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LE JEU DE PAUME A VANNES.

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Jeu de Paume. — La paume est l'ancêtre en ligne directe de notre jeu de tennis. On lui attribue la plus haute antiquité. Hérodote, dit-on, y fait allusion ainsi qu'Hornère dans l'Odyssée (épisode de Nausicaa). Le vieux Caton était passionné pour ce jeu ; et il fut en grande vogue sous les Gaulois. Au XVème siècle, il y avait des jeux de paume dans tous les quartiers de Paris et dans la plupart de nos villes. Un de nos compatriotes, qui séjourna à Nantes en 1555 et 1556, mentionne dans son journal les noms de divers endroits où l'on jouait à la paume : rue du Château, Richebourg, la Fosse, le Bignon, etc.

La balle se renvoyait alors avec la paume de la main nue, ou avec un gantelet doublé de cuir. Une femme nommée Margot était célèbre à cette époque pour son habileté extraordinaire à ce jeu. Sous Henri IV parut la raquette. C'était encore un délassement de gentilshommes, et une ordonnance de Louvois en défendit la pratique aux vilains. Mais au siècle suivant, cette, ordonnance était tombée en désuétude, et partout s'établirent des jeux de paume.

On distinguait la longue paume, qui se jouait dans un espace plus long que large, ouvert de tous côtés, et la courte paume, appelée aussi tripot, qui, selon la définition qu'en donne le dictionnaire de Trévoux, se jouait dans une place couverte, entourée de murs des quatre côtés, et pavée de pierres ou de carreaux. Dans son Virgile travesti, Scarron s'exprime ainsi au sujet de ce dernier jeu : « Dans toutes les villes subalternes du Royaume, il y a d'ordinaire un tripot et où s'assemblent tous les jours les fainéans de la ville ».

Au XVème siècle il y avait à Vannes trois jeux de paume : l'un dans le quartier Saint-Patern, entre les rues Gillart (aujourd'hui de l'Étang) et la rue de la Tannerie ; l'autre, dénommé le jeu de la terre de Ker, sur le port, à l’emplacement occupé en 1918 par une maison neuve portant le n° 26 [Note : Nous empruntons encore au Livre de Comptes de Claude de la Landelle, chanoine de Vannes, les deux notes suivantes relatives à ce dernier jeu : (15 février 1555) « A la paulme, au jeu de la terre de Ker, l'advocat Gaincru, Lisle, Riantec, son nepveu, Colombel et l'un des Gotz y estantz.... 1 s. ». (18 février 1555) « Au jeu de paulme de la terre de Ker où se trouvèrent M. de l'Isle advocat et plusieurs mineurs (bourgeois) de ville entre aultres Colombeau, le filz Jehan Le Maistre, le filz Jacques Sillart qui merchoit les esteufz et pour moy une douzaine plus qui me failloit pour moy, car je merchois ce que perdois et aultre. Pour ce... XI s. tourn. II d. »] ; le troisième, enfin, qui, antérieurement dans la rue de la Bienfaisance (alias : des trois Duchesses), avait été transféré place des Lices, après l'achèvement par le duc Jean IV de son château de l'Hermine et des nouveaux murs de la ville.

C'est ce dernier qui a survécu jusqu'à la fin du XVIIIème siècle. Il était installé dans l'emplacement qu'occupe en 1918 la maison Lorvol. En 1659, il était la propriété de M. Yves Sanguin, conseiller au Parlement de Paris, auquel, il avait été sans doute apporté par sa femme, qui était une demoiselle Nicolle de la Porte, de la paroisse de Questembert. Le fermier était alors un sieur Auffret, de Nantes, qui payait un loyer de 523 livres, plus une rente de 72 livres assignée aux pauvres en vertu d'une ancienne fondation. En 1694 est 1703, on y trouve comme locataire un paulmier nommé Guy Boutincourt. Enfin, une déclaration de 1751, faite pour l'impôt du vingtième, nous apprend que la maison sur les Lices, appelée le jeu de paume, était alors possédée par les enfants Le Maignan de Kerangat, de Questembert, qui la tenaient par héritage de la famille Sanguin. Cette maison avait dû être relevée en 1748 moyennant une dépense de 5.500 livres, et, l’année, suivante, la location en fut continuée au sieur Oillic, par un nouveau bail, pour 428 livres, et une rente de 72 livres assignée aux pauvres, mais avec promesse d'y faire des réparations, lesquelles s'élevèrent à 800 livres. En 1751, une nouvelle somme de 1.500 livres était demandée pour refaire la couverture du jeu de paume. Cette dernière indication montre bien que l'établissement était ce que, dans le langage du temps, on appelait un tripot, c'est-à-dire un bâtiment couvert pour y jouer la courte paume. Ses dimensions étaient de 120 pieds sur 40 de largeur, avec une petite cour.

On trouve encore d'autres renseignements sur ce jeu de paume dans les pièces d'un procès qui eut lieu en 1759 entre la veuve Oillic, alors fermière ou propriétaire de l'établissement, et la troupe des comédiens du duc d'Aiguillon que étaient venus donner des représentations à Vannes. On lit dans ces pièces que les comédiens offraient à la veuve Oillic :  1° Cent vingt livres pour la jouissance pendant deux mois du jeu de paume, d'une cuisine et de trois cabinets qu'occupent les acteurs tant pour représenter que pour s'habiller et se déshabiller ; 2° vingt-six livres « pour tout au plus un cent de bouteilles de vin qui avaient été cassées » ; 3° de faire rétablir « le jeu de paume tel qu'il estoit avant la construction du théatre ».

En 1765, la veuve Oillic maria sa fille à Alexis-Joseph Lorvol, marchand, natif et domicilié de Limerzel. C'est ce dernier, devenu ensuite commis greffier au Présidial, puis, pendant, la Révolution, sécrétaire du Conseil général du district, qui démolit le jeu de paume, et fit élever en 1790, en façade sur les Lices, la grande maison qui existe en 1918 au n° 8, et qui a porté longtemps son nom. Quelques années après, il construisit encore, perpendiculairement à cet immeuble, et sur l'emplacement même de la salle de l'ancien jeu de paume, le long bâtiment qui s'étend jusqu'à la Basse-Cour.

Les circonstances qui amenèrent la construction de ce dernier bâtiment, divisé en chambres nombreuses desservies par un long corridor, méritent d'être rappelées ici. En 1792, devant l'impossibilité de loger tous les officiers dans les bâtiments militaires, il fut décidé qu'ils recevraient le logement en argent selon leurs grades, et se logeraient de gré à gré chez les habitants. Quelques années plus tard ; un arrêté du directoire exécutif, en date du 28 frimaire an IV, prescrivit que, pendant la guerre, les officiers municipaux des lieux où il se trouvera des troupes en garnison ou en cantonnement, auraient à pourvoir à ce que tous les officiers de ces troupes soient logés suivant leurs grades respectifs, sans qu'il puisse être exigé de ces officiers d'autre rétribution que celle que leur est allouée dans les différents grades par la loi du 23 mai 1792. Le tarif de ces allocations était le suivant : chef de brigade, 50 livres ; chef de bataillon, 40 livres ; capitaine, 18 livres ; lieutenant, 12 livres.

C'est à la suite de ces prescriptions (et sans doute à l’instigation de la municipalité) que fut entreprise par le sieur Lorvol la nouvelle construction, dont les dispositions intérieures rappellent celles d'un couvent ou d'une caserne.

Ainsi disparurent définitivement, après une existence de près de quatre siècles, toutes les traces du vieux jeu de paume dont la fréquentation semble avoir été totalement délaissée dans les années qui précédèrent la Révolution.

(Étienne MARTIN).

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