Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

LE CHATEAU DE LA HUNAUDAYE

  Retour page d'accueil      Retour page "La baronnie de la Hunaudaye"      Retour page "Ville de Plédéliac"  

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

A la fin du siècle dernier (XVIIIème), la vieille forteresse féodale mesurait encore la hauteur de ses épaisses murailles avec les chênes séculaires de la forêt. Elle inspirait le respect dû à la majesté de l'âge, après avoir fait régner la terreur. C'est qu'il avait fière apparence, ce château, avec ses ponts-levis, ses tours et ses remparts qui, la Révolution survenue, en faisaient pour la sécurité publique un danger permanent. Le laisser subsister eût été, en effet, conserver à l'insurrection une formidable retraite. En octobre 1793, le district de Lamballe prit à son sujet des mesures radicales et urgentes : on le brûla. On mit le feu au château à l'aide de ses vieilles tapisseries.

En 1785, la Hunaudaye était encore habitée par M. Minet de la Villepaye, avocat au Parlement de Rennes, dont nous avons déjà prononcé le nom en parlant du Saint Esprit et de son Prieur, lui-même « licencié en l'un et l'autre droit ».

C'était un savant éclairé, et ses notes ont été précieuses à l'historien de Bretagne, Dom Morice qui les a reproduites dans ses « Preuves ».

M. Minet était l'ami et le conseiller intime du comte de Rieux, héritier des seigneurs de cette baronnie, dont il avait la gérance générale.

C'est de ce château qu'il dirigeait les affaires de ce petit royaume, comprenant, en outre de la Hunaudaye, Plancoët, Montafilant, et toute la juridiction du Chemin-Chaussé avec ses juges, ses procureurs fiscaux, ses greffiers et ses notaires.

Voici, écrite de la main du dernier habitant du château incendié, la description de ce qu'il était avant de devenir la proie des flammes :

« La Hunaudaye est un château composé de cinq tours grosses et moyennes qui forment un pentagone avec des bâtiments appliqués aux gros murs par le dedans de la cour. Il est situé aux confins du diocèse de Saint-Brieuc, du côté du levant, dans la paroisse de Plédéliac, à sept lieues de Saint-Brieuc, trois petites de Lamballe, deux de Plancoët, une et demie de Jugon, et cinq de Dinan.

Ce château n'est que d'une moyenne antiquité, puisqu'il est prouvé qu'il n'existoit point encore en 1214. Il paraît avoir été commencé incontinent après cette époque, mais tout prouve qu'il ne fut pas l'ouvrage d'un seul siècle. En voici l'origine :

M. de Sainte-Foix, historiographe de l'ordre du Saint-Esprit, a la preuve que Roland de Rieux, qui vivait en 1140, avait épousé Adelie de Penthièvre, princesse d'une singulière beauté, et dont il eut postérité (Mémoire imprimé pour le comte de Rieux contre la maison de Rohan).

Il est très certain que Tournemine, père ou ayeul d'Olivier, passa d'Angleterre en Armorique avec une suite digne d'un grand personnage. (Je l'ai communiqué à dom Morice qui l'a employé dans ses Preuves).

L'endroit où est situé le château de la Hunaudaye étoit alors place nue, un marécage. Je ne devinerais pas quelle a pu être l'origine de son nom (car son fondateur n'avait point nom Hunaud ni aucun de ses descendants), si je ne voyais qu'un hameau qui n'en est qu'à une bonne portée de fusil à balle, aujourd'hui nommé le village Saint-Jean, à cause d'une chapelle sous l'invocation du saint qui y subsiste d'ancienneté, ne s'appeloit encore il n'y a pas deux cents ans, la Ville de la Hunaudaye.

Il s'y tenoit tous les ans plusieurs foires. Il y avait marché tous les lundis, auditoire et audience les mêmes jours. Il paraît que la chapelle étoit jadis succursale, et la grande quantité d'ossements qui se sont trouvés jusques sous ses murailles, en la réédifiant, en serait la preuve. Bref, selon les apparences, l'état où ce lieu étoit alors porta le nouveau seigneur à en donner le nom au château qu'il fit commencer.

Ce château étoit redoutable avant l'usage du canon. Il l'étoit encore au temps de la Ligue, où il tenoit pour le Roi, et où il eut toujours une compagnie de deux cents hommes à pied qui faisoit tête à la garnison de Lamballe qui tenoit pour le duc de Mercœur. Les détachements se cherchaient et se rencontraient journellement, ce qui faisoit perdre beaucoup de sang, sans que cela aboutit à rien. Enfin ils en vinrent à se respecter et firent un traité en forme de trêve, par lequel il fut dit que chacun garderoit sa place sans se guerroyer : ce qui fut exécuté ».

Ajoutons que chacune des tours avait un escalier de granit. La tour du midi, l'une des plus remarquables, contient un escalier Renaissance d'un travail délicat. En outre de cet escalier, des cheminées de la même époque ; enfin les armoiries de la maison de Tournemine de la Hunaudaye « Ecartelé d'or et d'azur », encore très visibles sur une des consoles des machicoulis de la façade est du château.

Dans un étroit réduit, à peine accessible à la lumière du jour, et que l'on ne manquera pas de vous faire visiter, une figure tracée sur la dure pierre du sombre cachot est l'empreinte laissée par la main d'un prisonnier. [Note : Voici comment se présente, à première vue, ce château de la Hunaudaye : « Son plan est celui d'un pentagone assez régulier, flanqué de cinq tours, une à chaque angle. On n'y remarque ni ouvrage extérieur, ni double bayle (enceinte), ni donjon séparé du reste de la place. L'entrée principale, avec ses deux baies cintrées, l'une spacieuse pour les chevaux, l'autre étroite pour les gens de pied , s'ouvrait dans la courtine méridionale près de la tour occupant l'angle sud-ouest, etc. ». Et M. de Courcy (De Rennes à Brest, p. 79. — Paris, Hachette) nous rappelle la date exacte (1378) du don fait à Pierre de Tournemine par Jeanne de Penthièvre, veuve de Charles de Blois, en récompense de sa fidélité, de ses hommes et teneurs en Pléven et Plédéliac « à foy, hommage et rachapt ».].

En 1781, la Hunaudaye était considérée comme forteresse, et une lettre de M. Minet au comte de Rieux en date du 17 décembre de cette même année, en donne pour preuve le devoir de « guet et de garde » qui subsiste toujours pour les vassaux de la baronnie :

« Pour ce qui est de la Hunaudaye, ce qui est dans les paroisses de Plédéliac et de Pléven ne saurait être vendu séparément du château sans déshonorer absolument cette réserve. Si vous en ôtez les rentes féodales, vous ne faites du château qu'une espèce de métayrie à qui il ne restera que du domaine. En perdant les fiefs, il perdra la seigneurie de deux paroisses, l'une dans laquelle il est, l'autre sur le bord de laquelle il est. Il y a même des rentes comme celles de guet et de garde qui ne conviennent qu'au château, à raison de ce qu'il est forteresse où les habitants des deux paroisses étaient tenus à venir monter la garde ».

En 1505, le château de la Hunaudaye eut l'insigne honneur de recevoir la visite de la reine Anne, duchesse de Bretagne, que nous avons vue au passage de la forêt, alors qu'elle revenait de « festoyer » chez son féal et amé cousin, arrêtée par les gardes des « boys » de messire le baron.

« Ce fust le jeudi d'après la feste de l'Apostre sainct Jacques, l'an de l'Incarnation mil cinq cens cinq, le sire de la Hunaudaye estant à chevaucher par les environs, voilà qu'un escuyer richement accoustré, requist l'entrée du chasteau. Puis, le dict sire estant revenu au soir, présenta à lui le dict escuyer lettre fort bien scellée. Et la dicte lettre estoit de la très crestienne roine Anne, duchesse de Bretagne, et à lui disoit qu’icelle voulant visiter son très chier cousin, elle avoit voulu avertir lui en l'avance.

Et le mardi ensuivant, à l'heure des vespres, hommes d'armes estant au haut des tours, tout d'un coup fut veu par eux grande troupe venant vers le chasteau, et le sus dict escuyer ayant recogneu la Royne cheminant vénérablement a la dicte troupe en advertit en grande haste le sire de la Hunaudaye, et sitôt le dict seigneur assemblant ses gens, baisser fit le pont-levis, et s'estant rendu sur icelui, il attendit sa souveraine dame. Et la dicte dame montée sur une blanche haquenée, estoit accompagnée du sire de Rohan et de essaims de damoiselles convenablement estoffées. Et par après marchoient foule de gros seigneurs, varlets et gens d'armes vestus de hoquetons rouges.

Et estant descendu sur le dict pont, le sire de la Hunaudaye faisant humble salutation : « Ma souveraine dame, vous plaist sçavoir que suis confus de l'honneur que vous me faictes, car j'à m'avez tant comblé que je vois avecq grand déplaisir de ne pouvoir acquitter ma debte ; vous suppliant humblement de croire que je vouloir toujours obéir à vous, à mon pouvoir, et suppliant le ciel de vous donner une vie longue, et ce pour le bonheur de la Bretaigne et du Roy Loys ».

Et la Roine gracieusement respondit : « Mon cousin say bien que vous estez ung dévoué et fidèle subjet ; aussi viens visiter vous qui avez toujours bataillé pour moi quand estois embesoignée ».

Lors, la dicte Anne s'avançant avec le dict seigneur, sonnèrent hautement les trompettes, et sonna aussi l'horloge en manière de réjoissance : ainsi se rendit la Roine en son logis, et chascun l'admiroit à part soi, car estoit belle, estant dans sa vingt-neuvième année et pour lors espouse du bon Roi très chrétien Loys le douzième.

Le soir, estant proche et ayant chevauché la Roine à travers la forest, trouva au chasteau la dicte Roine tables dressées en la Cour, et varlets tout à l'entour tenant flambeaux pour éclairer. Lors, la Roine richement accoustrée fut mise sur ung siège élevé, ayant escuyers à cheval et eschansons la servant avec grande révérence. Et la susdite table estoit couverte de vases, coupes d'or et d'argent, ayant vin fort bon jusqu'aux bords. Et en plus fust couverte par IV fois XXXVI plats contenant viandes en abondance : entr'autres, à la quatrième fois, fust apporté en grande vénération par VIII escuyers, veau entier tenant lui sur ses jambes par artifice, bien assaisonné dans le dedans, et ayant pommes d'orange dans la bouche. Et quant parent le dict plat, trompettes sonnèrent si hautement que sembloieut vouloir les tours en branler. En voyant le dict veau, la compagnie fust tout esjouie et un chascun voulut en avoir sa part » (Journal d'Olivier de la Roche).

Ce repas pantagruélique que le curé de Meudon ne désavouerait pas et dont nous croirions le récit détache de l'un de ses chapitres si Olivier de la Roche ne l'avait signé ; cette profusion de plats, de varlets, d'escuyers et d'échansons sont bien de leur temps, et à voir le soin du chapelain de la Hunaudaye à décrire « la joye » de l'assistance à l'apparition de ce veau rôti faisant son entrée triomphale sur ses quatre pattes et sur les épaules de VIII varlets, gais croque-morts d'un appétissant convoi, on devine la complaisance de Rabelais à envoyer le carême au diable.

C'est que c'était toute une affaire pour ces estomacs de condescendre à la sévère abstinence d'autrefois, surtout quand on n'avait pas comme « Messire » la ressource des « poissons royaulx » des « pescheries » de ses côtes et des succulentes perches de l'Arguenon. Au fond, on n'était pas plus dévot qu'aujourd'hui, mais la menace de la potence [Note : En 1590, le Parlement de Bretagne défend, sous peine d'être pendu, de manger de la viande pendant le carême] s'en mêlait et mettait un frein légal aux instincts carnivores.

M. Minet, dont nous venons de constater les incertitudes, au sujet de la Hunaudaye, aurait pu, nous semble-t-il, mieux s'expliquer son origine.

Les dangers que l'on courait à pénétrer dans ces bois avaient rendu ce lieu si redoutable que ce n'était pas à qui s'y aventurât.

De là : « Hûc non audet ». Il n'ose venir jusqu'ici [Note : Les ruines de la Hunaudaye sont en 1894 la propriété de la famille de Talhouët].

(un ancien rédacteur à la chancellerie).

© Copyright - Tous droits réservés.