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SAINT-KARÉ ou SAINT-CARRÉ

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SAINT KARÉ.

Le nom de saint Karé existe à Plestin dans le nom de lieu Lancarré ; en Lanvellec, d'autre part, à une douzaine de kilomètres sud de la Lieue-de-Grève, il existe une chapelle N.-D. de Saint-Carré, et un hameau du nom de Saint-Carré.

Plestin.

A Plestin, le nom seul de Lancarré existe, c'est un groupe de maisons situé au bord de la Lieue-de-Grève. Il n'y avait, antérieurement au nouveau cantique de saint Efflam, aucun souvenir de ce saint. Le nom de lieu fort significatif de Lan-Karé seul subsistait. En ce point il y avait avant la Révolution une chapelle dédiée à Notre-Dame, et connue sous le nom de N.-D. de Lancarré, mais qui n'était pas sous le vocable de saint Carré. L'abbé Durand [Note : Qui fut longtemps recteur de Trédrez, mort en 1920, connaissait à merveille toute l'hagiographie de la contrée et a écrit bon nombre de cantiques pour les saints des environs] m'a dit que cette chapelle était dédiée en outre à la Sainte Trinité. Il est probable qu'il tenait ce renseignement de la tradition. Cette chapelle se trouvait au petit hameau qui porte encore le nom de Lancarré, sur le côté gauche de la route départementale allant vers Saint-Michel ; une partie de l'ancien presbytère a subsisté, on remarque encore les fenêtres à meneaux dans une maison appartenant à M. Philips Robert ; l'église était en bordure de la route, il n'en subsiste rien [Note : Si ce n'est l'ancien mur du cimetière, en bel appareil de granit qui borde la route], mais l'on trouve encore parfois des ossements humains en creusant autour de son emplacement. On en a découvert un certain nombre en 1910, alors que l'on faisait des travaux pour établir un caniveau.

Nous n'avons pas de documents anciens concernant cette chapelle. Un testament de 1606, conservé aux Archives Départementales des C.-d.-N. (fabrique de Plestin) donne « aux chapelles de Notre-Dame de Lantcarré et de Madame Sainte Honoré par moitié dix soulz ». Les registres de baptêmes, mariages et sépultures de Plestin, année 1701, mentionnent qu'un certain Le Bouhæc fut inhumé cette année dans la chapelle « Notre-Dame de Lancarré ». La Carte de Cassini (1774) porte une chapelle du nom de Lancaré. Les Archives départementales des C.-d.-N. ont gardé le dossier de la vente de la chapelle et des dépendances de Lan Carré :

La chapelle de Lan Carré avec une petite maison et issue qui se prolonge vers Saint-Efflame, la nef ayant de longueur 50 pieds, largeur intérieur 16 pieds, hauteur des murs 10 pieds, à chaque cotté une chapelle latérale, clocher sans cloche... un cimetière 2 cordes trois quarts……. tous les objets cy dessus describts... donnent du levant sur la grève de Saint-Michel, du midi sur le chemin conduisant de Saint-Efflame à la montagne de Roc'h helles [Note : Le tout fut adjugé 6.000 fr. à Chauvin. 23 Messidor an VI, ibid.].

Cet état descriptif ne fait malheureusement aucune allusion au mobilier. Il eut été intéressant de connaître si la chapelle contenait une statue de saint Carré [Note : Cf. l'état descriptif de la chapelle Saint-Haran qui mentionne les statues de S. Garand et de S. Everzin].

L'ancien cadastre de Plestin (1814) mentionne la chapelle et en donne le plan, Habasque la nomme dans ses Notions sur les C.-d.-N., t. I (1832), p. 19, et Souvestre aussi dans les Derniers Bretons, t. I, p. 72 [Note : Edit. in-12 1858. La première édition est de 1836, et je crois bien que Souvestre a copié ici Habasqu]. Mais, comme on l'a vu, il s'agit toujours de la chapelle de Lancarré ; la chapelle n'est jamais désignée sous le nom de Saint-Carré. Il ne subsiste aucun souvenir du saint attaché à la chapelle. Et M. Anatole Le Braz, dans ses Saints Bretons d'après le Tradition Populaire [Note : XIII, (1897), p. 89], raconte que c'est vainement qu'il a interrogé une vieille pauvresse de l'endroit pour obtenir quelques renseignements sur saint Carré. Saint Carré est inconnu, la pauvresse ne lui a parlé que de N.-D. de Lankaré.

Tout ce que je sais, me dit-elle, c'est qu'autrefois Notre-Dame de Lan-Karé était vénérée à l'égal de la Notre-Dame de Kernitron et celle. du Coz-Yodet. Les trois vierges étaient du reste trois cousines. La veille de leur pardon, elles se faisaient visite. Le soir tombé, la nuit déjà close, on voyait dans le ciel s'approcher leurs processions, pareilles à de blancs nuages ; et le son des cloches des trois chapelles s'entendait distinctement, par-dessus le bruit de la mer, malgré les distances qui les séparent. Le pardon de Lan-Karé avait lieu à la mi-août, dans le beau temps, la saison claire. On y venait en foule, de tout le pays. La Lieue-de-Crève, si blanche, était ce jour-là, toute noire de pélerins.

La chapelle avec la pointe de terre sur laquelle elle était bâtie, fut vendue, sous la grande Révolution, à un nommé Ch..., qui s'était fait une fortune scandaleuse en achetant des biens nationaux. C'était un bâtard et un mécréant. Il fit enlever les autels et brûler les statues des saints. Le sanctuaire fut transformé en une crêche à moutons. Mais comme les dévôts continuaient à y venir en oraison, le propriétaire, furieux, fit démolir la chapelle. Ces pierres sont, tout ce qu'il en subsiste. Mais la veille du 15 août, on entend, à la brume, des tintements plaintifs de cloche, quoiqu'il n'y ait plus ni cloche, ni clocher. Moi qui vous parle, je les ai plus d'une fois ouïs.

On a cessé de fréquenter l'oratoire en ruines, mais on se rend toujours en pèlerinage à la fontaine. On y vient pour les gens languissants, pour les enfants malingres et pour les cochons malades. Ceux-ci, on les asperge avec l'eau de la source ; on emporte aussi des bouteilles de cette eau, et jusqu'à ce que les animaux soient guéris, on en mêle chaque jour, quelques gouttes à leur nourriture.

Cette fontaine se trouve de l'autre côté de la route en suivant un petit chemin qui passe à gué sur la rivière du Launay ; elle porte le nom de Feunteun Sant Pléz, et n'a rien de commun avec Saint-Carré, si bien, on le voit, qu'il n'y a aucun souvenir d'aucune sorte qui rappelle ce saint autre que le nom significatif de Lan-Karé, et fait encore plus significatif, la présence d'une chapelle en ce lieu, bien que la chapelle soit dédiée à la Vierge, et que son pardon, 15 août, tombe à la date d'une fête de la Vierge.

Lanvellec.

La situation est absolument identique en Lanvellec ; le saint y est totalement inconnu. Il y a cette seule différence que le nom de lieu est là-bas Sant Karé tandis qu'à Plestin c'est Lan-Karé. Le village porte le nom de Saint-Carré, et la vierge s'appelle Itron Varia Sant Karé ; Sant Karé ; n'est qu'un nom de lieu, il n'y a aucun souvenir du saint.

La chapelle est dédiée, à Itron Varia Drué, N.-D. de Pitié. Le pardon qui coïncide avec les fêtes de la Pentecôte attire un monde considérable [Note : M. La BRAZ, ibid., p. 115 et seq., a reproduit en partie un cantique qui est chanté au pardon ; p. 121, il mentionne un autre cantique composé par le chanoine Le Pon. C'est celui que l'on vend actuellement, l'imprimatur est du 30 mai 1884. Il est reproduit dans le petit livre de M. l'abbé Le Guillou. Ces cantiques n'ont trait qu'au culte de N.-D. de Pitié. M. L'ABBÉ MILLON, Les Grandes Madones Bretonnes, Rennes, 1922, in-8°, donne pp. 191 et sq. une notice très intéressante sur N.-D. de Saint-Carré en Lanvellec, et cite une partie du cantique de l'abbé Le Pen. — Luzel avait composé une ballade sur ce pèlerinage. Elle est dans Bepred Breizad, Morlaix, 1865, in-8°, p. 101]. M. l'abbé Le Guillou, qui fut longtemps recteur de Lanvellec, et avait étudié d'une façon remarquable l'histoire de cette paroisse, a publié pour être vendu aux jours de pardon, un petit livre intitulé Lanvellec, Pèlerinage de N.-D. de Pitié, Saint-Brieuc, 1903 (Imprimerie St-Guillaume).

L'on trouvera dans ce petit livre une histoire très documentée du culte de N.-D. de Saint-Carré. Or il ressort de tous les textes que cite M. l'abbé Le Guillon que Saint-Carré est le nom du hameau, de la frérie, mais que la chapelle était sous le vocable de la Vierge. La chapelle ancienne, tombée en ruines pendant la Ligue, était déjà dédiée à la Vierge. Par acte du 22 mars 1642, Jean le Roux donnait « à Madame Marie de Sainct Quaré une rente annuelle, perpétuelle et non franchissable sur Liors Couldri ». Messire François Nicol inscrit le 19 mars 1686 dans le registre paroissial que « la chapelle de Notre-Dame de Pitié située en sa paroisse, frérie de Saint-Carré, dans le fonds du seigneur de Perrien et le fief de Bégard, est négligée et toute ruinée ». Il s'en suit donc que cette chapelle ruinée pendant la Ligue était déjà dédiée à la Vierge et n'était plus sous le vocable de St-Carré, lequel complètement oublié, n'avait laissé aucun autre souvenir que son seul nom qui désignait le hameau.

Entre 1686 et 1695, date on la chapelle fut reconstruite, un homme qui était né à Saint-Karé en 1636, Jan Bizien, eut trois apparitions successives de la Sainte Vierge :

Chaque fois la céleste visiteuse révéla à son dévot serviteur que l'emplacement de l'ancien sanctuaire cachait une statue. Craignant d’être le jouet d'une illusion, l'humble villageois se présenta timide et tremblant au presbytère de Lanvellec. Priez et cherchez, lui dit, le recteur, si la révélation vient du ciel, vous trouverez. Le pieux paysan suivit fidèlement ce conseil. Après avoir beaucoup prié, il alla discrètement, à la tombée de la nuit, creuser le sol à l'endroit désigné et découvrit à une certaine profondeur, une statuelle en chêne de sa mère tant aimée, en un parfait état de conservation.

Cette découverte eut un retentissement considérable :

Les miracles se multiplièrent comme à l'envi avec l'affluence de jour en jour croissante des pèlerins. Le clergé garda d'abord une attitude très réservée, n'accueillant qu'avec une défiance extrême le bruit des faits extraordinaires dont Saint-Karé était le théatre. Cependant, en présence des guérisons soudaines qui se produisaient ...... vénérable et noble messire Francois Nicol, sieur de Saint-David, et recteur de Lanvellec, se décida à sortir de sa prudente réserve.

Et voici comment ce digne recteur a relaté les faits dans son cahier de paroisse :

Les paroissiens de Lanvellec et autres paroisses circonvoisines ayant renouvelé leur dévotion à Notre-Dame de Pitié... les guérisons très remarquables et très évidentes qui s'y font journellement m'ont porté à demander à Monsieur Joseph Corentin, de Plivern de Kermeno, grand vicaire et official de Dol [Note : Lanvellec était une enclave de l'évêché de Dol. — Sur la découverte des statues miraculeuses, nous ne pouvons mieux faire que renvoyer le lecteur à l'étude très intéressante de M. l'abbé LEMASSON : Les origines de N.-D de Nazareth près Plancoët, Mém. Société Emulat. Des C.-d.-N., 1914, et Saint-Brieuc, in-8°, 1914. La statue de N.-D. de Nazaret fut trouvée en 1621, perdue, puis retrouvée en 1644. On aura là tous les documents originaux, toutes les dépositions des témoins. — Une, statue de N.-D. de Pitié fut découverte en 1758 par une petite pastoure infirme dans un buisson, à l'endroit où l'on construisit la chapelle de N.-D. de Kernivinen en Perros-Guirec, A. CHANGEUR, Perros-Guirec et S. Quay (Collection Parfums de Bretagne), Paris (1910), in-12°, p. 25], aux parties inférieures de Bretagne, demeurant à Lannion, la permission de rebâtir la chapelle et d'y faire dire la messe.

La double faveur fut accordée, la chapelle neuve, chapel nevez fut consacrée le 11 décembre 1695 [Note : Tout ce qui précède est emprunté au petit livre de l'abbé Le Guillou]. Dans tout ceci il n'est jamais question de saint Karé ; le saint qui était déjà inconnu antérieurement à l'invention miraculeuse de la statue, demeura plus encore inconnu.

La fontaine qui se trouve auprès de la chapelle est, elle aussi, sous l'invocation de N.-D. de Saint-Carré ; comme il a été dit, le nom de lieu Saint-Carré seul subsistait. C'est seulement en 1897, que l'abbé Joncour, en composant le nouveau cantique de saint Efflam, En Enor da Zent Koz Plistin, eut l'idée de sortir ce saint de l'oubli. Il en fit un compagnon de saint Efflam, et l'abbé Le Guillou, dans sa petite brochure, a suivi la thèse de l'abbé Joncour.

Saint-Karé et N.-D. de Pitié.

Il est un fait excessivement curieux, c'est que la chapelle de Lan-Karé et celle de Saint-Carré sont sous l'invocation de N.-D. de Pitié. Le cantique En Enor da Zend Koz Plistin a consacré ce fait en indiquant que saint Carré abordant au Roc’h ar Laz avec saint Efflam apportait avec lui l'image de N.-D. de Pitié :

Ha gant-he skeudeu Maria-Drue.

N.-D. de Pitié est la Pieta, tenant dans ses bras le corps du Sauveur après la descente de Croix. Son culte est excessivement répandu à travers toute la Haute et Basse-Bretagne. La plupart des églises et chapelles bretonnes ont une statue de N.-D. de Pitié souvent sur le porche ; beaucoup de calvaires sculptés en ont aussi à l'envers du Christ ou au pied du fut. Il est regrettable que nous n'ayons pas une étude sur le culte de la Vierge en Bretagne (Cf. DUINE, Bréviaires et Missels, appendice, I, p. 208). Cette étude faciliterait beaucoup les travaux des hagiographes celtiques. En particulier pour N.-D. de Pitié, nous n'avons aucun relevé ni aucune note qui permette de connaître l'histoire de cette dévotion.

Ce culte existe en Haute-Bretagne et l'on a signalé à la chapelle Sainte-Eutrope, entre Gaël et Concorret (M.), « une vieille croix sur le fut de laquelle est représentée une Madone assise, offrant à la compassion des pèlerins le corps de Jésus expiré ». [Note : RONAN DE KERMENÉ, in Buhez Breiz, 1919, p. 215]. Il existe aussi en Mur (C.-d.-N.) une chapelle à N.-D. de Pitié (C. E. M.). Mais c'est surtout en Basse-Bretagne que l'on rencontre les chapelles sous cette invocation. Dans le Morbihan, une chapelle en Kervignac, est sous le nom de N.-D. de Pitié [Note : ABBÉ GUILLOTIN DE CORSON, Pardons et Pèlerinages du diocèse de Vannes, Rennes, 1898, in -8°, p. 103], la chapelle de N.-D. de Larmor en Plœmeur est dédiée à N.-D. de Pitié qui y a une statue (Ibid., p. 176) ; il existe encore des chapelles à N.-D. de Pitié en Guidel (C. E.-M.), en Sainte-Hélène (ROSENZW). Dans le Finistère, on en trouve plus encore : en Plouvorn [Note : KERDANET, Vies des Saints d'Albert Le Grand, p. 503 (opuscule du Père Cyrille le Pennec)], en Plouguin (Ibid., p. 514, et Soc. Arch. Fin., 1907, p. 208), en Milizac [Note : Soc. Arch. Fin., 1907, p. 201], en Poullaouen (Ibid., 1909, p. 318), en Quimper (Ibid., 1903, p. 137), en Le Faou (Ibid., 1910, p. 175). La. chapelle N.-D. des Trois-Fontaines en Gouezec, est sous l'invocation de N.-D. de Pitié (Ibid., 1910, p. 297), l'église de Camoret est dédiée à la même Vierge (Ibid., 1910, p. 173). En Langolen, la chapelle Saint-Huel est dédiée maintenant à N.-D. de Pitié, dont le culte a probablement été substitué au vieux culte de saint Huel (Ibid., 1903, p. 152).

Le département des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) offre lui aussi de nombreuses chapelles à N.-D. de Pitié. Et cependant, l'ancien archidiaconé de Pougastel, dont relève la région qui nous intéresse, paraît s'être attaché plus particulièrement à cette dévotion. N.-D. de Pitié a sa statue à Lannion « contre un pilier de l'église. Les enfants aiment à venir prier devant cette statue et à baiser les pieds du Sauveur ; les petites filles déposent dans la main de la Vierge une épingle comme modeste offrande de leur piété naissante ». [Note : ABBÉ FRANCE, Kerduel ou les Missionnaires bretons du XVIIème s., Saint-Brieuc, 1890, in-12°, p. 203. L'Abbé France suppose que ces cultes et les confréries y rattachées auraient été organisés par les Missionnaires du XVIIème s. Ce n'est- pas le cas pour N.D. de Saint Carré, qui était déjà dédiée à N.-D. de Pitié avant la ligue]. La chapelle de Kernivinen en Perros-Guirec est dédiée à N.-D. de Pitié ; en 1718, une bergère trouva dans un buisson, à l'emplacement de la chapelle, une statue de la Vierge de Douleurs ; les paroisses voisines firent alors ériger une chapelle (CHANGEUR, op. et loc. cit.). La chapelle de Saint-Jacut en Plestin, dédiée conjointement à N.-D. de Pitié contient une superbe statue de la Pieta ; la chapelle Saint-Paul en Guimaëc, possède « une Piété assez difforme et barbare dans une niche aux volets arrachés » [Note : L. LE GUENNEC, Excursion arch. dans la commune de Guimaëc (Bullet. Soc. Arch. du Finist.), p. 29 du tirage à part, Quimper, 1918, in 8°]. L'église du Mur, à Morlaix, avait un autel à N.-D. de Pitié ; à Ploujean, la chapelle de Trofeunteuniou était dédiée à N.-D. de Pitié [Note : L. LE GUENNEC, Notes sur la paroisse de Ploujean, Morlaix, 1908, in-4°, p. 33 et 60]. L'église de Plougonven avait une chapelle dédiée à N.-D. de Pitié, cette chapelle est déjà signalée dans un acte du 6 février 1492 [Note : ID. Notice sur la commune de Plaugonven, in Mouez ar Vro du 27 mars 20, vide et. le n° du 9 oct. 20]. La même vierge a des chapelles en Cavan, en Lanmerin, en Trébrivan, en Glomel, en Boqueho, en La Roche-Derrien (C.-d.-N.) [Note : GAULTIER DU MOTTAY, Géogr. dép. des C.-d.-N., pp. 698, 512, 553, 603, 129]. Il suffit de parcourir la région de Plestin pour remarquer des pieta au-dessus du porche des églises, sur les calvaires. Or, il est impossible d'admettre que saint Karé, qui est un saint, puisqu'il a un Lan-Karé, ait introduit ce culte en Bretagne. On sait d'ailleurs que le culte de la Vierge n'apparaît jamais dans la plus ancienne hagiographie bretonne [Note : DUINE, op. et loc. cit., et S. Armel (Ss. de Brocéliande), in Ann. De Bret., t. XX, p. 46 du tirage à part, Rennes, 1905, in-8°], que le nom de la. Vierge n'intervient dans aucun nom de lieu ancien ( LOTH, Ns., p. 5) ; on connaît la plupart des dates auxquelles les diverses fêtes de la Vierge ont été décidées par l'autorité religieuse [Note : DUINE. Questions d'Hagiogr. et Vie de S. Samson, Paris, 1914, in-8°, p. 9]. En outre, l'histoire du culte de N.-D. de Pitié nous est relativement connu. La Missa Nostræ Dominæ Pietatis fut mise en circulation dans l'église par Sixte IV (1471-1484). Le Calendrier du Missel de Poitiers de 1498 marque au 22 mars « le vendredi avant le dimanche des Rameaux on fait l'office de la Bienheureuse Marie de Pitié » [Note : J'emprunte ces renseignements à M. l'abbé DUINE, Brév. et Missels, n° 12, p. 39, n. 1, cf. n° 26, p. 75, et n° 67, p. 184] ; ce culte s'était propagé très rapidement en Bretagne, le Missel de Rennes de 1523 reproduit cet office ; nous avons vu qu'en 1492 une chapelle était déjà dédiée à N.-D. de Pitié dans l'église de Plougonven ; et pour ce qui concerne la chapelle Saint-Jacut de Plestin, dont on acheva la reconstruction en 1496, Perceval de Lezourmel fondait en 1499 en cette chapelle, une messe hebdomadaire « à jour de samedy, en l'honneur de Dieu, Notre-Dame et Monsieur saint Jacut, mais spécialement de Notre-Dame » [Note : Notes Ms. de l'abbé Joncourt, ancien recteur de Plestin, sur les chapelles et seigneuries de Plestin ; la partie qui intéresse S. Jacut a été publiée par l'ABBÉ LEMASSON, S. Jacut, son histoire et son culte, Saint- Brieuc, 1912, in-8°, p. 53] et il s'agit là de Notre-Dame de Pitié ; la jolie statue qui représente la Vierge de douleur est en effet de l'époque de la reconstruction, puisqu'une niche en enfeu avait été faite spécialement pour un groupe de ce genre.

Il est bien probable que c'est de cette époque ou des époques voisines que date l'immixtion du culte de N.-D. de Pitié dans nos deux chapelles Saint-Karé, culte qui a complètement chassé le culte du vieux saint local. Il est plus difficile d'expliquer pourquoi le même culte est venu s'implanter dans chacune des deux chapelles ; et à ce sujet je ne crois pas possible d'admettre que ce soit la conséquence d'une spécialité du culte du vieux saint local ; peut-être Lancarré a-t-il vu le culte de N.-D. de Pitié après l’invention de la statue à Saint-Carré, et sous l'influence du renom de la N.-D. de Saint-Carré, il se peut [Note : Répétons qu'il est regrettable qu'on n'ait pas publié une étude sur le culte marial en Bretagne. Il est plus que certain que le culte de N.-D. a « déniché » bon nombre de vieux saints nationaux. On a d'abord adjoint le culte de N.-D., ce culte a pris une importance de plus en plus grande et en bien des points a dû supprimer l'ancien saint et l'ancien nom de la chapelle. A la chapelle Saint-Efflam en Pédernec (C.-d.-N.), il y a une statue de N.-D. de Bonne Nouvelle, probablement pour « dénicher » S. Efflam, saint des Bonnes Nouvelles. Nous avons vu plus haut S. Huel, déniché par N.-D. de Pitié à Langolen. En ce qui concerne les paroisses, l'on peut dire que plus d'une moitié de nos églises paroissiales bretonnes sont sous le patronage de N.-D. ; on a vu N.-D. de Cavan, il existe de même N.-D. de Plufur, N.-D. de Plouarel, etc. ; or la substitution de N.-D. au culte du vieux saint éponyme est souvent très ancienne ; c'est ainsi qu'à Saint-Jouan des Guérets, I et. V., le culte de N.-D. de S. Jouan existait déjà en 1400, et a depuis complètement fait oublier S. Jouan. (ABBÉ MILLON, Les Grandes Madones bretonnes, pp. 93 et sq)].

La Trinité et Saint-Carré.

La chapelle de Lancarré en Plestin était dédiée conjointement à Notre-Dame et à la Sainte Trinité. Le culte de la Sainte Trinité est très répandu en Bretagne. Nombreuses sont les chapelles élevées sous ce vocable [Note : ROSENZW. cite 14 paroisses, chapelles ou hameaux La Trinité dans le Morbihan. Dans le F., je relève 8 chapelles, en Coray (Soc. Arch. Fin., 1903, p. 323), en Argol (1910, p. 172), en Pleyben (p. 180), en Plouzané (C. E.-M.) ; la chapelle de la Trinité au village de Saint-Drézouarn, en Kergloff (Soc. Arch. Fin., 1909, p. 316) de la Trinité ou de Saint-Gonarc’h en châteauneur (p. 322), de la Trinité-Lansignac, en Plouvénez-du-Faou (C. E.-M.), sont dues à des substitutions, le double nom l'indique. — Dans les C.-d.-N., chapelles en Plésidy, Ploubazlanec, Plouha, Canihuel, Plounérin, Bégard, Andel, Le Vieux-Marché, Tressignaux, Maël-Carhaix, hameaux en Saint-Michel-de-Plélan, Gomménech, Pléhédel ; l'église de Trébeurden dédiée à la Trinité, et la chapelle de la Trinité ou de Saint-Jorand en Plouec sont des substitutions (C. E.-M., et GAULTIER DU MOTTAY, Géogr. dép. des C.-d.-N.). — D'après le FURETEUR BRETON, IX, 1914, p. 97, à Plozével, dans la Cornouaille, la Trinité serait la patronne des tailleurs ; ceci me semble erronné, car en Bretagne les corps de métiers n'ont pas de saints patrons. — Sur ce culte v. une note curieuse de KERDANET dans sa réédition des Vies des Saints d'Albert Le Grand, p. 617. — On le voit, les Bretons ont élevé beaucoup de chapelles à la Trinité, les autres peuples ne l'ont pas fait ; ils ont de même beaucoup de chapelles sous le vocable du Christ (Ecce Homo), ils ont des chapelles au Saint-Esprit (en Léhon, en Plédéliac (C.-d.-N.) (C. E.-M.), à Lesneven (F.) (Soc. Arch. Fin., 1905, p. 184), aux Saints-Anges, en Saint-Thélo (C.-d.-N.), à Landerneau (F.) (C. E.-M.) ; ils ont élevé des chapelles sous le vocable du Paradis, du Purgatoire, de la Miséricorde, du Trépas, etc., etc..] et dans beaucoup d'églises l'on peut voir des statues représentant à la fois Dieu le Père, assis, majestueux avec sa barbe blanche et sa tête couronnée, portant sur ses genoux son Fils crucifié, tandis que le Saint-Esprit, sous la forme d'une colombe, vole sur la tête de Dieu le Père.

On n'a pas encore étudié l'histoire de ce culte en Bretagne ; la dévotion à la Sainte-Trinité semble être demeurée longtemps privée. C'est seulement le pape Jean XXII (1310-1334) qui étendit la fête de la Trinité à l'Eglise universelle, et la fixa au premier dimanche après la Pentecôte [Note : J'emprunte encore ce renseignement à M. l'ABBÉ DUINE, Brév. et Missels, n° 5, p. 31. — Il y a lieu de remarquer que les chartes anciennes mentionnent des églises sous ce vocable en 1163 et 1170 (Anc. Evéch. de Bret., IV, p. 278, VI, p. 135). Par contre, ce culte n'a fourni aucun nom de lieu en Plou-, Lan-, Lok-, taudis que le culte de la Sainte-Croix a fourni un Plougras et des Langroas (J. LOTH, Ns., 73 et 106), et le culte du Christ de nombreux Lok-Christ. Le culte de la Trinité s'est donc établi très tard en Bretagne. En Galles, il existe un Llandrindod (Rev. Celt., XXXV, 1914, p. 114) ; mais l'on a continué assez tard à constituer des Llan-, en Galles. — La messe de la Sainte-Trinité est mentionnée dans la Vie de S. Gonéry (DUINE, Memento, I, n° 69, p. 89) et cette vie semble bien du milieu du XIVème s. — Sur le culte le la Trinité, v. DIDRON, Iconogr. chrétienne, Histoire de Dieu, Paris, 1843, in-4°, pp. 552 et sq.]. Ce n'est donc que postérieurement au milieu du XIVème s., que le culte de la Sainte-Trinité a été adjoint au culte de N.-D. dans la chapelle de Lancarré ; le petit saint local ne pouvait résister devant deux cultes qui ont eu un tel succès en Bretagne ; force lui était d'abandonner la place [Note : Cet exemple me semble très curieux de la décadence de nos saints nationaux. L'on verra plus loin au chapitre de S. Tuder, un saint breton « déniché », par S. Théodore, antérieurement à 1620 ; pour S. Tuder comme pour S. Carré, la substitution est antérieure au vaste mouvement contre nos saints locaux ; pour S. Garan, au contraire, c'est bien une victime de ce vaste mouvement. — Les exemples d'une double substitution sont fréquents, il semble que l'on n'hésitait pas à changer le patron officiel d'une chapelle : en Châteauneuf-du-Faou (F.), la chapelle de la Sainte-Trinité, primitivement dédiée à S. Gonoarc'h, éponyme du village, a successivement été sous le vocable de S. Tudual et de S. André (Soc. Arch. Fin., 1909, p. 322)].

Le nom de saint Carré.

L'on prononce Karé, Sant Karé, Lan Karé. Le texte le plus ancien fourni par l'abbé Guillou, qui est de 1622, donne Sainct Quaré [Note : Texte relatif à la bénédiction de la croix de pierre qui est sur le placitre de la chapelle. — La graphie Qu = K, n'a aucune importance]. Le nom n'a donc pas varié depuis cette époque.

La charte de 1170, reproduite dans les Anciens Evêchés de Bretagne, VI, p. 133, et par laquelle le duc Conan confirme les possessions de l'Abbaye de Bégar, parle d'une Grangiam que dicitur Sanctus Caramus cum omnibus appendiciis ejus. Geslin de Bourgogne et A. de Barthelemy identifient cette possession avec Saint-Caro (sic) en Lanvellec, il faut lire Saint-Carré. L'identification est peut-être juste, mais la forme Caramus paraît ne pas pouvoir être utilisée. Cette charte ne nous est connue que par une copie de la Collection des Blancs Manteaux, vol. 73, t. 1, f° 120, et par des extraits concordants d'ailleurs sur l'orthographe de Caramus, publiés par Du Paz. Cette copie et ces extraits proviennent à leur tour d'une copie exécutée en 1304 ; les noms de lieux y sont si déformés qu'on n'ose les utiliser : Sanctus Esflanim en Pedernec = Sanctus Euflamm, Loeargal = Loeargat Louargat. En outre des déformations dues à une mauvaise lecture, il faut ajouter la déformation due à la latinisation de la finale, ce qui fait que la forme Caramus, loin d'être certaine ne peut être utilisée.

Il semble que Karé ne soit pas le même nom que Carroc, Carreuc, auquel M. Loth a consacré l'article suivant (Ns., p. 19) :

CARROC, CARREUC (saint) : Saint-Carreuc, trêve de Plédran (C.-d.-N) : Saint-Carreuc en Plémy (C.-d.-N.) ; capella Sancti Carrocy en Erquy (Anc. Ev. III, 82, an 1235).
CORNWALL : Saint-Carrock (Lyson's Mayn. Brit., III). Saint-Carroc en Cyrus, prieuré (Oliver, Mon., p. 8).

Ces formes sont absolument différentes de Karé. A la forme Carreuc de Haute-Bretagne doit correspondre une forme bretonne Carrec, qui existe, car il y a en Riec (F.), une chapelle Saint-Carrec [Note : C. E.-M. — Jamais à Carreuc ne pourrait correspondre une forme bretonne Carré : cf. LOTH, op. cit., Tréveneuc, p. 52, Plogoneuc, p. 26, Goezeuc, p. 47, Ideuc, p. 63, Lanneuc et Leveneuc, p. 78 ; Meleuc, p. 85, Mieux, ibid., Perreuc, p. 103, Rieux, p. 108, Sieu, p. 113, Teffredeuc, p. 116, Caradeuc, p. 129, Igneuc, p. 130 ; la forme euc est aussi une forme archaïque ; — Il existe un Kergarec en Saint-Jean-du-Doigt (F.) (C. E.-M.), ce qui prouve bien que la forme Carrec s'est conservée en Tréguier avec sa finale ec.]. Il n'y a donc aucune relation.

Le nom de famille Carré, bien que relativement fréquent en Bretagne [Note : Et surtout vers le Vannetais : Listes Electorales 1912 : Kervignac, Meslan, Pont-Scorff, Courin, le Faouët, Poullaouen. — Carré et Caré Arzano, reg. bat. mar. sep. 1716], paraît n'être d'aucun secours pour étudier le nom de notre saint. D'abord ce nom de famille semble être une importation de France, où ce nom est fort commun, ensuite ce nom de famille, s'il apparaît parfois dans la région de Plestin 3 ne semble pas avoir été porté par des familles du pays, mais par des familles fixées d'une façon temporaire dans le pays, enfin il paraît récent puisqu'il n'entre dans aucun nom de lieu.

Il faudrait savoir ce que représente la finale é. On ne peut admettre qu'elle représente une finale et, cette finale a subsisté dans tous les vieux noms où elle existait, les bas-Bretons et les haut-Bretons faisant entendre toujours le t final [Note : Une demoiselle Jeanne Carré fait des donations en 1584 à l'église de Locquirec (Arch. munic. de Locquirec). Carré. Trédrez, naiss., an VIII et an XI. Locquirec, 2 décès 1792, an XI. Saint-Michel, 2 décès 1843-53. Je n'utilise les noms de famille que pour l'onomastique, non pas pour en conclure à l'histoire du culte. Des saints que nous étudions, très peu ont fourni des noms de famille : Efflam, Gestin (à Plestin, parce que dans les autres régions c'est un simple nom d'homme). Les autres n'en ont pas fourni, et d'ailleurs n'étaient pas noms de baptême autrefois. Pour S. Carré, il faut remarquer que c'est probablement le nom de famille français Carré qui a déterminé la graphie Carré avec deux r, la graphie ayant été primitivement Quaré], et dans le cas de saint Carré, la finale et aurait été maintenue ferme sous l’influence du participe passé passif Karet, du verbe Karout = aimer. On avait là un nom dont les sens aurait empêché la forma d’évoluer. Inutile aussi de supposer une vieille forme à finale en at, ces finales ont subsisté [Note : Cf. ibid., Enogat, p. 38, Ergat, p. 39, Gouescat, p. 40, Guengat, p. 51].

Il existe un Langarais en Plumelec (M.) (ROSENZW), un Trégaray en Sixt (I-et-V.) (P. T. T.). Une charte française de 1291, nomme un Jehan de Seint Karaey, borgeois de Léhon, prés de Dinan (Anc. Ev. de Bret., IV, p. 379). Il semble fort délicat d'utiliser ces formes comme se rapportant au saint qui nous occupe.

L'on retrouve la finale é, ou ay, non loin de Plestin, dans les noms de Saint-Conné, en Lanvellec [Note : Ou Saint-Connay, cadastre et C. E.-M.] et Saint-Junay en Plounérin [Note : Ibid. Sur cette finale, v. et. J. LOTH, Ns. 149, s. y. Elvod. — A mentionner encore pour ces finales, un Menez Houarnay en Plougonver (C.-d.-N.), ce Houarnay pourrait être Houarnec ; Rugunay en Locquirez (F.) (C. E.-M.) peut être rapproché de Connay].

L'étude de ces deux noms montre que la finale é ne représente pas une ancienne finale et ou ec, mais l'ancienne finale . L'on peut donc supposer pour Carré une forme Caroé primitive, la finale étant devenu é, comme dans le nom de la paroisse Coroé devenue Coray [Note : J. LOTH, Chresto, p. 200 ; dans Coray, la graphie a gardé le souvenir de l'ancienne forme : les noms de paroisses qui s'écrivent souvent ont une ortographe traditionnelle. Les noms de petits hameaux ne peuvent avoir une ortographe traditionnelle. Les formes en , se retrouvent à la fois en ay et en o. C'est ainsi que S. Gourlay = Gourloé se retrouve sous la forme Urlo (J. LOTH, Ns., pp. 48, 125, 133). Cet exemple montre que cette double évolution s'est faite un peu partout, à travers tous les dialectes ; des Urlo existent à côté des Ourlay, en outre des ex. donnés par J. Loth, cf. Lezurlo en Peillac (M.) (ROSENZW. et C. E.-M.), Goasgourlay en Lampaul-Saint-Thég. (F.), Kergourio en Plussulien, Lezourlay en Locarn (C.-d.-N.). (C. E.-M.). Il est vrai que le nom de famille Gourlay très commun a pu influencer certaines graphies ; le nom de paroisse Corlay (C.-d.-N.) donné sous la forme Corlé dans des comptes de 1330 et sq. (LONGNON, Pouillés de Tours, p. 301 et seq.) doit être le même nom. Le même fait semble confirmer l'hypothèse de J. LOTH, Ns., p. 26, qui rapproche Langonné en Plabennec (F.), de Langonneau en Pédernec et de Trégonneau paroisse (C.-d.-N.) ; à 20 kil. à l'ouest de Langonneau, il existe en Lanvellec une chapelle de Saint-Connay (cadastre et C. E.-M.). De même, Saint-Gonlay, qui est, le nom d'une paroisse d'Ille-et-V., paraît l'éponyme d'un Tréhonleau en Persquen (M.) (G. E.-M. ; ROSENZW. donne Tréonleau ; nom qui est sans rapport. avec Conleau éponyme d'une presqu'île en Vannes et de Trégonlo en Saint-Jean-Brévelay (M.). ROSENZW). Aussi il se pourrait que le nom de Caré se retrouve dans le nom de famille Caro très fréquent, et dans les nombreux noms de lieux en Caro ; Ile Caro en Loctudy (mais Lanharo en Gast, F., C. E.-M.) ; ces noms peuvent être en partie empruntés à Caro = cerf, ou à un ancien Caroth ; la paroisse de Caro (M.) était anciennement Caroth plebs, 833, Charoth, 1131 (ROSENZW.) ; d'ailleurs, dans la paroisse limitrophe de Caro, en Sérent, il existe un Trécarot (ROSENZW.), cf. La Touche-Caro en S.-Nicolas-du-T., même canton que Caro (ID.) ; Porcaro, paroisse, Launay-Caro en Mohon (M.) (ID.), La Ville Caro en S.-Etienne-du-Gur (C.-d.-N.) (C. E.-M.) semblent des Caroé] ; les graphies Langarais, Trégaray et Saint Karaey viendraient à l'appui de cette hypothèse.

Quoiqu'il en soit de la finale, le nom semble dérivé de la racine Kar = aimer, que l'on retrouve dans Carantec, Caradec ; il n'y a pas lieu de tenter une étymologie par un nom latin Quadratus, nom qui a été porté, puisqu'il est celui d'un saint, une forme latine Quadratus n'aurait jamais donné un nom breton Karé [Note : Evêque, 21 août (USUARD)].

Conclusion.

Saint Karé a complètement disparu, il est complètement oublié et seul son nom a subsisté dans deux noms de lieu, un premier côtier, le second à l'intérieur. C'est ici le fait continuellement retrouvé des saints qui ont une chapelle sur le bord de la mer, au lieu de leur débarquement, et une autre plus haut à l'intérieur du pays.

En dehors de ce renseignement topographique, nuit complète. Le saint a été déniché par le culte de N.-D. et par celui de la Sainte-Trinité dans le cours du XVème s. ; mais le nom de lieu Lan Karé permet d'affirmer que ce saint est ancien [Note : Il existe en Ploudiry (F.), un lieu dit Rolocaré (C. E.-M.). L'on peut supposer Ros ou Roc’h Loc-Karé ; à défaut de toute forme ancienne je n'ai pas voulu en faire état].

(R. Largillière).

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