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LES VIEUX REMÈDES THÉRAPEUTIQUES BRETONS

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Avant-Propos.
Dans la médecine populaire, on peut distinguer trois éléments, qui en font comme l'ossature.

Ce qui ressort, tout d'abord, d'une étude même superficielle, c'est l'emploi des simples : thérapeutique parfois très heureuse, car elle n'est que la concrétisation des pratiques de médecine, découvertes autrefois et transmises dans les familles de guérisseurs de génération en génération. Cette vertu curative, peut provenir, soit de l'expérimentation populaire, soit de quelques guérisseurs — moitié devins, moitié médecins — des anciens âges, qui ont transmis leurs secrets à leurs proches ou à leurs amis.

Autre source de la médecine populaire : la sorcellerie avec tout ce qu'elle comporte de sortilèges et de superstitions. L'étude ici ne devient pas instructive, car, lorsqu'on considère par quelles causes instrumentales on veut obtenir la guérison, il ne peut y avoir qu'un mouvement de pitié, mais simplement documentaire : la curiosité est vivement excitée de savoir tous les trésors de thérapeutique renfermés dans l'urine ou dans la bouse de vache, surtout quand on les emploie en emplâtres qui doivent être appliquées juste à l'opposé de la partie ou de l'organe malade, comme s'il s'agissait de poser une règle d'apparence scientifique : ablata causa, positur effectus.

Celle partie aura surtout le don de « dilater la rate », sur la « niaiserie collective » qui porte à attacher tant de prix à des pratiques où l'audace le dispute au ridicule.

Pratiques, d'ailleurs, et — c'est le troisième élément de la médecine populaire — qui rappellent le culte des anciens Druides, ou tout au moins la transposition de ce culte dans le christianisme, avec seulement un enduit pour atténuer le cynisme de son fond...

Nous avons également énuméré tous ces saints, à la protection desquels la piété profonde et quelque peu naïve des populations bretonnes se vouent en certains maux. Mais il fallait aussi, à côté de ce qui est les manifestations véritables de la foi bretonne, noter ce qui n'en est que la contrefaçon, ces saturnales, qui parfois viennent jeter un discrédit sur la dévotion authentique, comme ces pierres, ces fontaines aux pouvoirs magiques... sur tout ce qui regarde les choses les plus scabreuses de la vie.

Nous intéressant à toutes les questions qui touchent la Bretagne, et étant nous-même installé en plein cœur de la Bretagne, nous avons pensé qu'il serait peut-être utile de faire des recherches sur l'origine et la manière de procéder de la médecine populaire et de cataloguer les vieux remèdes bretons employés encore chez nous. Ces recherches jetteront aussi peut-être un jour plus clair sur ces pratiques dont l'esprit critique moderne se plaît à démontrer la puérilité. Avant qu'elles ne fussent un souvenir — autant dire curieux — il convenait de les cataloguer en une sorte de synthèse...

***

Avant d'exposer l'ensemble de notre travail qu'il nous soit permis d'exprimer notre profonde gratitude à M. le professeur Seyot, doyen honoraire de la Faculté de Pharmacie pour le très grand honneur qu'il nous a fait en acceptant de présider la soutenance de cette synthèse.

Que M. le professeur Meunier, professeur de Parmacie galénique à la Faculté de Pharmacie, nous permette de lui offrir nos remerciements les plus sincères et nos sentiments de respectueuse et profonde reconnaissance pour tous les conseils qu'il nous a donnés pour la rédaction et l'exposé de notre sujet.

Nous tenons à remercier tout particulièrement M. le professeur Guérithault, professeur à l'Ecole de Médecine et Pharmacie de Nantes, qui nous a inspiré l'idée de ce travail : qu'il veuille bien nous permettre de lui dire toute notre reconnaissance, pour l'intérêt qu'il n'a cessé de nous porter et pour tout ce qu'il a fait pour nous, pendant nos années d'études, et pendant nos années d'internat à l'Hôtel Dieu de Nantes.

Enfin nous prions ceux qui nous ont facilité notre tâche, et tous ceux qui se sont mis à notre disposition, avec une amabilité entière, de trouver ici l'expression de nos bien vifs remerciements, et de croire à notre reconnaissance.

PREMIÈRE PARTIE.
La première partie de ce travail est consacrée aux plantes employées en médecine populaire, et aux maladies traitées par les plantes.

Après quelques mots sur l'origine de ces remèdes à base de simples et sur la manière de les employer, nous les avons classées par famille botanique, en mentionnant leur nom breton et latin.

Nous devons toute la documentation de cette première partie au barde breton bien connu, botaniste réputé, M. Louis Le Floch.

C'est l'emploi des plantes en Bretagne pour les différentes maladies qu'il a recueilli près des guérisseurs et des personnes qui en usent. Il les a publiées dans une revue bretonne An Oaled. Le Foyer et il a eu l'amabilité de m'en donner la traduction française pour me permettre de faire cette thèse. De notre côté nous avons également recueilli certaines près de gens qui se sont fait soigner par des guérisseurs.

DEUXIÈME PARTIE.
Dans cette seconde partie, nous avons étudiés et classés par maladie ce qu'en Bretagne on appelle les remèdes de bonne femme. Pour cela nous avons fait usage d'une large documentation, et nous avons consulté de nombreuses publications, en nous attachant surtout aux nombreux articles et thèses de médecins. Nous avons également de notre côté, recueilli de nombreux cas de maladies traitées par les remèdes de bonne femme : et cela est encore très courant de nos jours.

TROISIÈME PARTIE (à faire).
Dans cette dernière partie, nous acons passé en revue les Saints, qui en Bretagne, passent pour guérir certaines maladies. Là aussi même remarque que pour la deuxième partie.

Enfin, dans un appendice à cette troisième partie, nous avons cités quelques croyances superstitieuses : les cloches guérisseuses, les croyances aux fontaines guérisseuses, et les croyances aux pierres guérisseuses.

 

Introduction.

« Les herbes et les arbres qui sont dans le monde peuvent servir de tous remèdes ; c'est simplement parce qu'on ne s'entend pas bien à les distinguer qu'on ne les utilise pas.

Autrefois, vivait dans l'Inde un saint roi médecin nommé Jîvaka, capable de combiner et de réunir les herbes médicinales ; il avait la forme d'un jeune garçon : ceux qui le voyaient éprouvaient de la joie et étaient guéris de toutes leurs maladies. Parfois avec une seule plante, il soignait toutes sortes de maladies ; parfois, avec toutes sortes de plantes il soignait une seule maladie. Parmi les herbes qui sont dans le monde, il n'y en avait aucune qui ne fut susceptible d'être employée par lui ; parmi les maladies qui sont dans le monde, il n'y en avait aucune qu'il ne pouvait guérir.

Quand la vie de Jivaka prit fin, les herbes du monde se mirent à pleurer en même temps et toutes se lamentaient disant :

Nous pouvons toutes être employées à la guérison des maladies ; mais, seul, Jivaka était capable de nous bien connaître. Les hommes qui viendront plus tard se tromperont parfois en nous employant ; péchant tantôt par excès, tantôt par défaut, ils feront que les maladies ne guériront pas, et ainsi on incitera les gens à penser que nous ne sommes point divines. C'est en songeant à cela que nous pleurons et gémissons.

Or, il y avait une plante nommée haritaka qui, se tenait à l'écart, était seule à ne point pleurer. Elle disait :

Toutes les maladies, je suis capable de les soigner : ceux qui me mangeront seront tous guéris de leurs maladies ; ceux qui ne me mangeront pas ne guériront pas. Il n'est pas nécessaire d'avoir recours au discernement d'un homme, et voilà pourquoi je ne pleure pas » [Chavannes, professeur au collège de France - 500 contes chinois traduits par Tsu-Pi-Yu-King, n° 189].

Comme en fait foi ce conte antérieur à l'ère chrétienne, les Indous ne se souvenaient déjà plus, à cette époque, des formules magiques qui donnaient aux plantes leurs vertus. Des erreurs avaient dû se glisser dans les incantations qui n'agissaient pas et, seule, l'herbe purgative faisait encore de l'effet parce qu'elle n'avait pas besoin du secours de la magie.

La vérité, c'est que, sous l'influence du Bouddhisme ou de religions pré-bouddhiques, les Indous ne comprenaient plus les préceptes magiques qui, comme l'imagine Lord Raglan [Lord Raglan, président de l'Association britannique pour l'avancement des sciences - Le tabou de l'inceste] conquirent l'univers, voici quelques millénaires.

Totems, tabous, décompteurs et nos prédécesseurs sorciers herboristes, sont des vestiges de ces vieilles croyances.

Leurs formules se sont plus ou moins bien conservées, mais partout où elles se retrouvent, elles procèdent du même système. Les guérisseurs nègres, bretons, indous, chinois ou égyptiens étaient frères spirituels.

On le voit dès la plus haute antiquité, les guérisseurs régnaient en maîtres ; il n'est pour s'en rendre compte que de consulter l'histoire ancienne. Un coup d'œil sur le monde vous offre de nos jours le même spectacle, aussi bien chez les quelques Indiens d'Amérique, encore existants que chez les noirs d'Afrique, ou les Indous, ou les Asiatiques.

En France, deux centres principaux de guérisseurs ont subsisté : le Bas-Poitou et surtout la Bretagne ; nulle part la médecine populaire ne semble s'y être aussi profondément enracinée.

La Bretagne, la terre des traditions par excellence semblait être de tout temps prédestinée à la médecine populaire.

« Les paysans bretons sont essentiellement traditionalistes et l'évolution est infiniment lente dans ce pays où tout se conserve précieusement. Parcourez les Pardons, lisez les conteurs Bretons, interrogez les paysans, et vous verrez combien l'âme bretonne a gardé cette empreinte du passé. Malgré toutes les découvertes modernes dont les sciences médicales ont bénéficié largement en dépit de tous ces progrès, on constate que la médecine populaire qui repose peut-être sur des préjugés, est toujours aussi tenace dans nos campagnes bretonnes ».

Cette médecine populaire y est pratiquée par des personnes que l'on nomme « guérisseurs » (et de nos jours encore, elles sont nombreuses en Bretagne) parce qu'elles ont le « don » de guérison :

A quoi attribuer ce don ?... à différentes causes qui semblent toutes bien mystérieuses...

Il sera par exemple, la propriété du septième enfant d'une même famille, à condition que les six premiers soient du même sexe et le septième de l'autre sexe. Ou encore, en bénéficieront, toutes les personnes nées aussi avec présentation du siège mais les pieds en avant. Ce don les différencie des rebouteurs, qui eux, opèrent à l'aide d'un secret transmis de père en fils...

Les guérisseurs agissent, les uns par incantation, d'autres par imposition des mains, d'autres enfin ont souvent recours à l'emploi des simples ou à des remèdes de leur fabrication. Ils sont de l'un ou de l'autre sexe, et chacun, du moins bien souvent, a sa spécialité.

Les femmes ne guérissent généralement qu'au moyen de simples, des « Louzou » comme on les appelle en Basse-Bretagne, constitués, comme nous le verrons, par des tiges, des fleurs, des racines que l'on administre en infusion ou que l'on applique en cataplasmes, ou en onguents. La préparation de ces remèdes et fort longue, car il faut bien se garder de changer l'ordre prescrit pour la cuisson de ces plantes.

Voici quelques-uns de ces guérisseurs cités en exemples par le Dr. Giffo dans sa thèse inaugurale :

« Mme M..., a habité longtemps les ruines du château de Rusquec, près de la Chapelle de Saint-Herbot, en Plonévez du Faou, à quelques kilomètres du Huelgoat, et on accourait de toutes parts pour la consulter. Elle guérissait « d'après les urines ». Il fallait lui apporter un litre de ce liquide ; elle en faisait « l'exposition », puis elle « prononçait » et se retirait pour préparer un ou plusieurs flacons d'infusion d'herbes secrètes ; elles les livrait ensuite au malade sans en indiquer le prix » [Dr A. Giffo - Thèse médecine, Montpellier, 1913].

« Le canton de Pont-l'Abbé a le bonheur de posséder deux guérisseurs célèbres : l'un, le sieur B... habite le bourg de Saint-Jean-Trolimon ; l'autre, le sieur D... les environs de Pont-l'Abbé ».

« Le canton de Concarneau possède, à Leneven en Beuzec-Conq, un guérisseur très recherché et d'un type particulier, car il est en même temps sorcier. Pendant que le malade lui indique les manifestations de son mal, le bonhomme paraît lire attentivement un vieux livre imprimé dans une langue ancienne et, l'exposé terminé, il continue quelque temps sa lecture ; puis, fixant le malade à travers ses lunettes, il prononce gravement : « Je vous promets de penser à vous dans mes prières » et il indique le jour et l'heure. C'est la médication des cas légers. Dans les cas graves, il ajoute à ses prières un petit gâteau de cire enveloppé dans un sachet de grosse toile et dans lequel il a incorporé, pendant la fusion, une feuille d'aconit, quelques gouttes d'huile et les deux pattes antérieures d'une taupe ».

« La commune de Penmarch a l'avantage très appréciable de pouvoir recourir aux soins d'une vieille bigoudène. Sa langue a la propriété de guérir les maladies des yeux chez les jeunes enfants, particulièrement la « toque » des yeux (c'est ainsi que l'on nomme l'ophtalmie lymphatique). Cette même langue serait très habile à enlever les corps étrangers des yeux » [Dr A. Giffo - Thèse médecine, Montpellier, 1913].

A côté des guérisseurs se trouvent aussi en Bretagne les rebouteurs.

« C'est surtout dans les luxations et les entorses que rebouteurs et rebouteuses sont à leur affaire » [Dr A. Giffo - Thèse médecine, Montpellier, 1913].

Les rebouteurs ou rebouteuses possèdent (souvent d'héritage) des formules dont ils tiennent soigneusement cachée la composition.

« L'entreprise Le P... de Quimper, a l'avantage de posséder un rebouteur, charretier, d'une musculature peu commune, et dont les mains calleuses ne manquent pas de vigueur ».

« Le canton de Pont-Croix, possède un rebouteur consultant. Il est appelé pour contrôler les diagnostics et les traitements des médecins de la région ; il n'opère pas lui-même ! » [Dr A. Giffo - Thèse médecine, Montpellier, 1913].

« Le canton de Pont-l'Abbé, possédait, il y a quelques années, dans la personne du sieur Th... employé à la Compagnie d'Orléans, un rebouteur fameux dont la notoriété s'étendit bien au loin des limites du canton » [Dr A. Giffo - Thèse médecine, Montpellier, 1913].

M. Lajat chargé du « Cours d'histoire de la Bretagne » à l'institut des lettres de Nantes, m'écrit : « Les sorciers et les rebouteurs, dont j'ai connu aussi quelques types dans le Finistère, ne sont pas des personnes différentes : notamment, un nommé « Jobic ar Saout » résidant à Plougarden, opérait, il y a quelques temps, comme un vrai sorcier. Ce Jobic ar Saout, paysan assez aisé, soignait souvent les animaux ; il avait une grande foi en sa puissance. Etant entré chez lui, un jour qu'il était malade, je lui proposais d'appeler le médecin, il me répondit qu'il savait ce qu'il avait et qu'il dirait les paroles nécessaires. Le lendemain, il était, paraît-il, bien portant, il avait, disait-on, un livre mystérieux, qui, pour moi, devait étre un exemplaire du Grand Albert, livre qui eut sa célébrité aux XVIIème siècle et XVIIIème siècles » [Lajat - Lettre manuscrite].

Il ne faudrait pas rejeter en bloc l'expérience médicale des siècles précédents. Il subsiste toujours un peu de vrai au fond des plus extravagantes formules cabalistiques.

Les premiers fondeurs précipitaient leurs femmes avec le minerai dans les fours. Le minerai élément mâle, ne pouvait, croyaient-ils, produire de métal que grâce à un élément femelle. Les fondeurs étaient des artistes, ils voulaient être créateurs et donner à leur œuvre un sens cosmique. Cette œuvre ne pouvait s'accomplir que si deux sexes se trouvaient en présence. Aujourd'hui encore, les fondeurs chinois jettent dans le métal en fusion leurs ongles et leurs poils, éléments femelles du corps [Guénet - L'Asie centrale].

Les sorciers, eux-aussi, étaient des artistes. Ils entouraient leurs remèdes de « formules créatrices » qui nous semblent incompréhensibles.

Dissocier la « formule créatrice » du remède c'est un travail qui dépasserait le sujet de cette thèse et nos compétences. Nous croyons cependant utile d'examiner, dans cette introduction, les différents éléments créateurs : nombres, signes, animaux totémiques, plantes, pour essayer de retrouver le remède sous les incantations.

NOMBRES.

Au temps où le masculin et le féminin n'étaient pas seulement un artifice grammatical, mais une réalité pour les esprits des hommes d'alors, les nombres eux aussi avaient acquis un sexe. Les nombres pairs étaient femelles et les impairs mâles. Additionner ou multiplier un pair et un impair, c'était accomplir un acte créateur.
1 + 2 = 3 [Guénet - La pensée chinoise]
2 + 3 = 5 [Guénet - La pensée chinoise]
3 + 4 = 7
4 + 5 = 9
5 + 6 = 11
6 + 7 = 13,
3 x 3 = 9
3 x 4 = 12
5 x 5 = 25, etc.
Voilà autant de formules appelées à un retentissement cosmique, capables d'influencer la reproduction des animaux domestiques, de faire lever les céréales, par conséquent, d'agir sur les misères humaines.

C'est pourquoi les remèdes d'autrefois tirent souvent leur force vitale des nombres premiers.

Voici quelques-uns de ces remèdes tirés de la mystique des nombres :

Pour chasser la fièvre, appliquer pendant deux jours sur votre pouls un emplâtre constitué par 5 gousses d'ail, 5 racines de persil (un peu de suie de cheminée et une pincée de gros sel).

Un autre procédé pour exploiter la vertu des nombres premiers, c'est de décompter l'incantation.

LES SIGNES.

On retrouve naturellement dans la composition des remèdes, les signes magiques qui expriment une idée de fécondation :
Le triangle = stylisation des organes féminins [Morgan - L'Humanité préhistorique].
La croix = symbole de la terre.
Les 4 Orients ou le Carré.
Le Cercle = symbole du Ciel.
Le Centre, etc, etc...

Dans la région de Beuzec-cap-Sizun, on guérit la goutte et les rhumatismes en faisant au malade des scarifications du palais. Les deux incisions sont faites en forme de triangle.

***

LES ANIMAUX TOTÉMIQUES.

Les sorciers emploieront tout ce qui pourra leur sembler capable de provoquer un flux vital. Les anciens animaux totémiques qui représentaient un interdit sexuel seront souvent mêlés aux formules magiques et, particulièrement, les déjections de ces animaux serviront aux remèdes [Freud - Totem et Tabou] (de même les œufs, le lait, le beurre).

Les Brahmanes indous se purifient par des absorptions et des ablutions d'urine de vache [Miles - Le culte de Civa], nos bretons emploieront souvent la bouse des animaux domestiques et le vin qui pourrait fort bien avoir remplacé l'urine.

Voici d'ailleurs quelques exemples de ces remèdes : contre les angines, appliquer un cataplasme de blanc de baleine et de bouse de vache.

Contre la douleur provenant d'un effort, appliquer un cataplasme de bouse de vache.

On guérit les maladies d'yeux par des applications d'œufs fraîchement pondus, encore chauds.

Sur les tumeurs, appliquer une bonne poignée de bouse de vache, la plus fraiche possible, infusée d'abord pendant douze heures dans une chopine de vin rouge, etc...

LES PLANTES.

Toutes les plantes qui entrent dans le composition des remèdes de bonnes femmes n'ont pas été choisies pour leurs propriétés reconnues.

Pour guérir les yeux, on se sert de l'herbe de saint Jean, passée à la flamme du feu de la Saint-Jean ; mais le jour de la Saint-Pierre on se sert de l'Artemisia abrotanum.

Il est bien évident que l'herbe employée n'a d'autre vertu que de rappeler le nom de Saints catholiques qui, dans l'esprit des Bretons, ont remplacé quelques vieilles divinités auxquelles on attribuait un pouvoir créateur.

Enfin, à certaines plantes, comme le trèfle ou la digitale, le nombre impair des feuilles ou des pétales donnait peut-être un flux vital.

Rendre au malade, par des moyens magiques, le flux vital qu'il avait perdu, n'était pas le seul système des sorciers bretons. Pour vaincre le Mal, ils essayaient aussi de le faire passer dans le corps d'un animal inférieur, d'une plante ou d'un objet.

Ce sont probablement là des restes de mythes métempsychiques d'origine fort obscure !

Cette médecine populaire, ainsi que le dit le Dr Paul Delaunay, est faite de survivances, elle se rattache aux origines mêmes de l'art de guérir : magiques, religieux, scientifiques, traditionnels, tels sont les fondements de la thérapeutique populaire [Dr P. Delaunay - Médecine internationale illustrée, janvier 1930].

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PREMIÈRE PARTIE
Plantes médicinales employées en médecine populaire en Bretagne et maladies traitées par les plantes.

Introduction.

Les plantes, en Breton « er louzen aj » auxquelles la croyance populaire attribue une vertu curative, jouent un grand rôle dans la médecine populaire. A l'origine, il n'y a aucun doute à ce sujet, les plantes furent les premiers médicaments ; les hommes en découvrirent peu à peu et par hasard, les propriétés, soit en imitant les animaux, soit en observant certains cas d'empoisonnements ou de bien-être provoqués par telle ou telle plante. « Dieu, disent-ils, n'a pas seulement créé l'herbe pour la nourriture des animaux ; il en a créé pour que les hommes aient des remèdes, il a donné à la plus petite plante une vertu spéciale ? ».

« La nature nous a donné des moyens naturels de traiter les maladies en utilisant des simples ».

Ces simples auxquels ont recours non seulement les gens de l'intérieur des terres « l'ar-coat », comme on semblerait le croire, mais aussi beaucoup de gens de la côte et même les insulaires, en un mot les habitants de « l'Ar-Mor », sont employés et vendus par les guérisseurs les « marchands d'herbes » comme on les appelle — et dont la réputation s'étend au loin.

Sans diplôme, sans enseigne, sans réclame d'aucune sorte, la maison du marchand d'herbes est bien connue dans les cantons d'alentour. Un jardinet suffit à l'approvisionnement de son magasin.

On y trouve de la Tanaisie « er vann louzen », ou « Luzenen en buen » (la mère des herbes ou herbes aux puces ; de la bryone « Iruinen doar » ; de millepertuis « louzenen en drouch » (l'herbe à la coupure) ; de la centaurée « Louzenen en terluan » (l'herbe à la fièvre), etc., plantes dont l'emploi réglé par les indications du guérisseur soulagent les clients de telle ou telle maladie.

Entre tous les remèdes donnés par les guérisseurs ou les rebouteurs, les simples ont gardé et garderons encore pendant longtemps, une place importante dans la thérapeutique populaire.

Ces remèdes à base de végétaux sont administrés sous forme d'onguents, de cataplasmes, de pommades, d'infusions, de macérations aqueuses ou vineuses. Seul, le guérisseur sait choisir la plante ou les plantes qui conviennent à la maladie. Seul, il sait confectionner le mélange des plantes cueillies tel jour, ou telle nuit, à telle ou telle heure, et préparer des cataplasmes, onguents, pommades et infusions ; cette préparation est fort longue, et il en garde jalousement le secret qui se transmet de père en fils.

Dans ce chapitre, nous allons voir les principales plantes employées en thérapeutique populaire, sous quelle forme on les administre et dans quelles maladies.

Voir aussi   Vieux remèdes de Bretagne "Plantes médicinales employées en médecine populaire en Bretagne"

Voir aussi   Vieux remèdes de Bretagne "Maladies traitées par les plantes en Bretagne"

Voir aussi   Vieux remèdes de Bretagne "Les vieux remèdes de bonne femme en Bretagne"

Voir aussi   Vieux remèdes de Bretagne "Les saints guérisseurs et les cloches, fontaines, pierres guérisseuses en Bretagne"

 

Conclusion.

Voilà donc classés tous les moyens populaires de se rendre maître du mal, sans avoir recours à la Faculté, en la frondant même parfois. Guérisseurs, rebouteurs, sorciers, superstitieux, y sont décrits avec impartialité.

De cette étude, il faut retenir plusieurs enseignements :

D'abord, qu'il existe à côté de la thérapeutique encadrée et revêtue du cachet de la science, une autre thérapeutique populaire, officieuse. On peut dire d'elle ce qu'on disait de ces nombreux artistes de notre vieille province bretonne, qui composent des œuvres « spontanément », elles se manifestent par un « je ne sais quoi de naïf », qui n'est peut-être pas de l'art « pur en son midi », mais qui rappelle les premières ébauches de peinture ou de sculpture qu'on retrouve dans la préhistoire de l'art. Avec des âmes d'artistes, s'ils n'ont pu composer des œuvres classiques, il leur manquait l'instrument pour traduire leur âme. Les guérisseurs ont un peu de ces premiers artistes : ils ne peuvent réussir dans l'art.

Toute la médecine populaire est là, et si la loi ne peut la reconnaître car la médecine est un instrument qui ne peut être manié — le bien général le réclame — que par des hommes reconnus aptes, il n'en est pas moins vrai qu'elle subsiste encore, tout en se cantonnant dans sa modeste sphère, dans nos départements bretons.

Mais ce n'est plus ni ébauche d'art, ni ébauche de science que ces pratiques ridicules et fantasques des sorciers et de leurs apparentés. Cela est à proscrire énergiquement, ainsi d'ailleurs que ces coutumes bizarres qui courrent le peuple quand il apprend que telles maladies particulières viennent accabler un malade. Cela, c'est la contrefaçon non seulement de l'esprit humain et de la thérapeutique officielle mais encore de l'authentique médecine populaire.

Disons le sans fausse honte, notre région sur ce point est peut-être poétique, mais ces remèdes de bonne femme ne font pas toujours honneur à son sens pratique. Peut-être y a-t-il là un reflet de l'imagination quelque peu fantastique que tout breton porte en lui, même à travers le monde. L’amour de la fable et du conte est au fond du tempérament celte. Chez les intelligences supérieures, il a conduit à l'esprit de recherches scientifiques, et chez les écrivains à de véritables chefs-d'œuvre emprunts d'une forte personnalité. Mais cet amour du mysticisme et de la fantaisie dans les intelligences frustres nous a valu une foule de traditions, et en thérapeutique, de remèdes, où vraiment la plupart du temps, on rechercherait les données du bon sens.

Regrettons aussi également que le sentiment, chez des gens « peu avertis » ait donné naissance à une thérapeutique que j'appellerais religieuse-pierre de tel saint, menhir de tel autre………. que sais-je, pratiques vraiment bizarres et incompréhensibles.

Dans ce travail, nous avons essayé de cataloguer tous ces remèdes un peu disparates, que l'on désigne vulgairement sous le nom générique de remèdes de bonne femme, et de figer en quelque sorte sur le papier pour en perpétuer le souvenir très curieux dans les archives pharmaceutiques, les pratiques mystérieuses d'un monde qui tend à disparaître devant le progrès des sciences modernes.

(Paul Romieux).

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