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TUAULT DE LA BOUVRIE

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TUAULT DE LA BOUVRIE, DERNIER SÉNÉCHAL DE LA SÉNÉCHAUSSÉE DE PLOËRMEL. DÉPUTÉ AUX ÉTATS GÉNÉRAUX. (JOSEPH-GOLVEN) naquit à Ploërmel le 19 mars 1744. Il était fils de François-Marie Tuault, seigneur de la Bouvrie, en Saint-Guen, trêve de Mûr, conseiller du Roi, sénéchal de Ploërmel de 1734 à 1762, mort en cette ville le 19 novembre 1762, et de Françoise-Marie-Joséphine Cesson, fille d'Hervé Cesson et de Marie-Anne de la Rue. Il eut pour parrain, M. Golven-Jules Le Sancquer (Sanquer), doyen des procureurs et notaires royaux du siège de Ploërmel. Il n’avait qu’une soeur, Anne-Marie Françoise Tuault, qui épousa, en 1764, Jean-Louis de Lantivy, vicomte de Trédion, et mourut à Ploërmel le 27 janvier 1783, ayant eu deux fils qui furent fusillés à Quiberon ; son mari épousa en secondes noces, en 1786, Rosalie-Charlotte Le Brun.

La famille Tuault, originaire de Picardie, vint se fixer en Bretagne, dans le pays de Guémené-sur-Scorff, vers le milieu du XVIème siècle, avec Thomas Tuault, seigneur du Palévart, avocat au Parlement de Paris, que le prince Constantin-Louis de Rohan-Guémené avait choisi comme secrétaire et comme argentier. Ce prince était atteint de cécité ; il amena avec lui en Bretagne Thomas Tuault, qui devint Intendant de la Principauté et sénéchal de Guémené. Il mourut vers 1580, ayant eu d'Isabeau Le Berre dix enfants, dont la postérité se perpétua dans le pays de Guémené, où elle posséda les terres de Treslan, de Ménémarin, de Rescaly, de Trémer ; de Pendreff, en Caudan ; de Kerlagadec, en Ploërdut ; de la Bouvrie, en Saint-Guen. Le fameux Bénédictin dom Morice (Pierre-Hyacinthe Morice, né à Quimperlé en 1693, mort en 1750) était petit-fils d’une demoiselle Hélène Tuault.

Joseph-Golven fit ses études au collège des Pères Jésuites de Vannes ; reçu avocat au Parlement en 1765, il fut nommé, l’année suivante, avec dispense d’âge, sénéchal de Ploërmel et subdélégué de l'Intendance dans cette ville. Il n’avait alors que vingt-deux ans.

Le 7 août 1769, il épousa dans la chapelle Sainte-Anne, du château de Quéjau, en Campénéac, Françoise-Perrine Abillan, née à Quéjau, le 4 mai 1752, fille unique de Mathurin-Pierre, seigneur de Quéjau, qui mourut à Quéjau le 24 avril 1788, et de feue Marie-Françoise-Yvonne Jéguic, dame de Stanghingaut et de Kergouët, en Meslan, qui était morte à Quéjau le 2 juillet 1753.

La famille Abillan, qui vivait dans le pays de Ploërmel depuis le XIVème siècle, était originaire du Poitou, et s’armait : « d’azur à trois papillons d’argent ».

Par suite de ce mariage, Joseph-Golven Tuault devint châtelain de Quéjau. Cette ancienne seigneurie, dite primitivement « Kerjau », avec manoir, métairie, chapelle privée, colombier, futaie, moulins et terres, relevait de la châtellenie de Trécesson ; elle avait droits de moyenne justice, et un enfeu prohibitif dans la chapelle Sainte-Anne de l’église de Campénéac. Le château de Quéjau existe encore à 1.500 mètres à l'Ouest de ce bourg. Il appartenait, dès le XIVème siècle, à une famille dite de « Kerjau », puis « de Quéjau », qui posséda également Lesné, en Gaël, et s’armait : « d’argent à trois roses de gueules ». Elle porta, par alliance en 1560, Quéjau aux Desgrées, seigneurs de La Touraille, en Augan, qui le cédèrent vers 1627 aux Abillan, déjà seigneurs de la Ville-Gauthier et des Closdoirs, en Campénéac.

Tuault habita, tantôt Quéjau avec son beau-frère, tantôt son hôtel à Ploërmel.

Il exerça pendant vingt-trois ans la charge de sénéchal de Ploërmel, avec une sagesse et un désintéressement qui lui assurèrent l’estime de tous et une grande popularité dans toute l’étendue de son immense juridiction, qui comprenait 176 paroisses ou trêves. Bien qu’ardent royaliste, il joignit, à ses sentiments de fidélité et de dévouement pour le trône, des idées libérales et une indépendance toute bretonne. « J’aime le Roi de toute mon âme, écrivait-il en 1786 à M. Ambroise Chaillou de l'Etang, châtelain de la Villefief, en Augan ; je mourrais pour lui, mais je me ferais dix fois immoler pour la défense des libertés de mon pays ». Il fut nommé plusieurs fois délégué de Ploërmel aux Etats de Bretagne, et le roi, en reconnaissance de ses mérites et de ses services, lui ayant fait proposer de lui octroyer des Lettres de noblesse, il reçut assez mal l’envoyé chargé de lui faire ces avances. « Monsieur, lui répondit-il, je n’ai rien à envier à personne ; je ne relève, par ma place, que du Roi, et de Dieu seul par ma conscience de magistrat. J’ai 176 paroisses dans ma main. Allez, et dites à ceux qui vous ont chargé de faire près de moi cette démarche, que le sénéchal de Ploërmel aime mieux être le premier dans son Ordre, que le dernier dans celui de la Noblesse ! ». Plus tard cependant, en 1815, Tuault accepta cette distinction : « Mais seulement, comme récompense et comme preuve du bien qu’il avait fait à son pays ».

Ayant eu la profonde douleur de perdre, en 1784, sa femme, morte victime de sa charité et des soins qu’elle avait donnés à un pauvre malade atteint d’une maladie contagieuse, il donna sa démission de sénéchal, et fut remplacé en 1785 par M. Aimé Gaillard de la Touche, lieutenant civil et criminel de Ploërmel, époux de Marie-Anne Brunel des Portes, et qui devait devenir sous-préfet de Ploërmel de 1810 à 1816. Mais, en 1788, Tuault reprit ses fonctions de sénéchal, poste qu’il occupa jusqu’à la suppression de cette charge, en 1791.

Il avait alors trois enfants : deux filles, qui devinrent Mesdames Dahirel et Néels du Planty, et un fils, Benjamin, né en 1784.

Le 7 avril 1789, se réunit à Ploërmel l’assemblée des électeurs du Tiers-Etat de cette sénéchaussée, assemblée composée des délégués nommés par chaque paroisse, dans la proportion de deux par mille habitants. Les séances se tinrent dans l’église du couvent de Bethléem, des Carmélites de Ploërmel, couvent qui devint, en 1811, celui des Ursulines. A la séance d’ouverture, Tuault prononça un discours magistral ; puis on procéda à la rédaction du « Cahier des plaintes, doléances et remontrances de l’assemblée générale du Tiers-Etat de la sénéchaussée de Ploërmel ». Ce cahier comprenait vingt-quatre articles, qui avaient été rédigés en grande partie par M. Tuault de la Bouvrie (ou Bouverie). Il fut établi en quatre exemplaires, et signé le 16 avril par MM. Robin de Morhéry, délégué de la paroisse du Quillio ; Rouault de Coinquelan, avocat, délégué de Josselin ; Perret de Trégadoret, avocat, délégué de Ploërmel ; Georgelin, avocat et littérateur, sénéchal de Corlay ; Le Guével, avocat, échevin et délégué de Josselin ; Duval, échevin de Redon, délégué de Bellac ; Boullé du Moustoir, avocat, délégué de Pontivy ; Pigret, sénéchal et délégué de Loudéac ; Moisan, délégué de Trévé ; Corbel du Squirio, avocat, délégué de Baud ; Gaillard de la Touche, lieutenant de la sénéchaussée et délégué de Ploërmel ; Delaizir, maire et délégué de Plémet ; Nouël de la Touche délégué de Ploërmel, et Tuault de la Bouvrie, sénéchal de la sénéchaussée.

L’assemblée nomma ensuite les quatre députés du Tiers, qui devaient siéger aux Etats généraux, et leurs deux suppléants. Les élus furent, comme députés : MM. Tuault de la Bouvrie, Poullé du Moustoir, Robin de Morhéry et Perret de Trégadoret ; comme suppléants : MM. le Deist de Botidoux et Le Goaësbe de Bellée. — Disons un mot de chacun de ces personnages :

Jean-Pierre Boullé, seigneur du Moustoir, né à Auray le 2 juillet 1753, était fils d'Yves, sénéchal d'Auray, et de Thérèze Barbe Lauzer de Larmor. Il fit ses études chez les Pères Jésuites de Vannes, et fut reçu avocat en 1775. Il épousa à Pontivy, le 14 juin 1785, Jeanne-Perrine Ruinet du Tailly, fille du maire de cette ville. Second député de la sénéchaussée de Ploërmel aux Etats Généraux, il se jeta dans le mouvement révolutionnaire, et fut, avec Lanjuinais Le Chapelier, un des principaux fondateurs du « Club Breton », qui devint le « Club des Jacobins ». Il fut élu maire de Pontivy à la fin de 1791, et, l’année suivante, nommé administrateur du Directoire du Morbihan. Accusé de Fédéralisme, il fut, malgré son passé politique, incarcéré à Vannes, en octobre 1793, et ne fut délivré que par le 9 thermidor (27 juillet 1794). Devenu Procureur Général Syndic du Directoire du Morbihan, il fut élu député aux Cinq Cents, en 1796, et nommé, en 1801, Préfet des Côtes-du-Nord (aujourd’hui Côtes-d’Armor). Créé Baron de l'Empire en 1809, Officier de la Légion d'Honneur en 1811, il fut destitué par la Restauration, et occupa, pendant les Cent-jours, la préfecture de Vendée. Il mourut au Vaumeno, près de Saint-Brieuc, le 13 juin 1816, laissant postérité.

Louis-François-Anne Robin de Morhéry, agriculteur et négociant au Quillio, troisième député de Ploërmel aux Etats généraux, donna sa démission de député en 1791.

Rodolphe-Claude Perret de Trégadoret, né à Ploërmel le 10 novembre 1741, fils de Louis-Charles, seigneur de Trégadoret, du Valin, maire de Ploërmel, et d'Elisabeth Quéneau, dame de Lézillac, il fut avocat et maire de Ploërmel en 1778. Elu quatrième député de Ploërmel, il siégea à l'Assemblée Nationale et à l'Assemblée Législative, et mourut à Vannes en 1798, président de la municipalité de cette ville depuis 1796. Il laissait postérité de Mademoiselle de Kercron.

Jean-François Le Deist de Botidoux, seigneur de Quénécunan, de Beauregard, en Uzel, né à Uzel vers 1752, fils de François-Guillaume, conseiller du Roi, et de Suzanne-Françoise Martin. Elu premier suppléant de la sénéchaussée de Ploërmel, il se rendit à Paris, et se joignit, comme volontaire, aux émeutiers qui envahirent la Bastille. Admis à siéger à l'Assemblée Nationale, en remplacement de M. Tuault de la Bouvrie, à partir du 14 février 1790, il vota tantôt avec la droite, tantôt avec la gauche. En 1792, il fit du service comme capitaine au 34ème régiment d’infanterie, sous La Fayette, et fut commissaire ordonnateur à l’armée des Alpes. Dénoncé comme Fédéraliste, il revint en Bretagne où il réussit à capter la confiance de Puisaye, qui le nomma, en 1794, secrétaire du Comité de l'Armée Catholique et Royale de Bretagne, dont le siège était alors à Locminé. Il fut soupçonné de servir d’espion et d’agent secret aux Républicains. Après le traité de la Prévalaye, il se retira à son château de Quénécunan, au Quillio, où il vécut jusqu’à la Restauration, qui le nomma messager d'Etat près la Chambre des Pairs. Il mourut à Saint-Brieuc en 1823.

Sébastien-Jean Le Goaësbe de Bellée, né à Bellée, en Saint-Congard, le 1er février 1752, fils de Sébastien-Guy, seigneur de Bellée, de Boyac, avocat général au Parlement de Bretagne, et de Mathurine-Jeanne Préaudeau. Il appartenait à une ancienne famille du pays de Ploërmel. Il fut garde du Corps du Roi de 1772 à 1778, puis capitaine des Gardes-côtes de la région d'Hennebont.

Il se fit recevoir avocat en 1783, et fut maire de Ploërmel de 1784 à 1788. Il ne fut pas appelé à siéger à la Chambre. Il devint, en avril 1790, lieutenant-colonel de la Garde Nationale de Ploërmel, et, en mai suivant, membre du Directoire du Morbihan. Accusé de tiédeur par les montagnards, il fut incarcéré au Petit Couvent de Vannes le 17 février 1794. Relâché le 8 novembre suivant il fut nommé juge suppléant au tribunal de Vannes ; puis, le 2 mai 1799, juge à Ploërmel, et, en 1811, à Vannes. Il mourut dans cette ville le 28 octobre 1814, laissant postérité de sa cousine, Louise-Sébastienne Le Goaësbe de Réron, qu’il avait épousée à Sérent, en 1775, et qui mourut à Ploërmel le 21 août 1831.

De suite après sa nomination de premier député de la sénéchaussée de Ploërmel, M. Tuault de la Bouvrie avait gagné Versailles. Sa conduite à l'Assemblée Nationale peut se résumer en deux mots : Franchisé et Loyauté. D’abord grisé par les idées de liberté, et persuadé que les Etats-Généraux allaient réformer les abus existants et les coutumes surannées, il partagea les idées du Tiers ; mais il refusa de prendre part au Serment du Jeu de Paume et désapprouva le renvoi de Necker. Puis, quand il vit que les mots de Liberté, d'Egalité, et Fraternité, n’étaient qu’un panache trompeur, et que le mouvement réformateur et libérateur qu’il avait rêvé, dégénérait en révolution, il donna sa démission de député le 14 février 1790. Et, après la suppression des sénéchaussées, au commencement de 1791, il refusa de remplir une fonction publique, ne voulant pas prendre part aux actes, que, dès cette époque, un fonctionnaire était forcé de commettre ou de subir.

Il se trouvait à Paris, lors de la journée du 10 août 1792 et il écrivait, au sujet de cette émeute, à son ami et voisin, le comte Le Doüarain de Lemo « J’aurais voulu être de ces Suisses, qui sont morts pour le Roi ».

Animé de pareils sentiments, et avec tout son passé de droiture et de bienfaits, Tuault ne pouvait tarder à devenir suspect. Arrêté une première fois en avril 1793, il fut incarcéré d’abord au petit couvent à Vannes, puis dans l’ancien couvent des Ursulines de Ploërmel, devenu plus tard l'Institut des Frères ; il réussit à s’évader grâce au dévouement de sa fille, qui devait devenir Madame Dahirel, et de ses nombreux amis, dont les membres de la famille Friquet.

Il vécut ensuite, pendant plusieurs mois, errant dans la campagne et se cachant de ferme en ferme. Puis, lassé de cette existence, et voyant ses biens menacés d’être saisis et vendus comme bien d’émigré, il vint se constituer prisonnier devant le Comité Révolutionnaire de Ploërmel, dont M. Poullain du Parc était président. — « Quel sort attends-tu donc de nous ? » lui demande celui-ci. — « La liberté, » répondit-il fièrement. — « Tu as donc une caution ? » « Ouvrez la fenêtre, réplique Tuault, et demandez au premier passant venu s’il consent à être la caution du citoyen Tuault... ». Un laboureur de la Noë Verte, nommé Sebillot, passait en ce moment sur la place des Halles, on l’appela, et il accepta sans hésiter cette dangereuse responsabilité. Tuault était libre ; et ses concitoyens s’empressèrent de le nommer juge du tribunal District et commandant de la Garde Nationale.

Cette popularité le rendit plus redoutable encore à ses ennemis, les sans-culotte, qui le firent arrêter de nouveau en mai 1794, à la suite de la bataille de Beignon. Puisaye, chef de l’armée catholique et royale de Bretagne, ayant appris que l’armée républicaine d'Ille-et-Vilaine, commandée par les adjudants généraux Damas et Wendling, s’avançait pour se réunir à Beignon à celle du Morbihan, sous les ordres du général Avril, était allé s’établir, avec environ 2.000 hommes, dans les landes entre Plélan et Beignon. La colonne de Damas et de Wendling était forte de 3.000 hommes d’infanterie et de 85 cavaliers, parmi lesquels étaient 12 prêtres assermentés. Le samedi matin, 3 mai 1794, cette troupe montait sans défiance la côte du Pont du Secret, quand elle fut attaquée à l’improviste, de flanc, par l’infanterie de l’armée de Puisaye, et, en tête, par les cavaliers de M. Le Forestier. Les Bleus furent mis en déroute, et se réfugièrent dans la forêt de Paimpont ; plusieurs d’entre eux furent tués et l’adjudant général Wendling grièvement blessé. Les troupes du Morbihan, sous le commandement du général Avril, apprenant la défaite de la colonne d'Ille-et-Vilaine, se replièrent en hâte sur Ploërmel. Et le soir de cette victoire, Puisaye et son état-major, dont son aide de camp, le comte de Busnel, soupèrent et couchèrent au château de Quéjau, chez Monsieur Tuault de la Bouvrie.

Celui-ci fut, de ce fait, accusé d’incivisme et d’entente avec les ennemis de la République. Arrêté à Ploërmel, il fut emmené à Vannes, et sa fille, depuis Madame Dahirel, ne voulant pas se séparer de lui, suivit à pied, malgré son jeune âge, la voiture qui le conduisait en prison. Incarcéré d’abord à Vannes, il fut transféré à Hennebont, puis à Port-Louis, et ne dut la liberté, et probablement la vie, qu’à la chute de Robespierre, le 9 thermidor (27 juillet 1794).

Arrêté une troisième fois le 17 ventôse an IV (6 mars 1796), il fut emprisonné à Vannes au Petit-Couvent (nunc : l’hôpital militaire) ; et voici ce que Perret de la Garenne écrivait à son frère, Perret de la Lande, au sujet de cette arrestation : « Tuault vient d’être arrêté et écroué au Petit-Couvent de Vannes, pour avoir adressé une lettre aux Boisbaudry, qui ont été emprisonnés avec lui le 22 ventôse. Ainsi, voilà le roi des J... F... de notre pays en cage ; il n’est pas prêt d’en sortir, si l’on me demande mon avis ». — On ne demanda pas sans doute l’avis de Perret, car Tuault fut relâché, après dix-sept jours de captivité, le 2 germinal an IV (29 mars 1796).

Les Perret, auteur et destinataire de cette lettre, appartenaient à une famille de Ploërmel, qui vivait dans ce pays dès le XVème siècle, y posséda, entre autres, le Pas­aux–Bisches, Lézonnet, Tregadoret, la Ville Louays, Glévily, la Bourdelaye, la Ville Aubert, Rue Verte, la Valin, les Garennes, Brango, et fut anoblie par le roi Henry IV, en 1606, à la suite de l’héroïque défense de Ploërmel contre les Ligueurs par les frères Perret des Croslais et du Pas–aux–Bisches, en 1594. Jean-Louis Perret de la Lande et d'Agathe-Yvonne Dumay de la Morissais. Il avait été nommé, en 1795, capitaine d’infanterie, et il épousa, en 1802, sa cousine, Pauline Dusers, fille de Charles-Guillaume, député de Vannes aux Etats Généraux, et de Perrine-Jeanne Dumay. Il mourut en 1815, ne laissant qu’une fille, qui épousa Alexandre Depasse. — François-Marie Perret de la Lande, frère aîné du marquis de la Garenne, avait été président du Tribunal de Vannes de 1752 à 1755, puis député aux Cinq Cents. Il avait acheté le Val Néant, en Sérent, en 1793. Il devint, en 1811, grand Prévôt des Douanes à Rennes, puis conseiller à la Cour et chevalier de la Légion d’honneur, et mourut sans alliance en 1816.

Tant qu’aux Boisbaudry, dont il est fait mention dans la lettre de Perret, c’étaient le comte François-Dominique-Joseph du Boisbaudry, châtelain de la Haute-Touche, et sa femme ; née de Marnière de Guer. — François-Dominique-Joseph, comte du Boisbeaudry, était né le 17 septembre 1724, nommé conseiller au Parlement de Bretagne en 1748, il avait acheté, en 1754, la seigneurie de la Haute-Touche, en Monterrein, des Lopriac. Ardent défenseur des libertés bretonnes, il avait été l’un des douze députés envoyés à Paris par le Parlement de Bretagne pour présenter au roi les doléances de cette Assemblée, et emprisonné avec eux à la Bastille. Il avait épousé dans la chapelle du château de Coëtbo, en Guer, le 19 novembre 1754, sa cousine Angélique de Marnière de Guer. Bien qu’âgé de 72 ans, et frappé de cécité, il fut emprisonné, en 1796, au Petit-Couvent de Vannes, avec sa femme ; puis interné au Bignon, en Ploërmel, où il mourut à la fin de 1796. Sa veuve mourut à Rennes en 1824. Leurs trois fils avaient émigré à l'Armée des Princes, en 1791.

Après sa mise en liberté, le 23 mars 1796, Tuault revint habiter Ploërmel et son manoir de Quéjau. Elu député du Morbihan en 1803, il siégea à la Chambre pendant toute la durée de l'Empire et sous la première Restauration. Créé chevalier de la Légion d’honneur le 6 novembre 1810, le roi Louis XVIII, à la suite d’un magnifique discours qu’il avait prononcé le 5 novembre 1814, le nomma, par brevet du 26 janvier 1815, officier de la Légion d’honneur ; après lui avoir adressé le 25 novembre 1814 des lettres d’anoblissement, lui attribuant pour armoiries : « d’azur à un lys d’or, surmonté d’un croissant d’argent », et pour devise : « Deo et Regi immaculata fides ». — « Fidélité inviolable à son Dieu et à son Roi ».

Devenu, en 1814, conseiller général du canton de Ploërmel et président du Tribunal de cette ville, Monsieur de Tuault assista, le 4 juillet 1815, à la cérémonie de la pose de la première pierre du monument de Mi-Voie, érigé à la mémoire des héros bretons du Combat des Trente. Il mourut à Ploërmel le 22 août 1822, âgé de 78 ans, et entouré de la vénération universelle. Il avait composé lui-même son épitaphe : « Passant, ne le foule pas ; il n’a jamais foulé personne ».

D’une instruction fort au-dessus de la moyenne, M. de Tuault s’était occupé de littérature ; et il était, en 1813, membre des sociétés littéraires et philotechnique de Rennes, et de l'Athénée des Arts de Paris. Il fit paraître, en 1815, un opuscule de 65 pages, intitulé : Traduction d’un extrait des voyages du Docteur Karamsin, médecin de Moscou (in-8°, chez Galles, à Vannes). — Ce M. Nicolas Karamsin avait, dans un ouvrage en trois volumes, donné le récit d’un voyage qu’il avait fait, en 1790, en Courlande, en Pologne, en Suisse, en France et en Angleterre. Cet ouvrage, écrit en allemand, avait été traduit en anglais, et c’est sa dernière partie, concernant la ville de Londres et ses habitants, que M. de Tuault traduisit à son tour en français. « Traduction, écrit-il, qui, commencée dans les premiers jours d’octobre 1813, fut achevée le 21 de ce mois, à Ploërmel, jour où l’on dansait dans cette ville à l’occasion du mariage du fils du sous-préfet ».

Monsieur de Tuault a inséré, à la fin de cette brochure, trois pièces de vers de sa composition : une idylle, Lise et Hylas, racontant la mort tragique de deux jeunes fiancés, engloutis par un raz-de-marée au cap de la Baie des Trépassés ; deux contes : le premier est intitulé : Histoire véritable, et raconte les aventures d’un soi-disant chevalier breton, le comte du Châtel, croisé en 1141, qui, fait prisonnier par les musulmans, aurait été sauvé par la fille de celui dont il était l’esclave ; le second a pour titre : le Mariage expiatoire : une belle, riche et noble demoiselle s’éprend d’un soudard, l’épouse, et le convertit.

Monsieur de Tuault composa plusieurs autres poésies, entre autres son portrait, où je remarque les vers suivants, écrits en 1805 :

« Je ne fus ni pauvre, ni riche, - Ni très instruit, ni sans talents ; - Je ne fus prodigue, ni chiche, - Ni vieux, ni jeune à soixante ans. - J’eus des parents auprès du trône, - Sous le dais, sous les fleurs de lys ; - Et j’en eus qui vendaient à l’aune, - Ou portaient le simple surplis. - Je fus assez fin sans finesse, - Et malin sans malignité, - Sans orgueil comme sans bassesse, - Heureux dans la médiocrité ».

Joseph-Golven de Tuault de la Bouvrie laissait trois enfants ; deux filles : Mesdames Dahirel et Héelz du Planty, et un fils : Benjamin de Tuault de la Bouvrie, châtelain de Quéjau, chef de Bataillon au Corps Royal d'Etat-Major, chevalier de la Légion d’honneur et de Saint-Louis, né à Ploërmel en 1784, mort à Quéjau en 1835, ayant eu, de Rosalie de Préaudeau, qu’il avait épousée en 1819 :

1° Madame Ange de Préaudeau, morte veuve à Paris, le 22 juin 1909 ;

2° Louis de Tuault de la Bouvrie, châtelain de Quéjau, chevalier de la Légion d’honneur, sous-préfet de Ploërmel de 1872 au 16 mai 1881, né en 1827, mort au château de Quéjau, le 16 juin 1898, aimé et regretté de tous ses concitoyens, veuf depuis quatre ans de Mathilde de Kersauson de Penendreff, qu’il avait épousée le 15 novembre 1859, et dont il avait eu : 1° Mathilde, épouse depuis 1887 de M. Henry Nouvel de la Flèche ; 2° Jean, officier de marine, mort à Toulon le 15 mars 1897, laissant de Cécile du Bois de la Villerabel, qu’il avait épousée à Saint-Brieuc, le 25 novembre 1891, un fils, Jean, né en 1894, et 3° Louis, enseigne de vaisseau, mort à Quéjau, sans alliance, le 11 décembre 1896 ; 

3° Charles de Tuault, qui épousa Eveline de Mauduit, morte à Paris le 11 janvier 1908, ayant eu : Marie, qui épousa M. André Destailleurs ; et, Benjamin, né en 1870, qui a épousé à Paris, en janvier 1914, Marie-Marguerite Latouche.

Le portrait de Joseph-Golven Tuault de la Bouvrie a été gravé dans la collection Dejabin. Il y est représenté de profil : cheveux roulés en cadenettes avec marteau et habit à col haut et brodé, jabot avec fraise en dentelles. Les traits sont fins et expressifs, la physionomie aristocratique et bienveillante.

Ce portrait, il m’a semblé qu’il était bon de le rappeler dans les assises du congrès Breton tenues dans la cité Ploërmelaise, et qu’il était digne de figurer dans la galerie des Ploërmelais célèbres, à côté des Derval, des Picaud de Morfouace, des Perret, des Baudeville, des Cahideuc, des Coëtlogon, des Montauban, des Volvire, des Madaillan, des Guémadeuc, des Rogier, des Lambilly, des Desgrées, des Hervieux de Mellac, des Larcher de la Touraille, des Toustain, des Rioust des Villeaudrains, des Beaugeard, des Le Doüarain, des Busnel, des Bois­baudry, des de Lys, des Trécesson, des Saint-Pern, des Berruyer, des Baron du Taya, des Ropartz, des Dubreton, des Guérin, et de tant d’autres, dont notre vieille cité a le droit et le devoir de s’enorgueillir.

Soyons fiers et gardons pieusement la mémoire de ce glorieux compatriote, de cet homme de bien, de principe et d’honneur, qui, malgré les temps troublés au milieu desquels il avait vécu, avait su mériter, avec l’estime et la reconnaissance de ses concitoyens, la belle devise, donnée par le roi Louis XVIII, et dont tous ses descendants sont restés dignes : Deo et Regi immaculata fides (M. de Bellevue). 

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