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LA FORET DE LA HUNAUDAYE

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A lire certain « Guide », dont nous ne prétendons point médire, puisque nous ne le nommons pas, on ne serait guère édifié sur la Hunaudaye, son château et sa forêt. Tout ce qu'on nous y apprend, c'est que les ruines couvrent une superficie de 60 hectares et que cette forteresse, bâtie en 1378 par Pierre de Tournemine, avait la forme d'un pentagone irrégulier, flanqué d'une tour cylindrique à chaque angle. Il est vrai que l'on prend la peine de nous faire remarquer les lierres et les ronces qui envahissent ces vénérables débris, en ajoutant que la forêt est peuplée de sangliers et de chevreuils.

Aux broussailles grimpantes et piquantes, nous tenterons de substituer cette autre verdure, l'histoire, qui donne plus de vie aux vieux murs qu'elle ne leur en emprunte. Quant aux sangliers et aux chevreuils, nous ne chercherons ni à les affronter ni à les effaroucher.

Les bois de la Hunaudaye s'étendent entre Lamballe et Plancoët sur une superficie de plus de deux mille hectares. Cette forêt s'est appelée d'abord Lanmur, au XIIIème siècle, et nous la voyons ainsi désignée dans un acte transactionnel, passé entre Pierre Mauclerc et Olivier de Tournemine qui, en 1214, et du consentement d'Alix, héritière de Bretagne, reçut en échange de biens maternels, plusieurs paroisses auxquelles le duc ajouta la possession de la forêt de Lamballe, autrement dite de Lan-mur.

Selon du Fail, elle aurait été connue jadis sous le nom de Forêt Noire.

Enfin, depuis plusieurs siècles, elle s'appelle la Forêt de la Hunaudaye.

La fraîcheur de ses ombrages sert, l'été, d'abri aux chevaux et aux vaches des riverains, qui s'y repaissent tout à leur aise. Ces animaux vaguent en liberté, une clochette au col, broutant l'herbe que les feuilles mortes engraissent de leurs couches fécondantes, et, le soir quand les bestiaux se rassemblent, le son de toutes ces clochettes. est le seul bruit qui vienne, avec celui de quelque Angélus lointain, rompre le silence des solitudes de la forêt.

Si par hasard, le flair des chevaux, qui ne les trompe pas, vient à leur signaler le loup, l'instinct les réunit. Se groupant de façon à ne présenter que la ruade à l'ennemi, ils sont rarement surpris et ne succombent guère que lorsqu'ils sont isolés.

Malheur au cheval qui se laisse surprendre ! Un soir d'hiver, à l'heure où les arbres commencent à se confondre dans la même ombre, le châtelain du Vaumadeuc et son fils regagnaient leur logis quand tout à coup le galop d'un cheval, assourdi par la neige, les fil prêter l'oreille. Au même instant, un loup s'enfuit. Une barrière était fermée : évidemment le fauve s'apprêtait à profiter de l'obstacle en sautant à la gorge de l’animal trop épuisé pour le franchir.

Ouvrir, et il n'était que temps, fut l'affaire d'une seconde et le salut du cheval qu'un second loup poursuivait. Le coup manqué, le rabatteur mystifié n'eut plus qu'à rejoindre son complice ; un hennissement, presque un râlement, tant il était faible, salua la délivrance.

C'est encore, et toujours la lutte en ces bois, mais on n'y dévalise plus, et ce n'est pas nous, au moins, qui en sommes les victimes. Sous ce rapport, Paris, la nuit, est loin de valoir la Hunaudaye.

Il n'en a pas été toujours ainsi.

En 1355, une chasse au sanglier est donnée, à la Hunaudaye, en l'honneur de messire Eder de Beaumanoir. Eder, tout entier au plaisir de suivre la meute qui vient de lancer un solitaire, tombe, lâchement assassiné.

En 1384, un évêque de Saint-Brieuc est dévalisé en traversant la forêt.

Au temps où la reine Anne la traversa, la souveraine ne put elle-même se soustraire aux procédés de son « amé et féal cousyn », le sire de Tournemine, qui mit le comble à la galanterie en faisant arrêter sa suzeraine « qu'il venoit de festoyer ».

L'histoire de cette province est malheureusement pleine des exemples de ces hospitalités loyalement acceptées et transformées par les « féaux » en traquenards, comme à l'Hermine et à Champtoceaux.

Revenant donc du château où « elle fust bien festoyée, Anne fut prinse prisonnière par les gardes des boys du dict messire et baron, car il dict avoir ce privilège que quelque personne passant par les dicts boys, sans son congé ou licence, est à sa volonté de le confisquer corps et biens » (Journal d'Olivier de la Roche, chapelain du sire de la Hunaudaye).

La veille, le seigneur de la Hunaudaye avait eu l'attention de déguiser en loups deux de ses hommes et de les faire déposer aux pieds de la reine une « biche enchaînée à son grand déplaisir et malheur » (Journal d'Olivier de la Roche, chapelain du sire de la Hunaudaye). Sans doute était-ce une allusion discrète à sa propre « prinse », méditée pour le lendemain, par ces autres fauves que l'on appelait les gardes !

« Toutefois, le dict baron fut-il grâcieux à la dicte dame, en lui donnant sa ranson » (Journal d'Olivier de la Roche, chapelain du sire de la Hunaudaye).

Il est vrai qu'Anne chevauchait à la tête de ses grands seigneurs à travers la forêt, et que si elle ne se fût prêtée de bonne grâce à l'impertinent caprice de son vassal, les gardes des boys du très-haut et puissant messire eussent fait piteuse contenance au moindre signe de la souveraine de France et de Bretagne.

Non loin du château de la Hunaudaye, dont les ruines sont en Plédéliac, tandis que le Vaumadeuc est en Pléven, ce manoir, encore habitable et habité, servait de rendez-vous de chasse aux sires de la Hunaudaye. C'était le Meyerling de la baronnie, mais en plus petit, et sans que le moindre drame ait ensanglanté les pages de son histoire.

Il a toujours ses trois étangs et ses taillis que le sanglier visite à ses heures.

Sa façade n'a de remarquable que la porte d'entrée et des fenêtres Renaissance avec cordon de granit. A l'intérieur, son escalier en pierres de taille et ses superbes cheminées où flambent, l'hiver, de véritables troncs d'arbres, rappellent le XVIème siècle et l'existence facile d'autrefois.

Sur la route qui mène de Pléven à Lamballe, à quelques kilomètres plus loin, et toujours dans la forêt, on aperçoit comme des logements de grande ferme. C'est ce qui reste de l'abbaye de Saint-Aubin-des-Bois, fondée en 1137 par Geoffroy Botherel, comte de Penthièvre et de Lamballe. Protégée au siècle suivant par Guillaume Pinchon (Saint Guillaume., évêque de Saint-Brieuc, qui obtint de Pierre Mauclerc une charte en sa faveur, elle échappa plus tard aux guerres de la Ligue, mais ses moines trouvèrent dans la garnison de la Hunaudaye un voisinage qui sentait son huguenot et dont on se fût bien passé. Etant de Penthièvre, non de la Hunaudaye, l'isolement du monastère au milieu de la forêt rendait plus redoutables encore les exigences de ces soudards. Cette partie de forêt a conservé le nom le Bois de Saint-Aubin. Au point de vue du chauffage, jamais moines ne furent mieux partagés. Leur jardin fournissait à leur frugalité d'abondants légumes et de succulents fruits. On a conservé dans le pays une espèce de vigne, dite de Saint-Aubin, dont le raisin est particulièrement savoureux.

Moins privilégiés sous ce rapport, à cause de leur proximité de la mer, les religieux de Saint-Jacut (autrefois Saint-Jagu) étaient, pour les poissons et les coquillages, plus avantageusement placés.

Les confrères des deux abbayes se visitaient souvent, ce qui leur permettait d'assaisonner leur vie d'un régime moins monotone.

Il y avait encore, à la Révolution, cinq moines à Saint-Aubin lorsque la persécution sanglante vint les frapper. Un seul se sauva, par la fenêtre.

Successivement, maison de retraite pour la vieillesse des prêtres du diocèse et maison de fous, l'ancien monastère a été en partie démoli quand les aliénés et les frères de Saint-Jean-de-Dieu qui les soignaient ont été transférés à Dinan, aux « Bas-Fouins » (aujourd'hui Bas-Foins). On ne voit plus aujourd'hui de l'abbaye qu'un corps de logis servant de magasin de bois et de logement de garde. Le cartulaire de Saint-Aubin est très intéressant à fouiller comme mine historique.

II Le Saint Esprit des Bois.

De l'autre côté du château de la Hunaudaye, dans le voisinage de la forêt, le Saint Esprit des Bois était doté d'un Prieuré. Sa chapelle, que le dernier prieur fit ériger en succursale, continue à être desservie par le clergé de Plédéliac.

Le Saint Esprit a, de plus, sa fontaine miraculeuse où l'on se rend en pèlerinage. Je ne sais si on lui attribue encore la vertu de décoiffer sainte Catherine en faveur des filles qui boivent de son eau pour ne plus la coiffer. L'épingle qui attache et que la soupirante jetait dans la source disait assez quel genre de soif l'amenait à son eau fraîche.

Avant l'ère chrétienne, presque toutes nos fontaines étaient consacrées aux dieux et demi-dieux de l'Olympe. Pour mieux infiltrer dans l'âme des néophytes, encore païens d'habitudes, les idées du culte nouveau, les premiers missionnaires en Armorique substituèrent à Jupiter, Mars, Hercule, etc., des noms de saints que ces sources ont gardés (Abbé Deric).

Qui le Saint Esprit supplanta-t-il ici ? Entre Cupidon, dieu de l'amour, et Minerve, déesse de la sagesse, il y a bien des patrons mythologiques à placer.

Le dernier titulaire du prieuré, qui dépendait de la Hunaudaye, était (avant la Révolution) le fils du régisseur général de la baronnie, l'abbé Minet « licencié de l'un et de l'autre droit ». En outre des bénéfices attachés à cette situation, son titulaire avait la « chapelainie de du Guesclin », c'est-à-dire qu'il profitait des avantages d'une fondation pieuse du Connétable dans l'église Saint-Sauveur de Dinan. Nous possédons un intéressant règlement des dîmes, petite et grande, de Sainl-Mandé, auxquelles prenait part notre chapelain. Il eut lieu, le 21 juin 1775, entre lui d'une part et de l'autre messires de Kergu et de Goyon, seigneur de Thaumatz, le prieur du prieuré « Royal » de Saint-Malo de Dinan, le prieur de Saint-Jacut et le recteur de Saint-Mandé.

Se référant à des actes antérieurs, notamment à une transaction passée, le 24 juin 1669, par devant maître de Lorgeril, notaire, entre écuyer de Goyon et noble et discret Vincent de la Touche, chanoine régulier, prieur recteur de Saint-Mandé, transaction qui sert de base au travail des arbitres, ceux-ci, choisis d'accord entre parties, concèdent au chapelain de du Guesclin un dix-huitième de la totalité des dîmes : « une gerbe sur dix-huit ». Parmi les arbitres, nous avons retenu le nom de noble maître Plesse de Saint-Mirel, avocat au Parlement.

L'abbé Minet cumulait les charges de prieur du Saint Esprit et de recteur de Plédéliac. Il jouissait enfin des privilèges réservés à l'une des chapelles de la cathédrale de Rennes. Le procès-verbal de prise de possession de la chapelle de Saint-André (14 août 1751), dresse par les notaires « apostoliques » [Note : C'est-à-dire chargés de la rédaction des actes diocésains] de cette ville, constate que les chanoines récalcitrants en avaient fermé les grilles ; mais le père du jeune abbé, qui ne se déconcertait pas pour si peu, car il était homme de loi, passa la main entre lesdites grilles et dit : j'y suis « manu » (Ces actes sont à nos archives). Il n'ajouta pas « j'y reste », quoique, de fait, il y restât.

Un feuillet de la fabrique de Plédéliac contient le compte de « Messire François Brunet, seigneur du Guillier, trésorier bienveillant de ladite fabrique », rendu par procuration, au Saint Esprit, à la date du 27 juillet 1758 « par devant Monseigneur l'Illustrissime et Révérendissime Evesque et Seigneur de Saint-Brieuc » (Ces actes sont à nos archives). Tous ces titres, à sonorité pompeuse, moins en rapport avec l'humilité divine du Christ qu'avec le clinquant suranné des prélatures italiennes, n'empêchaient pas Sa Seigneurie de dérider Sa Grandeur en présidant, à certaine fête, au jeu de raquettes que l'on appelait alors cabaret.

Mon aïeul maternel — qui était de Plédéliac — m'a conté, au sujet de la fontaine du Saint Esprit et de ses épingles, que l'amoureux trouvé, la fille promise, les choses n'allaient pas toutes seules au moment des épousailles. Garçon d'honneur pendant un de ses congés d'étudiant, il ne s'attendait pas au rôle laborieux qu'il aurait à jouer, à peine arrivé de Paris dont le voyage, il y a quatre-vingts ans, ne s'effectuait pas sans quelque fatigue.

Du Saint Esprit à l'église paroissiale, il n'y a pas loin et, précédé d'une vielle, le cortège s'acheminait à pied du village où demeurait la belle vers Plédéliac où l'on devait la marier, quand, aux premières maisons du bourg, la future se dégage du bras protecteur et, s'enfuyant, reprend dans une course folle la route que l'on venait de parcourir.

Ici commençait le rôle du personnage en vue, rôle pénible, excessif, car il ne s'agissait de rien moins que de rattraper la colombe envolée et de la ramener au pigeon qui « l'espérait ».

Le garçon d'honneur, qu'il eût ou non du jarret et de l'haleine, finissait toujours par triompher dans cette lutte de vitesse ; les regrets du nid suffisamment prouvés, la comédie cessait et la tâche de notre étudiant redevenait joyeuse sinécure.

(un ancien rédacteur à la chancellerie).

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