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CAHIER DE DOLÉANCES DE PLOUARET et DU VIEUX-MARCHÉ

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Subdélégation de Lannion. — Département des Côtes-du-Nord, arrondissement de Lannion, chef-lieu de canton.
POPULATION. — En 1793, 4.126 hab. (D.TEMPIER, Rapport…. au préfet, dans le volume du Conseil général des Côtes-du-Nord, session d’août 1891, 3ème partie, p 163).
CAPITATION. — Total en 1770, 3.940 l. 17 s. 8 d., se décomposant ainsi : capitation, 2.688 l. 16 s. 8 d. ; 21 d. p. l. de la capitation, 235 l. 5 s. 5 d. ; milice, 359 l. 2 s. ; casernement, 657 l. 13 s. 7 d. (Arch. d'Ille-et-Vilaine, C 3981).
VINGTIÈMES. — En 1788, 3.989 l. 10 s.
FOUAGES. — 119 feux 2/3. — Fouages extraordinaires et garnisons, 2.232 l. 19 s. 3 d.

OGÉE. — A 6 lieues au S.-0. de Tréguier, à 32 lieues de Rennes et à 3 lieues 1/2 de Lannion. — 4.000 communiants. — Ce territoire est plat, fertile en grains et abondant en foin ; les landes n’y sont pas fort étendues.

PROCÈS-VERBAL. — Assemblée électorale, le 31 mars, à l'église paroissiale de Plouaret, sous la présidence de Jean-Louis Turquet de Beauregard [Note : Il devint plus tard receveur de l’enregistrement (Renseignement communiqué par M. Léón DUBREUIL)], avocat et sénéchal de la jurisdiction du Vieux-Marché, assisté de Joseph Lemartret, greffier ordinaire des délibérations. — Comparants [Note : Nous donnons les quelques cotes de capitation que avons trouvées dans un rapport de Le Normant de Kergré, commissaire des Etats et du sous-ingénieur Anfray, du 20 décembre 1785 (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 2422).] : Pierre Le Morvan (100) ; Yves Le Cozmeur ; Jean Malledant ; Yves Leguen (41) ; Guillaume Geffroy (11,8) ; Francois Le Cam (26,8 ou 23,6) ; Louis Le Lagadec ; Pierre Larcher ; Yves Goater ; Pierre-Jean Malledant ; Allain Tassel, membres du général de la paroisse ; Pierre Le Bourdonnec (30,15) ; Mathias Kerboriou ; Joseph Guezennec ; Jean Leguen ; Gabriel Le Guyader (21,17) ; Guillaume Meurer ; Guillaume-Jean Mahé (120) ; Gilles Merrien (24) ; François Merrien (43) ; Philippe Le Luyer ; Yves Geffroy ; François Le Meur ; Jean Le Lourec ; Yves Le Luyer ; Yves Le Hech ; Jean Le Cuziat ; Guillaume Le Calvez ; Yves Gueguen ; François Le Simon ; Turquet du Goavein, avocat ; François Le Saux ; Louis Le Corre ; J. Thos (13,5) ; Y. Chastelen ; Gabriel Le Lezec ; Pierre Huon ; P. Calvez. — Députés : Joseph Guézennec ; Guillaume Le Calvez ; Pierre Huon ; Pierre Le Bourdonnec ; Pierre Le Calvez ; Gabriel Le Guyader.

 

Mémoire et charges pour le général et notables cultivateurs de la paroisse de Plouaret, diocèse de Tréguier.

Le général de Plouaret a vu avec joie le zèle des communes de Rennes pour le bien général de la province et avec reconnaissance l'invitation qu'elles lui ont faite de présenter ses divers sujets de plaintes. Pénétré de ce double sentiment, après avoir adhéré aux demandes de ces communes, il croit devoir y ajouter les siennes.

[1]. Le vœu de la Nation, celui du Monarque chéri qui la guoverne, c'est de répartir équitablement entre les trois ordres le droit de voter et les subsides, et de faire disparaître ces charges onéreuses, qui, sans procurer un grand avantage à ceux qui les imposent, pèsent extrêmement sur les contribuables.

[2]. Tel est sans doute le droit de nouvel acquêt, introduit depuis quelques années : les frais de répartition excèdent de beaucoup les sommes qu'on lève pour le droit principal. Tel est aussi le droit de franc-fief, particulier aux roturiers.

[3]. Tel est, plus aggravant encore, le droit accordé aux seigneurs de fief d'assujettir le vassal à la suite de moulin ; injuste dans son principe, abusive dans ses progrès, criante par l'excès où elle est portée, cette sujétion est devenue pour les vassaux une source de vexations journalières et pour les seigneurs un objet à réprimer.

Il n'y a point de privilège préférable à ceux du public même, ni de laps de temps à alléguer contre celui dont les droits sont imprescriptibles ; ne vaut-il pas mieux prendre pour règle ce qui est juste que ce qui est ancien ?

On n'envie pas aux seigneurs de fief le droit exclusif qu'ils ont d'avoir des moulins ; on leur reproche seulement le droit qu'ils prétendent d'astreindre leurs vassaux exclusivement à tel moulin, quelqu'injustices qu'ils y souffrent. Qu'on supprime cette faculté, contraire à la liberté naturelle, et tout rentrera dans l'ordre ; les seigneurs ou leurs ayant cause auront seuls des moulins, mais les mouteaux seront libres de suivre celui qu'ils voudront. Il ne sera pas besoin d'une loi impérieuse pour faire suivre le moulin de son seigneur proche ; on préférera de soi-même cette proximité tandis que le meunier se montrera juste et équitable.

Dans cette réforme salutaire, il n'y aura à perdre que les seigneurs ou propriétaires qui n'auront pas fait choix d'un meunier honnête ; mais ne peuvent-ils point en choisir ?

On sait qu'il existe contre les meuniers coupables des actions ouvertes, des coutumes et règlements ; mais il est aussi d'expérience que ces lois sont des armes impuissantes contre des gens qui, trouvant du profit à faire leur devoir, en trouvent encore davantage à l'excéder.

On sait de même que les propriétés sont respectables et qu'on ne peut dépouiller les seigneurs de ce qui leur est acquis ; aussi ne refuserait-on pas à cet égard une indemnité raisonnable et modérée, si on la jugeait nécessaire.

Il est du moins en ce genre un excès qui a toujours paru intolérable, c'est la vente et transport que les seigneurs font aux étrangers des mouteaux qui sont hors de la banlieue : c'est bien assez, c'est même trop d'être vexés par les meuniers dans la banlieue, sans qu'on puisse échapper à la vexation en s'en éloignant.

[Note : Il y avait dans la paroisse de Plouaret un assez grand nombre de moulins, dépendant de diverses seigneuries. A la seigneurie du Vieux-Marché appartenait le moulin du Vieux-Marché, qui, par bail du 12 juillet 1748, était affermé 380 l., et à la seigneurie du Dresnay, un moulin loué 300 l., par bail du 19 décembre 1744 (Arch. des Côtes-du-Nord, E 1745, Vente des seigneuries du Vieux-Marché, du Dresnay et de Traovennez par Yves-Joseph de Montigny à Joseph-Thibault, marquis de la Rivière, 3 septembre 1748). En 1757, le moulin du Vieux-Marché était affermé « avec ses sujets détreignables et aventuriers » pour la même somme de 360 l. (Ibid., E 937, Aveu d’Yves Thibault, marquis de la Rivière 1757) ; le même document mentionne encore le moulin de Marquès, dans la frairie de Trenna ; par le bail de 1762, le prix de la ferme fut porté à 400 l. La seigneurie du Vieux-Marché avait aussi un four banal, qui, par bail de 1762, était affermé, avec les halles, coutumes et foires du Vieux-Marché, pour la somme totale de 780 l. (Ibid., E 226, Minu après décès du marquis de la Rivière, 3 septembre 1770). De la seigneurie de Keramborgne dépendaient : le moulin de Mapanroué, affermé 180 l. en 1760-1769 (Ibid., E 1825, Rôle rentier de la seigneurie de Keramborgne); le grand moulin de la Haye, loué 120 l., et le petit moulin de Roudor, loué 51 l., en 1785-1790. En 1791, le grand moulin n’était plus loué que 64 l. et, en 1792, 70 l. ; le petit moulin, 63 l. en 1791 et 1792 (Ibid., E 1827). A la seigneurie de Kernahan appartenait aussi un moulin (Ibid., E 1819, Bail à domaine congéable du 3 janvier 1755), et les sujets de la commanderie de Palacret étaient tennus de suivre le moulin du Pont-Blanc ou le moulin de Garnachannay (Ibid., série H, terrier du Palacret, 1731, fol. 483 et sqq.)].

[4]. Il n’y a pas plus d’un siècle que les hêtres, frênes, ormeaux et autres bois blancs appartenaient de droit aux colons congéables ; aujourd’hui les seigneurs fonciers, en vertu de la nouvelle jurisprudence faite par conseillers et présidents du Parlement de Rennes, tous nobles et ayant des fiefs et domaines en Bretagne, réclament tous ces bois, dureté extrême qui réduit les pauvres colons à la plus triste situation ; obligés par leurs titres à faire les charrois et corvées, ils sont en même temps obligés, pour le moindre essieu ou bras de charrue, d'acheter à grands frais du bois, tandis qu'il y a du superflu sur les tenues convenancières.

[Note : Voy. à ce sujet le bail à domaine congéable consenti, le 3 janvier 1755, par Louis-Marie Gourin, seigneur de Kernahan, commissaire de la marine à Brest, à J-B. Prigent, notaire et procureur à Plouaret. Ce bail comprend outre la dîme et le moulin de la seigneurie, le manoir seigneurial de Kernahan, « avec faculté, d’émonder tous arbres de chêne, même ceux qui sont en rabine et en touche, de disposer des arbres de cette espèce qui tomberont par impétuosité des vents ou qui périront par défaut de séve, comme d’exploiter et abattre par pied tous autres arbres, soit hêtres, frênes, ormes, noyers, châtaigniers et tous bois blancs qui sont ou croîtront sur les dépendance dudit manoir » (Arch des Côtes-du-Nord, E 1819). Ainsi, dans ce cas particulier, le domanier a la disposition des bois blancs].

[5]. On demande aussi l'extinction de la dîme seigneuriale, qui n'a été introduite en faveur des seigneurs qu'à condition qu'ils feraient la chasse des bêtes fauves, qui désolent les récoltes des cultivateurs, chasse qu'ils ne font pas ; au contraire, si un paysan, dont une vache aura été mangée du loup place un piège pour le surprendre, on lui confisque son piège, avec menaces de peines afflictives, que mérite selon eux un pareil délit.

[Note : Dans la paroisse de Plouaret, plusieurs seigneuries percevaient la dîme. La seigneurie du Vieux-Marché avait un droit de dîme à la 12ème gerbe, mais un tiers en revenait à l'église : voy. l'acte de vente de la seigneurie du 3 septembre 1748 (Arch. des Côtes-du-Nord, E 1745) et divers aveux de 1761-1778 (Ibid., E 2193). Les dîmes de la fratrie du Vieux-Marché étaient affermées 60 l. en 1757 (Ibid., E 937. Aveu du marquis de la Rivière) et 30 l. seulement en 1770 (Ibid., E 926, Minu du 3 septembre 1770). — A la seigneurie de Keramborgne appartenaient la dîme du bourg, affermée 40 l. avant 1769 et 45 l. après 1769, et la dîme de Keramborgne, affermée 30 l. en 1760-1778 (Ibid., E 1825, Rôle rentier de la seigneurie de Keramborgne). La dîme de la seigneurie de Kernahan consistait en deux traits, dans les fratries de Coatmorvan et de Keroué, et elle se percevait à la 12ème gerbe, saut les terres du manoir qui étaient sujettes à la dîme ecclésiastique à la 36ème gerbe ; certaines d'entre elles ne devaient que les prémices (Ibid., E 1819, Bail à domaine congéable du 3 janvier 1755). Le sieur de Keryvon possédait la dîme du Marqués (dans les fratries de Kardouallan et du Quenquis) « au 12, y compris le tiers pour celle ecclésiastique » ; il la tenait en fiel du comte du Runfaou (Ibid., E 936, Minu de Gilles de Lescu, seigneur de Runfaou, 1756). La plupart des domaniers de la commanderie du Palacret devaient la dîme à la douzième gerbe, « celle de l’èglise y comprise », et les terres exemptes de dîme devaient 6 s. de prémice au recteur : voy, divers aveux de 1729-1730 (Ibid., série H, terrier du Palacret, fol. 483 et sqq.). Parmi les convenants de l'abbaye de Bégard, les uns étalent sujets à la dîme féodale (parfois au taux de la 11ème gerbe), les autres en étaient exempts, mais devaient au recteur, soit la dîme à la 36ème gerbe, soit un droit de prémice (Ibid., série H. Terrier de Bégard de 1788, fol. 283 et sqq. et 297). — Un mémoire de Poullain Duparc, du 16 amis 1759, à l'occasion d'un procès entre le recteur de Plouaret et le fermier de la dîme seigneuriale de Kernahan, nous décrit bien les taux respectifs de la dîme seigneuriale et de la dîme ecclésiastique dans la paroisse : « La dîme ecclésiastique se lève par toute la paroisse de Plouaret à la 36ème gerbe où la dîme seigneuriale n'a pas cours, et où elle a lieu on lève la 12ème et du nombre perçu on donne le tiers à l'église et les deux autres tiers au seigneur foncier ou féodal... Le recteur de la paroisse de Plouaret n'a qu'une portion congrue, les gros fruist appartenant au chapitre de Tréguier... », mais il jouit des novales (Ibid., E 1819)].

[6]. Le domaine congéable en l'évêché de Tréguier est si nuisible aux citoyens qu'il occasionne le ruine totale de quantité innombrable de pauvres colons par les sommes qu'on paie pour commissions, frais de prisages et autres, dont la suppression serait absolument nécessaire pour éviter la multiplicité d'inconvénients, parce qu'on exerce les congéments en toute saison de l'année, ce qui fait sortir le pauvre colon hors sa tenue sans blés, foins, pailles, et dépouillé de toutes nécessités.

[Note : Parmi las convenants dépendant de la seigneurie du Vieux-Marché, on peut citer le convenant Perrot, qui doit, comme rente convenancière, 3 l. 18 s., 2 rennées d'avoine, et qui est assujetti aux « corvées ordinaires ». Les tenues à féage acquittent surtout des rentes en argent (Arch. des Côtes-du-Nord, E 937, Aveu du marquis de la Rivière, de 1757)].

[7]. Une injustice criante de la part des seigneurs, en ce qu'ils ne touchent point leurs rentes suivant les apprécis de justice ; leurs receveurs, quand l'apprécis porte à 3 $, font payer jusqu'à 5 ou 6 $ ; même, ils ne veulent poin recevoir les blés qu'ont produits les terres hypothéquées pour leurs rentes ; ils font rendre le plus beau blé qu'on trouve, et ils ne font bannir leurs recettes que quand les blés sont dans une cherté exorbitante, ce qui occasionne la ruine totale des colons.

[8]. Le général de Plouaret observe qu'il est extrêmement surchargé de subsides royaux, puisqu'il est vrai que seulement les capitations, vingtièmes et fouages montent à 16.000 $ par an, dont l'ordre de la noblesse n'y est imposé que dans les vingtièmes, et encore très modérément ; donc, le pauvre cultivateur est obligé pour le tout.

[9]. Encore une injustice criante à l'égard des charrois des troupes de Belle-Isle-en-Terre, en ce qu'on ne rend les ordres que le soir avant les charrois, encore très tard, et, y arrivé à Belle-Isle-en-Terre, on est vexé, attendu qu'il n'y a pas de poids et balances ; au lieu de 1.500 livres, qui est la règle ordinaire, on fait charger jusqu'à quatre, cinq mille livres par charretée, et l'éloignement de cette paroisse pour aller à Belle-Isle est de trois fortes lieues (Voy. le cahier de Belle-Isle-en-Terre).

[10]. Les paroissiens de Plouaret se plaignent encore des procureurs fiscaux, en ce qu'ils ruinent les vassaux par les impunissements qu'ils forment contre les aveux et déclarations, et cela après qu'ils les ont eux-mêmes faits.

[Note : Il convient de signaler une liasse de procédures diverses d’impunissements, d’aveux, poursuivies par J.-B. Prigent, procureur fiscal de la seigneurie de Kernahan, et datées de 1786 (Arch. des Côtes-du-Nord, E 1819). Voy. aussi un mémoire imprimé qui est l'œuvre de J. Paranthoen, sénéchal de Pleubihan : celui-ci se plaint « d'avoir été écrasé par les vexations énormes des procureurs fiscaux de la Haye Keramborgne et principalment par celles de Me J.-B Prigent » ; le mémoire donne à ce sujet de nombreux détails (Ibid., F, 1826)].

[11]. Au reste le général de Plouaret, sur tous ces objets, en réfère à la prudence et aux lumières supérieures de la ville et communes de Rennes ; elles sauront, dans leur sagesse, séparer ce qui doit réussir, ce qui serait refusé, et les motifs de refus lui seront toujours respectables, lors même qu'ils lui seront inconnus.

Tel est le vœu particulier que d'heureuses circonstances l'engagent à former ; à quel temps réserverait-il les justes réclamations s'il gardait le silence dans ces jours mémorables, où tout promet dans l'ordre politique une régénération nouvelle, où le Monarque, rapproché des sujets qu'il aime, les associe en quelque sorte à son conseil ?

Arrêté en l'assemblée générale de la paroisse de Plouaret et le Vieux-Marché, ce jour trente-un mars mil sept cent quatre-vingt-neuf, ainsi signé en la minute par dépôt aux archives de la dite paroisse de Plouaret.

[27 signatures, dont celle du président Turquet de Beauregard, qui la fait suivre de cette réserve : « sans approbation de tous articles qui attaquent les propriétés »].

(H. E. Sée).

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