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LA PROMENADE DE LA RABINE A VANNES.

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La Rabine. — Pendant des périodes géologiques dont la durée est incalculable, la mer a battu nos côtes avec une violence et une fureur inlassables. Les îles et les roches si nombreuses que l'on voit au large, sont les témoins de rivages disparus, les débris de continents détruits ou engloutis.

Promenade de la Rabine à Vannes (Bretagne).

Quand elle eut rompu et franchi le seuil de Port-Navalo, et que, brisant tous les obstacles qui s'opposaient à sa course, elle eut rempli le golfe entier du Morbihan, et poussé des ramifications, loin à l'intérieur des terres, elle se trouva finalement arrêtée devant la butte de Kerino, épaisse muraille de granit qui reliait alors le village de ce nom et le lieu appelé depuis la Chevrinière. Se ruant encore contre cette dernière barrière, elle parvint à la longue à y pratiquer une fissure qui, bientôt élargie, permit à ses flots de se répandre dans une dépression de terrain existant au-dessous du village de Trussac. Puis, contournant le massif rocheux de Kerino, elle trouva un passage dans une sorte de couloir en équerre entre ce massif et la pointe de la Sentière, à l'endroit occupé en 1918 par une Fonderie.

Elle put alors étaler ses eaux dans le bassin limité à l'ouest par la terre de Kaer, à l'est par la montagne de Calmont, et au nord par la colline où plus tard devait s'élever la ville de Vannes. Elle enlaçait de ses bras les flancs de ce dernier promontoire, et quand la nouvelle ville fut entourée de murailles ; ses flots continuèrent à couler librement dans les fossés des nouveaux remparts. L'extension ultérieure de la première enceinte, et certains atterrissements formés par les alluvions, contribuèrent à limiter subséquemment et à contenir ses divagations. Cependant, jusqu'au XVIIème siècle, le mouvement diurne des marées portait encore ses eaux jusqu’au faubourg Saint-Patern d'un côté, et, de l’autre jusqu'aux abords de la porte Saint-Salomon.

Il y eut donc de bonne heure, dans ce fond du golfe, où débouchaient plusieurs ruisseaux, une sorte d'estuaire que les habitants, qui étaient venus s'établir au sommet de la colline, ne tardèrent pas à utiliser pour leurs relations avec les populations côtières. Un commerce maritime très actif y existait déjà au moyen âge. De nombreuses barque, utilisant les chenaux que le flux et le reflux avaient creusés entre les diverses laisses de la mer, venaient y apporter tout ce qui était nécessaire aux besoins de la vie urbaine, et à ceux du plat pays dont les produits pouvaient aussi être exportés par la même voie, Les opérations de chargement et de déchargement de ces embarcations d'un faible tonnage s'opéraient par les moyens les plus primitifs. Il n'y avait ni quais ni jetées. Quelques pierres roulées (des pierres de moulins, disent les anciens actes) ou des amas de sable et de cailloux, que la mer recouvrait à chaque marée, formaient les voies d'accès par lesquelles les charrettes venaient se placer sous les palans des bateaux ancrés au bord du chenal.

Le havre n'était en réalité qu'une grande vasière, sillonnée de divers chenaux, entre lesquels s'étaient formées de nombreuses bosses ou platures, constituant parfois des îlots ou de petits tertres assez élevés, et dont certains étaient reliés à la terre ferme par des ponts de bois ou des chaussées submersibles. Cet état de choses subsistait encore au commencement du XVIIème siècle, époque à laquelle la Communauté obtint de Louis XIII la propriété (qu'on lui contestait) de toutes les terres vagues et vaines, marais et mollières, formant le port de Vannes.

Il y avait alors sur la rive, droite de ce port deux tertres principaux que la mer entourait en partie, mais sans jamais les submerger. Sur l'un de ces tertres, situé à 20 ou 30 mètres au delà du kiosque actuel de la musique, on avait élevé la chapelle Saint-Julien. La seconde éminence était à l'entrée de la future Rabine, à l'endroit où l'on bâtit plus tard le bloc des deux ou trois maisons qui masquent en 1918 l'entrée de la rue du Drézen. Et c'est ce dernier tertre qui fut l'embryon de la promenade actuelle, dont la construction se fit par sections à des dates très espacées.

On commença, d'abord, par prolonger ce tertre le long du rivage, au moyen d'une jetée assez étroite que Dubuisson-Aubenay, l'érudit voyageur qui séjourna à Vannes en 1636, nous a décrite dans les termes suivants :

« Mais sortons par la porte prochaine de Saint-Vincent : Vous passez le pont à six arches qui est devant, et prenant à droite, vous allez le long de la rivière et du quay sur lequel il y a un petit môle de cent pas avançant dans la rivière, qui sert de promenoir aux marchands et à tous ceux de Vannes ».

Ce môle, d'une longueur de 80 à 90 mètres, atteignait à cette époque le point où est situé aujourd'hui le poste de la douane, et dominait une levée, formant quai le long du grand chenal. Dans cette levée, on avait aménagé trois ou quatre calles pour l'accostage des navires.

Le prolongement de ce petit môle était lié au développement du quai, dont la continuation toujours réclamée, ne put être réalisée qu'un siècle après la visite de Dubuisson-Aubenay. Entre temps, il avait été élargi, et le terrain marécageux à l'ouest avait été remblayé avec des détritus et des terres rapportées, de telle sorte qu'au commencement du XVIIIème siècle on put bâtir, en avant de la rue du Drézen, la plupart des maisons de la rue actuelle du Port. En 1719, on fit sur le môle une première plantation d'arbres. Un projet, dont le plan se trouve aux archives départementales, fut établi vers cette époque par l'architecte Delourme pour continuer les quais dans la direction de la Sentière. Il fut déclaré adjudicataire de l'entreprise en 1727, pour un prix de 32.990 livres ; et, après sa mort survenue en 1729, l'ouvre fut continuée par ses héritiers et paraît avoir été achevée en 1733.

Promenade de la Rabine à Vannes (Bretagne).

Les travaux de de dévasement du chenal, poursuivis dans les années suivantes, permirent de combler les trous et les marécages existant en face de l'église des Carmes et du Père- Eternel ; et, dès 1745, on décída de resabler les allées du môle et de les continuer le long du nouveau quai. A la séance du 13 novembre 1747, on présenta à la Communauté un projet et un devis pour la prolongation de ce petit mail. L'entreprise fut adjugée au sieur Pinaut pour un prix de 2.610 livres. Elle comportait la construction de murs semblables aux anciens, de tablettes, de sep passées, et d'une marche au midi conforme à celle du nord. L'adjudicataire devait, en outre, établir 12 bancs de pierre, faire le pavage des passées, sabler les allées, et y planter 76 arbres au lieu de 64 prévus au devis. Le procès-verbel de réception de tout le travail porte la date du 10 novembre 1749.

La ville, posséda dès lors une jolie promenade plantée, dont la longueur, d'environ 170 mètres, allait être considérablement augmentée à la suite des grands travaux qui se firent peu après pour l'amélioration du port. Ce port se comblait de plus en plus, et les faibles sommes que la Communauté pouvait consacrer chaque année à l'enlèvement des vases étaient insuffisantes pour lutter contre les apports journaliers de la mer. Elle avait pu, cependant, de 1747 à 1748, déblayer le terrain bosselé qui s'étendait au bas de la butte de Calmont, et établir sur la rive gauche du port en avant de la rue du Commerce, des talus et un petit mur formant quai.

Enfin, en 1752, elle obtint des États de Bretagne une première subvention de 60.000 livres qui allait permettre l'exécution des projets élaborés, à diverses époques. Ces projets comportaient notamment la construction d'écluses de chasse, par lesquelles on espérait combattre les envasements perpétuels du chenal. Une commission de cinq ingénieurs, envoyée par le duc d'Aiguillon, vint en 1754 recorsnaître et étudier les moyens à employer pour remédier à cet état de choses, et rétablir ou augmenter la navigation du port. Le projet rédigé par l'un d'eux, M. Chocat de Grand maison, fut approuvé par arrêt du Conseil du 21 décembre 1754.

Bien que nous ne fassions pas ici l'historique de notre port, nous croyons devoir ajouter que l'idée fondamentale de ce projet reposait sur le fonctionnement d'écluses de chasse, à l'aide desquelles on comptait pouvoir rendre un chenal son ancienne profondeur, en enlevant par la rapidité du courant les vases qui l'encombraient et le rendaient inaccessible aux navires de 15 à 20 tonneaux. Et, pour se procurer la masse d'eau nécessaire à ces chasses, on devait enlever toutes les terres rapportées dans les fossés des remparts afféagés à divers peticuliers, lesquels avaient formé dans ces fossés (notamment au bas de la Garenne) des jardins élevés de sept à huit pieds au-dessus de l'anan fond ; on ordonnerait aux religieux dominicains et aux autres riverains supérieurs d'entretenir en tout temps leurs fossés et canaux au-dessus du fossé de la tour de la prison, dans la largeur et profondeur convenables pour l'écoulement des eaux ; on supprimerait, enfin, le moulin des Lices avec son canal et son étang ; et, pour le remplacer, on édifierait sur la butte royale (à l'entrée de la vieille route de Séné) un moulin à vent, lequel fut effectivernent construit et n'a été démoli, que depuis peu d'années. Par ces divers moyens, on espérait créer un réservoir, rempli à chaque marée par les eaux de la mer, que l’on laisserait échapper à chaque marée basse par une écluse de chasse établie à la tête du port. On prévoyait, en outre, la construction à la Chevrinière d'une seconde écluse pour retenir les eaux, qu'on lâcherait de temps en temps, afin d'approfondir la partie du chenal comprise depuis cette écluse jusqu'à Conleau.

Les travaux entrepris en vertu de l'arrèt de 1754 se poursuivaient encore en 1752. En 1761, on fit une tentative pour percer la butte de Kerino, afin d'éviter le coude que faisait la rivière à la pointé de la Sentière. Cette tentative échoua, et ne devait être réalisée qu'en 1830. Mais on utilisa les déblais et les décombres provenant de ce travail pour remblayer tout le terrain à partir du Père-Éternet et prolongar la promenade. Enfin, en 1824, après acquisition des terrains de la Sentière, la première partie de notre Rabine se trouva achevée et plantée, et forma, dès lors, le long du port, cette jolie promenade de 700 mètres de longueur dont nous jouissons aujourd'hui. Mais, dès 1788, l'aspect du port et des belles allées de la Rabine frappait déjà l'étranger. Arthur Young, qui visita Bretagne à cette époque, y trouva partout l'image de la désolation et d'une misère sordide. L'agriculture n'y était pas, dit-il, plus avancée que chez les Hurons, et le peuple y était presque aussi sauvage que le pays. Villes, bourgs, auberges, étaient d'une saleté repoussante ; les habitants, à peine vêtus, et en haillons. Aussi éprouve-t-on une surprise agréable à lire les lignes suivantes, que le célèbre économiste et agronome anglais écrit dans son journal à son arrivée à Vannes : « Vannes n'est pas une mauvaise ville, mais sa plus grande beauté consiste dans son port et dans sa promenade ».

De nos jours (vers 1918), cette promenade a encore été prolongée jusqu'au lieu dit le Pont-Vert, où se trouvait autrefois l'ancienne entrée par le lais de mer de Truussac, aujourd'hui desséché et cultivé. De 1820 à 1830 on avait percé la butte de Kerino pour y pratiquer le canal qui existe actuellement. On profita de ce travail pour remblayer à l'aide des décombres la partie gauche du port, depuis la cale de radoub jusqu'à la butte. Ce n'était alors qu'une vasière ou l'on déversait et accumulait toutes les vases extraites du port. C'est là que l’on transporta, un peu plus tard, les chantiers pour la construction des navires, chantiers qui se trouvaient autrefois sur la rive de Calmont-Bas, en avant de la rue du Commerce. Ce transfert permit la création de la petite promenade plantée que l'on y voit aujourd'hui.

Le percement du canal avait laissé subsister toute la partie ouest de la butte, le long de laquelle on établit un chemin de halage. Cette butte fut fortement entamée pour la construction de l'usine à gaz. Quelques années plus tard, on acheva de l'enlever entièrement, créant ainsi un large boulevard qui a permis, comme nous l'avons dit plus haut, de continuer jusqu'au Pont-Vert les allées de notre Rabine.

(Étienne MARTIN).

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