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HISTOIRE DE LA COLONIE DE SAINT-DOMINGUE

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L'île de Saint-Domingue, une des plus vastes des Antilles, fut découverte le 6 décembre 1492, par Christophe-Colomb, qui, lors de son premier voyage, débarqua à l'embouchure de la Grand'Rivière, près d'un promontoire qu'il appela le « Cap-Saint, », et où fut bâtie plus tard la ville du Cap.

Découverte de Saint-Domingue par Christophe Colomb

Cette île, de quatre cents lieues de tour et de cent quatre-vingt lieues de long, était alors très peuplée et divisée en cinq états indépendants gouvernés par des Caciques. L'un de ces états se nommait « Haïti », qui signifie en langue caraïbe « terre montagneuse ». Colomb changea ce nom en celui d' « Hispaniola », et jeta sur ce territoire les fondations d'une ville, qu'il appela « Santo-Domingo », d'où le nom de Saint-Domingue que devait porter plus tard l'île tout entière.

Plan de Saint-Domingue (XVIIIème siècle)

Ses habitants accueillirent avec bienveillance les Espagnols. Mais ceux-ci les traitèrent avec une telle cruauté qu'un siècle après il n'y avait plus sur ce territoire qu'un millier d'indigènes.

Le premier noyau de la population française fut formé à Saint-Domingue dans la seconde moitié du XVIIème siècle par les « Flibustiers » ou « Boucaniers », dits aussi « Frères de la Côte », dont les exploits maritimes tiennent du prodige. Vers 1662, ils quittèrent leur île de la Tortue, située à quelques milles au Nord-Est de Saint-Domingue, débarquèrent sur cette côte au nombre de douze, sous la conduite de Pierre le Long, au Cap-Saint, dit aussi « Haut-du-Cap », et y fondèrent une paroisse sous le patronage de Saint-Pierre ; paroisse qui, après la construction de la ville du Cap Français, à peu de distance au Nord, devint une trêve du Cap, sous le nom de « Saint-Pierre-du-Haut-du-Cap ».

Bientôt les Boucaniers, dont la plupart étaient Français, occupèrent toute la partie Nord de l'île entre Fort-Dauphin et Port-de-Paix, puis ils s'étendirent peu à peu à l'Ouest et au Sud. En 1664, tout le territoire qu'ils occupaient, d'une superficie de près de 80 000 kilomètres carrés, environ le septième du territoire de la France, fut déclaré colonie française ; et Colbert lui donna comme premier gouverneur un gentilhomme originaire de l'Anjou, Bertrand d'Ogeron de la Bouère, né à Rochefort-sur-Loire, qui attira dans cette colonie une quantité de ses compatriotes, entre autres le P. Marc, d'Angers, qui devint le chef spirituel de la colonie.

Grâce à l'intelligence et à l'énergie de M. d'Ogeron et de son neveu, M, de Pouancey, qui lui succéda en 1675, la colonie s'accrut et s'enrichit rapidement.

Elle eut successivement pour gouverneurs :

1644 à 1646, le chevalier de Fontenay ;

1659, M. des Champs, seigneur de Moussac ;

1660 à 1663, M. du Rossey, du Périgord ;

1663 à 1664, M. de la Place, neveu du précédent ;

1664 à 1675, M. d'Ogeron, de l'Anjou, mort à Paris en février 1676 ;

1675 à 1682, M. de Pouancey, neveu du précédent, mort en 1682 ;

1683, M. Franquenay ;

1683 à 1690, M. Tarin de Cussy, tué en 1690 à la bataille de Limonade ;

1690 à 1691, M. Dumas ;

1691 à 1700, M. Ducassé (M. de Boissy, intérimaire en 1697) ;

1700 à 1702, le marquis de Gallifet ;

1702 à 1705, M. Auger, mort en 1705 ;

1705 à 1707, M. de Charrette ;

1707 à 1710, le comte de Choiseul-Beaupré, mort en 1710 ;

1710 à 1712, M. de Valernod, mort en 1712 ;

1712 à 1713, M. de Charrette ;

1713 à 1716, le marquis de Blénac ;

1716 à 1718, M, le marquis de Châteaumorand ;

1718 à 1723, M. le marquis de Sorel (intendant : M. de Montholon) ;

1723 à 1731, M. le marquis de Rochalard ;

1732 à 1733, M. de Vienne ;

1733 à 1737, le marquis de Fayet ;

1737 à 1746, le marquis de Larnage, mort en 1746 ;

1746 à 1748, M. de Chastenay ;

1748 à 1751, le marquis de Conflans ;

1751 à 1753, M. le comte du Bois de la Motte ;

1753 à 1757, le marquis de Vaudreuil ;

1757 à 1761, M. Jean-Bart, petit-fils du célèbre marin ;

1761, M. de Bory ;

1762 à 1763, le vicomte de Belzunce, mort en 1763 ;

1763 à 1764, le chevalier Gohin de Montreuil ;

1764 à 1766, le comte d'Estaing ;

1766 à 1770, le prince de Rohan ;

1770 à 1771, le comte de Nolivos ;

1771, le vicomte de la Ferronnays ;

1772 à 1775, M. de Vallières ;

1775 à 1777, le marquis d'Ennery ;

1777, le comte d'Argout ;

1784 à 1786, le comte de la Luzerne ;

1786 à 1789, le marquis de Chilleau ;

1789 à 1790, le comte de Peynier ;

1790 à 1792, M. Rouxel de Blanchelande ;

1792 à 1793, le comte d'Esparbez.

A peine devenue colonie française, l'île de Saint-Domingue vit s'élever rapidement sur son territoire des villes et des paroisses, et, reçut une organisation civile et militaire. Des sénéchaussées y furent établies en août 1685 ; puis, en juin 1701, des Conseils Supérieurs furent fondés au Cap et à Port-au-Prince, et composés des plus notables colons de l'île. En 1787 le Conseil supérieur du Cap fut réuni à celui de Port-au-Prince sous le titre de Conseil supérieur de Saint-Domingue. Tous les membres de ces Conseils avaient droit à la noblesse au second degré.

Saint-Domingue : ville de San-Domingo

Saint-Domingue : ville de San-Domingo

A partir de 1690, il fut établi dans les principaux centres des compagnies d'archers, qui furent transformées peu après en régiments de milice et en deux compagnies de maréchaussée.

Peu de temps après sa fondation, la colonie, par suite de la guerre déclarée en 1689 entre la France et l'Espagne, eut cruellement à souffrir des invasions des Espagnols, qui occupaient toute la partie Est de l'île de Saint-Domingue, et qui s'emparèrent de toute la plaine de Limonade, du Cap et du Limbé, mettant tout à feu et à sang ; jusqu'à la paix signée à Ryswick, en 1697. Elle fut aussi éprouvée par de nombreux tremblements de terre.

En 1789, la Colonie française de Saint-Domingue, dont l'importance et la prospérité s'étaient encore accrues par suite de la guerre de l'Indépendance des États-Unis, comptait près de douze mille habitations et plus de deux milles sucreries. Environ quinze cents navires transportaient annuellement les denrées de cette île aux principaux ports de France, spécialement à Nantes, à la Rochelle, à Bordeaux, à Saint-Malo et au Havre. Son commerce s'élevait annuellement à une valeur de plus de 735 millions ; et la valeur des habitations était de plus d'un milliard et demi.

Plan de Saint-Domingue (1760

L'île appartenait pour un tiers environ aux Français et pour les deux autres tiers aux Espagnols.

La partie française avait pour capitale Port-au-Prince, siège d'un archevêché, du gouvernement et du commandement militaire. Elle se divisait en trois provinces :

1° La province du Nord, ayant pour capitale le Cap, et comprenant comme paroisses principales celles de Limonade, du Fort-Dauphin, du Trou, du Quartier-Morin, du Dondon, de la Petite Anse, de Plaisance, du Limbé, de Port-Margot, de Port-de-Paix, de Marmelade ;

2° La province de l'Ouest, ayant pour capitale Port-au-Prince, et comprenant entre autres les paroisses de Saint-Marc, de Bombarde, des Gonaïves, de Léogane, de Jacmel, de la Groix-des-Bouquets, de Sale-Trou, du Petit-Goave ;

3° La province du Sud, ayant pour capitale Saint-Louis, et comprenant entre autres les paroisses des Cayes, de Mirogoane, d'Aquin, de Port-Salut, de Tiburon, de Jérémie.

La population était environ :

En 1670, de 2.000 habitants ;

En 1676, de 5.000 ;

En 1681, de 8.000 ;

En 1700, de 20.000 ;

En 1755, de 190.000, dont 14.000 blancs, 5.000 mulâtres et 171.000 nègres ;

En 1775, de 340.000, dont 25.000 blancs, 15.000 mulâtres et 300.000 nègres ;

En 1789, de 540.000, dont 60.000 blancs, 30.000 mulâtres et 450.000 nègres ;

Les « blancs ou colons », jouissaient seuls des droits politiques.

Les « mulâtres » ou « hommes de couleurs », comprenaient les « mulâtres », nés d'un blanc et d'une négresse, les « quarterons », nés d'un blanc et d'une mulâtresse, les « tiercerons », nés d'une blanche et d'une quarterone, et les « Métis » ou « sang-mêlés ».

Les « Nègres » étaient esclaves ou affranchis. Un esclave nègre valait de 2 à 3.000 livres tournois, et une esclave négresse de 1.000 à 2.000 livres tournois.

La propriété foncière se composait d' « habitations » et de « hattes ».

« L'habitation » était en réalité tout un village ; elle comprenait la maison de demeure de la famille du colon, les bâtiments de la sucrerie où de la caféterie, les magasins, les cases des nègres.

Les « hattes » étaient de vastes territoires, où l'on élevait les bestiaux.

La mesure de superficie était le « carreau », qui représentait environ un hectare.

Les principaux objets de la culture coloniale étaient, d'abord et surtout la canne à sucre, transformée en sucre, melasse et rhum ; puis le coton, le café, le tabac, les plantes à épices et les plantes à teinture comme l'indigo. A partir de 1759 on cultiva encore à Saint-Domingue le bambou, qui y avait été introduit par M. Fournier de Bellevüe.

Tous les colons en état de porter les armes faisaient partie de la milice et étaient répartis en compagnies ; chaque quartier avait la sienne avec ses officiers. Tous les officiers étaient nommés par le gouverneur et brevetés par le Roi. Leur costume consistait en pourpoint et hauts-de-chausse en drap brodés de passements d'or et d'argent, épée avec baudrier, épaulettes à torsades, et chapeau orné d'un bouquet de plumes. A partir de 1766 l'uniforme consista en un justaucorps de drap léger, de petit Lodève bleu, doublé de toile blanche, parements bleus, collets et revers rouges, le parement fermé en dessous par trois petits boutons, un à l'épaulette, six à chaque côté de revers, trois gros au-dessous, et trois à la poche qui est coupée en travers. Veste de drap léger, petit Lodève blanc, doublée de toile blanche, sans poche ni pattes, garnie de dix petits boutons sur le devant et d'un à chaque manche. Culotte de tricot blanc, avec caleçon de toile séparé, boutons blancs timbrés d'une ancre. Chapeau brodé de galons blancs sans plumet. Epaulettes en tresse d'argent.

L'un des premiers colons français établis à Saint-Domingue, avait été Jean IX de Fournier de Bellevüe, de Varennes et de la Chapelle, écuyer, qui avait quitté le Berry, vers 1685, à l'âge de cinquante ans environ, pour aller fonder un établissement à Saint-Domingue, il s'était fixé à Limonade, dans la plaine du Cap, au Nord de l'île, près de l'anse connue sous le nom de « Port-de-Mer », où Colomb avait débarqué, en 1492. Il construisit sur ce territoire deux habitations qu'il appela : l'une « Bellevüe », l'autre « la Chapelle », du nom des seigneuries qu'il possédait dans le Berry ; puis il fit bâtir près de là une petite église qu'il plaça sous le patronage de sainte Philomène, et à laquelle il donna comme premier chapelain un religieux bénédictin, le P. Rodolphe. Cette chapelle, dite depuis « Chapelle du Bord-de-Mer », existe encore au début du XXème siècle près de l'habitation Bellevüe. C'est près delà qu'on a découvert, en 1883, à quatre pieds de profondeur en terre, une ancre que l'on croit avoir appartenu à la caravelle de Christophe Colomb, qui fit naufrage en ce lieu dans la nuit du 24 au 25 décembre 1492.

En 1707, M, de Fournier de Bellevüe, d'accord avec sa femme et quelques colons du voisinage, fit élever à trois lieues à l'Ouest de la chapelle Sainte-Philomène une église sous le vocable de Sainte-Anne, qui devint le siège de la paroisse Sainte-Anne de Limonade [Note : Limonade est située à environ cinq lieues au S.-E. de la ville du Cap ; son territoire, qui joint au Nord la mer, est très fertile et arrosé par deux rivières, la Grand'Rivière et le Fossé. Il fut ravagé en 1690 par les Espagnols, et il s'y livra, en janvier 1690, une bataille, où fut tué le gouverneur de Saint-Domingue, M. de Cussy. Nous citerons, parmi les nombreuses habitations que renfermait cette paroisse, celles des de Caze, de la Belinaye, de Vilaine, du Plessis, du Gas et de la Roche de Fontenille, de Bénazé, de Brémont, Walsh, le Febvre]. Cette église fut rebâtie en 1771, par les soins du P. Christophe, alors curé de Limonade ; cette nouvelle construction coûta 150.000 livres tournois. Ce fut Mme de Fournier de Bellevüe, née du Gas, qui donna les trois autels, le pavage du choeur et les balustrades, le tout en marbre. Elle fut inhumée dans le choeur de cette église, en 1782. Précédemment les Fournier avaient également été inhumés dans l'ancienne église, dont ils étaient seigneurs fondateurs et prééminenciers en 1714, 1728 et 1755. L'église Sainte-Anne, rebâtie en 1771, fut détruite par un tremblement de terre, en 1842 ; elle a été relevée, en 1866, sur le même emplacement.

L'habitation de Bellevüe, en Limonade, étant venue, par suite d'alliance en 1728, au marquis le Gentil de Paroy, elle fut dite depuis « Bellevüe-Paroy », puis « Paroy ». Lors de la révolte des nègres, elle comprenait deux sucreries et deux caféteries, estimées valoir près de trois millions. Les Fournier possédaient à Limonade deux autres habitations : une qu'ils portèrent par alliance en 1766 aux Montholon, et qui fut dite depuis « Montholon » ; elle valait, en 1792, un million et demi ; l'autre dite « Fournier de Bellevüe », qui valait trois millions et demi ; une autre, dite « Fournier de Varennes », qui valait 600.000 livres tournois ; une autre, dite « Entrepôt Fournier », qui valait 700.000 livres tournois ; enfin, une habitation, dite « la Chapelle », qui valait plus de deux millions. Ce fut sur cette propriété que M. de Fournier de Varennes, alors commandant des milices de Limonade, fit élever une chapelle sous le vocable de « Sainte-Suzanne », chapelle qui fut bénite le 23 juillet 1780 ; la Chapelle vint, par suite d'alliance, en 1735, aux Miniac, et prit le nom de « la Chapelle-Miniac » ; elle n'est plus connue que sous le nom de « Miniac », et appartient à M. Dupuy de Saint-Martin.

En 1765, la comtesse Fournier de Bellevüe, née du Gas, acheta, moyennant 500.000 livres tournois, de Jacques Loyseau, conseiller au Conseil supérieur du Cap, une habitation importante d'une contenance de 179 carreaux de terre, située dans la paroisse « Saint-Pierre du Limbé » [Note : La paroisse du Limbé, avec port et rivière, fut fondée en 1717, à six lieues à l'ouest de la ville du Cap ; son territoire, formé de terrains d'alluvions, est très fertile. Là se trouvaient entre autres les habitations des de Rosière, de Mézy, Bayon, de Libertat, etc.].

Les Fournier possédaient encore dans l'île de Saint-Domingue : une sucrerie au morne Pelé, dans la paroisse du Quartier-Morin ; un terrain au quartier de la Rivière Pelée, dans la paroisse de l'Acul ; une sucrerie appelée la Plaine de la Croix de l'Acul, dans la paroisse du Gros Morne ; la sucrerie de Rocou, en la paroisse du Trou ; enfin, un hôtel dans la ville du Cap Français [Note : Les Boucaniers avaient fondé, en 1673, au Cap-Saint, un établissement qui fut transformé, en 1682, en la ville du Cap-Français ; prise et brûlée en 1690, par les Espagnols, elle fut reconstruite et devint la capitale de la colonie, de 1716 à 1751, époque où la résidence du gouverneur fut transférée à Port-au-Prince. Des religieuses de Notre-Dame de Périgueux s'y établirent en 1724. Les fortifications furent refaites en 1748. La ville, souvent incendiée ou ruinée par des tremblements de terre, est actuellement le siège d'un évêché. Là demeuraient entre autres les de la Martre, de la Martellière, d'Alban, du Verger, de Chanteloup, de Paterson, le Febvre, Budan du Vivier, de Liniers, de Rigaud de Vaudreuil, de Durfort de Duras, de Lacaussade, de Brossard, de Vigny, Potier de la Houssaye, etc.], dit « Hôtel de Bellevüe », situé à l'embranchement de la rue du Palais et de la ruelle qui conduit au Morne de la Providence. Une des rues du Cap porte encore le nom de « Rue de Varennes » ; et l'un des mornes (colline) du voisinage près de la baie de Bekly, s'appelle encore le « Morne Bellevüe ».

En résumé, lors de la Révolution la fortune de la famille Fournier à Saint-Domingue s'élevait à près de vingt-cinq millions.

Dès leur arrivée à Saint-Domingue, les Fournier occupèrent dans cette île de hautes situations. Capitaine des milices de Limonade en 1695, Jean de Fournier de Varennes fut nommé en 1701 Conseiller au Conseil supérieur du Cap, lors de la création de ce Conseil, et, en 1713, lieutenant-colonel du régiment de Pardieu au Cap-Français. La plupart de ses descendants furent membres du Conseil supérieur du Cap, commandants des milices de Limonade, de Sainte-Suzanne et de Bois-de-lance. Quatre d'entre eux furent créés chevaliers de Saint-Louis ; et l'un d'eux, Charles Fournier de la Chapelle, fut intendant de la colonie de 1736 à 1739, et Procureur général du Grand-Conseil de 1759 à 1764.

En 1759, ce fut M. de Fournier de Bellevüe qui introduisit le bambou à Saint-Domingue. Il avait pris sur l'habitation Rochechouart, à la Martinique, une tige de bambou qu'il apporta sur le vaisseau royal l'Hector, et qu'il planta sur sa propriété de Bellevüe. L'année suivante, il donna des boutures de cet arbuste à plusieurs de ses voisins, et ce fut ainsi que cette plante se répandit bientôt dans l'île entière. Ce fut également lui qui introduisit à Saint-Domingue le lilas dès Indes, connu sous le nom d' « Azedecock », et qui, le premier, mit en pratique et propagea, en 1767, l'inoculation pour combattre les ravages que la petite vérole faisait dans la colonie.

Dès le début de la révolte des nègres, en août 1791, les habitations que les Fournier de Bellevüe possédaient à Limonade et au Limbé furent détruites. Le marquis de Bellevüe était alors à Paris pour l'éducation de ses enfants ; et sa femme ; Mlle de la Courcière, demeurait seule à Saint-Domingue. Forcée de fuir devant les massacres et l'incendie, elle se retira en son hôtel du Cap ; et l'Assemblée coloniale de cette ville l'obligea à fournir dans un délai de trois mois, en juillet 1792, 6.500 livres de farine pour le ravitaillement de la ville menacée d'être assiégée par les noirs révoltés. Au mois de novembre 1792, le colonel de Touzard remporta à « Bellevüe », en Limonade, une importante victoire sur les noirs, qui perdirent cent soixante des leurs. La marquise de Bellevüe profita de l'accalmie de 1795 pour faire relever ses habitations, mais elles furent incendiées à nouveau en 1799 ; et elle-même périt au Cap, lors du massacre commandé par le cruel Dessalines, de tous les blancs résidant, en cette ville, en février 1804. Reconstruites plus tard, les habitations de « Miniac » et de « Bellevüe-Paroy » existent encore au début du XXème siècle. Ce fut dans cette dernière demeure que séjourna en 1820, le roi d'Haïti, Christophe. Cette habitation appartenait alors à un nègre qui s'en était emparé, et s'était, comme beaucoup de ses congénères, affublé d'un titre de noblesse ; il se faisait appeler le baron Pierre Poux [Note : Le roi nègre Christophe avait voulu, en 1811, à l'exemple de Napoléon, se créer une cour et donner des titres à ses officiers. C'est ainsi que l'on vit figurer dans son entourage le prince de Sale-Trou, le duc de Marmelade, le comte de Limonade, les barons de la Seringue, du Boucan, du Poux, les chevaliers Coco, Jako, etc.]. Le roi Christophe, ayant résolu de faire un pèlerinage à Sainte-Anne de Limonade, quitta le Cap, le 15 juillet 1820, et alla coucher chez le susdit baron. Le lendemain, il se rendit à l'église Sainte-Anne ; et étant tombé, pendant la messe, frappé d'une attaque d'apoplexie, il fut rapporté à « Bellevüe-Paroy », où il resta jusqu'au 8 octobre, date à laquelle il put regagner son  palais de Sans-Souci, où il se suicida, le 20 octobre suivant, de deux coups de pistolet (X. de Bellevüe).

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