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SAINT-POL-DE-LEON SOUS LA REVOLUTION (CHAPITRE 26). |
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CHAPITRE XXVI.
SOMMAIRE.
Suppression du comité de surveillance. — Arrestation de quatre Américains. — Arrivée à Saint-Pol de Cambry, commissaire pour les arts et les sciences. — Le collège devient un hospice militaire. — Le Directoire de Morlaix recommande à la municipalité de surveiller les écoles primaires. — La cathédrale mise à la disposition des instituteurs. — Le décadi y sera célébré. — Liste des citoyens jugés propres à occuper les places dans les municipalités. — Le conseil demande quelques ouvrages d'instruction pour former une bibliothèque communale. — Arrestation de Prud'homme de Keraugon. — Le citoyen Dumay, ayant dû quitter la cure, demande un logement à la municipalité.
Le 15 fructidor, an II (2 septembre 1794), la municipalité de Saint-Pol se réunissait pour prendre lecture d'une lettre du Directoire du district de Morlaix, en date du 11 du même mois. Cette lettre recommandait la plus scrupuleuse exactitude à surveiller les étrangers et autres hommes suspects. Partout alors, en effet, on croyait voir des ennemis. C'est le propre de ceux qui font trembler tout le monde de se méfier de tous et de considérer chaque individu comme un ennemi caché. Aussi bien, le conseil prit un arrêt ordonnant : 1° aux postes militaires de saisir et d'amener à la maison commune les étrangers et autres hommes suspects pour vérification être faite ; 2° enjoignant aux cabaretiers de la commune d'inscrire exactement sur un livre, à ce destiné, tous les étrangers qui pourraient descendre dans leur demeure, sous peine de dix livres d'amende et de plus grande, en cas de récidive ; 3° les citoyens, logeant les étrangers, furent assujettis à la même déclaration, sous les mêmes peines [Note : Reg. 25. Fol. 46].
Le douet (lavoir) de la Gloire, construit le siècle précédent, d'après le plan du Frère Blaise, religieux capucin de Roscoff, ingénieur et maistre architecte, se trouvait dans un état déplorable par suite de l'incurie et de l'insouciance de l'administration. Le 22 fructidor, an II (9 septembre 1794), les gardiens de la maison commune reçurent ordre de veiller à ce que ce douet fût nettoyé et tenu propre ; de le nettoyer et de le curer avec le plus grand soin, au moins tous les cinq jours. Défense fut aussi faite aux bouchers et aux charcutiers, sous peine de dix livres d'amende par chaque contravention, de laver les tripes et les boyaux dans le dit douet ; pareille défense et sous la même peine à tous les citoyens d'y jeter des immondices [Note : Reg. 25. Fol. 48. — Ce douet, ainsi que la fontaine de la Gloire, qui se trouve à côté, existe toujours. La fontaine ne manque pas de cachet. Sur le frontispice, il y a une statuette de la sainte vierge].
La loi du 7 fructidor, an II (25 août 1794), supprima les comités révolutionnaires dans les communes n'ayant pas huit mille habitants. Mais l'article 27 de cette loi prescrivit à chaque commune de remettre au comité révolutionnaire du chef-lieu du district, dans la décade qui suivrait la promulgation du décret « les procès-verbaux, renseignements et effets dont elle pouvait être dépositaire ».
Saint-Pol n'ayant pas la population requise, son comité de surveillance fut dissous, et les procès-verbaux du comité furent adressés au district de Morlaix. Plus tard ces pièces qui sont fort intéressantes furent expédiées aux archives départementales. M. Henry, secrétaire de la mairie de Saint-Pol, qui en avait eu une copie, eut l'obligeance de nous la communiquer. Nous la reproduirons plus loin, ainsi que plusieurs autres pièces d'une importance extrême qu'on peut aussi voir aux archives de la mairie de Saint-Pol.
Au moment de sa dissolution, le comité de surveillance de Saint-Pol était composé des citoyens : Henri-François Villeneufve, Yves Le Bihan, Jacques-François Michel, Benjamin Kervingant, Jean-Julien Le Roux, Jean-Pierre Sévézen, Jean Le Pen, Philippe-Louis Miorcec.
Ce comité, dès sa formation, ne fut pas inactif. Il prit son rôle au sérieux. Nous aurons l'occasion de le constater, en temps et lieu.
Quelques jours après la dissolution du comité de surveillance, le 4 vendémiaire, an III, le conseil municipal nommait commissaires de la maison d'arrêt : les citoyens Villeneufve et Le Bihan ; et pour descendre à la poste pour la vérification des lettres adressées aux personnes suspectes, les citoyens Miorcec, maire, et Conversy, officier municipal [Note : Reg. 25. Fol. 50].
A la suite d'un incident survenu le 7 vendémiaire, an III (29 septembre 1794), la municipalité se trouva dans une position assez embarrassante, quoi qu'il n'y eût guère lieu de s'en préoccuper. Voici en effet ce qui s'était passé, à cette date. Nous donnons ici le texte de la délibération ; peut-être la lira-t-on avec une certaine curiosité.
« S'est présenté le citoyen Jean Cité, lieutenant des douanes nationales du poste Yves, le quel a exposé qu'environ les 6 heures 1/2 au matin de ce jour, après une longue recherche, faite d'après l'avis de l'évasion de quatre Anglais prisonniers, il a saisi dans les bois de Kerlaudy, proche du passage de la Corde, quatre étrangers, habillés en marins, violemment réputés d'être Anglais et déserteurs, et qu'il conduit à Pol-Léon à l'aide des citoyens Jean Kerbiriou, Jean Le Roux, Pierre Le Brun, préposés et canotiers au dit poste d'Yves ainsi que sous l'escorte de quatre volontaires faisant partie du détachement établi à Kerlaudy, observant au reste que la capture dont est cas a été faite tant par les réposés au poste du dit Yves que par les militaires du étachement cy-dessus mentionné.
Sur quoy, le conseil délibérant, ouï l'agent national arrête de procéder à un interrogatoire sommaire des quatre étrangers arrêtés, et attendu qu'ils paroissent n'entendre et ne parler aucune autre langue que l'Anglais, le conseil a été d'avis d'inviter le citoyen Benoist, lieutenant des douanes nationales à Roscoff de se transporter à la maison commune de Pol-Léon pour servir d'interprète à l'interrogatoire sommaire dont est cas. Le dit citoyen Benoist étant rendu ayant déclaré qu'il se rendoit volontiers à l'invitation qui lui étoit faite, il a été procédé à l'interrogatoire ainsi qu'il suit et séparément.
A comparu devant le conseil municipal un individu d'environ cinq
pieds, vêtu d'un habit gris, veste noir, pantalon jaune de tricot, chapeau rond,
cocarde nationale, cheveux châtains clairs, barbe rouge, âgé d'environ vingt-cinq
ans, le quel interrogé par la voye de l'interprète a déclaré qu'il
s'appelait Charles Coussval, originaire de la Nouvelle-York (Nework) dans les Etats-Unis, résident
ordinairement dans ladite ville ; qu'embarqué sur un brique, chargé de farine
pour la République française et sorti du port de N’yorgue à la destination du
port de Lorient, le dit navire a été chassé, à la hauteur d'Ouessant, par une
frégate anglaise, que dans la crainte de tomber en son pouvoir, l'équipage du
brique amériquain a gagné la côte de France ; que le bâtiment ayant touché et
s'étant ensuite relevé a eu le malheur de couler à fond ; que l'équipage s'est
jette sur un petit bateau appartenant au navire ; que ce petit bateau ayant été
encore englouti par la grosse mer, les quatre marins qu'il renfermoit et dont il
étoit du nombre ont gagné la côte vis-à-vis d'Ouessant ou de Brest, sans pouvoir
préciser le lieu ; que lui et ses trois camarades ont rencontrés le jour avant
hier, le troisième jour de leur naufrage et après une marche de cinq lieues dans
la terre, en rapprochant de cette commune, un particulier à eux inconnu qui leur
a dit en mauvais anglais qu'il y avait un bâtiment américain à Roscoff et que ce
motif les avait engagé à diriger leur route de ce côté ; qu'ils avoient
rencontré hier matin entre les dix à onze heures un particulier sur la route de
Roscoff qui les avoit engagé en anglais de le suivre au dit port ; qu'au reste
ils ne l'avoient point suivis préférant d'aller à Morlaix pour y trouver un
batiment américain ; que depuis leur naufrage ils ont vécu dans les campagnes au
moyen de quelques piastres qu'ils avoient en leur possession ; qu'enfin s'ils
n'ont point fait leurs déclarations devant les autorités constituées d'être
américains, c'est qu'ils croyoient n'être plus à temps d'après l'échéance du
premier jour de leur naufrage de faire cette déclaration ; qu'ils se croyoient
en pleine sûreté s'acheminant vers Morlaix, que leur navire s'appeloit Ledy en
anglais ou Madame en français ; que le capitaine nommé Whoweou, et cinq autres
de l'équipage ont dû échouer sur la chaloupe dans la quelle ils s'étoient sauvés
lors du naufrage de leur navire, parce qu'ils ne les ont pas apperçu de depuis,
le déclarant a ajouté qu'il servoit en qualité de matelot, et a signé avec le
dit interprète ».
Charles Cousval — Benoît.
« Les deux autres, nés également à New-York, ont fait leur déclaration presque dans les mêmes termes ; le quatrième, né à Boston, également. Ces trois marins ont déclaré ne savoir signer ».
« Sur quoi, le conseil arrête que les quatre matelots, sommairement interrogés, seront provisoirement détenus dans un des appartements de la maison d'arrêt de cette commune pour être demain transférés sous bonne escorte au Directoire du district de Morlaix, pour être statué ainsi que de raison, en lui adressant copie de tout ce que dessus ».
Signé : Conversy, Le Bihan, Villeneufve, Ménez, agent national, Labbé, secrétaire greffier [Note : Reg. 25. Fol. 52-53].
La Révolution, dans sa haine féroce du passé, s'était bêtement ruée sur tout ce qui pouvait en rappeler le souvenir. Les plus beaux monuments ne trouvèrent point grâce devant les vandales de cette néfaste époque, pas plus que les bibliothèques et les plus précieux manuscrits qui devinrent la proie des flammes. S'attaquer à des pierres, à du bois, à des toiles, à des livres, quoi de plus absurde, de plus insensé ? Cela ne s'est vu qu'en Orient, au VIIIème siècle, sous Léon, l'Isaurien, justement surnommé l'Iconoclaste, en Allemagne, au XVIème siècle, lors de la Réforme, et dans notre pays, pour la Révolution. On ne saurait assez déplorer les destructions qui s'accomplirent alors. Ce sont des pertes irréparables pour l'art aussi bien que pour l'histoire. Après la chute de Robespierre et des malfaiteurs qui avaient couvert le sol de notre belle Patrie de sang et de ruines, il se fit comme un revirement dans l'opinion. On comprit qu'on avait agi en vrais barbares et on essaya de sauver ce qui pouvait être encore sauvé ou avait échappé au marteau des démolisseurs. Des commissions furent instituées pour faire des recherches, parcourir les lieux où l'on pouvait concevoir l'espoir de recueillir quelques précieux débris. C'est grâce à ces commissions qu'on a retrouvé plusieurs chefs-d'œuvre qui avaient été relégués dans les mairies, souvent au milieu d'objets de rebut, où ils n'eussent certainement pas manqué de se détériorer.
Le 10 vendémiaire, an III (1er octobre 1794), le citoyen Cambry, commissaire pour les arts, sciences, etc., dans le département du Finistère, se présentait au conseil municipal de Saint-Pol. Après avoir, au préalable, exhibé ses pouvoirs, dûment enregistrés au Directoire du district de Morlaix le 6 du même mois, il déposa sur le bureau un réquisitoire dont la teneur suit :
« Le citoyen maire et les officiers municipaux de Paul-Léon sont invités à ne rien négliger pour mettre à l'abri de toute insulte, de tout accident, le tombeau du cy-devant évêque Visdelou ;
A faire mettre en lieu sûr la colonne octogone (en pierre de Kersanton) qui se trouve actuellement dans la cour de la municipalité, et qui servait de base au Christ, aux différentes statues de la croix placée jadis en face de la cathédrale ;
A faire transporter avec soin, dans une des salles de la maison commune, le tableau de la chapelle Toussaint, représentant l’Eucaristie…… Celui de l'autel du Rosaire, où l’on voit le plan de Paul-Léon ;
A conserver les débris des vitraux peints, placés dans la cathédrale, qui représentent un acte de charité, et de ceux ou la date de joli travail est indiquée, et ne point permettre qu'on brise, qu'on enlève, ou qu'on vende les marbres de la même église ;
En général à préserver de destruction tous les morceaux qui peuvent servir à l'histoire de l'art, à celle des siècles passés, dont tant de causes anneantissent les souvenirs.
Signé : Cambry, commissaire ».
Sont également invités le maire et les officiers municipaux de Paul-Léon à faire enlever et soigner le tableau de la chapelle de Saint-François, tableau de portraits et de costumes à conserver ;
Ainsi que le Christ à droite, qui sans avoir de dignité a quelque expression dans la tête.
Signé : Cambry, commissaire.
Sur quoi, le conseil délibérant, oui l'agent national, charge le citoyen Le Roux de faire enlever de la cy-devant cathédrale les différents objets mentionnés dans le réquisitoire du citoyen Cambry, de faire murer en outre autour du mosolé du cy-devant évêque de Visdelou, de manière à le préserver de tout accident, de faire enlever en outre de la cy-devant église des Ursulines les quatre colonnes de marbre du maître autel, ainsi que des cy-devant Minimes le tableau de Saint-François, ainsi que le Christ à droite, parce que tous les dits objets déplacés avec soin seront déposés dans un des appartements de la maison commune, charge en outre le même commissaire de faire transporter de la cour d'entrée dans la cour derrière du cy-devant eveché les débris de pierre de Kersanton consistant en Cologne provenant de la démolition de la croix de la Grande Place. » [Note : Reg. 25. Fol. 56-57].
Fait et arrêté les dits jour, mois et an que devant.
Signé : Ménez, agent national ; Le Roux, officier municipal ; Miorcec, maire ; Peychaud, officier municipal ; Le Bihan, officier municipal ; Villeneufve, officier municipal ; Varsavaux, officier municipal ; Conversy, officier municipal ; Labbé, secrétaire greffier.
Le 15 vendémiaire, le citoyen Loheac, commissaire des guerres, à Morlaix, se présentait au conseil municipal, porteur d'une lettre, datée de Rennes et qui lui avait été adressée par le commissaire des guerres, chargé de la police supérieure et de l’administration générale des hôpitaux militaires de l'armée des côtes de Brest, portant notamment « que d'après la différence constatée entre le local du ci-devant évêché et du ci-devant collège pour l'établissement d'un hospice militaire, le dit citoyen Loheac ne devait pas balancer à laisser la disposition du premier local à l'usage de la municipalité, en choisissant le second pour hospice militaire. Le citoyen commissaire, chargé de la police supérieure et de l'administration générale des hôpitaux militaires de l'armée des côtes de Brest se réservait d'obtenir l'agrément de la commission des secours publics pour le changement dont il était cas ». Sur la réquisition du citoyen Loheac, la municipalité était invitée à le mettre provisoirement en possession du ci-devant collège et à nommer des commissaires pour le suivre sur les lieux et assister au procès-verbal, devis et détail estimatif qui seraient dressés à ce sujet.
Les citoyens Le Roux, Peychaud et Villeneufve furent choisis pour accompagner Loheac.
Deux jours après, la municipalité recevait de Morlaix, une lettre l'informant que le citoyen Loarer, architecte, était chargé d'aménager le collège pour servir d'hôpital. Le conseil municipal décida de prêter aide et assistance au dit citoyen Loarer dans toutes les demandes de matériaux dont il pourrait avoir besoin [Note : Reg. 25. Fol. 57-59].
La Révolution avait désorganisé les écoles primaires. Les parents, n'ayant aucune confiance dans les citoyens qui dirigeaient ces écoles, retenaient leurs enfants chez eux, de sorte que les classes étaient vides et les maîtres sans élèves. Certaines administrations républicaines auraient bien voulu y mettre ordre, et elles prirent quelques mesures pour faire naître la confiance dans les familles. De ce nombre fut le Directoire du district de Morlaix. Et en effet, le conseil municipal de Saint-Pol recevait de ce district un arrêté du 23 vendémiaire avec une lettre du 24, recommandant de la façon la plus expresse à la municipalité « de surveiller sévèrement la conduite morale et civique des instituteurs et des institutrices de la commune, afin que l'épuration des mœurs ne pût être retardée par ceux que le plus saint des devoirs oblige de tout faire pour en hâter les progrès ».
En conséquence le conseil nomma les citoyens Peychaud et Varsavaux « à l'effet de surveiller la conduite morale des dits instituteurs et institutrices aux termes du dit arretté et de la ditte lettre et de se transporter fréquemment dans les dittes écoles » [Note : Reg. 25. Fol. 66].
Le 4 brumaire, an III (26 octobre 1794), le conseil municipal se réunit de nouveau. Ce jour, après avoir pris lecture d'un arrêté du Directoire du district de Morlaix du 9 vendémiaire, le conseil ordonne « que le dit arrêté sera publié sur le champ pour en être donné connaissance officielle ; que la maison servant de presbytère sera évacuée par l'ex-ministre du culte dans l'espace de deux décadis après la publication du dit arrêté ; que dès ce moment les ci-devant églises et chapelles cesseront d'être à la disposition de tout ministre du culte ; nomme le citoyen Le Bihan pour veiller à l'exécution des dispositions ci-dessus mentionnées, et pour en présence de l'agent national, être contradictoirement avec le chargé des effets de fabrice, faire un inventaire de tous les dits effets tant d'argenterie, linge, qu'autres ;
Arrête aussi que la ci-devant église cathédrale sera également mise à la disposition des instituteurs des écoles primaires, et que les boiseries inutiles de la ci-devant église seront employées à faire des tables et des bancs pour les écoles ; arrête encore que décadi sera exactement célébré dans la commune et que le peuple sera invité à se réunir les jours de décadis dans la ci-devant église cathédrale à l'effet d'y entendre la lecture des lois et instructions publiques ; arrête qu'il se transportera tous les décadis à 10 heures du matin dans le bâtiment destiné à l'instruction publique, et que les autres fonctionnaires publics seront invités à s'y trouver ».
Signé : Miorcec, maire, Ménez, agent national, Figuières, Kervingant, Sévézen, Villeneufve, Conversy, etc. [Note : Reg. 27. Fol. 18-19].
Le peuple dut entendre dans ces réunions des prônes fort intéressants. Ce sont les décadis qui ont tué la foi dans un grand nombre de provinces en France, le saint jour du dimanche ayant été supprimé, à cette néfaste époque. Dans ces provinces le jour du Seigneur n'est plus en effet observé, et cest à se demander s'il s'y trouve encore des chrétiens...
Dans la séance, tenue le lendemain, après avoir pris lecture d'un arrêté du Représentant du Peuple près les côtes de Brest et de Cherbourg, en date du 14 vendémiaire, demandant à chaque administration une liste indicative des citoyens qu'elle jugera mériter les diverses places, en observant de choisir les plus dignes de l'estime et de la confiance, surtout ceux qui se sont prononcés en 1789, et dont les principes de moralité civique et les talents personnels rendent propres à remplir les diverses places qui pourront leur être confiées, après avoir aussi pris lecture de la lettre d'envoi du district de Morlaix, en date du 29 vendémiaire, demandant la liste prescrite par l'arrêté ci-dessus mentionné, le conseil, ouï l'agent national, arrête de procéder à la désignation des citoyens propres à remplir les places dans le conseil général de Paul-Léon.
En conséquence, le conseil a désigné :
« Pour maire, le citoyen
Philippe-Louis Miorcec, né et domicilié à Saint-Pol, notaire, greffier et
régisseur des consignations avant la Révolution, âgé de 41 ans, élu membre du
conseil permanent le 17 août 1789, ayant exercé les fonctions municipales depuis
le 14 février 1790 jusqu'au 22 janvier 1792, élu maire à cette époque, en ayant
rempli les fonctions jusqu'au 22 décembre 1792, réélu à cette époque maire, mais
n'ayant pu accepter cette place à raison d'affaires particulières et
indispensables, nommé membre du conseil du district de Morlaix en janvier 1793,
ainsi que commandant et chef de la garde nationale du canton de Paul-Léon, dont
il a fait les fonctions jusqu'au 4 thermidor dernier, époque de sa nomination de
maire, place qu'il occupe aujourd'hui d'après les vœux du conseil général,
de la société populaire et le comité de surveillance de Paul-Léon, ratifié par le
Représentant du Peuple, Prieur (de la Marne), par son arrêté du 4 thermidor, le
dit citoyen Miorcec, ayant été encore nommé électeur par l'Assemblée primaire du
canton de Paul-Léon les 26 juin 1791 et 16 août 1792. Notaire public, l'un des
membres de la société populaire de la commune de Paul-Léon, et précédemment
membre de la société populaire de Morlaix.
Pour officier municipal, le citoyen Jean-Marie-Joseph Conversy, âgé de 33 ans révolus, né et domicilié en cette commune, avocat avant la Révolution, membre du conseil permanent de la commune de Pol-Léon, officier de la garde nationale, ensuite officier municipal, électeur en 1791, et présentement officier, membre de la société populaire de Paul-Léon depuis son établissement.
Pour autre officier municipal, le citoyen Henri-François Villeneufve, fils de feu Antoine, officier de santé, né et domicilié en cette commune, âgé de 51 ans, employé avant la Révolution dans les fermes de la ci-devant province de Bretagne, élu membre du conseil permanent de Pontrieux en 1789, où il a fait le service de la garde nationale sans interruption jusqu'à la suppression de son emploi, nommé depuis notable et assesseur du juge de paix dans la commune de Paul-Léon, lieu de sa résidence, où il a pareillement fait le service de la garde nationale, nommé ensuite officier municipal, électeur du Finistère le 16 août 1792, et également nommé par ses concitoyens membre du comité révolutionnaire qu'il a présidé, et étant en outre membre de la société populaire, et ayant fait le service dans la garde nationale de Brest, pendant les quatre mois qu'il y a passé, — et a protesté contre le Fédéraliste en 1793.
Pour autre officier municipal, le citoyen Jean Peychaud, âgé de 45 ans, natif de Bourg, département du Bec d'Ambès, résident à Paul-Léon depuis la fin d'octobre 1775, marchand de vin, en qualité de porte d'enseigne dans la garde nationale de Bourg, revenu à Paul-Léon, lieu de son domicile, y a fait le service de la garde nationale, ensuite élu notable et aujourd'hui officier municipal, membre en outre de la société populaire de cette commune.
Pour autre officier municipal, le citoyen Yves Le Bian, âgé de 53 ans révolus, né dans la commune de Plouénan, marchand, domicilié dans cette commune de Paul-Léon depuis très longtemps avant la Révolution, membre du conseil permanent en 1789, employé ensuite dans la garde nationale de Paul-Léon, premier officier municipal en 1791, et en ayant fait les fonctions pendant deux ans, devenu ensuite assesseur du juge de paix, actuellement officier municipal et membre de la société populaire depuis son établissement, et membre du ci-devant comité de surveillance.
Pour autre officier municipal, Jacques François Michel, âgé de 50 ans, cultivateur depuis près de vingt ans, avant et depuis la Révolution, officier municipal d'après le vœu du conseil général, de la société populaire et du cy-devant comité de surveillance, ratifié par le représentant du peuple. Prieur de la Marne, par son arrêté du 4 thermidor, et membre de la société populaire, « ayant prêté le serment civique notamment le 27 février et le 14 juillet 1790, Né à Plouézech, département des Côtes-du-Nord, domicilié en cette commune depuis 1777.
Pour autre officier municipal, le citoyen Germain Varsavaux, natif de la commune de Paul-Léon, âgé de 27 ans, marchand, domicilié en cette commune. Etudiant au collège de Quimper, en rhétorique, à l'époque de la Révolution, ayant continué ses études pendant deux ans dans le même collège sous des professeurs constitutionnels, membre de la société populaire de Quimper, peu de temps après sa formation, ayant fait le service de la garde nationale en cette commune pendant son séjour ; retourné à Gouesnou, près Brest, chez ses parents, il a continué le service de la garde nationale ; dès l'époque de son arrivée à Paul-Léon, le 27 mai 1793, il a servi aans la garde nationale ; membre de la société populaire et installé officier municipal d'après le vœu du conseil général et du comité de surveillance, ratifié par le représentant du peuple, Prieur de la Marne, par son arrêté du 4 thermidor.
Pour autre officier municipal. Benjamin Kervingant, âgé d'environ 39 ans, né dans la commune de Brest, domicilié en cette commune en qualité d'apothicaire avant la Révolution, et depuis ayant servi en qualité d'officier de la garde nationale en 1789, et successivement jusqu'à cette époque, nommé notable d'après le vœu du conseil général, de la société populaire et du cy-devant comité de surveillance, ratifié par le représentant du peuple. Prieur de la Marne, par son arrêté du 4 thermidor, et membre de la Société populaire de Paul-Léon, et en exercice des fonctions de notable qui lui ont été confiées.
Pour autre officier municipal, le citoyen Vincent Berdelo, âgé de 55 ans, né dans la commune de Plestin, district de Morlaix, domicilié en cette commune, longtemps avant la Révolution, et depuis cette époque nommé officier municipal, en 1789, dont il a fait les fonctions pendant quatre années consécutives, depuis assesseur et notable jusqu'à ce jour, étant membre de la société populaire depuis sa création.
Pour agent national,
Le citoyen Claude Ménez, âgé de 27 ans, né et domicilié en cette commune, écolier avant la Révolution et actuellement commerçant, sergent de la garde nationale en 1789, sous-lieutenant en 1791, notable en 1792, ensuite officier municipal dont il a rempli les fonctions jusqu'au 29 messidor dernier, époque à laquelle il a été désigné par le conseil général de la société populaire, et le cy-devant comité de surveillance pour remplir les fonctions d'agent national qu'il exerce actuellement d'après l'arrêté confirmatif du représentant du peuple, Prieur de la Marne, en datte du 4 thermidor, membre de la société populaire de cette commune.
Pour officier public et premier notable,
Le citoyen Jean-Julien Le Roux, âgé de 44 ans, né à Port-Brieuc, domicilié depuis très longtemps en cette commune, maître de la cy-devant psalette, avant la Révolution, depuis la suppression du cy-devant chapitre, ayant servi dans la garde nationale en 1789, et successivement jusqu'à sa nomination d'officier municipal en 1791, place qu'il a occupée depuis ainsi que celle d'officier public pour laquelle il déclare opter, et étant d'ailleurs membre de la société populaire depuis sa création, et ancien membre du cy-devant comité de surveillance, ayant toujours protesté contre le fédéraliste en 1793.
Pour autre notable, le citoyen François Péron, âgé de 45 ans, marchand cloutier, clubiste de la société populaire de Morlaix et de celle de cette commune depuis sa formation, officier municipal depuis le 21 novembre 1791.
Pour autre notable, le citoyen Guillaume Corre, âgé de 62 ans, né en cette commune, cultivateur avant et depuis la Révolution, ayant rempli les devoirs civiques et notable depuis quatre ans.
Pour autre notable, le citoyen Pierre Le Hir, sans-culotte, né à Brest le 28 janvier 1758, et domicilié en la commune de Paul-Léon depuis environ 24 ans.
En 1789, commerçant et commis au bureau des postes de Paul-Léon, nommé directeur en 1791 ; sa nomination confirmée à l'assemblée électorale de Morlaix le ...... 1793.
En 1789, lieutenant-maire de l'ancienne municipalité. Elu premier président du conseil permanent le 17 août même année, il arbora la cocarde tricolore le 2 novembre suivant avec deux ou trois de ses amis. Elu premier maire constitutionnel le 9 février 1790, ayant depuis exercé successivement les fonctions d'officier municipal, de notable, d'assesseur du juge de paix ; électeur depuis la Révolution, commissaire délégué du département et du district à différentes époques, ayant sorti de la municipalité comme officier municipal, lors de la promulgation de la loi sur le gouvernement révolutionnaire, place déclarée incompatible avec celle des directeurs de postes, ayant protesté contre le fédéraliste en 1793, l'un des fondateurs de la société populaire de Paul-Léon, et aussi membre de la société populaire de Morlaix.
Pour autre notable, le citoyen Joseph-Marie Guillaume, âgé de 68 ans. En 1789, notaire et procureur à Paul-Léon, et depuis cette époque à différentes fois a présidé, comme membre, aux assemblées du conseil permanent de la société populaire, aux assemblées primaires et électorales, et exerce depuis 1790 les fonctions de juge de paix et de notable du dit Paul-Léon.
Pour autre notable, Jacques Guiader, âgé de 46 ans, né en cette commune, tonnelier de profession, a accepté l'acte constitutionnel et assisté aux assemblées primaires, sergent de la compagnie des canoniers, et notable depuis trois ans sans interruption jusqu'à ce jour.
Pour autre notable, le citoyen Hervé-Marie Figuières, né le 22 avril 1748 en la commune de Ploudalmézeau, et domicilié depuis 1759 en cette commune, notaire, ayant été membre et secrétaire du conseil permanent, ayant exercé les fonctions municipales depuis le 14 février 1790 jusqu'au renouvellement de la seconde moitié des membres de la municipalité, ayant été ensuite nommé notable du conseil général de la commune, et l'est encore, a été officier et fusilier de la garde nationale, notaire public désigné du département du Finistère à la résidance de la commune de Paul-Léon, a eu la jambe cassée d'un coup de feu à la journée du 19 mars 1793 (vieux stil), en combattant contre les ennemis de la Patrie, lors de l'insurrection des habitans des communes circonvoisines de cette commune sur ceux de celle cy, dont il restera estropié toute la vie, membre de la société populaire.
Pour autre notable, le citoyen Claude Le Bos, né et natif de Quimper, département du Finistère, âgé de 29 ans révolus, et domicilié en cette commune depuis trois ans, profession de chapelier, a été membre de la Société des Amis de la Constitution à Quimper en 1791. En 1792, il est venu résider à Landerneau pendant dix mois, et étant aussi membre de la société populaire, ayant fait le service de la garde nationale. A. Paul-Léon, il a monté la garde, en qualité de fusilier, caporal, sergent, et devenu lieutenant de la garde nationale a accepté la Constitution. Lors de l'insurrection des campagnes en cette commune, il s'est montré en républicain à défendre ses amis et sa patrie, et a toujours paru aux assemblées primaires qui y a eu lieu, étant notable depuis trois ans jusqu'à ce jour.
Pour autre notable, le citoyen François Le Guével, originaire de la commune de Plounévez-Moédec, district de Lannion, département des Côtes-du-Nord, commerçant, domicilié en cette commune depuis le 4 octobre 1775, âgé de 51 ans ; nommé notable à la première assemblée primaire pour l'organisation des municipalités, c'est-à-dire, en 1789. En 1791 nommé assesseur du juge de paix dont il a rempli les fonctions pendant deux ans, à l'expiration desquels il a été nommé notable dont il a exercé les fonctions jusqu'à ce jour sans interruption.
Pour autre notable, le citoyen Olivier Grall, cultivateur, âgé de 43 ans, domicilié en cette commune, nommé officier municipal le 14 février 1790, refusa cette place pour ne pas discontinuer la culture de ses terres et fut nommé premier notable, à la même époque ; élu juge de paix du canton rural, le 21 décembre 1790, électeur nommé le 16 août 1792 et toujours notable, ayant fait son service dans la garde nationale.
Pour autre notable, le citoyen Pierre Lafitte, âgé de 28 ans, né à Montaudran (?), tailleur de profession, domicilié en cette commune depuis trois ans, officier de la garde nationale, ayant accepté l'acte constitutionnel et suivi les assemblées primaires.
Pour autre notable, le citoyen Louis Bolloré, âgé de 59 ans, né en la commune de Paul-Léon et y résident, marchand de vin avant la Révolution, assesseur du juge de paix depuis trois ans, ayant fait le service de la garde nationale, et toujours assisté aux assemblées primaires, et membre de la société populaire.
Pour autre notable, le citoyen Jean-Pierre Sévézen, né à Morlaix le 20 août 1761, domicilié à Paul-Léon depuis environ vingt ans ; en 1789 clerc procureur, commerçant, secrétaire du conseil permanent ; le 17 janvier 1791, secrétaire greffier du juge de paix et en 1792, secrétaire de la société popupulaire ; le 8 décembre de la même année réélu secrétaire greffier de la justice de paix. En 1793, nommé officier de la garde nationale ; depuis et avant cette époque exerçant les fonctions de notable ; au mois d'octobre de la même année élu membre du comité révolutionnaire ; enfin nommé à la perception des contributions foncières, mobilières et droits de patentes pour les années 1791, 1792 et 1793.
Pour autre notable, Pierre Le Hir, cultivateur, âgé de 63 ans, né et domicilié en cette commune, notable depuis le mois de juillet dernier (1793), commissaire pour le recensement des grains, a accepté la Constitution et prévenu la municipalité de l'insurrection du 19 mars 1793.
Pour autre notable, le citoyen Pierre Combot, âgé de 35 ans, cultivateur, né à Saint-Pol, notable depuis 1793.
Pour autre notable, le citoyen Joseph Le Boulch, âgé de 56 ans, né à Sibiril, cultivateur, notable depuis 1793.
Pour autre notable, le citoyen Jacques Cadiou, âgé de 47 ans, meunier et cultivateur, né à Cléder, notable.
Pour autre notable, le citoyen François Le Boulch, âgé de 30 ans, né à Morlaix, musicien de la cy-devant église cathédrale avant la Révolution, officier de la garde nationale en 1791, membre de la société populaire depuis cette époque, commissaire en exercice des casernes, ayant rempli avec zèle et exactitude les différentes fonctions dont il avait été chargé par la municipalité.
Pour juge de paix du chef-lieu du canton : Le citoyen Joseph-Marie Guillaume. Pour son secrétaire greffier : — Le citoyen Sévézen, fils. Pour assesseurs : Les citoyens : — Claude Bot, Dominique Sabatier, Pierre Lafitte et François Boulch. Pour juge de paix du canton rural : Le citoyen Charles-Armand-René Péreault, âgé de 30 ans révolus ; avant la Révolution clerc procureur, natif de Carhaix, domicilié de Paul-Léon depuis 1787, y marié le 13 juillet 1791, étant sous-lieutenant des chasseurs de la garde nationale, nommé procureur de la commune le 21 août 1791, élu officier municipal le 21 novembre 1791. Réélu procureur de la commune le 12 décembre 1792, a balloté pour la même place au renouvellement de la municipalité, dans la même année capitaine de la garde nationale jusqu'au 23 messidor, le Directoire du district l'ayant nommé juge de paix du canton rural de Paul-Léon, place qu'il occupe actuelement, électeur le 16 août 1792, administrateur de l'hôpital de Paul-Léon le ... et membre de la société populaire depuis sa formation.
Pour greffier du juge de paix du canton rural : Le citoyen Jean Le Pen, né à Brest le 14 avril 1765, et domicilié à Paul-Léon depuis le 2 octobre 1785. En 1789, clerc procureur et commerçant, membre de la société populaire de Morlaix avant la formation de celle de Paul-Léon et l'un des fondateurs de cette dernière, officier de la garde nationale, élu membre du comité révolutionnaire, en octobre 1793.
Pour assesseurs du canton rural : Ollivier Grall, cultivateur, Pierre Le Hir, it., Pierre Combot, it., Joseph Le Boulch, it.
Sur la représentation faite au conseil par les citoyens Salaün, Rageul et Poulpiquet, tendante à ce qu'on nommât d'autres commissaires distributeurs en leur lieu et place, l'Assemblée délibérant, ouï l'agent national, a désigné et nommé d'après l'extrait des côtes parts d'impositions des plus fort contribuables de cette commune qui a été remis sur le bureau, les citoyens François-Augustin Prud'homme, Jacques Ménés et Louis Bolloré, pour distributeurs des secours à accorder aux familles indigentes des défenseurs de la Patrie sous le ressort de la dite commune, charge le bureau municipal de faire part aux dits commissaires de leur nomination, avec invitation de s'occuper sans délai du travail qui peut leur incomber en leurs dites qualités. [Note : Reg. 27. Fol. 19-25, recto].
Fait et arrêté en conseil général les jour, mois et an que devant.
Signé : Conversy, officier municipal, Miorcec, maire, Villeneufve, officier municipal, Peychaud, officier municipal. Ménez, agent national. Le Hir, notable, Michel, officier municipal, Louis Bolloré, Le Bihan, officier municipal, Berdelo, Sévézen, Le Roux, officier municipal, Lafitte, P. Le Hir, Le Guével ».
Malgré son étendue, nous avons tenu à reproduire intégralement cette délibération du 5 brumaire, an III. Elle ne laisse pas d'exciter l'intérêt du lecteur, chacun des personnages, y désignés, ayant sa note caractéristique qui permet de le juger, sans crainte de s'y méprendre.
A Saint-Pol, paraît-il, les détenus de la maison d'arrêt jouissaient d'une certaine liberté, à cette époque. C'est ainsi qu'ils pouvaient, sans trop de difficulté, communiquer avec le dehors. Les femmes pénétraient dans l'intérieur du bâtiment, voyaient leurs maris et passaient même la nuit avec eux, et vice versa. Les amis et les parents des détenus y venaient également manger et se faisaient servir du dehors.
Depuis la chute de Robespierre en effet, le régime des prisons s'était quelque peu relâché de ses rigueurs à l'égard des prisonniers. Désormais ils pouvaient respirer, en attendant qu'on les mit en liberté. La commission de surveillance du district de Morlaix crut, néanmoins, devoir le 19 brumaire (11 novembre 1794), adresser un blâme à la municipalité de Saint-Pol pour les facilités si grandes qu'elle concédait aux détenus.
L'agent national, après s'être renseigné auprès du garde
de la maison d'arrêt et des deux commissaires, officiers municipaux, nommés par
le conseil pour surveiller les prisonniers, répondit qu'il ne contestait pas
l'assertion de la commission de surveillance de Morlaix, mais qu'on avait jugé
bon de se conformer à l'article 5 du décret du 31 octobre 1794, paru dans les annales de la
République et portant que « les personnes arrêtées pour cause de suspicion
pourraient avoir communication, aux heures prescrites par la municipalité avec
un ou deux parents pour la gestion de leurs affaires ».
Les manuscrits et les ouvrages de littérature, d'histoire et de science, appartenant aux différentes communautés et à l’évêché de Saint-Pol, avaient été enlevés et expédiés en grande partie au district de Morlaix, de façon que la ville était absolument dénuée de livres, et les habitants se trouvaient dans l'impossibilité de s'en procurer, à leurs frais, ne possédant aucune ressource.
La municipalité, qui avait fait part, le 12 novembre 1794, de la situation au citoyen Cambry, commissaire délégué pour les arts et sciences du Finistère, lui demanda quelques ouvrages d'instruction, « le dictionnaire encyclopédique, par exemple, ainsi que d'autres livres intéressants dont l'administration supérieure avait des doubles ». Cette cession de livres permettrait à la Commune de former une bibliothèque qui serait placée dans la maison commune.
Nous ignorons si cette demande fut prise en considération. Ce qui est certain, tous les manuscrits n'ont pas été enlevés et il en reste encore dans les archives de la mairie de fort intéressants qu'on peut consulter avec fruit.
Ainsi que nous l'avons vu plus haut, le Directoire du district de Morlaix avait chargé le citoyen Loarer, architecte, d'aménager le collège de façon à en faire un hôpital militaire plus vaste et plus commode que celui dont on avait disposé jusque là. Le 19 novembre 1794, le citoyen Brindejone en fut nommé directeur et le citoyen Peychaud, officier municipal, dépensier. Toutefois l'inauguration de l'hôpital n'eut lieu que l'année suivante. Nous raconterons en temps et lieu ce qui se passa à cette occasion ; ces détails, croyons-nous, seront lus avec intérêt.
Le citoyen Prud'homme de Keraugon, maire de Saint-Pol, avait été, à la suite de la journée du 19 mars 1793, suspendu de ses fonctions par le conventionnel Prieur (de la Marne). En butte pendant toute une année aux dénonciations incessantes du Procureur de la commune et du curé constitutionnel Dumay qui terrorisait Saint-Pol, Prud'homme finit par être décrété d'arrestation en juillet 1794. On l'attacha sur un canon pour le conduire au tribunal révolutionnaire de Brest, mais il fut croisé en route par un courrier apportant la nouvelle de l'exécution de Robespierre, ce qui lui sauva la vie, à lui et à bien d'autres. Il ne recouvra néanmoins la liberté au en novembre 1794. Il fut alors réintégré dans son emploi de receveur des douanes dont il était pourvu à Saint- Pol, lors de son arrestation. L'inspecteur des douanes nationales de Morlaix, Maduron, lui adressa, à ce sujet, ses plus chaudes félicitations, et lui déclara que ses appointements lui seraient soldés dès qu'il lui aura fait connaître l'époque de sa réclamation [Note : Reg. 25. Fol. 81].
Le 22 brumaire, le président temporaire des arts, adjoint au comité de l'instruction publique, adressait aux administrateurs du district de Paul-Léon une lettre au sujet de certains monuments.
Le conseil municipal, dans, une séance tenue le 11 frimaire, an III (2 décembre 1794), convaincu que cette lettre a été envoyée par erreur à Paul-Léon, comme renfermant une administration du district, mais désirant cependant donner à la commission des arts les renseignements qu'elle demande, « arrette d'écrire à la commission qu'il existe à Paul-Léon un mausolé en marbre blanc, représentant l'évêque Visdelou, soigneusement conservé par la municipalité en son entier, à l'exception toutes fois d'un doigt cassé, dont on n'a pu découvrir les auteurs, le doigt portant un aneau empreint d'armoirie, que quant au tableau qui a dû exister dans le réfectoire des cy-devant Carmes, représentant la transfiguration de Raphaël, la municipalité n'a d'autre connoissance à cet égard si ce n'est que les commissaires du district de Morlaix venus pour faire la vente des cy-devant Carmes ont transportés à Morlaix les différents tableaux existants dans la cy-devant communauté des cy-devant Carmes, que quant à la grille en fer servant de principalle porte du chœur servant de cy-devant église de Paul-Léon, elle a été envoyée au district de Morlaix avec les autres fers existants sur les domaines nationaux en cette commune pour servir aux travaux de la République en vertu d'ordre du district de Morlaix, que relativement aux tableaux existants dans la cy-devant cathédrale de Léon, le citoyen Cambry, commissaire des arts et de sciences dans le département du Finistère en a fait déposer quelques-uns à la maison commune qui y existent, que quant aux tableaux qui pouvaient se trouver au cy-devant évêché, le commissaire du séquestre a dû les adresser au Directoire du district de Morlaix.
Arrête au surplus que copie de la dite lettre et de la présente délibération seront adressées au Directoire du district de Morlaix comme pouvant donner des connaissances sur les monuments du district en général [Note : Reg. 25. Fol. 81].
Le citoyen Floch qui, à la suite de dénonciations, avait été traduit devant le tribunal révolutionnaire de Brest, fut acquitté par ce tribunal, naguères si féroce. Le conseil général de Saint-Pol, voulant lui donner des preuves de son estime, le nomma, le 29 primaire, an III (19 octobre 1794), officier municipal, charge qu'il avait déjà occupée, en remplacement du citoyen Peychaud qui avait opté pour la place de dépensier de l’hôpital militaire, établi au collège. Ce dernier avait déclaré au conseil que la modicité de sa fortune lui faisait un devoir rigoureux de son option [Note : Reg. 27. Fol. 31].
Quatre jours après, le citoyen Dumay, cy-devant curé constitutionnel de Saint-Pol, lequel, par suite des décrets, rendus par la Convention, avait dû quitter l'ancien presbytère, s'adressa au Directoire du district de Morlaix pour obtenir un logement. Le conseil, après avoir pris lecture d'une lettre du district, en date du 2 frimaire et d'une pétition du citoyen Dumay en date du 3, ouï l'agent national, lui désigna une maison à Guénan, ci-devant occupée par le citoyen Mézangeau et appartenant à l'émigré de Bourg-Blanc, ou si mieux il aimait, la maison occupée par les ci-devant aumôniers des Ursulines, ces deux logements se trouvant sans l’occations.
Ici nous allons ouvrir une parenthèse et revenir sur nos pas. C'est principalement à partir de septembre 1792 jusqu'à la chute de Robespierre, le 27 juillet 1794, que notre Patrie a été le théâtre d'orgies, de crimes qui n'ont rien eu d'approchant dans les siècles passés. Notre chère Bretagne n'a pas été épargnée, et elle aussi a vu passer sous le triangle égalitaire de nobles victimes, et son sol a été couvert d'immenses ruines.
(abbé J. Tanguy).
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