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LA FONTAINE DE GUINGAMP

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Comme les murailles et le château, la Fontaine, le plus gracieux des monuments de Guingamp, doit son origine à l'époux de Françoise d'Amboise : c'est une erreur. On lit dans le plus vieux compte qui soit dans nos archives, celui de 1447 : « Ne se charge pas le dit procureur de certaines rentes que l'on disoit être deues aux dits bourgeois, et qui furent ordonnées autrefois pour maintenir la Plomée pour lors estant en la dite ville ; même se sont faits les précédents procureurs, passés quarante ans, exempter de s'en charger ». Quarante ans, dans le style des Bretons, veulent dire un temps immémorial, parce que c'était la plus longue prescription édictée par la Coutume, celle après laquelle tout était couvert et éteint.

La fontaine de Guingamp (Bretagne).

Donc, en 1447, la Plomée, c'est-à-dire la Fontaine de plomb [Note : Les tuyaux de conduite passaient par la rue de Montbareil, et la continuation de cette rue, à l'intérieur des murs, en a pris le nom de rue de la Pompe ; en breton : rû feunteun ar blumen, rue de la Fontaine de plomb], existait depuis un temps immémorial ; par conséquent, elle est de beaucoup antérieure à Pierre II.

Le compte de Jéhan Calouart pour l'année 1450, dont il ne nous reste que des lambeaux, apprend qu'à cette époque la Fontaine, toute ruinée, était hors d'état de servir. On y fit de notables réparations sous l'administration de Merien Chéro, qui dura deux ans, en 1464 et 1465. Le détail de ces réparations, qu'Ogée avait lu, mais très-imparfaitement, nous apprend que les eaux étaient conduites, exactement comme aujourd'hui, par des tuyaux, partie de terre cuite et partie de plomb, du coteau de Montbareil au centre de la ville, où elles jaillissaient « au bout soubzain de la Cohue, » c'est-à-dire, vers le bas de la Place, et étaient reçues dans une grande auge de pierre. Les bourgeois étaient propriétaires des champs où se trouvaient les sources principales ; ils empêchaient les possesseurs des terres traversées de planter trop près des canaux, en vertu d'une servitude qui ne paraît pas avoir été sérieusement contestée ; mais ils indemnisaient les riverains, lorsqu'ils bouleversaient leurs courtils, et les obligeaient à scier leur blé pour chercher la Plomée.

« En 1464, dit Ogée, la communauté de ville fut obligée de payer une somme de quinze sous pour la soudure du plomb de la Fontaine et la mise d'un tuyau et demi qui se trouvaient cassés ». On croirait que ce fut là toute la réparation de 1464 ; ainsi que je l'ai dit, cette réparation fut considérable et s'éleva à 8 livres, 13 sous, 2 deniers ; l'année suivante, on y consacra à peu près la même somme. Voici le, texte dont Ogée a seul fait inexactement état : « Item se descharge d'avoir poié à Jéhan Le Guilcher, le 25 jour d'avril, pour souder la dite Plomée sur la bouette qu'elle estoit cassée et rompue sous le pont de Montbareil, et y mettre un pié et demy de tuau de plon à chacun costé de la dite bouette, et pour ce : 15 sous ». — J'ajoute ces deux autres détails : « Item se descharge d'avoir poié à Rollant Le Quéré, potier, pour deux dozaines de tuaulx de terre pour mettre en icelle Plomée : 10 sous. Item à Jéhan Le Luayer pour troys charretées de grosses pierres plattes pour couvrir les tuaulx de la dite Plomée que la charette auroit rompue sur le grand chemin au-dessus de la maison Jéhan Henry : 2 sous 6 deniers ».

La fontaine de Guingamp (Bretagne).

Ogée poursuit : « En 1465, la ville paya encore une autre somme de cinq sous aux propriétaires des courtils, en dédommagement des endroits par où passoient les tuyaux de cette fontaine, aujourd'hui nommé la Pompe ». Encore une grave erreur : ce n'était pas pour les dédommager du passage des tuyaux, mais bien de la destruction accidentelle de leur récolte, qu'une indemnité, tout à fait exceptionnelle, était payée aux riverains.

Enfin, Ogée dit encore : « En 1469, vingt des plus riches bourgeois de Guingamp donnèrent chacun un écu en avance de la mise du conduit des eaux de la Fontaine ». Encore une inexactitude. Voici le texte, dont l'importance pour établir les droits que la seigneurie prétendait sur les bourgeois, en cette matière, n'échappera à personne : « Item, dit ce receveur (Yvon de Coatgourheden), qu'à chacun plez il a esté en ajournement vers le procureur de Guingamp ès causes d'office touchant le devoir de pavaige et aussi touchant la Plomée, etc. Item pour un procès par lequel fut ordonné que vingt des plus puissants des dits bourgeois eussent avancé chacun ung escu pour faire la mise de la conduite de la Plomée, le dit procès daté le 4 jour d'août 1469. - Après se décharge d'avoir poié à Frère Yves Kaerh'guillié [Note : Prieur des Frères-Prêcheurs, dont la Plomée traversait l'enclos ; pourquoi il y eut procès, ainsi que je crois l'avoir dit. Il semble que les religieux voulaient jouir des eaux au passage : ils firent de grosses réparations, que les bourgeois, maintenus dans la possession des eaux, leur remboursèrent], par l'ordonnance des bourgeois et du consentement de la justice, pour le reste qui lui estoit deu à cause de la mise par lui faite touchant la Plomée, 9 l. 9 s. 2 d. Item poia ce receveur pour ciment à abiller la Plomée, 20 d., et pour trois charretées de ardille (sic) pour mazsonner environ la masse et les bondes d'icelle Plomée » (Archives Municipales. Comptes de Meryen Chéro et d'Yvon de Coatgourheden).

Je cite Ogée une dernière fois : « L'an 1588, Pierre Le Goff, maire de Guingamp, remboursa à l'abbé de Sainte-Croix une somme de cent écus, qu'Olivier Foliard, précédent procureur des bourgeois, avait empruntée de cet ecclésiastique pour la construction de la Pompe, au haut bout de la cohue de cette ville, aujourd'hui nommée la Grande-Place ».

La fontaine de Guingamp (Bretagne).

Cette seconde fontaine était, comme la première, un bassin de pierre avec des ornements de plomb ; car nous-voyons, dans deux délibérations de 1626, que « les ornemens de plomb de la Pompe seront mis comme ils étoient anciennement, et que le maire rachettera l'auge de pierre étant actuellement chez la veuve Réné Rocancour. Sera cimenté le bassin de pierres de taille de la Pompe et seront faits des robinets aux quatre gargouilles du dit bassin, et injonction au maire de faire conduire l'eau jusqu'au bout suzain de la halle ».

La halle, qu'on nommait la cohue, était bâtie sur la place triangulaire qui forme aujourd'hui le centre et comme le coeur de la ville.

Ce fut en 1735 que l'on se décida à reconstruire les aqueducs et la fontaine, que des réparations incessantes et fort onéreuses ne pouvaient plus dès lors entretenir. Les travaux commencèrent l'année suivante, et ne s'achevèrent qu'après une foule de désagréments et de retards. Il est vrai qu'avec des ressources très-bornées, on entreprenait un véritable monument.

Les eaux qui viennent jaillir au centre de la ville prennent leur source à mi-coteau de Montbareil, et sont conduites par un aqueduc de plus de mille mètres, dont les arches en plein cintre rappellent, en quelques endroits, les constructions hydrauliques des anciens Romains. Sur l'une de ces arches on a écrit la date de 1743.

Le 28 décembre de cette même année 1743, fut enregistré le marché passé avec Corlay, le célèbre sculpteur de Châtelaudren, pour les ornements de la Pompe, moyennant une somme de quinze cents livres. Tout le monde sait ce que fut Corlay : un simple menuisier qui, en sculptant quelque ornement, s'avisa, un beau jour, qu'il était né statuaire. La communauté de Guingamp fut certes bien inspirée, quand elle lui confia sa Fontaine ; en échange de nos quinze cents livres, Corlay nous a donné tout simplement un petit chef-d'oeuvre de grâce, de fantaisie et d'originalité : rien ne porte là le cachet du XVIIIème siècle ; on dirait le caprice d'un Florentin du temps des Médicis, si le type armoricain, très-prononcé dans toutes les figure, ne venait révéler tout d'abord l'ébauchoir d'un artiste bas-breton, sur la dure nature duquel n'a pas heureureusement déteint le mauvais goût de son époque.

Guingamp : la fontaine Plomée

La fontaine de Corlay se compose de trois valves ou plutôt de trois gracieuses corbeilles superposées et de diamètres inégaux. Le premier bassin est en granit : c'est une vaste coupe toscane couronnée d’un très-élégant balcon en fer forgé ; le second est supporté par quatre chevaux marins ; le troisième par quatre sirènes qui pressent de leurs mains des mamelles gonflées, dont l'eau s'échappe pour jaillir dans les bassins inférieurs : ce troisième bassin a pour ornement des têtes d'anges et des dauphins entremêlés. Au sommet, la Vierge Marie, les pieds appuyés sur le croissant symbolique, semble prête à s'élancer vers le ciel ; vingt jets d'eau, diamantés par chaque rayon de soleil, lui forment une couronne et une auréole scintillante.

On peut reprocher à l'artiste de Châtelaudren d'avoir mêlé le sacré au profane, et la vue de ces belles jeunes filles, dont une queue écaillée termine le corps si gracieusement modelé, réveille tout naturellement le souvenir du classique exorde de l'épître aux Pisons : … Ut turpiter atrum - Desinat in piscem mulier formosa supernè.

Guingamp : la fontaine Plomée

Le sculpteur pourrait bien répondre à son tour qu'à tout prendre, ce n'est pas une mauvaise idée de faire ainsi fouler aux pieds les idoles du paganisme par la Mère de Celui qui a détruit dans le monde l'idolâtrie et le paganisme ; mais j'imagine que Corlay ne se piquerait pas de tant de philosophie, et qu'il se contenterait de dire qu'ayant à faire une fontaine, il a choisi, sans plus songer, celles des personnifications aquatiques qui lui allaient le mieux ; qu'il ne faut voir dans la Vierge que la Vierge, dans la fontaine que la fontaine, et dans l'ensemble qu'une élégante et pittoresque fantaisie. Ce qu'il y a de très-certain, c'est que les monstres marins ont sauvé la Vierge du vandalisme révolutionnaire. Il fut tacitement convenu que l'on ne devait voir là-haut que la statue de la Raison ou de la Liberté, et la fontaine fut respectée. Si, au lieu de chevaux marins et de sirènes, Corlay avait groupé des prophètes et des anges, on eût patriotiquement fondu cette masse de plomb pour en faire des balles. Un ancien plan en élévation de la ville de Guingamp, que M. de Kermartin a bien voulu me communiquer, nous montre qu'au-dessus de la Fontaine, au point où se bifurquent les deux rues de la Place, existait jadis une croix en granit.

J'ai dit plus haut que les vieilles halles, propriété des Penthièvre, s'élevaient près de la Pompe : c'était un maussade édifice qui encombrait le centre de la ville ; il fut détruit dans la seconde moitié du XVIIIème siècle, et l'on créa, en 1775, cette jolie place qui donne, au coeur même de la cité, l'eau, l'air et la verdure.

La fontaine de Guingamp (Bretagne).

En 1780, le Vally, qui s'appelait très-anciennement la Motte [Note : C'était le nom du château existant en cette place avant celui de Pierre II. — M. de La Borderie a publié, dans la revue des Provinces de l'Ouest, Tome Ier, 2ème Partie, « l’inventoire fait à Guingamp, .... jour de septembre l'an 1384, des joaux, ornemens de chappelle, vesselles d'argent, menage.... qui furent de feu Madame Jehanne jadis duchesse de Bretaigne et vicomtesse de Lymoges.... les quelles choses avoient esté apportées de la Roche Deryen où elles estoient, et livrées au chastel de la Mote de Guingamp, etc. ». — Vally et Motte sont, du reste, corrélatifs : la motte était l'élévation de terre sur laquelle était assise la forteresse, et le vallis, le fossé, la circonvallation qui entourait la motte], fut aplani par les soldats du régiment de Rouergue, en garnison à Guingamp : on avait le projet d'en faire une place d'armes et de l'entourer de casernes. Depuis la Révolution, le Vally a servi de champ–de–foire. On achève, en ce moment même de le planter et de le niveler : ce sera, dans quelques années, une vaste et magnifique promenade. Le nouveau champ-de-foire, livré depuis dix ou douze ans, s'étend au nord-est de la ville, et comprend une partie des Cantons, ancien boulevard extérieur, les douves des fortifications que l'on a comblées, et le Champ-au-Roi. (S. Ropartz).

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