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LA PROMENADE DE LA GARENNE A VANNES.

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La Garenne. La Garenne est un saillant que projette vers le nord la montagne de Calmont. La mer, qui au moyen âge s'étendait jusqu'au faubourg Saint-Patern, où elle se mélangeait aux eaux de divers ruisseaux, baignait alors les flancs abrupts de cet éperon couvert d'une épaisse végétation d'ajoncs et de broussailles. Le terrain appartenait depuis le XIIème siècle à l'abbaye de Saint-Gildas de Rhuys, qui en avait formé la dotation partielle de son prieuré de Saint-Guen. Lors de la construction de l'Hermine, vers 1380, le duc Jean IV s'empara de la Garenne pour en faire une partie du parc du château, parc immense puisqu'il s'étendait jusqu'à Plaisance.

Promenade de la Garenne à Vannes (Bretagne).

 Par acte du 1er janvier 1387, le duc assigna aiu prieur de Saint-Guen, à titre de dédommagement, une rente de 10 livres, 6 sols et 1 denier sûr sa recette de Vannes.

Après la réunion de la Bretagne à la France et l'abandon du château de l’Hermine, les rois délaissèrent la jouissance de ce parc aux gouverneurs et capitaines de Vannes. En 1569, une portion en fut accordée à l'hôpital de Saint-Nicolas ; et en 1635, la petite Garenne, le marécage intermédiaire et le bas de la grande Garenne furent concédés aux Dominicains, qui y bâtirent le couvent dont les terrains sont occupés aujourd'hui par l'hôtel et le parc de la préfecture. Il ne resta plus au domaine royal que le haut de la Garenne et les pentes du côté de la ville.

Les gouverneurs de Vannes, qui en avaient la jouissance, affermaient ordinairement ce mont broussailleux à des particuliers, qui y faisaient paître des troupeaux, ou s'en servaient pour divers usages.

Après l'installation à Vannes, en 1674, du Parlement de Bretagne, l'afflux de population qui se produisit alors créa des besoins et des goûts nouveaux. La ville ne possédait encore, comme espaces ouverts, que les trois places publiques dont il a été parlé dans la première partie de cette étude, et dont deux, celles de la Poissonnerie et du Poids-Public, étaient fort exiguës, et affectées à des usages spéciaux et utilitaires. On réclama une promenade publique convenablement aménagée, et semblable à celles qui existaient déjà dans beaucoup d'autres villes du royaume.

Le 15 juillet 1678, le syndic Henri Daviers présenta à la Communauté un projet pour la création d'une promenade sur la Garenne. Il fut décidé que l'on prierait le Cte de Lannion d'en écrire au duc de Chaulnes, gouverneur et lieutenant général de Bretagne. On ne possède aucun renseignement sur la nature de ce plan ni sur son auteur. L'autorisation demandée au duc de Chaulnes fut accordée par une ordonnance du 9 septembre 1678, qui permit, en outre, de prélever sur les deniers d'octroi une somme de 2.000 livres pour être affectée, dit cette ordonnance, « à faire travailler au terrain nommé la Garenne ». Mais un an après, le 16 octobre 1679, une nouvellé ordonnance du duc prescrivit d'ajourner ce travail afin de permettre la construction d'une écluse au port de Vannes. Le projet de création d'une promenade sur la Garenne ne devait étre repris que vingt ans plus tard.

Promenade de la Garenne à Vannes (Bretagne).

Le comte de Lannion, gouverneur de vannes, portait un vif intérêt à l'exécution de ce projet. Il intervint encore auprès de l'intendant de Rennes pour obtenir l'afféagement du terrain ; et le 20 novembre 1698 il envoyait à la Communauté une somme de 150 livres pour les frais de cet afféagement qui, stipulait-il, devait être fait en son nom. Cependant, ajoutait-il, « le soin que je prends en cela n'est que pour vous faire une promenade et un jardin, voulant que vous soyez le maître. Mais, une fois l'afféagement fait, vous me manderez les mesures faudra que je prenne pour faire travailler à l'embéllissement de Vannes, étant assuré que ce sera une très agréable et très belle promenade ».

On aura remarqué que le Cte de Lannion demandait que l'afféagement fût fait en son nom, en considération sans doute de son intervention et de la subvention qu'il promettait, subvention plutôt maigre pour un travail de cette importance. On trouve des traces de son insistance sur ce point dans plusieurs lettres subséquentes. Ainsi, le 7 décembre 1698, il écrit :

« Pour moy je ne prétend que faire une chose qui sera un embellissement pour la ville et ce sera plus les jardins et les promenades de Monsieur le Maire que les miennes, et j'espère qu'avec le temps lun et lautre, par les corvées que je vous ferai avoir, que nons ne lairons pas que d'en faire un lieu agréable ... ». Voici encore une autre lettre du 3 janvier 1699 qui témoigne du grand désir d'attacher son nom à cette œuvre, et qui donne quelques détails intéressants sur les travaux projetés :

« 3 janvier 1699. — Je vois que, pour l'exécution, il faudra beaucoup d'argent, beaucoup de monde suivant l'estimation de l'ingénieur et cinquante manoeuvre pendant plus de trois mois pour aplanir la Garenne. Je vous prie de me mander si j’escrivois à Monsieur l'intendant pour luy demander les paroisses dauprès Vannes pour vous applanir la Garenne, si cest une chose qui seroit util pour se travaille, et en cas que vous lapprouverez il faut que vous m'envoyez le nom des paroisses qui sont aportée d'estre demander pour y venir travailler. Je trouve le projet très beau, l'exécution difficil, pour moi j'y contriburai de 80 pistolles par an comme je vous lay dit. Mais que je sois à Paris je feray en sorte dobtenir de Monsieur le comte de Toulouse une ordre pour qu’il soit employer quelques argents des deniers doctroy pour aider à travailler à ce jardin ; il faut toujours l'afféagement en mon nom et quoy qu'il soit sous mon nom, ce sera une endroict qui sera pour tout le monde, et y ordonnerez de toutes choses. Quand jay eu la pensée de faire accomoder la Garenne, ce n'a esté que pour donner une endroict agréable à tous les honnêtes gens de la ville dont ils profiteront, et pour moy, selon les apparences, je n'en proffiteray guère, et je seray bien aise qu'il reste des marques à la ville que j'y ay fait quelques embellicement, et si nous pouvions finir celuy que nous voulons commencer se sera un des beaux endroits de Bretagne. Je suis très content du plan que vous mavez envoyer. Je lay trouvé fort beau. Mandez moi si vous en avez besoin, je vous le renverray … ».

Le plan auquel cette lettre fait allusion est resté inconnu comme celui déjà présenté en 1678 par le syndic Davier. L'afféagement nécessaire fut demandé au sieur Geslin, chargé par un édit du mois de mai 1678 de l'aliénation des domaines du roi. La somme offerte par M. de Lannion était de 110 livres au profit de Sa Majesté. Mais, pour parvenir à l'adjudication du terrain, des publications étaient nécessaires, et le sieur Geslin répondit au maire le 1er décembre 1698 dans les termes suivants :

« A Rennes le 1er décembre 1698. — Monsieur, j'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l’honneur de m'écrire le 29e du passé, où vous m'informez des intentions de M. le marquis de Lannion d'acquérir du Roy la place de la Garenne pour y faire des jardins publics pour la décoration de votre ville, pourquoy il offre cent dix livres au proffit de Sa Majesté, et que Monsieur l'intendant a qui il en aurait écrit lui a répondu qu'il fallait s'adresser à moy. Je vous envoye cy joingt deux affiaes à ce sujet : l'une desquelles vous ferez, s’il vous plaist, publier par trois dimanches consécutifs aux prônes de la paroisse dans laquelle est scitué le terrain, qui est à ce que je croy St-Patern, et l'autre, vous la ferez, s'il vous plaist, afficher à la principale porte de l'église de la dite paroisse, à laquelle affiche M. le Curé donnera son certificat, ainsi que des trois publiquations qu'il aura faites aux prônes, et ce au pied des trois d’affiches en conformité du modèle que je vous envoie aussi cy joingt. Et quand vous m'aurez, renvoyé le certificat, je feray incessamment après faire l'adjudication par M l'intendant, et ensuite le ferez passer en contrat par devant Messieurs les Commissaires du Roy à Paris ... ».

Le certificat réclamé fut sans doute fourni à M. Geslin, mais l'on semble s'être dispensé des publications requises, pour le motif indiqué dans ce passage de la lettre du Cte de Lannion mentionnée plus haut :

« J'ay reçu vostre lettre où vous me mandez que Monsieur Geslin vous a envoyé les publications touttes dressez pour faire publier à Saint-Patern, mais que vous chercherez les moyens d'avoir les certifficats du Recteur s'il est possible sans qu'il les fasse au prosne, parce que, vous prévoyez des oppositions, les paroissiens y ont toujours leurs moutons ».

La ville, devenue propriétairé de la Garenne, fit executer quelques travaux dans les années suivantes. Mais, faute de ressources suffisantes, on dut se borner à aplanir le sommet de la montagne, et à y faire une place ornée de quelques plantations. On planta également des ormeaux sur les talus du chemin, profondément encaissé, que l'on avait creusé dans l'un des flancs de la Garenne pour rendre cette place accessible, et pour établir une communication entre le port et le pont de la Tannerie, débouché des routes de Rennes et de Nantes. Anciennement cette communication ne pouvait se faire que par la montée du Jointo et la ferme de la Noë, après laquelle on rejoignait la route aux abords de la maison du Poulfang.

Nous venons de dire que l'état des finances de la ville ne permettait pas alors l'exécution du plan conçu en 1678 et, remanié en 1698. En elle, au début du XVIIIème siècle elle était fortement obérée et elle avait à faire face à de lourdes charges, dont les principales étaient l'amortissement et les intérêts d'une somme de 100.000 livres donnée au roi en 1689 et de divers emprunts contractés pour le rachat de nouveaux offices munipaux créés dans le but unique de remédier à la détresse du trésor royal. Plus tard toutes les ressources de la Communauté durent être consacrées au port, qui s'encombrait toujours de vases, malgré les travaux d'enlèvement que l'on recommençait sans relâche, et qui se poursuivent encore vers 1918 sans beaucoup plus de succès. La mer, que l'on avait voulu resserrer entre des talus et des murs de quai, au lieu de lui laisser son libre parcours, remplaçait chaque jour par de nouveaux apports les vases enlevées la veille, ce qui rendait vains les efforts faits pour assurer aux navires la profondeur d'eau nécessaire à leur entrée et à leur accostage aux cales. Si la mode était encore aux évocations de mythes mythologiques dont nos pères faisaient un si fréquent emploi, on pourrait comparer ce travail à celui du rocher de Sisyphe ou à la toile de Pénélope.

Ce n'est que vers le mileu du XVIIIème siècle, par suite de circonstances particulières et à l'aide de secours extérieurs, que l'on put songer à reprendre le projet de transformation de la Garenne en une promenade publique et d'accès facile.

En 1749 on construisit les murs de clôture et les escaliers que nous y voyons aujourd'hui. D'après un toisé qui existe aux archives départementales (B 496), et qui porte la date du 9 juin 1749, la dépense totale s'éléva à 465 livres et 6 deniers.

Puis, en 1752, à l'occasion d'une disette qui éprouva cruellement la population, et pour subvenir à la subsistance des pauvres et des mendiants dont le nombre allait toujours croissant, on résolut de faire exécuter des travaux publics auxquels on les emploierait moyennant un salaire raisonnable.

Promenade de la Garenne à Vannes (Bretagne).

Par délibération du 21 février 1752, la Communauté décida d'affecter à ces travaux une somme de 2.000 livres, et fut d'avis que le meilleur emploi de cette somme serait de faire travailler par économie à la Garenne. Un nouveau plan fut demandé au sieur Tanguy, architecte, et l'on fixa comme suit les salaires à payer aux pauvres que l'on devait employer : 4 sols par jour aux hommes ; 3 sols aux femmes ; et 2 sols aux enfants ; — par chaque vingt travailleurs, il devait y avoir un régalleur payé à raison de 10 sols ; — enfin, on désigna deux piqueurs payés sur le pied de 15 sols par jour, et l'on autorisa l'achat des outils, ustensiles et matériaux nécessaires pour l'ouvrage à faire.

Après trois semaines d'un travail assidu, pendant lesquelles on occupa par jour 200 personnes, tant hommes que femmes et enfants, la somme de 2.000 livres se trouva absorbée, et l'oin dut demander à l'Intendant l'autorisation d'employer une nouvelle somme de 1.500 livres pour continuer les travaux jusqu'au mois d'août, époque pour laquelle on prévoyait une diminution considérable dans le prix du pain, par suite de l'abondance de la nouvelle récolte.

L'hiver suivant, on sollicita un nouveau secours de 1.200 livres, afin de poursuivre les travaux, pour lesquels l'évêque de Vannes accordait 30 perrées de seigle (60 hectolitres) à prendre dans ses greniers ; il s'engageait, en outre, à payer en argent la mouture et la cuisson. A l'aide de ces douze cents livres et de la subvention de l'évêque, on se flattait de pouvoir parachever l’œuvre entreprise. Cependant, en mai suivant, on dut encore solliciter une nouvelle somme de 600 livres pour finir le travail qui, semble-t-il, fut enfin terminé à la fin de cette même année, puisque, le 3 décembre 1753, on nommait pour la garde et l'entretien de la promenade, un nommé Le Thuillier, demeurant avec sa femme sur la Garenne.

Sauf quelques améliorations ou perfectionnements effectués ultérieurement — notamment sur le plateau qui, originairement, était un glacis descendant par un pente uniforme de l'hospice jusqu'au mur du parc de la préfecture — la promenade de la Garenne avait donc, dès 1753, l'aspect et les dispositions qu'elle présente de nos jours. Le plan, exécuté sous la direction de l'architecte Tanguy, comportait établissement de terrasses successives, plantées d'arbres, et communiquant de l'une à l'autre par des rampes faciles. La terrasse inférieure, entaillée comme les autres dans le flanc abrupt de la montagne, forma la chaussée carrossable qui aujourd'hui surplombe directement le ruisseau. Antérieurement il n'existait, pour les communications entre le port et le faubourg Saint-Patern, qu'une piste étroite côtoyant le ruisseau et accessible seulement aux pietons et aux chevaux.

Au cours de l'exécution des travaux, il se produisit un petit incident assez curieux que nous trouvons relaté dans les termes suivants, dans une délibération du 16 juin 1752 : « M. de Kverho-Pihan, procureur de la Communauté, représente qu'à l'occasion des travaux de la Garenne, il se trouve sur la deuxième terrasse un rocher qu'on ne peut enlever à la sape, qu'on a été obligé de percer en-dessous pour faire jouer la mine, sur l'assurance que le sieur Tanguy, chargé de la conduite de l'ouvrage, a donnée qu'il n'en pouvait arriver aucun accident ; et que dans le temps qu'on se préparait à faire jouer la mine, M. Daviers a déclaré à M. le Maire s'y opposait, à moins qu'on ne lui donnât une garantie indemnité des événements qui en pouvaient arriver ; sur quoi la Communauté invitée à délibérer, après avoir entendu le sieur Tanguy a décidé qu'on fera incessamment jouer la mine en-dessous du rocher dont il s'agit, attendu qu'il a assuré que cela ne pouvait faire aucun préjudice au sieur Daviers. A l'endroit led. sieur Daviers répète ses protestations et signe : N Daviers ».

Les traces du roches en question se voient encore en 1918 à la base de la double rampe qui fait communiquer la deuxième avec la troisième allée de la Garenne. L'opposition et les craintes du sieur Daviers étaient motivées, sans doute, par la proximité de son habitation élevée sur le bastion de la porte Poterne, lequel avait été concédé à son père, en 1678, lors de l'ouverture de cette porte.

(Étienne MARTIN).

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