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DOM MAUDEZ-RENE LE COZANNET A CAVAN ET CAOUENNEC

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Le recteur attendu de Lanmérin, M. Yves Daniel, ayant été nommé au mois de juillet 1701, désormais la paroisse pouvait se passer des services de M. Le Cozannet. Celui-ci songea donc à revenir à Langoat. Mais, à ce moment même, de préssantes sollicitations lui furent adressées de Cavan. Le saint homme, qui ne savait rien refuser, accepta d’autant plus volontiers qu’il était persuadé qu’en dehors de sa paroisse natale il pourrait plus efficacement travailler à la gloire de Dieu et au salut des âmes.

Cavan venait de perdre son recteur « noble Yves-Jean de Kergariou, bachelier de Sorbonne » qui mourut à 41 ans après en avoir passé huit dans la paroisse. Dom Maudez ne paraît pas avoir eu de relations avec lui. Les registres de Cavan, où ont signé, à l’occasion de l’enterrement, tous les principaux membres de la famille de Kergariou et tous les prêtres présents, ne le signalent, lui, d’aucune manière.

Ce fut le successeur de M. de Kergariou, « noble et discret missire Joseph-Joachim Le Borgne, seigneur du Goazwen », en Brélévenez, qui fit appel à son dévouement. Le nouveau recteur, nommé en vertu de « l’alternative des mois », n’était encore que diacre lorsqu’il fut pourvu de l’avantageuse paroisse de Cavan. Celle-ci, il est vrai, possédait le nombre de prêtres qui lui était strictement nécessaire. Ce nombre s’élevait, d’ordinaire, à trois, non compris un ou deux chapelains de châteaux.

Or les deux « servants in divinis » de M. de Kergariou, Dom Yves Le Floc’h et Dom Jacques Le Lourec, restaient dans la paroisse dont ils étaient, d’ailleurs, originaires [Note : Dom Jacques Le Lourec appartenait à cette famille des Lourec dont plusieurs membres vinrent s’établir à Quemperven où ils firent honneur à la paroisse. Louis Le Lourec marié à Marguerite Le Huérou, qui vint demeurer à Kerlastre, et Marguerite Le Lourec mariée à André Rouzaut, demeurant au manoir du Poulglaou, où elle fut longtemps à Quemperven le soutien des bonnes œuvres].

De plus, un autre prêtre du nom de Maurice Dagorn avait été nommé curé d’office à la mort du dernier recteur ; il avait même reçu de l'Evêque l’ordre de continuer ces fonctions jusqu’au moment où le nouveau recteur pourrait les remplir. Mais Dom Jacques Le Lourec, qui avait déjà plus de 70 ans, aspirait à être déchargé de tout ministère fatigant, et M. Le Floc’h, outre qu’il n’était point approuvé pour les confessions (voir Registres de Cavan, 25 avril 1695), devait quitter la paroisse, sans tarder. Il semble, d’autre part, que le curé d’office ne manifestait pas toujours à l’égard du diacre recteur la déférence convenable [Note : Voir les registres, où, vers la fin de l’année, M. J. J. Le Borgne lui-même a corrigé de sa propre main les signatures de Maurice Dagorn qui, même après l’ordination sacerdotale du recteur, continuait, indûment peut-être, à signer : Maurice Dagorn, curé d’office]. M. Joseph-Joachim Le Borgne fit des instances auprès de Dom Maudez Le Cozannet pour qu’il consentît à venir provisoirement l’aider à Cavan. Le Recteur fut ordonné prêtre aux Quatre-Temps de septembre 1701 ; mais, d’après les Statuts, avant d’être autorisé à gouverner lui-même sa paroisse, il eut à passer trois mois complets au grand Séminaire pour s’y former aux fonctions du saint ministère. Il ne put donc séjourner définitivement à Cavan que vers le milieu de décembre 1701.

A partir de ce moment-là M. Le Cozannet aurait, à la rigueur, pu reprendre sa liberté. Mais M. Le Floc’h venait de se retirer dans une autre paroisse, et le curé d’office devenu simple vicaire attendait lui-même une place vacante de recteur. Dans ces conditions, Dom Maudez qui jouissait, à bon droit, de toute la confiance du jeune recteur, fut prié par lui de rester quelque temps encore. Lorsque M. Maurice Dagorn, vers la fin de l’année 1702, fut nommé recteur de Penvénan, M. Le Borgne, toujours plus rempli de vénération pour le prêtre si saint et si modeste que la divine Providence lui avait procuré, proposa au serviteur de Dieu diverses combinaisons pour essayer de le retenir auprès de lui. Il lui offrit d’être, soit son vicaire à Cavan, soit curé de Caouënnec. M. Le Cozannet, qui tenait sans doute à conserver la possibilité de se rendre où l’appelleraient ses travaux apostoliques, ne voulut point se lier à une paroisse.

Mais, vers cette même époque, à Caouënnec un habitant, du nom de Claude Mombré, avait fait la fondation d’une messe matinale, les dimanches et jours de fêtes, et de deux autres messes en semaine. Le recteur supplia donc son bienveillant ami d’y établir sa résidence, afin de pouvoir donner son concours à l’exécution de cette fondation. Il accepta, mais avec la réserve que le recteur et le curé s’engageraient à le faire remplacer quand ses travaux ne lui permettraient pas de se trouver sur les lieux.

C’est ainsi que notre saint prêtre fut amené à rester un peu plus d’un an au presbytère de Cavan, et plus de six ans au bourg de Caouënnec.

L'église de Caouënnec (Bretagne)

Cavan était, à cette époque, une des plus belles paroisses du diocèse de Tréguier. L’esprit de la population y était excellemment chrétien. De nombreuses familles, aussi ferventes que distinguées, les de Kergariou, les Briand de Cameru, les de Kerliviou, les du Largez, qui habitaient les manoirs de Kerescarn, de Kerrouspy, de Kergrehenan, de Boisriou, etc., ajoutaient encore au bon renom de la paroisse.

La dévotion au saint Patron, saint Chéron [Note : « Il paraît qu’en 1687, les recteurs de Cavan et de Kérien-Quimperlé, trouvant une grande anologie entre les mots Sus Caraunus, (ailleurs Carannus), et Sus Kerianus, abandonnèrent ce dernier qu’ils ne cherchaient point à connaître, pour garder l’autre, resté depuis le patron de leurs églises » (Gaultier du Mottay, Essai d'Iconographie bretonne, p. 54). M. l'Archidiacre Le Pennec qui nous communique cette note, veut bien ajouter : « Le patron de Cavan serait donc Saint Kérien, ermite, disciple de Saint Ké (Vème siècle). Il y est désormais invoqué sous le nom de Saint Chéron, martyr, évêque de Chartres ». Monsieur Beüret, recteur de Cavan de 1669 à 1693, fait, année par année, à la suite de ses registres, l’historique de la paroisse. Or, à la fin de 1674, nous lisons : « Il (le Recteur) fist audit an 1674 imprimer l'Office de Saint Chéron ou Caran, Patron de cette paroisse, qui luy avait esté incognu de précédent, comme à tous ses prédécesseurs qui en faisaient mémoire comme d’un confesseur pontife, et qui l’honoraient soubz la figure et image qui est à présent au-dessous (sic) de la porte de la sacristie nouvelle, qu’il fist aussy meubler et approprier la mesme année. Priez Dieu pour le repos de son âme »], était remarquable. Elle se traduisait, entre autres traits, par la fréquence des noms de Chéron et de Chéronne donnés au baptême, et aussi par des mentions du genre de celle-ci consignée dans les registres : « Chéron de Kerliviou, fils de Escuyer Claude de Kerliviou et Damoiselle Anne Souron, sieur et dame de Kergrec’henan de cette paroisse, fut solennellement baptisé le 28 dudit mois (de mai), et au jour et feste du glorieux saint Chéron, patron et protecteur de ladite paroisse ».

Le bénéfice ecclésiastique de Cavan, si l’on en juge par les annates payées aux chanoines de Tréguier, aurait été trois à quatre fois supérieur à celui de Lanmérin.

L’église actuelle, malgré ses diverses restaurations, conserve encore, dans ses parties essentielles, le cachet du XVème siècle qui l’a vu construire. « Ses piliers prismatiques, dit Gaultier du Mottay (Géographie des Côtes-du-Nord), portent sur leurs chapiteaux des inscriptions de cette époque, et servent de points d’appui à des arcades ogivales ». « La tour, ajoute le même, surmontée d’une flèche élancée et flanquée de deux tourelles couronnées en dôme, porte la date de 1684 ».

Telle quelle cette église demeure donc un précieux souvenir des temps dont nous retraçons l’histoire. Bien souvent elle a dû être témoin de l’angélique piété avec laquelle Dom Maudez célébrait la sainte messe et priait, pendant de longues heures, au pied du tabernacle. Bien souvent, aussi, du haut de la chaire, la voix du saint prêtre a retenti dans son enceinte avec des accents de conviction qui pénétraient les coeurs.

Nous avons fait remarquer déjà que l’année 1702 est une des rares où Dom Maudez fait et signe des actes pendant la sainte quarantaine. Il est donc fort probable, comme nous l’avons insinué, que le serviteur de Dieu prêcha à Cavan même le Carême. La dévotion dont ce peuple lui donna le spectacle ne fut sans doute pas l’une des moindres raisons qui le déterminèrent à se fixer à Caouënnec, d’où il visitait fréquemment l'église-mère de Cavan, distante seulement de quelques kilomètres [Note : Le nom de Caouënnec est visiblement tiré du mot Cavan qui se prononce en breton « Caouen ». Dans L'Eglise de Bretagne de l’abbé Tresvaux, on lit qu’une vicomtesse du nom de Rojanteline avait, au XIème siècle, fondé dans un lieu de Bretagne nommé en latin « Cavana plebs » une petite communauté de filles qui fut dissoute peu de temps, après, mais qui a pu être l’origine de la paroisse actuelle de Caouënnec. Leur chapelle dédiée à la Sainte Vierge serait devenue l’église paroissiale dédiée elle-même à Marie. L’adjectif latin Cavana, cavanienne ou appartenant à Cavan, a désigné la population et l’église de cette localité, et ce mot traduit en breton a donné Caouennec. En breton Cavan signifie corneille, et cavannec, lieu habité par des corneilles. Caouen signifie hibou, et caouennec, lieu habité par des hiboux].

L’église de Caouennec récemment reconstruite conserve, entre autres souvenirs du temps de Dom Maudez, un splendide autel majeur sur lequel le saint prêtre a fréquemment célébré, et quelques vieilles statues [Note : Certains matériaux de l’ancienne église, ceux du porche, par exemple, ont été utilisés dans la construction de la nouvelle. Le clocher, qui n’a pas été retouché, porte la date de 1760].

M. Le Cozannet était depuis un an en cette trève quand le curé, Henry Nicol, fut appelé à Cavan par son recteur qui voulait faire de lui son principal vicaire [Note : Henry Nicol, natif de Cavan même, appartenait à l’une des familles les plus honorables du pays. Il avait fait à Quemperven, années 1680 et suivantes, les premiers essais du saint ministère, et comptait près de 50 ans en 1703].

Le nouveau curé de Caouënnec, Pierre Lividic, était un tout jeune prêtre de vingt-cinq ans. Il vint, à la fin de novembre 1703, résider au presbytère avec sa soeur, Louise Lividic. Il appartenait à une excellente famille d’une paroisse voisine : un de ses frères, établi dans la localité, était marié à Françoise Nicol, nièce du précédent curé.

Nouvellement sorti du séminaire, il fut on ne peut plus heureux de commencer son ministère sous l'oeil expérimenté du saint et modeste abbé Le Cozannet, dont les exemples l’aidèrent grandement à conserver sa ferveur. Le soin et l’exactitude avec lesquels le bon curé tient ses registres, ainsi que les détails qu’il y joint, sont, à son insu, des signes non équivoques de la régularité de sa vie et de la perfection de sa charité sacerdotale. Au lieu, par exemple, de passer sous silence les cas fort rares où il lui arrive de laisser des malades mourir sans sacrements, il les souligne plutôt et semble soulager sa conscience et son coeur de prêtre en racontant simplement ce qui est arrivé [Note : C’est ainsi que, dans l’acte du 9 octobre 1706, à propos de la mort de Catherine Allain, décédée à trente-deux ans, sans les secours de la religion, il écrit : « Le soussignant prêtre (Pierre Lividic) , ayant été requis pour l’entendre en confession accompagna pas à pas l’homme qui luy était venu, jusqu’au domicile de ladite défunte, où étant rendu, il la trouva morte »].

Une autre preuve du mérite de ce jeune prêtre, c’est la fidélité qu’il garda jusqu’à sa mort au saint auxiliaire avec lequel il vécut pendant six ans. Celui-ci – autre témoignage de leurs bons rapports – dirigeait spirituellement sa sœur.

Dom Maudez fut là ce qu’il avait été partout ailleurs, un prêtre de haute vertu et de grand zèle.

Plus encore à Caouënnec que dans les paroisses où il avait passé déjà, nous le voyons s’absenter régulièrement, au temps du Carême, et souvent pendant le reste de l’année. Nous savons ce qui motivait ces absences : les prédications de plus en plus nombreuses qu’il entreprenait.

Mais lorsqu’il pouvait-être présent à Caouënnec, il aidait activement le curé dans tous les actes de son administration spirituelle : les registres en font foi. Il dut même, selon toutes probabilités, prêter son concours à la réorganisation de l’école, qu’une ordonnance de l'Evêque, en sa visite du 5 mai 1706, avait privée de son instituteur dans les termes suivants : « Nous avons donné défaut, (c’est-à-dire constaté qu’il ne s’est pas présenté à la visite), contre le nomé Jan Pezron faisant la fonction de maistre d’escole dans la trève de Caouennec sans une permission expresse de nous, et avoir été jugé capable, conformément au Concile de Trente, et après avoir ouy le sieur Recteur de Cavan, lequel nous a assuré qu’il était incapable de faire ladite fonction, et qu’il y avait même du danger de le tolérer, nous avons fait déffanses aux pères et mères de quelque qualité et condition qu’ils puissent être, d’y envoyer leurs enfants, et audit Pezron d’enseigner dans ladite trève. Et sera la présente ordonnance leüe et publiée en prosne de Grande messe, à ce que personne n’en prétende cause d’ignorance ».

Cette défense portée certainement sur les indications des prêtres de Caouënnec, qui se sont couverts de l’autorité du recteur de Cavan, laisse supposer qu’une autre école pourra immédiatement recevoir les enfants.

Il était, en effet, d’usage courant qu’en pareil cas l'Evêque recourût, pour la continuation de l’enseignement, à ses prêtres, principalement aux plus jeunes. Il y a donc lieu de croire que le jeune curé de Caouënnec, aidé de Dom Maudez, celui-ci déjà exercé à cette oeuvre de zèle, se chargea, au moins pendant quelque temps, de la direction de l’école qui venait d’être fermée.

En parcourant les registres qui relatent toute la vie paroissiale de Caouënnec, pendant que le serviteur de Dieu s’y trouvait avec M. P. Lividic, on constate qu’elle ne présentait guère de différence avec ce qu’elle est aujourd’hui.

En conséquence nous n’entrerons pas dans les détails, et nous nous contenterons de signaler les quelques incidents un peu plus frappants qui sont venus, de temps à autre, pendant ces six années, rompre la monotonie de la vie quotidienne.

Son nom paraît la première fois dans un acte de baptême, à la date du 22 novembre 1702. Il y est qualifié « prestre servant en ladite Trefve ». Il eut le regret de ne pouvoir assister, quelques jours après, le 29 novembre, aux solennelles obsèques de Jan Lestic, père de Dom Jacques Lestic, vicaire de Buhulien. Ce regret dut lui être d’autant plus sensible que ce digne chrétien était son pénitent. « Il se confessa en sa dernière maladie, disent les registres, à missire Maudet-René Le Cozannet, prestre servant en ladite paroisse, et receüt de luy le saint Viatique et le sacrement d'Extrême-Onction ».

Le 5 juillet 1703, il dut offrir à Dieu un autre sacrifice. Ce jour-là, un jeudi, se fit à Cavan, à l’occasion d’une fête locale, la cérémonie très solennelle de la bénédiction de la grande cloche, du poids de 568 livres, qui venait d’être refondue et portait nom de Chéronne. Les parrain et marraine étaient Briand de Cameru, seigneur de Kerouspy, et Dame Hélène Reau, dame de Kerverrault. La bénédiction fut faite par le recteur en présence de tout le clergé de Cavan et de Caouënnec et de diverses notabilités, parmi lesquelles M. Le Mercier, Docteur en médecine de la faculté de Montpellier. Dom Maudez est le seul des membres du clergé qui ne soit pas mentionné à cette cérémonie.

A la Toussaint de la même année eut lieu l’installation du nouveau curé, M. Pierre Lividic. Si le départ du pieux ecclésiastique qu’était Henry Nicol avait causé de la peine au serviteur de Dieu, il dut se sentir bien consolé lorsqu’il comprit avec quelles dispositions de zèle ardent M. Lividic entrait dans le saint ministère. Dès le début les deux prêtres se rendirent compte qu’ils travailleraient d’un commun accord au règne de Dieu dans les âmes.

Le 6 du mois de mars 1704, Dom Maudez se trouvait encore absent de Caouënnec, lors des funérailles de M. de Coatéloury qui attirèrent un concours de peuple extraordinaire. Il dut être douloureusement impressionné quand il apprit le malheur qui venait d’atteindre ce charitable bienfaiteur et toute sa sympathique famille [Note : M. de Coatéloury avait péri avec tous les membres de sa famille, sauf un, dans la baie de Perros, à la suite d’un naufrage]. A ces funérailles avaient assisté au milieu de la foule consternée des tréviens, des représentants de toute la noblesse de la région : les de Kerjégu, les de Troguindy, les de Lézormel, les du Halgoet, etc.

Le 8 juin de la même année M. le Curé de Caouënnec maria son frère Yves avec la nièce de l’ancien curé. M. Henry Nicol. Le recteur de Cavan lui-même fit le mariage entouré de tout le clergé de la paroisse et de la trève, auquel s’était joint un jeune diacre de Trégrom, Jan Lividic, cousin du marié. M. Le Cozannet, que des liens très étroits d’amitié unissaient aux deux prêtres, fut certainement très peiné de n’y pouvoir assister.

Le 27 août 1705 eurent lieu, à Cavan, la visite épiscopale et la confirmation. Les deux paroisses de Tonquédec et de Pluzunet y étaient également convoquées. Dom Maudez travailla avec le clergé de Cavan et de Caouënnec à préparer au premier Pasteur du diocèse une réception digne de lui. S’il fuyait les honneurs pour lui-même, son zèle délicat et intelligent recherchait au contraire avec empressement tout ce qui faisait ressortir la dignité et l’autorité de ceux que leur charge élevait au-dessus de lui. Les registres des visites épiscopales rapportent que plusieurs membres de la collégiale de Tonquédec furent ce jour-là sévèrement blâmés par l'Evêque. Le clergé de Pluzunet qui, les années précédentes, s’était vu rappelé à l’ordre pour la question des Pâques accordées trop difficilement à quelques-uns, avait profité de la leçon et ne reçut que des encouragements.

Le 30 novembre suivant eut lieu l’enterrement de Pierre Mounier, vénérable vieillard de 103 ans, qui avait conservé, jusqu’à la fin, le plein usage de ses facultés. Dom Maudez, qui lui avait porté sa dernière communion, se fit un devoir d’être présent à son inhumation que présidait M. Lividic.

L’année 1706 fut pour Cavan, et pour l’abbé Le Cozannet lui-même, des plus mouvementées. Le recteur M. Le Borgne prit la décision de quitter la paroisse. Malgré les avantages très appréciables de ce poste de choix, il demanda à son Evêque, et obtint la paroisse de Brélévenez, où résidait sa famille, et où se trouvait, au Goazwen, son propre domaine seigneurial. M. François Le Goffic, recteur de Brélévenez, était bien mort le 23ème jour de mars, mois du Pape ; mais une interprétation française du droit canonique, que nous avons eu déjà occasion de signaler, mettait à la disposition de l’évêque le moyen de donner à qui il voulait les paroisses les plus enviées. Il lui suffisait d’obtenir du recteur en exercice qu’il donnât sa démission ; assez tôt cependant pour que, au moins quelques heures avant sa mort, son successeur eût réellement pris possession de la paroisse. Ainsi s’expliquent les additions suivantes qui ont été jointes aux registres de Brélévenez, à l’acte de décès et d’enterrement de M. Le Goffic : « A été présent noble et discret missire Joseph Joachim Le Borgne, seigneur du Goazwen, prêtre et recteur de Cavan, lequel, en conséquence de la démission faite à Mgr l'Evêque et Comte de Tréguier, a pris possession du bénéfice de ladite paroisse de Brélévenez, environ deux heures avant la mort dudit sieur Le Goffic ci-devant Recteur, soubz les signes des sachants signer ».

La paroisse de Cavan demeura sans recteur plus d’une année. Il n’y fut pas même nommé de curé d’office, et c’est M. Henry Nicol, vicaire, intime ami de M. Le Cozannet, qui l’administra durant tout ce temps.

Le 5 mai 1706, Cavan et Caouënnec, avec Guénézan et Botlézan, furent convoquées à Pluzunet pour la Visite et la Confirmation. Le recteur, M. Le Borgne, quoique déjà nommé à Brélévenez depuis la fin de mars, était toujours à Cavan. C’est lui qui présenta à l'Evêque la paroisse et la trêve. Nous avons rapporté l’ordonnance qui fut, faite, en cette circonstance, au sujet de Jean Pezron, maître d’école à Caouënnec.

Les registres des Visites nous en ont conservé une autre éditée le même jour qui nous révèle la situation morale et matérielle du pays, à ce moment-là.

Elle est motivée par l’acquisition que doit faire la paroisse de Pluzunet d’un encensoir d’argent et d’une croix de procession du même métal [Note : A cette époque, semblables objets se trouvaient dans presque toutes les paroisses. La Révolution les fit enlever]. L'Evêque, après avoir fait ressortir que ces objets sont nécessaires pour la dignité du culte, conseille au recteur de demander à ses paroissiens d’aider à cet achat, ajoutant « que c’est dans les temps fâcheux et difficiles qu’ils doivent donner plus libéralement aux églises et aux pauvres, pour détourner de sur eux, par leurs aumônes, les marques de la colère de Dieu justement irrité par nos iniquités ».

Le 15 décembre de la même année mourut à Cavan à l’âge de 76 ans le servant « in divinis » dont nous avons parlé, Jacques Le Lourec. Ses funérailles furent présidées par « vénérable et discret missive » Yves Thoraval, recteur de Lanvézéac, qui était son confesseur. Dom Maudez lui-même eut, cette fois, la consolation de se trouver présent avec tout le clergé de Cavan pour offrir à son ancien confrère, avec le secours de ses ferventes prières, le tribut de ses hommages et de ses regrets les plus sincères.

Le 30 mai 1707 le serviteur de Dieu eut à déplorer la mort imprévue d’un brave cultivateur originaire de Quemperven, Louis Caron, dont il avait, trois mois auparavant, béni le mariage avec une jeune fille de Caouënnec. Cet homme « mourut sans sacrements, d’autant qu’il fut subitement tué par une chute de charette, mais il avait néanmoins satisfait au précepte de la communion paschale avec beaucoup de piété » (Registres de Caouënnec).

Le coeur sacerdotal du saint prêtre fut encore attristé, vers la fin de cette même année, par une autre mort. Un enfant de dix ans, Jean Le Meur, soit par accident, soit par négligence des parents, mourut sans sacrements : « Le sieur Cozannet ayant été requis pour l’entendre en confession, accompagna pas à pas le député et le trouva mort ».

Mais le grand événement de 1707 ce fut l’arrivée du nouveau recteur de Cavan, Nicolas Le Gall. Il entra en fonction à la Saint-Michel de cette année. Dom Maudez assista à l’installation qui se fit après la grand'messe chantée par le recteur lui-même. On y observa tout le cérémonial en usage alors pour ces circonstances. Deux notaires royaux le mirent en possession du bénéfice-cure de Cavan, et l’acte en fut rédigé par eux en bonne et due forme : Nous le transcrivons tel quel en note [Note : « Nous notaires royaux... avons mis et installé le sieur Le Gall en ladite qualité (de recteur), en la possession réelle, corporelle et actuelle dudit bénéfice, et ce par la libre entrée et sortie de ladite église et du choeur d’icelle, prenant l’eau bénite, s’agenouillant, et faysant prière à Dieu devant la vénérable image du crucifix et devant le maistre autel du choeur de ladite église, touchant et baisant ledit autel, se transportant au lutrin, baisant le livre, prenant la place au choeur, sonnant la cloche, faisant lecture desdites provisions, observant les autres cérémonies ordinaires et accoutumées, laquelle prise de possession, à l’instant le requérant ledit sieur Le Gall, en ladite qualité, a été publiée par nous susdits notaires à haute et intelligible voix, tant au devant de la porte du choeur de ladite église que de la porte principale d’icelle. ... Lequel (Nicolas Le Gall) nous a de plus requis de nous transporter en la maison presbytérale dépendant dudit bénéfice. A quoy inclinants et rendus à ladite maison, avons pareillement pris possession corporelle, réelle et actuelle de ladite maison, appartenances et dépendances, par y avoir entré tant dans la cuisine, salle, chambre, que dans le jardin en dépendant, et y avoir fait feu et fumée, beü et mangé, levé motte et arraché herbe, coupé branches audit jardin, et fait tous les autres actes nécessaires pour bonne et valable possession prendre ; laquelle prise de possession lui avons délivré (au recteur), sans opposition, ni contradiction de personne quelconque, pour luy valoir et servir ainsy qu’il appartiendra »].

M. Le Gall paraît avoir témoigné, comme son prédécesseur, une grande bienveillance à tous ses auxiliaires.

L’année 1708 fut marquée par de très rudes épreuves, tant pour le curé de Caouënnec que pour son fidèle ami.

Le 5 janvier M. Lividic perd sa nièce âgée de 15 mois. Dom Maudez assiste à l’enterrement.

Mais ce premier coup n’était pour ainsi dire qu’une préparation à des sacrifices infiniment plus douloureux. Peu de jours après, le curé lui-même, et sa soeur Louise, tombèrent gravement malades.

Malgré les efforts du médecin et les soins dévoués dont M. Le Cozannet ne cessa d’entourer les deux malades, la mort s’annonça bientôt comme prochaine. Le serviteur de Dieu s’empressa de prévenir sa pénitente de la gravité de son état, et il la confessa. Il appela ensuite le confesseur de M. Lividic, Dom Jean Le Parc, recteur de Buhulien, qui rendit sans tarder le même service au vénérable malade. C’était le 8 février 1708. Le lendemain M. Le Cozannet leur apporta à tous deux le saint viatique. En même temps, comme la mort ne semblait pas imminente, il fit avertir le recteur de Cavan de vouloir bien leur administrer le sacrement d'Extrême-Onction. Il semblerait que la mort fut foudroyante pour la soeur et que Dom Maudez n’eut pas le temps d’arriver avec les saintes huiles. Contrairement à l’usage, en effet, le Registre ne signale pas qu’elle ait reçu l'Extrême-Onction : « Elle se confessa, y est-il dit, en sa dernière maladie au sieur Modé René le Cozannet, et receüt de luy le sainct sacrement d'Eucharistie ».

Le recteur de Cavan survenu peu après se hâta d’administrer le curé qui, un jour à peine après sa soeur, succomba à son tour. Il laissait à tous les habitants de la trève les plus profonds regrets. Nul plus que Dom Maudez ne ressentit cette perte douloureuse. M. Pierre Lividic, un vrai coeur d’apôtre, était en même temps pour lui un tendre ami. Ils s’étaient donné l’un à l’autre une mutuelle confiance.

Sur la demande du recteur, il promit de ne pas quitter la trêve qu’il n’y vînt un autre curé pour pourvoir aux besoins spirituels des habitants.

En conséquence, cette année il ne put guère s’absenter. Tous les actes sont faits et écrits par lui jusqu’au milieu de juin, c’est-à-dire jusqu’à la visite épiscopale qui eut lieu à Caouënnec même le 19 juin 1708.

Dom Mandez, à cette occasion, dut pourvoir avec son dévouement habituel à ce que les habitants de la trève, dont il était provisoirement le curé, profitassent, comme il convenait, de la visite de leur Evêque.

Le soin de la réception revenait de droit à son recteur. Il put donc, après avoir été la cheville ouvrière de toute la préparation spirituelle et matérielle, avoir la joie qu’il enviait tant de faire beaucoup et de passer inaperçu.

Aussi, bien loin de songer à ses propres intérêts, en manifestant le désir de conserver ces fonctions qu’il remplissait si dignement, il supplia, avec instance, qu’on le déchargeât au plus tôt d’un honneur et d’une sollicitude qui lui enlevaient la liberté de s’adonner aux travaux apostoliques qu’il appréciait par dessus tout. Il reçut le jour même pleine satisfaction. L'Evêque et le recteur de Cavan s’entendirent pour nommer au poste de Caouënnec un prêtre âgé d’environ trente-cinq ans, originaire de Cavan, Dom Guillaume Guillou, alors vicaire à Plouec.

C’est lui qui signe le premier acte des Registres, à la suite de la visite épiscopale. Dès son arrivée, le nouveau curé eut à résoudre une question à laquelle Dom Maudez était intéressé. On se rappelle que le motif principal qu’avait fait valoir M. Le Borgne, pour obtenir de lui qu’il se fixât à Caouënnec, c’était le service de la messe matinale fondée par Claude Mombré. Or cette fondation, d’abord acceptée avec ses obligations les plus onéreuses, demandait à être ramenée aux conditions plus facilement exécutables que prévoyait le contrat. Celui-ci disait : « Honorable Claude Mombré ... attendu la nécessité qu’il y a, à présent, d’une messe matinale en ladite treuve ... a donné, scavoir à la fabrice d’icelle deux boessaux de froment de rente annuelle, mesure de Lannyon, et huit sols par argent de rente par chacun an, sur un fonds de terre appelé parc-ar-goazou ou parc-an-avallen en Bulien... (pour avoir) pour lui et ses héritiers un emplacement d’enfeu dans le choeur d’en haut... Et pour ayder lesdits trefviens et avecq plus grande facilité d’avoir la messe matinale aux dimanches et festes... attendu qu’il n’y a aucune rente ou assurance de rien en ladite église pour les messes matinales, il donne et lègue... à jamais la somme de trente livres tournois de rente... au sieur prestre que lesdits trefviens auront à l’advenir pour dire la messe matinale en laditte église, à condition néanmoins audit sieur prestre de dire deux messes par chaque semaine en ladite église pour le repos de son âme et de celles de ses parents et amis trépassés, scavoir aux jours de jeudy et samedy » (Archives départementales : Fonds de Cavan). Il était prévu que si la trève restait sans messe matinale, faute de prêtre pour la dire, ladite somme reviendrait à la confrérie du Sacre (c’est-à-dire du Saint-Sacrement), pour aider « à avoir de l’huile et à tenir la lampe ardente devant le S. Sacrement ».

Dès 1705 le recteur de Cavan, et surtout les prêtres de Caouënnec, faisaient remarquer que le fondateur demandait « non seulement de faire dire une messe tous les dimanches et fêtes [Note : Il y avait alors une cinquantaine de fêtes chomées], mais encore une particulière à son intention tous les jeudy et samedy de l’année, de sorte que, pour trente livres par an, il participe à plus de deux cents messes, quoique trente livres ne suffisent que pour la rétribution de soixante » [Note : Au début du XVIIIème siècle, l'honoraire d'une messe basse était de dix sous].

L’ancien curé Pierre Lividic et Dom Maudez s’étaient entendus pour continuer à la trève le bienfait de la messe matinale. Mais, devant l’irréductibilité des héritiers qui refusaient d’entrer en composition, le recteur de Cavan, d’accord avec M. Guillou et M. Le Cozannet, résolut de supprimer la messe matinale, et d’employer l’argent de la fondation à se procurer de l’huile pour le saint Sacrement, conformément à la disposition additionnelle formulée dans le contrat du 10 décembre 1699.

Dès lors, Dom Maudez n’avait plus de raison de rester à Caouënnec. L’acte suivant est le dernier où il soit question de lui dans cette localité. Il s’agit d'Anne Querellou, 63 ans, morte le 3 novembre 1708 et enterrée le 4 en l’église de Caouënnec. « Elle s’est confessée, y dit-on, au soussignant curé et reçut par ses mains le saint viatique, et le sacrement de l'Extrême-Onction par celles de vénérable et discret missire Maudé René Le Cozannet prêtre, pendant le cours de sa maladie ».

On remarquera que Dom Maudez, en ce dernier acte, est dit prêtre tout court, et non « prêtre d’icelle ». Il n’appartenait plus à Caouënnec. De plus, le curé signe pour lui, ce qui indiquerait que le saint prêtre n’est plus dans la trève, et ne doit plus y résider.

(F. M. Henry).

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