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SAINT-POL-DE-LEON SOUS LA REVOLUTION (CHAPITRE 21). |
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CHAPITRE XXI.
SOMMAIRE.
La maison de la Retraite est convertie en prison. — Règlement de la prison. — La municipalité se prononce contre le comité central de Rennes. — Demande par la Société des Amis de la République qu'on substitue le nom d'Auximi à celui de Saint-Pol. — La municipalité se prononce également contre les mesures prises par les administrateurs du Département. — Arrêté du Département contre les prêtres fidèles. — La municipalité de Saint-Pol accorde un certificat de civisme aux citoyens Goarant, curé de Plougoulm et Touboulic, curé de Plouénan. — Honteuse lettre de la municipalité de Saint-Pol au président de la Convention nationale. — Nouvelle Constitution. — Autre piètre lettre de la municipalité, à ce sujet, à la convention. — Les filles Bléas qui tenaient de petites écoles, citées à la barre de la municipalité. — Le citoyen Dreppe, suspendu de ses fonctions, est menacé de se voir enlever le cours d'hydrographie.
L'ancienne maison de la Retraite avait dû être convertie en maison d'arrêt. Ne fallait-il pas un vaste local pour renfermer les suspects, et ils étaient nombreux à Saint-Pol, aussi bien que dans le reste de la France ? Comme hôtes des prisons, les honnêtes gens avaient remplacé les voleurs et les malfaiteurs. On dut forcément transformer les couvents en maisons de détention. La guillotine ne réussissait pas à les vider. De nouvelles victimes venaient remplacer celles qui avaient disparu.
Voici quel fut le règlement adopté pour le dépôt des détenus, installés dans la ci-devant maison de Retraite de Saint-Pol.
Art. 1er. — Les détenus auront la liberté de se promener dans l'intérieur de la maison et dans les deux cours.
Art. 2. — Leurs noms seront inscrits dans le corps de garde.
Art. 3. — Nul ne pourra entrer dans la maison, s'il n'est introduit par un des commissaires pour la surveillance des détenus.
Art. 4. — Les lettres, paquets, bardes, etc., ne pourront leur parvenir, ni à ceux à qui ils les adresseront, sans avoir été lus et visités par les commissaires.
Art. 5. — Ces commissaires sont les citoyens Guillaume, Le Roux, Péréault, les commandants de la troupe de ligne et de la garde nationale. Chacun sera porteur d'une carte signée du citoyen Goëz, faisant les fonctions de maire et revêtu du cachet de la municipalité.
Art. 6. — Les officiers municipaux pourront entrer à toute beure, sans carte même, s'ils sont revêtus de leurs écharpes ou connus du commandant du poste.
Art. 7. — Tous les matins, le commandant du poste fera son rapport au bureau municipal.
La municipalité de Saint-Pol s'était tenue, nous l'avons dit plus baut, sur la plus grande réserve par rapport aux mesures prises par les administrateurs du Département, à l'occasion des événements du 31 mai et du 2 juin. Le 21 de ce mois, le conseil général désapprouva la conduite des administrateurs. Voici ce qui fut arrêté dans cette séance qui se prolongea toute la journée. « Le conseil général de Saint-Pol-de-Léon, considérant que les mesures prises par les administrateurs du Département constituent un acte de fédéralisme, propre à opérer la dissolution de la Convention et infailliblement la guerre civile et tous les maux de l'anarchie ; qu'il est bien éloigné de supposer des intentions perfides à des administrateurs qui ont tant de titres à la confiance publique, mais qu'ils ont pu se faire illusion et prendre dans le chaos obscur des événements l'erreur pour la vérité,
adopte l'appel nominal sur la question de savoir si le conseil général enverra son adbésion au comité central de Rennes.
Les citoyens Goëz, Perrin, Péron répondirent : non.
Trobert, non, jusqu'à nouvelles instructions.
Le Roux, Villeneufve, Le Hir, Le Bihan, Corre : non.
Peychaud, non, jusqu'à nouvelles instructions.
A l'unanimité l'adhésion est refusée jusqu'à nouvelles instructions.
Le citoyen Perrin, officier municipal, est chargé de demander au Département des instructions précises sur l'objet important dont il s'agit. Une indemnité de 15 livres par jour lui est allouée pour son voyage à Quimper » [Note : Reg. 24. Fol. 118].
A Saint-Pol, comme ailleurs, il ne manquait pas d'exaltés. La Société des Amis de la République demandèrent, le 28 juin, au conseil général de substituer à la dénomination de Saint-Pol-de-Léon celle d'Auximi. Le nom de Saint attaché à la ville de Léon sonnait faux aux oreilles de ces patriotes. Le conseil général crut, pour le moment, devoir ajourner la question.
Le lendemain, 29 juin, le citoyen Perrin remit à la municipalité les pièces qu'il avait reçues du Département sur la question de l'adhésion aux mesures prises par les administrateurs. Un des membres insista fortement pour que le conseil s'en tint au refus formel d'y adhérer, et plusieurs autres membres s'étant prononcés dans le même sens, la question fut ainsi posée : « Adhérera-t-on aux mesures prises par les administrateurs du département du Finistère ? ».
A l'appel nominal auquel il fut procédé, les citoyens Le Bihan, Peychaud, Guillaume, Chambonneau, Guével, Menez et Bolloré répondirent : oui.
Les citoyens Goëz, Perrin, Trobert, Villeneufve, Le Hir, Corre, Guyader, Le Bot, Le Bourguays, Grall et Lafitte répondirent : non.
A la majorité, l'adhésion est refusée, Deniel, procureur de la Commune, observant, à la signature de la délibération, qu'il n'est annoté ni pour le oui ni pour le non [Note : Reg. 24. Fol. 129].
Dans une séance, tenue le 30 juin 1793, le conseil municipal de Saint-Pol ordonnait à son secrétaire greffier de transcrire, à la suite de sa délibération, un arrêté, pris le 13 du même mois, par le Département contre les prêtres fidèles. Nous reproduisons intégralement ce document qu'on lira, croyons-nous, avec intérêt :
DÉPARTEMENT DU FINISTÈRE
EXTRAIT DES REGISTRES DU DÉPARTEMENT
Du 13 juin 1793, l’an II de la
République Française.
Séance du conseil général, présidée par le citoyen
Kergariou.
Présent le citoyen Brichet, procureur général syndic.
Vu
l'arrêté du mois de mai dernier, relatif aux prêtres réfractaires, sujets à la
déportation, qui viendroient se livrer à la discrétion des corps administratifs,
le rapport écrit déposé sur le bureau, le 9, par le citoyen Duboys,
administrateur, député vers les commissaires de la Convention nationale, alors à
Quimperlé ; vu aussi la lettre adressée le 8 par ces commissaires à la Convention
nationale, imprimée dans le Bulletin du Département ;
Et considérant qu'avant même l'émission de la loi du 18 mars, les prêtres réfractaires étaient tellement surveillés par les administrateurs et les citoyens patriotes du Finistère, qu'ils n'avaient déjà plus de retraite que dans les lieux les plus inaccessibles, d'où il est résulté que le plus grand nombre a ignoré longtemps l'existence de cette loi, et n'a pas pu profiter de la huitaine qu'elle accordoit pour sortir du territoire de la République ;
Que cependant le but moral de cette loi n'a pas dû être seulement de donner des exemples terribles ; qu'il doit être au contraire, dans le caractère des représentants d'une nation généreuse, de n'ordonner des exécutions sanglantes qu'alors qu'il est impossible de les éviter ;
Considérant néanmoins qu'il est plus pressant que jamais d'empêcher que les prêtres réfractaires fanatisent les habitants des campagnes et de prémunir ceux-ci contre toute espèce de séduction en réprimant la facilité coupable avec laquelle ils les recèlent encore ;
Considérant que la loi du 18 mars est restée muette relativement aux prêtres qui se présenteroient d'eux-mêmes sans avoir été saisis par la force armée ou par les citoyens ; qu'il est de l'essence d'une administration paternelle de faire connoitre aux administrés qu'elles sont les obligations que la loi leur impose, avant d'en déployer contre eux la sévérité, voulant faire connoitre aux citoyens qui ont pu prendre quelque intérêt à ces prêtres de mauvaise foi, que l'administration toujours ferme dans ses principes touchant le maintien de l'ordre désire néanmoins éviter l'effusion du sang ; le conseil prend sur sa responsabilité de renouveller en faveur des prêtres réfractaires qui se présenteront d'eux-mêmes, le délai de huitaine accordé par la loi du 18 mars ; mais le nouveau délai expiré, si ces réfractaires persistoient encore dans leur criminelle résistance à la volonté de la nation, ils ne mériteroient plus aucune grâce, et les citoyens seroient eux-mêmes repréhensibles, s'ils hésitoient à les livrer ou du moins à les chasser de leurs maisons, comme on chasse des loups dévorants qui n'ont que la soif du meurtre et du carnaje.
Art. 1er. — Le conseil arrête de donner un nouveau délai de huit jours à tous prêtres dans le cas de déportation qui seroient en ce moment sur le territoire du Finistère, pour quitter les retraites où ils se tiennent cachés, parce qu'ils se présenteront devant les administrations.
Art. 2. — Les prêtres dans le cas de la déportation qui se présenteront d'eux-mêmes, seront envoyés au chef-lieu du Département, pour y demeurer avec les autres ecclésiastiques qui y sont déjà détenus.
Art. 3. — Cette détention durera jusqu'au moment où le Directoire, chargé de l'exécution, aura trouvé à prendre les mesures nécessaires pour effectuer leur déportation.
Art. 4. — Le délai de huit jours, cy-devant fixé, ne commencera à courir, qu'à compter du jour de la publication dans les municipalités.
Art. 5. — Les Directoires des districts seront tenus d'adresser cet arrêté aux municipalités de leur arrondissement respectif, aussitôt qu'il leur sera parvenu, et de prescrire aux officiers municipaux d'en accuser la réception dans les 24 heures au plus tard.
Art. 6. — Les procureurs de Communes requerront aussi dans les 24 heures, les officiers municipaux ordonneront, et les secrétaires greffiers effectueront, sans désemparer, la transcription sur les registres des délibérations.
Art. 7. — Cet arrêté sera en outre affiché à la porte de la maison commune et publié à la sortie de la messe de paroisse, le premier dimanche ou jour de fête qui suivra sa publication par le maire ou le secrétaire greffier, en la présence du procureur de la Commune qui certifiera le district de cette publication.
Art. 8. — Les procureurs syndics des districts adresseront exactement et à mesure qu'ils les recevront les accusés de réception, certificats de transcription sur les registres, et de publication à l'issue de la grand'messe, au procureur général syndic du Département, qui en rendra compte au Directoire.
Art. 9. — Le délai ci-dessus une fois expiré, tout prêtre non sermenté qui n'auroit pas sorti du territoire de la République, ou qui ne se seroit pas remis à la discrétion des corps administratifs, sera saisi, conduit au chef-lieu du district et jugé conformément aux lois.
Art. 10. — Le présent arrêté sera adressé à la Convention nationale et au Pouvoir exécutif, envoyé aux districts et aux municipalités ; il sera en outre imprimé dans le Bulletin du Département.
Art. 11. — Ceux qui recevront ces prêtres, après la publication du présent arrêté, sont déclarés perturbateurs du repos public et seront punis comme tels.
Fait en conseil général du Département à Quimper.
Signé : Kergariou, président, Aimez, secrétaire général.
Vu l'arrêté du département du Finistère, en date du 13 courant, portant pour principales dispositions :
1° Que le délai de huitaine accordé par la loi du 27 mars dernier aux prêtres sujets à la déportation est prorogé de huitaine en faveur de ceux qui se présenteront volontairement dans le dit délai aux corps administratifs du dit département ;
2° Que ceux qui, après ce nouveau délai, auroient recelé quelqu'un de ces prêtres seront regardés comme perturbateurs du repos public, et punis comme tels ;
Nous représentans du peuple, envoyés près l'armée des côtes de Brest, approuvons le dit arrêté ; ordonnons en conséquence qu'il sera exécuté selon sa forme et teneur ; que l'envoi en sera fait dans le plus court délai à toutes les munipalités du département du Finistère, et que la publication aura lieu le dimanche suivant, à compter du quel jour le délai de huitaine commencera à courir.
Fait à Quimper le 13 juin 1793, l'an 2 de la
République.
Signé : Cavaignac et Sevestre.
Pour copie conforme à l'original déposé au secrétariat du Département, signé : Aimez, secrétaire général. Fait et arrêté en conseil municipal les jour, mois et an que devant.
Signé : Goëz, faisant les fonctions de maire. Le Roux, officier municipal, Péron, officier municipal, Déniel, procureur de la Commune, Le Bihan, adjoint. Le Hir, Villeneufve, officier municipal, Labbé, secrétaire greffier [Note : Reg. 23. Fol. 123-124].
Les citoyens Goarant, curé de Plougoulm et Touboulic, curé de Plouénan, avaient demandé, mais sans succès, un certificat de civisme à leurs municipalités. Devant ce refus formel, ils s'adressèrent au conseil général de Saint-Pol, le quel ne manqua pas de prendre fait et cause pour eux. Et en effet, dans une séance tenue le vendredi, 5 juillet 1793, le conseil général, « considérant que les ecclésiastiques, dont le civisme est connu, ne doivent pas souffrir de l'ignorance ou de la malveillance fanatique de leurs magistrats, accorda des certificats de civisme aux dits citoyens Goarant et Touboulic » [Note : Reg. 24. Fol. 133].
Laissons de côté le citoyen Touboulic pour ne nous occuper que de son compère Goarant. Il est assez intéressant de reproduire les motifs sur les quels s'était appuyée la municipalité de Plougoulm pour rejeter la demande du jureur. On jugera de la sorte le quel des deux conseils, de celui de Plougoulm, ou de celui de Saint-Pol savait le mieux apprécier les qualités d'un citoyen. Voici ce qu'on lit dans le registre de la municipalité de Plougoulm, à la page 83 :
« 1° Nous ne pouvons pas certifier pure et zélé patriote une personne qui a refusé d'aider à fournir des lits aux défenseurs de la Liberté ;
2° Une personne qui accable tout le monde d'injures, qui tantôt menace les paroissiens du bâton, tantôt du fusil ou du pistolet, de sorte que le bourg est désert ;
3° Une personne qui a eu l'insolence d'accabler de toute sorte d'injure le corps municipal revêtu de sa distinction.
4° Les communes voisines ont plusieurs fois porté des plaintes contre lui.
Voilà les motifs qui portent le conseil de cette commune à refuser au curé acte de civisme, disant qu'une telle conduite est bien indigne d'un pure et zélé patriote, encore moins d'un ecclésiastique ».
Signé : René Olier, maire, J. Autret, J. Berthévas, François Guillerm, Joseph Quéré, officier municipal, Yves Deniel, René Ollivier, procureur de la Commune, Claude Pérébéozen, Yves Le Milin, Yves Nedelec, Trebaol, secrétaire.
Les conseillers de Saint-Pol peuvent être fiers d'avoir pris sous leur protection le citoyen Goarant.
Le même jour, le citoyen Alain Balanant, héraut, demande à l'administration « de lui assurer, sa vie durante, la somme de 15 livres par mois pour le prix de ses gages. Le conseil délibérant, et connaissant les services que le dit Balanant a rendu à la Commune, ainsi que les infirmités dont il est accablé en ce moment, en raison de son grand âge, arrêta que cette somme de 15 livres lui sera payée sur les fonds de la municipalité ».
Le 10 juillet, le bureau municipal de Saint-Pol faisait parvenir aux administrateurs du district une expédition de ses arrêtés du 21 et du 29 juin, relativement aux mesures prises par le Département à la suite des événements des 31 mai, 1er et 2 juin. Deux jours après, c'était au président de la Convention nationale qu'il adressait une copie de ces mêmes arrêtés avec cette remarque qui met sa lâcheté au grand jour.
« La date de ces arrêtés, disait-il au président de la Convention, lui fera connaître que l'envoi a essuyé des retards qui proviennent non d'une vacillation quelconque dans les principes que dans des circonstances difficiles les officiers municipaux ont proclamées les premiers dans le département du Finistère, mais de l'espérance de voir rentrer dans le devoir des administrateurs qu'ils s'étaient plu jusqu'ici qu'à ne croire qu'égarés. Actuellement que cet espoir semble s'éloigner, actuellement que la marche du département prend un caractère de rébellion plus marqué et s'éloigne de jour en jour de l'unité de la République, les officiers municipaux croient qu'il devient instant de faire connaître à la République qu'ils ne sont point les complices de ces malheureux égarés. Ils ne se dissimulent pas le danger de leur résistance à l'entraînement général dans le Finistère, mais ils seraient indignes de la liberté, s'ils savaient composer avec ses principes ».
Ceux que le lâche conseil général de Saint-Pol appelle de malheureux égarés et qu'il charge si bien dans son message au président de la Convention nationale paieront bien cher leur tentative de résistance à la tyrannie de la Montagne. Nous le constaterons en son lieu.
15 juillet 1793, nouvelle séance du conseil municipal. A Saint-Pol, les pères Conscrits n'aimaient guère à chômer. Le citoyen Goëz, taisant les fonctions de maire, déclare au conseil qu'un dragon, venant de Morlaix, avait remis au bureau municipal un paquet contenant la nouvelle Constitution que la Convention nationale venait de voter. A cette annonce, la joie la plus vive s'est manifestée dans le conseil, et au milieu des cris de : « Vive la République, vive la Convention, vive la Constitution, » il a été unanimement arrêté que toutes les cloches seraient sonnées à toute volée et que trois coups de canon seraient tirés en guise de réjouissance.
Après lecture des pièces qui accompagnaient l'acte constitutionnel, tous les membres du conseil se sont levés simultanément et ont déclaré l'accepter.
« Un membre rappelle les mesures prises par le Département, tendant à détruire l'unité et l'indivisibilité de la République et demande que ceux qui auraient adhéré à l'arrêté du Département eussent à se rétracter ou à déclarer persister dans l'adhésion qu'ils y avaient donnée. Cette proposition ayant été adoptée, les citoyens Le Bihan, Peychaud, Guillaume, Charbonneau, Guével, Menez, Bolloré et Deniel, procureur de la Commune, interpellés de s'expliquer, ont déclaré avoir été induits en erreur et se rétracter formellement ».
« Un membre a cru que c'était le moment de rappeler au conseil le souvenir du contingent, fourni pour la force départementale envoyée à Paris et de lui proposer de rappeler ce contingent.
Le conseil arrête, à l'unanimité, que ce contingent sera rappelé.
Sur la demande de plusieurs membres, le conseil arrête également qu'il sera écrit au Département pour lui demander s'il s'est retracté de ses arrêtés relatifs aux événements des 31 mai, 1er et 2 juin et de lui notifier, s'il ne le faisait point, que le conseil, vu la loi du 26 juin, ne pouvait ni ne devait plus le connaître. Cette question et cette notification seront faites au Département ».
A la suite de sa signature, le citoyen Deniel ajoute :
« Pour entière approbation de la délibération, en remarquant que je ne suis pas dans le cas de me rétracter, n'ayant, à la délibération du 29 juin dernier, été annoté ni pour le oui, ni pour le non. Je respecte la Convention nationale et ses lois ; je me soumettrai aveuglément aux vœux des sages représentants qui, sans doute, ne tendent qu'au bien général et par conséquent au mien particulier ». Deniel, procureur de la Commune [Note : Reg. 24. Fol. 135-136].
Il est difficile de se montrer plus vil et plus rampant.
Du reste une bassesse
ne coûtait guère aux braves municipaux de Saint-Pol.
Le 22 juillet, la
municipalité mande au citoyen président de la Convention nationale que « le
canton de Saint-Pol-de-Léon, district de Morlaix, département du Finistère,
solennellement convoqué et réuni en Assemblée primaire le jeudi 18 juillet 1793,
a unaniment et individuellement accepté l'acte constitutionnel, proposé à la
sanction du peuple français ».
« La garnison, le 106ème régiment, a reçu avec enthousiasme et aux cris de Vive la République la notification qui lui a été faite de cet heureux résultat du vœu légal du canton ».
« Sans doute, on ne pardonnera pas facilement aux officiers municipaux d'avoir donné les premiers l'exemple, dans un département égaré, de l'obéissance aux lois et d'un attachement inviolable aux principes !.
Ils ont été déjà inquiétés par de perfides dénonciations, et ils seront peut-être dans l'oppression, quand le président de la Convention nationale recevra leur dépêche ; mais ils ont juré l'unité et l'indivisibilité de la République française et rien ne leur fera violer leurs serments ».
Attendons encore quelque temps, et ces vils flatteurs n'auront pas assez d'encens à offrir à Bonaparte, puis à Louis XVIII.
Les citoyens Peychaud et Bourguays, notables, acceptent les fonctions d'officiers municipaux le 29 juillet. Le 4 août les citoyens Miorcec et Péron, nommés successivement pour remplir les fonctions de maire, refusent. Le citoyen Trobert accepte ces fonctions [Note : Reg. 24. Fol. 137].
Les citoyens Jean-Louis Roulloin et Yves Le Saout avaient été commandés pour faire partie du détachement qui devaient aller à Morlaix assister aux fêtes de la Fédération. Ils refusèrent nettement et furent décrétés d'arrestation le 10 août 1793. Ils se dérobèrent aux poursuites, et on ne put les saisir chez eux. Chaque jour, néanmoins, on visita leurs maisons et celles qui étaient soupçonnées de les cacher.
Le conseil ordonna également de rechercher le nommé Le Gall, ecclésiastique, évadé, dans la nuit, de la maison d'arrêt, cy-devant servant de maison de retraite.
« Un membre du conseil dénonça, le même jour, les filles Bléas, comme coupables de tenir de petites écoles, sans avoir rempli les formalités prescrites par la loi du 26 décembre 1790. Elles furent mandées sur le champ à la barre du conseil municipal ; mais elles déclarèrent qu'elles ne se soumettraient point à ces prescriptions. Défense leur fut alors faite de continuer leurs écoles, à peine d'être punies conformément à la loi ».
Le conseil municipal donna dans la même séance acte du dépôt qu'avait fait le citoyen maire de Roscoff de l'arrêté du Directoire du district de Morlaix concernant les Anglais. Il commanda de l'inscrire sur les registres de cette ville avec les signalements des individus désignés dans la note remise sur le bureau, et d'en délivrer une expédition, pour y avoir recours au besoin, tant au commandant du 106ème régiment qu'à celui de la garde nationale.
Ces Anglais, tant hommes que femmes, avaient été arrêtés à Roscoff et étaient au nombre de dix. C'était une même famille du nom de Maculoch, qui résidait à Roscoff depuis quelque temps [Note : Reg. 23].
Le citoyen Dreppe avait été suspendu de ses fonctions d'officier municipal, à la suite de l'insurrection de mars 1793. Le conseil général de Saint-Pol, pour différents motifs, demanda, le 18 août, qu'il fût remplacé à l'école d'hydrographie qu'il dirigeait par le citoyen Trobert. Il fît appel à l'humanité des conseillers et il fut provisoirement maintenu à son poste. Le conseil général sollicita également la destitution du citoyen Prud'homme de Keraugon, receveur des douanes nationales, et suspendu des fonctions de maire depuis les journées de mars 1793. On lui reprochait de n'avoir pas accepté la Constitution et de s'être présenté à l'Assemblée primaire, sans y voter.
Le même jour, le citoyen Floch, notaire, s'était vu refuser un certificat de civisme, qui lui fut pourtant délivré le 21 août, malgré la protestation du citoyen Villeneufve, officier municipal [Note : Reg. 24. Fol. 147-154].
(abbé J. Tanguy).
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