auraient été délivrés, sur le champ au cy-devant évêque pour le rembourser de ses dépenses que pour subvenir aux besoins et nécessités des prêtres pauvres et infirmes, des jeunes et pauvres étudiants se destinant à l'état ecclésiastique et des pauvres communautés religieuses de l'un et de l'autre sexe, — ainsi qu'il est énoncé en la dite délibération y recours. Au surplus le dit sr Le Coat nous a délivré sur nôtre réquisition un extrait par lui certifié au dernier compte par lui rendu le 21 juin 1790 et arrêté le 5 juillet suivant.

Ce fait et ayant fermé les dites archives où nous avons rétablies toutes les pièces ayant servies à nôtre commission, exceptées celles privatives au dit sr Le Coat, avons clos et arrêtés sur les lieux nôtre présent procès-verbal et d'icelui délivré une expédition à ce dernier, les clefs cy dessus étant restées aux mains de leurs dépositaires ou représentans, jusqu'à ce qu'il soit ou puisse être déposé autrement, sous nos seings et celui du dit sr Le Coat les dits jour et an que devant, environ les sept heures de relevées. Ainsi signés à l'original, Kernoter Le Coat pour assistance, Boutin, Le Gall de Kerven, procureur de la commune.

Comme suit :
Je soussigné receveur du district de Morlaix, chargé du recouvrement des restans des deniers du cy devant Evêché de St Paul de Léon, reconnois avoir reçu de Monsieur Kernoter Le Coat, ancien receveur des dites décimes, la somme de trente cinq livres sept sols six deniers qu'il a déclaré avoir entre les mains pour les articles cy-après scavoir :

Pour la chapelenie du Cosquérou et qui etan . 1 l 10 sols.
A valoir à l'article de la chapelenie de Gar Jean : 7 l. 6 sols.
Pour la chapelenie de St Nicolas et Ste Catherine au Minihy : 9 l. 7 sols 6 deniers.
Pour la chapelenie de Balaise à Ploudaniel : 6 l. 17 sols.
Pour la chapelenie de Dauteux au dit Ploudaniel : 6 l. 17 sols.
Et pour la chapelenie de Ste Barbe Coëtivy : 3 l. 10 sols.

Total : 35 livres 7 sols 6 deniers.

De la quelle somme de 35 livres 7 sols 6 deniers, mon dit sieur Le Coat demeure bien et duement quitte, sauf tous autres dûs et droits à Morlaix le 16 juin 1791. Signé : Loret.

Pour copies conformes aux originaux cy dessus transcrits.

Le Bourguay, commissaire du Directoire exécutif, Villeneufve, administrateur municipal, Berdelo, administrateur municipal, Le Roy, administrateur municipal » [Note : Reg. 30. Fol. 4-5].

Le citoyen Jean-Marie Salaün (de Kertanguy) se démet de ses fonctions de président de l'Administration municipale et est remplacé par le citoyen Prud'homme-Keraugon, le 15 nivôse, an V — 5 janvier 1797.

Sous le Directoire, ce gouvernement pourri, une comédie succédait à une autre. Après la fête grotesque des Epoux vient la cérémonie odieuse de la Prestation de serment de haine à la royauté et à l'anarchie, ordonnée par la loi du 24 nivôse, an V — 14 janvier 1797.

Le 1er ventôse, 19 février, jour fixé pour la dite cérémonie, les chefs de corps tant civils que militaires se sont rendus sur la Grande Place, et en présence de la garde nationale et de la troupe de ligne en armes sur la dite place, le dit serment a été prêté individuellement en ces termes : « Je jure haine à la royauté et à l'anarchie ; je jure attachement et fidélité à la République et à la Constitution de l’an III ».

Procès-verbal de la protestation a été dressé et signé par : Prud'homme-Keraugon, président de l'administration municipale et receveur des douanes nationales, Villeneufve, administrateur municipal et pensionné de l'Etat, Le Roy, administrateur principal, Berdelo, La Boge, chef de bataillon, Pereault, commandant de la garde nationale, Mézangeau, colonel en retraite, salarié de la République, Conversy, juge de paix, Le Roux, commissaire de police, Le Bourguays, commissaire provisoire du Directoire exécutif, Varsavaux, secrétaire greffier de l'administration municipale, Jacquinot, chef de bataillon, commandant la place, Mathieu, capitaine commandant, Rageul, chef de bataillon, Laurent, capitaine, Allotte, garde-magasin des vivres, Navarre, garde-magasin, Figuières, notaire, Raoul, id., Miorcec, id., Coroller, id., Loussaut, id., Le Floch, id., Ménez, id., Roulloin, Richard, lieutenant des douanes à Pempoul, Cité, lieutenant des douanes à Saint-Yves, Kerbiriou, préposé des douanes nationales, Roux, Labat, garde-champêtre, Le Roux, Prat, huissier, Macé, assesseur du juge de paix, Choquer, Le Roux, Martin, préposé des douanes, Mazé, id., Sévézen, greffier du juge de paix, Coguiec, Pleyber, préposé des douanes, Toularhoat, id., Servet, Le Saint, Garel, préposé des douanes nationales, Gélébart, assesseur du juge de paix, Saout, adjoint de la commune de Plouénan, Guéguen, agent de Plouénan [Note : Reg. 30. Fol. 32-33].

« Le 13 germinal, an V, — 3 avril 1797, — à 6 h. 1/2 de relevée, les citoyens Louis Michel Le Floch, président, Jean-Louis Roulloin, propriétaire, Clet-Marie Le Coat-Kernoter, Jean-François-Michel Kerhorre, Ollivier Louis Coroller, scrutateurs de l'Assemblée primaire du canton de Paul-Léon, déposent sur le bureau du conseil municipal les procès-verbaux de la dite Assemblée primaire en date du 1er, 5, 6 et 13 courant, concernant les élections faites par la dite Assemblée primaire de trois électeurs, trois assesseurs de la justice de paix et de quatre officiers municipaux, et ont déposé de plus les instructions, tableau alphabétique des votans et indications fournies à l'Assemblée primaire par l'administration supérieure duquel dépôt ils ont requis acte et ont signé. Kernoter Le Coat, Coroller, etc.

14 germinal, séance de l'administration municipale, présidée par le citoyen Prud'homme-Keraugon jusqu'à l'installation des nouveaux membres, assisté des citoyens Villeneufve, Le Roy et Le Sann, administrateurs municipaux ; présent : Le citoyen Le Bourguays, commissaire provisoire du Directoire exécutif.

La séance a commencée par la lecture du procès-verbal de la dernière séance de l'assemblée de cette commune du jour d'hyer ; dans laquelle ont été nommés quatre administrateurs municipaux, en remplacement des quatre administrateurs provisoires et temporaires ; le citoyen Le Sann, le seul des administrateurs actuels qui étoit nommé par l'Assemblée primaire de l'an dernier ; les quatre nouveaux élus sont : les citoyens Michel Kerhorre, D'Arbo, Jean-Louis Roulloin et Pierre-Claude Dalabardon, les quatre, après avoir prêté individuellement le serment de haine à la royauté et à l'anarchie, et d'attachement et fidélité à la République et à la Constitution de l'an III, ont été instalés et pris place au bureau, et la partie de la séance, cy-dessûs a été close ».

Fait et arrêté les jour, mois et an que devant. Signé : Le Roy, administrateur municipal. Le Sann, administrateur municipal, Villeneufve, administrateur municipal.

Prud'homme-Keraugon, président — Le Bourguays, commissaire du Directoire exécutif [Note : Reg. 30. Fol. 50-51].

Le lendemain, on procéda à la réception de la nouvelle municipalité. — Le citoyen Michel Kerhorre à la majorité de quatre voix sur cinq, est nommé président.

Le 3 floréal, — 22 avril, — le citoyen D'Arbo est élu, par intérim, commissaire du Directoire exécutif en remplacement du citoyen Bourguays, démissionnaire, chargé d'une nombreuse famille et obligé de faire différents commerces pour la faire subsister par suite de la réduction de ses appointements.

Quinze jours après, le citoyen Ridar-Maisonneuve remplace après avoir prêté le serment de haine à la royauté et à l’anarchie, le citoyen D’Arbo dans ses fonctions, ce dernier n'ayant accepté que provisoirement.

L'administration centrale du Finistère invite, le 2 prairial, la commune de Saint-Pol à payer un loyer annuel pour le bâtiment du ci-devant évêché, édifice national. Ce loyer est fixé à 300 fr.

La municipalité demande l'autorisation de passer un bail avec le citoyen Anne, receveur du domaine national sur le pied de 300 livres [Note : Reg. 30. Fol. 56-75].

Le bon ordre laissait, paraît-il, beaucoup à désirer à Saint- Pol. C'est ce qui est clairement révélé par une délibération prise par le conseil municipal dans la séance du 6 prairial, an V, — 26 mai 1797, — et dont nous donnons l'extrait suivant :

« Les chefs militaires s'étant plaints que quelques cabaretiers de cette commune donnent à boire aux militaires ainsi qu'aux habitans après 10 heures et la clôture du beffroy sonnée, ce qui entretient l'indiscipline parmi la troupe, et le dérangement parmi l'habitant.

Le conseil arrête de faire faire ce jour une publication portant défense aux citoyens qui vendent des boissons de donner à boire passé dix heures, et une fois la clôche du beffroy sonnée, sous les peines qui écheent.

Les plaintes multipliées qui parviennent journellement à l'administration sur les différentes espèces de vols qui se commettent dans l'étendue de la commune devenant inquiétantes pour la sûreté des propriétés, si l'on ne s'empressoit de prendre des précautions nécessaires pour s'opposer aux projets des malfaiteurs, l'administration arrête qu'à compter de demain 7 du courant, il sera donné les ordres nécessaires au commandant de la garde nationale de cette commune pour qu'il soit commandé tous les jours un caporal et quatre hommes de la garde nationale pour faire des patrouilles pendant la nuit concurremment avec celles des troupes de ligne pour la sûreté du bon ordre et des propriétés.

La dite patrouille de la garde nationale entrera tous les soirs au corps de garde de la place à 9 heures et y restera jusqu'à 4 heures du matin. Les citoyens commandés ne pourront se faire remplacer dans leur service sans une permission par écrit du commandant de la garde nationale et qui ne doit l'accorder que sur des motifs les plus légitimes, et les individus qui se feront remplacer dans leur service ne pourront l'être par des enfants, comme il s'est pratiqué jusqu'ici, mais par des citoyens dont la conduite et le civisme sont connus » [Note : Reg. 30, Fol. 80].

Le 4 messidor, an V — 23 juin 1797 — en vertu d'une lettre du ministre de l'intérieur, en date du 17 floréal, le conseil municipal nomme des commissaires pour procéder à un état de population, tant des hommes que des animaux de toute espèce existants dans la commune.

La loi du 8 thermidor ordonnant de célébrer dans toute l'étendue de la République l'anniversaire de la prise de la Bastille, le 14 juillet, — 25 messidor — le citoyen Kerhorre, président de l'administration municipale, prononce, à cette occasion, le discours suivant :

« Il me serait inutile, citoyens, de vous retracer les événements qui ont conduit la République française à ce haut degré de gloire et de splendeur dont elle jouit aujourd'hui.

Je me bornerai à vous rappeler que la fête dont nous célébrons l'anniversaire est un des grands événements de notre Révolution et un jour à jamais mémorable pour les amis de la Liberté et pour tous les Français sensibles à la gloire de leur pays.

Les vainqueurs de la Bastille brisèrent, le 14 juillet, les chaînes de notre esclavage ; c'est à ces héros de notre Révolution qu'est dû le premier tribut de la reconnaissance publique ; ils montrèrent en ce jour à tous les peuples étonnés ce que peuvent la valeur française et son amour pour la liberté.

Après huit années de guerres et de gloire, la Liberté, cette déesse si chère aux Français, est à jamais consolidée.

Le trône des Césars est ébranlé ; la fière Albion, notre ennemie la plus terrible, tremble, en voyant nos braves guerriers prêts à descendre sur ses rivages et tous implorent la clémence de la France triomphante.

Au milieu de ses conquêtes, la République donne aux nations qu'elle vient de vaincre un spectacle aussi rare que beau ; elle leur offre un rameau d'olivier, symbole de son amour pour la paix.

Une telle générosité est seule digne des républicains français.

Nos guerriers, le front ceint des lauriers de la victoire, vont revenir au sein de leurs foyers pour y recevoir les transports de reconnaissance de leurs concitoyens... Oui, les Français ne formeront plus désormais qu'un peuple de frères ; tous vont se réunir à la Constitution et au Gouvernement, seul moyen de vivre libres et heureux. La pratique de toutes les vertus civiques les rendra le modèle des autres peuples, comme ils en ont été les vainqueurs ..... Vive la République ! ».

« Dans une séance, tenue trois jours après — 28 messidor, — un membre de l'Assemblée, ayant fait la mention que le discours prononcé par le Président de l'administration, à l'occasion de l'anniversaire du 14 Juillet fût inscrit au long sur le registre, l'Assemblée, le commissaire du Directoire exécutif entendu, arrête que la transcription du dit discours sera inséré au long en la présente délibération » [Note : Reg. 30, Fol. 92].

Les mesures prises le 6 prairial par le conseil municipal de Saint-Pol pour réprimer les désordres et assurer la tranquillité publique ne furent pas assez efficaces. Tout le pays était plus ou moins troublé, et on dut recourir à de nouvelles mesures pour le maintien du bon ordre, comme le prouve un arrêté de l'Administration centrale du 5 thermidor, an V, — 24 juillet 1797.

Voici ce que nous y lisons :

« 1° Obligation à tous les citoyens de se munir d'un passe port, sous peine d'arrestation ;

2° Organisation d'une colonne mobile pour prévenir la rentrée des émigrés, arrêter les déserteurs et les gens sans aveu et pour maintenir l'ordre et la sûreté dans l'intérieur du canton, obliger les aubergistes et ceux qui donnent du logement aux voyageurs, à avoir un registre chiffré, sur lequel ils inscriront, jour par jour, les noms des voyageurs arrivés chez eux, et donneront aux officiers municipaux tous les renseignements qui pourroient intéresser l'ordre public, obliger également les revendeurs et frippiers de se pourvoir, dans le plus bref délai, de registres sur les quels ils noteront, jour par jour, les meubles, bijoux, argenterie, etc., ainsi que les noms de leurs vendeurs et ceux des individus qui auront déposés entre leurs mains des effets de quelle que nature que ce soit ; faire mettre à exécution avec la plus stricte rigueur les art. 12 et 13 de la loi du 10 thermidor, an III, pour le maintien de l'armée de terre, au complet, ainsi que de l'arrêté du Directoire exécutif du 24 fructidor, an IV, concernant l'armée de mer.

Le commissaire du Directoire exécutif entendu,

Le conseil municipal délibérant (séance du 14 thermidor, an V).

Arrête de faire publier et afficher l'arrêté cy-dessus, d'en donner connaissance officielle, tant au commandant de la place, qu'à celui de la gendarmerie et de la garde nationale, de procéder jeudy seize à la formation d'une colonne mobile, conformément à la loi du 17 floréal, an IV ; de faire passer à l'administration centrale le tableau de son opération, dans la quinzaine à compter de ce jour ; enfin d'entretenir des relations de surveillance, entre cette administration et celles de Roscoff, Cléder, Plouvorn et Taulé, désignées par le tableau de correspondance de sûreté, par la municipalité de l'arrondissement de Morlaix ; d'inviter les gardes champêtres établis dans la commune à seconder de tout leur pouvoir la marche de la colonne mobile, et à faire parvenir à l'administration tous les avis qui pourroient intéresser la sûreté publique ».

Signé : Michel Kerhorre, président, D'Arbo, administrateur, Roulloin, administrateur municipal, Ridar, commissaire du Directoire exécutif, Dalabardon, administrateur, Varsavaux, secrétaire greffier [Note : Reg. 30, Fol. 105-106].

Le 22 thermidor, le conseil municipal se réunit pour délibérer au sujet de la célébration de l'anniversaire du 10 août.

« Cet anniversaire étant devenu une des époques les plus mémorables de la Révolution, il est du devoir des républicains de lui donner la solennité qu'elle mérite.

Le président de l'administration prononcera un discours analogue à la fête. Un amphithéâtre sera dressé près l'arbre de la Liberté. A onze heures du matin on se rendra à la salle commune, pour de là se rendre en cortège sur la Grande Place. Le commandant d'artillerie sera invité à faire tirer le nombre de coups de canon usités en pareille circonstance, etc. ».

C'est ainsi qu'on amusait le peuple sous le Directoire. Lorsqu'une comédie était terminée on en faisait une autre.

Dans cette même séance du 22 thermidor, le citoyen Ridar, commissaire du Directoire exécutif dépose sur le bureau « une loi du 7 thermidor relative aux sociétés particulières et qui prohibe, à peines de condamnation de 1,000 fr. d'amende et trois mois d'emprisonnement, à tous propriétaires, aux principaux locataires, toutes assemblées de société particulière s'occupant de politique ».

L'administration arrête que la dite loi sera publiée et affichée dans le courant de ce jour [Note : Reg. 30, Fol. 111-112].

On voit que nos directeurs, aussi bien que les oies du Capitole et les anciens consuls de Rome veillaient et étaient toujours aux aguets. Gare aux contrevenants et aux réactionnaires ! Cayenne et Sinnamary, avec leurs fièvres meurtrières les attendaient.

La République ne cessait de tailler de la besogne aux Pères conscrits de Saint-Pol. A peine leur donnait-elle le temps de respirer et de s'occuper de leurs propres affaires ; c'étaient en effet réunions sur réunions. Le 17 fructidor, ils s'assemblent de nouveau. La séance est présidée par le citoyen Michel Kerhorre, assisté des citoyens D'Arbo, Roulloin, Dalabardon et Ménez, administrateurs municipaux. Présent : le citoyen Ridar, commissaire du Directoire exécutif.

« Lecture est donnée d'une lettre du citoyen Barchou, commissaire des guerres à Morlaix, en date du 15 présent, à laquelle se trouve jointe une copie du commissaire ordonnateur des guerres, datée de Brest aussi du 10 courant, par la quelle il annonce que le 20 fructidor est l'époque fixée par le ministre de la guerre, pour qu'il soit fait une revue de toutes les troupes de la République dans la matinée du dit jour ; vû que l'impossibilité phisique où se trouve le citoyen Barchou, commissaire des guerres à Morlaix de pouvoir se trouver en différents lieux au même instant, il invite cette administration à nommer un de ses membres pour le substituer dans la revue qui se fera de la garnison de Saint-Paul le dit jour.

Le conseil délibérant, le commissaire du Directoire exécutif entendu, a nommé le citoyen D'Arbo, administrateur et ancien militaire pour faire la dite revue le 20 du courant, et copie des deux lettres précitées et du modèle d'état y joint seront transmis aux différents chefs composant la garnison de cette place. Signé : Michel Kerhorre, D'Arbo, etc. » [Note : Reg. 30, Fol. 122-123].

La lettre du citoyen Barchou est un modèle du genre. Le défunt La Palisse n'eût rien trouvé de mieux.

La République venait de l'échapper belle par suite d'une importante capture. Nous nous ferions de sévères reproches, si nous passions le fait sous silence. Le lecteur en jugera :

Nous reproduisons le registre de la municipalité :

« Le 24 fructidor, vers les deux heures et demie de relevée est entrée dans la salle de la commune un détachement des grenadiers de cette garnison, ayant un officier à sa tête, le quel a conduit un citoyen de cette commune, nommé René Le Borgne, le quel avoit les mains garrotées. Le citoyen Mignon, ofïîcier nous auroit déclaré avoir arrêté le dit Le Borgne, dans le cy-devant manoir de Kerestât comme suspect, et faisant le catéchisme à plusieurs enfants.

Le sous-lieutenant déclare avoir su que Le Borgne n'étoit point prestre ; qu’il se désistoit de sa déclaration précitée.

Le conseil déclare que le citoyen Le Borgne ne pouvant être sous aucun rapport être considéré comme ecclésiastique, et qu'il est reconnu comme cultivateur de cette commune, il n'y a pas lieu de donner suite à l'affaire ».

Quel soulagement pour la municipalité !

Six jours après, les citoyens Kerhorre, président de l'administration municipale, D'Arbo et Roulloin, administrateurs, et Ridar-Maisonneuve, commissaire du Directoire exécutif, atteints par la loi du 19 fructidor dernier, comme parents d'émigrés, se démettent de leurs fonctions.

Le 3 brumaire, an VI — 25 octobre 1797 — le citoyen Kerhorre reprend les fonctions qu'il avait quittées par un excès de prudence, dans la crainte que quelques-uns de ses beaux-frères ne fussent inscrits sur la liste des émigrés.

Par une lettre du 28 vendémiaire — 20 octobre — l'administration centrale lui a mandé en effet qu'aucun des Siochan de Kersabiec, ses beaux-frères, ne se trouvant portés sur les listes d'émigrés, elle n'acceptait point sa démission.

Le citoyen Ridar-Maisonneuve qui, par excès de prudence également, avait mis sa démission, ne se trouvant point sous le coup de la loi du 19 fructidor dernier, n'étant que neveu par alliance d'un présumé émigré, reprend ses fonctions [Note : Reg. 30. Fol. 147].

Le presbytère de Saint-Pol, ainsi que ses dépendances, a été vendu comme bien national au citoyen Le Pen, greffier du juge de paix.

L'administration municipale avait été renouvelée dans le courant d'octobre dernier. Le 12 brumaire, an VI, — 2 novembre 1797, — le conseil municipal tient une séance dans laquelle le citoyen Ménez donne lecture d'une lettre du commissaire du Directoire exécutif près l'administration centrale du Finistère en date du 10 brumaire courant.

« Le Directoire exécutif considérant que la loi du 19 fructidor a frappé de nullité l'élection de trois membres de l'administration municipale de Pol-Léon ; que le citoyen Ménez est le seul membre restant qui soit digne de la confiance des administrés de la commune par son civisme, son zèle et ses lumières.

Arrête ce qui suit, en vertu tant de Tarticle 196 de la Constitution que de la loi du 13 vendémiaire,

Article 1er. — Les membres de l'administration municipale de Pol-Léon dont l'élection n'a pas été annulée par la loi du 19 fructidor, an V, à l'exception du citoyen Ménez, sont destitués.

Art. 2. — Le Directoire exécutif nomme pour compléter la dite administration les citoyens Prud'homme-Keraugon, ex-constituant, ex-maire, Guillou, officier de santé. Le Hir, propriétaire, et Rageul, propriétaire.

Art. 3. — Le ministre de l'intérieur est chargé de l'exécution du présent arrêté qui ne sera pas imprimé.

Pour expédition conforme :

Le président du Directoire exécutif, signé : L.-M. Réveillere-Lepaux.

Par le Directoire exécutif : le secrétaire général, signé : La Garde.

Pour ampliation : le ministre de l'intérieur, signé : Le Tourneur.

Vu et enregistré au Secrétariat de l'administration centrale du Finistère, à Quimper, le 9 brumaire, 6ème année de la République. Signé : Alizard, secrétaire en chef ».

Le citoyen Le Hir déclare ne pouvoir accepter les fonctions de membre de l'administration municipale, les dites fonctions étant incompatibles avec son emploi de directeur des postes.

Le citoyen Prud'homme-Keraugon fait également remarquer qu'il a été nommé par le Directoire sur des renseignements inexacts, attendu qu'il est receveur des douanes nationales. Il écrira au ministre de l'intérieur pour l'engager à instruire le Directoire exécutif de cet inconvénient ; mais en attendant que le Directoire ait nommé un autre administrateur à sa place, il donnera à la commune les moments de liberté que pourra lui laisser son bureau, les quels malheureusement sont en petits nombres.

Le citoyen Benjamin Kervingant, apothicaire, désigné pour remplacer le citoyen Le Hir, accepte, « n'ayant rien de plus à cœur que d'être utile à sa Patrie, » et prête le serment de haine à la royauté et à l'anarchie, etc. [Note : Reg. 30. Fol. 149-150].

Le citoyen Ménez est nommé président de l'administration municipale sur le refus du citoyen Prud'homme-Keraugon d'accepter ces fonctions, et le citoyen Ridar-Maisonneuve est remplacé provisoirement par le citoyen Guillou dans les fonctions de commissaire du Directoire exécutif.

La municipalité fait observer au Directoire que le citoyen Maisonneuve n'a donné sa démission que dans la persuasion qu'il était frappé par la loi du 19 fructidor dernier, ayant épousé la nièce d'un émigré. L'administration n'est pas de cet avis, et elle ne saurait désigner de citoyen plus capable et plus propre à remplir la place de commissaire du Directoire exécutif que le citoyen Ridar. Elle le propose en conséquence au Directoire, sa démission ne provenant que d'une erreur.

Le citoyen Anne, receveur des domaines nationaux, informe la municipalité qu'il va exercer des poursuites contre le citoyen Le Bourguays qui, sous une administration précédente, a gardé en mains les deniers provenant de la vente d'effets appartenant à la République.

Dans le cours de ce travail nous avons, en mainte occasion, signalé les faits et gestes de ce peu sympathique personnage.

Le 18 brumaire, an VI, — 10 novembre 1797, — l'administration municipale crut devoir inviter les citoyens Labat, Vazel et Saintoux, membres de la société dramatique de Pol-Léon et directeurs du théâtre établi aux Carmes, à rayer de leur répertoire les pièces de théâtre qui n'atteindraient point directement le but indiqué par le gouvernement ; la saine morale et un républicanisme éclairé.

« Les pièces qui offriraient aux yeux des spectateurs des emblèmes religieux ou des costumes affectés à des sectes particulières doivent être sévèrement écartées, pour ne point blesser le système d'impartialité qui impose à l'administration le besoin de ne point favoriser toutes opinions dominantes exclusivement à d'autres opinions, quelles qu'elles soient ».

Parmi ces directeurs, il y en avait un, Vazel, sachant à peine signer son nom ; ce devait être un excellent juge.

(abbé J. Tanguy).

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