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La paroisse de Trigavou durant la Révolution.

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Renseignements ecclésiastiques. — Trigavou, cure de l'évêché de Saint-Malo, relevait en 1789 de l'archidiaconé de Dinan et du doyenné de Poudouvre, au siège de Saint-Enogat. Mais, l'an 1330, d'après un compte publié par Longnon dans les Pouillés de la Province de Tours, op. cit., p. 358, le décanat de Poudouvre était à cette époque annexé à cette paroisse, alors taxée à 100 sous de redevance envers la Cour d'Avignon.

Les seigneurs de la châtellenie du Bois de la Motte, ancien fief de bannière, illustré autrefois par les Beaumanoir, jouissaient dans l'église de Trigavou des droits de seigneurs fondateurs et prééminenciers. A la suite de l'alliance de la dernière héritière des marquis du Bois de la Motte, Marie-Françoise de Cahideuc, avec le comte J.-B. Le Roux de Coëttando, ce personnage était, lors de la Révolution, seigneur de la paroisse de Trigavou. Il est mort sans descendance masculine en 1817, au château du Bois de la Motte, et sa tombe se voit encore près de l'église de Trigavou. Il avait figuré avec honneur comme volontaire à la bataille de Saint-Cast, en 1758.

Sainte Brigide ou Brigitte (l'irlande, et le latin adoptent cette dernière forme), illustre vierge d'Irlande, était dès 1156 et est encore aujourd'hui la patronne de l'église de Trigavou. Sa statue de bois se voit dans l'église de cette paroisse, ainsi que celle de Sainte Anne, et son buste en argent, donné en 1688 par Guyonne de Montbourcher, dame et marquise du Bois de la Motte, fut préservé des pillages révolutionnaires lors de la mise à sac de l'église de Trigavou, et caché au manoir de la Rongerais.

Le 1er juin 1741, lisons-nous dans la liasse G 79 des Archives d'Ille-et-Vilaine, le recteur de Trigavou rend compte à l'évêque diocésain « que sa paroisse est petite et contient environ 400 communiants. Il ajoute qu'il est le seul décimateur, ce qui peut lui valoir de 7 à 800 livres par an, mais qu'il n'a point de casuel. De plus, les paroissiens sont pauvres en général, en sorte que le recteur et autres prêtres de la paroisse y manquent d'intentions de messes pour la plupart du temps. Aussi le recteur laisse-t-il à ces prêtres le peu de fondations qu'il y a à desservir, pour les faire rester dans ladite paroisse afin d'assurer la messe du matin aux dimanches et fêtes, pour rétribution de quoi, ils font aussi une quête ».

Il faut aussi noter, d'après ce rapport, que les enterrements et services n'étaient en général pas payés au clergé. Enfin, le recteur achève en priant l'évêque de lui accorder, à cause de l'impraticabilité des chemins, l'autorisation de célébrer en hiver les vêpres aussitôt après la grand’messe, autrement, dit-il, « il sera seul à les chanter avec ses prêtres ».

Il existait autrefois trois chapelles à Trigavou : celle du Val, ou des Vaux-Garoux, dédiée à Sainte Apolline, où se serait, assure-t-on, réalisé le dicton populaire « Trigavou, où la chèvre prit le loup » (cf. P. Sebillot : Contes des Paysans et des Pêcheurs, in-8, Paris, 1881, p. 336) ; la chapelle de la Rougerais, dédiée à Saint Yves, et enfin la chapelle domestique du Bois de la Motte, sous l'invocation de Sainte Anne, « fondée de plus de 400 l., écrit le Pouille de Mgr de la Bastie, laquelle comprend quatre chapellenies qui ont été réunies et dont le service a été réglé en 1746 ».

Ces chapellenies, fondées par les Beaumanoir, et qui sont taxées à 10 livres dans le compte de répartition des décimes de 1516 conservé aux Archives Nationales sous la cote G 8, I, folio 71, se desservaient tant à l'église de Trigavou, qu'en la chapelle du Bois de la Motte.

Trois d'entre elles étaient d'ordinaire accordées par les seigneurs présentateurs à un personnage d'importance. C'est ainsi que le 8 octobre 1784, Jacques-Julien Meslé de Grandclos, archidiacre de Dinan, théologal de Saint-Malo et commendataire de l'abbaye de Notre-Dame de la Chaume, devint titulaire de trois des chapellenies du Bois de la Motte à la mort de niessire Jean Jacob. La dernière était donnée à quelque pauvre prêtre résidant sur place, lequel avait mission d'acquitter par semaine quatre messes basses, deux à Trigavou et deux au Bois de la Motte. Le dernier titulaire en titre lors de la Révolution fut Monsienr Jean-Philippe Avril, de Pleslin (voir à cet article), lequel eut l'honneur de verser son sang pour la Foi sur l'échafaud, à Saint-Brieuc, le 10 février 1794.

Fait assez rare, le recteur de Trigavou était seul décimateur dans sa paroisse, ce qui, d'après sa déclaration, lui valait 2.990 livres de revenu brut et 2.649 livres de revenu net en 1790. Le 30 mai 1753, le recteur Jacob affermait 100 livres la dîme des lins et filasses de Trigavou, s'étendant aux quartiers « du Milieu, des Vaux et de Fonlangal », chiffre qui nous permet de nous faire idée de la place que tenait la culture des textiles dans cette localité. En 1790, la dîme des lins et filases rapportait au recteur 490 livres. Les autres récoltes sur lesquelles s'étendait sa dîme consistaient en froment, pour 139 boisseaux ; en blé noir, pour 269 bx et demi ; 17 bx et demi de mouture ; 41 bx d'avoine grosse, 10 bx d'avoine noire ; 7 bx et demi de paumelle. Il acquittait en 1790 pour 68 livres d'impositions appelées décimes.

La série G, aux Archives des Côtes-d'Armor, est assez riche sur Trigavou. D'après un compte de 1765, en notre possession, les recettes de cette église s'étaient élevées l'année précédente à 200 livres 7 sols. Dans cette somme, la vente de l'herbe du cimetière rentrait pour 1 l. 16 s., et celle des pommes du même lieu, pour 16 l. 5 s. Le blé offert à l'église avait rapporté 8 l. 12 s. ; le blé noir, 3 l. 12 s. seulement, le beurre 11 l. 12 s., et les quêtes aux divers offices de l'année, 14 sols.

La plus importante des fondations de la paroisse avait pour but l'entretien de la lampe du sanctuaire. Elle consistait en 4 boisseaux de froment, dont la valeur pouvait varier entre 24 et 28 livres chaque année. Elle avait été léguée en 1708 par noble écuier Alain-Charles des Cognets, sieur de la Garenne. Guyonne de Montbourcher, marquise du Bois de la Motte, avait aussi donné 16 l. 17 s. de rente à la fabrique de Trigavou. Nous avons relevé par ailleurs 11 petites fondations variant d'une livre à 4 l. 12 s., payées à la fabrique de Trigavou. Les dépenses pour la susdite année s'étant élevées seulement à 98 l. 2 sols, il demeurait pour l'exercice 1764 un boni de 102 livres 5 sols à l'église de cette localité.

Quelques-unes des fondations de la paroisse de Trigavou étaient toutes récentes. Ainsi, du temps de M. Jacob, elles s'étaient accrues d'abord de 6 livres 15 sols., léguées en 1756 par Jean Josse du Chesnay, pour deux services à perpétuité ; puis, en 1757, d'autres 6 l. 15 s. léguées par Julien Lucas pour deux services aussi à perpétuité, et enfin, en 1761, d'encore 6 l. 15 s. léguées par Joseph Guguen du Chesnay, à même fin que précédemment.

Le presbytère, nous renseigne le Pouillé de la Bastie, « est peu de chose, et fort éloigné de l'église ». Il ne s'est pas jusqu'ici corrigé de ce dernier défaut. Il fut loué le 26 février 1793, mais la municipalité s'en empara pour y tenir ses séances.

Quant à l'église de Trigavou, dont le choeur, avec sa chapelle privative et ses belles fenêtres du XVIème siècle, n'est certainement pas sans mérite, le Pouillé que nous utilisons, la juge « pauvre, point de sacristie, presque point d’ornements ; cependant, ajoute-t-il, le vaisseau n'est pas mal ».

Avant la Révolution, Trigavou possédait une école de filles dont les bâtiments, toujours existants, et toujours utilisés à cet usage, portent le millésime de 1756. Elle fut fondée, lisons-nous aux Archives d'Ille-et-Vilaine, G 79, par M. le Marquis et Mademoiselle du Bois de la Motte, et le comte Marot de la Garaye, qui la confièrent aux Filles de la Sagesse. On donna à ces religieuses, sur la demande du « général » de la paroisse de Trigavou, une maison et trois quarts de journal de terre que Joseph Bonnier, précédent recteur, avait légués à cette paroisse, à condition « qu'un prêtre nommé par le recteur veut instruit gratis huit ou dix petits garçons pauvres », mais la modicité des revenus avait empêché l'effet de cette fondation. Les bourgeois révolutionnaires ne manquèrent pas de faire main-basse sur cette utile institution destinée aux enfants du peuple. Ils expulsèrent les trois religieuses, dont l'une, dite la soeur La Faye, quitta le pays. Une autre était connue sous le nom de soeur Saint Georges. C'était la supérieure. Elle passa l'époque de la Révolution cachée dans les fermes dépendant du Bois de la Motte, et rendit tout ce temps de grands services à la population. La vente du modeste mobilier des Soeurs produisit 334 livres le 2 mars 1794. Quant à leur immeuble, grâce à un heureux concours de circonstances, il ne fut pas vendu, voici comment. Déjà la maison, prise à bail pour 75 francs, avait été expertisée à fin d'enchères publiques, quand, à cause de la guerre de guérillas qui ensanglantait un peu partout la Bretagne, un détachement de troupes vint occuper le bourg de Trigavou et s'empara de l'école, décrétée bien national, pour y établir son cantonnement [Note : Deux combats, écrit le colonel de Pontbriand dans ses Mémoires, p. 409, se sont livrés à Trigavou, dont l'un au Bois de la Motte en mars 1796]. Bien plus, les militaires organisèrent le local en position défensive et creusèrent des retranchements dans la cour et vis-à-vis la porte d'entrée, lesquels existaient encore en 1799. Leur occupation se prolongeant, dura jusqu'à l'époque consulaire, ce qui permit aux anciens propriétaires légaux de se faire réintégrer dans leurs droits.

L'ancienne église de Trigavou ne possédait que peu de propriétés. Foncières. Elles furent vendues : le pré de la Fontaine, le 13 juin 1798, et le Clos et le Pré du Presbytère, le 9 juillet de cette même année.

Quant aux ornements de l'église de Trigavou, ils produisirent 91 fr. 80 le 12 juin 1794, et le 24 août suivant, on inventoriait à Dinan, avant de l'envoyer à la Monnaie, et comme provenant de cette église : un ostensoir et un pied de ciboire avec sa couverture, pesant 8 marcs, 3 onces et un demi gros d'argent blanc ; un calice avec sa patène, une coupe de ciboire et un croissant pesant 3 marcs, 2 onces et un demi-gros d'argent doré, plus 4 marcs 5 gros de galon d'argent et 2 marcs, 5 onces, 2 gros de galon d'or. A ces chiffres, il convient d'ajouter une belle croix d'argent, ainsi qu'un encensoir et sa navette, que l'on avait inventorié à Dinan le 7 mai 1793, et qui pesaient 13 marcs, 1 once d'argent blanc.

En novembre 1796, le receveur des Domaines de Dinan signale l'église de Trigavou comme en mauvais état, sans aucun usage. Il ajoute qu'elle mesure 79 pieds de long.

Nous nous sommes étendus à l'article Pleslin sur les dispositions que comptait prendre la Révolution touchant la configuration paroissiale de Trigavou. Disons pour finir que Trigavou était groupé pour les prédications des stations avec Pleslin et Plouër, et que les jours de ses adorations avaient été fixés aux 13 et 14 février de chaque année.

 

CLERGÉ.JOACHIM-JACQUES CHARTIER, recteur, était originaire de Trigavou, où il naquit le 13 février 1733 du mariage de Pierre et de Mathurine Guinchard. Il étudia à Dinan. On le note au Séminaire comme « ayant de la voix et tant soit peu de chant, bien, surtout à son examen de prêtrise », laquelle il reçut le 25 septembre 1763. Après avoir été quelques mois chapelain de la Gonnais, en Ploubalay, il s'en démit le 6 octobre 1764 pour devenir vicaire de sa paroisse natale. Le 29 avril 1772, sur résignation de M. Jean Jacob, nommé chanoine titulaire et grand pénitencier de la cathédrale de Saint-Malo, M. Chartier obtint le visa pour lui succéder dans la cure de Trigavou [Note : Jean Jacob, né au bourg de Ploubalay le 22 mai 1715, de Gilles Jacob-Belleré et de Jacquemine Le Breton, put, grâce à ses parrain et marraine, Jean-René Labbé de Casnoual et Renée de la Bouexière, dame de la Trochardaye, se préparer en vue du Séminaire. Remarquablement doué, il fit gratuitement sa philosophie à la Concorde, en Saint-Servan, puis il étudia au collège de Rennes avec grands succès. D'excellents examens précédèrent toujours son admission aux saints ordres. Ainsi, pour celui du diaconat, passé le 22 août 1738, il fut noté comme « un bon sujet, chantant un peu et répondant fort bien ». Pourvu du rectorat de Trigavou le 3 mars 1749, M. Jacob conserva cette cure jusqu'en 1772 et exerça en cette qualité les fonctions d'examinateur synodal. M. Jacob mourut à Saint-Malo, l'un des vicaires généraux de Mgr. des Laurents, le 31 mars 1783].

Lorsque survint l'époque de la Constitution Civile, l'abbé Chartier refusa, le 11 février 1791, de s'assujettir à la loi, « jugeant nécessaire, dit-til, qu'auparavant l'Eglise consacre la serment de son autorité » ; mais comme l'on ne put trouver de curé intrus pour le remplacer, ce prêtre conserva ses fonctions jusqu'après la loi du 26 août 1792, et on le voit même toucher son traitement au mois de mai précédent, date à laquelle tous les insermentés encore en fonctions se virent diminuer de moitié leurs émoluments par ordre du Directoire des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor). (Cf. Archives des Côtes-d'Armor, L 154 , folio 37).

Lors de la loi condamnant les ecclésiastiques fidèles à l'internement ou à l'exil, M. Chartier, quoique sexagénaire, préféra s'expatrier. Il prit donc, en conséquence, à Trigavou, le 13 septembre 1792, un passeport afin de quitter la France. Sur cette pièce figure le signalement suivant de ce prêtre : « taille cinq pieds, cheveux, sourcils et barbe châtains parsemés de blanc, visage large, petit nez, moyenne bouche, menton fourchu ». Le lendemain, M. Chartier s'embarqua à Saint-Briac pour Jersey et séjourna dans cette île jusqu'au 20 mai 1801. Il refit alors en sens inverse le voyage qu'il avait effectué 9 ans auparavant et prit terre au Port-Jouan, en Saint-Briac, avec onze autres prêtres catholiques. Arrêtés par les agents de la douane chez une personne dévouée, nommée Marie Noël, qui leur avait accordé l'hospitalité, tous ces ecclésiastiques furent conduits devant le sous-préfet de Saint-Malo, à l'exception de MM. Chartier et Rault-Maisonneuve, de Dinan, « demeurés par infirmités sous caution à Saint-Briac » (cf. Archives Nationales, F 7, 7872, dossier 430. Chassin, le très passionné auteur des Pacifications de l'Ouest, 3 in-8, Paris, 1899, raconte ce débarquement, t. 3, p. 705, mais il confond Saint-Briac et Saint-Brieuc).

L'abbé Chartier avait en effet presque perdu la vue au cours de son exil, aussi lui permit-on de se retirer dans son ancienne paroisse, où le maire, son parent, s'engagea à le tenir sous sa surveillance jusqu'à ce qu'il eût prêté la promesse de fidélité au gouvernement consulaire, ce que, du reste, il ne se hâta pas d'accomplir. Le vieux recteur de Trigavou trépassa le 29 mars 1803, avant d'avoir vu définitive la nouvelle organisation du diocèse de Saint-Brieue.

Durant son exil, le, mobilier de M. Chartier avait été vendu à l'encan, au profit de la République, au mois de mars 1794. Il produisit 809 livres, non compris le linge et les objets en cuivre et en étain déposés à Dinan pour les besoins des armées qui opéraient en Bretagrie.

JACQUES-ELIE SARRAZIN, vicaire, était né à Saint-Servan, le 24 octobre 1757, du mariage d'Elie et de Thomase Nicole. On le note durant son Séminaire, comme « assez bien à ses examens, ayant de la voix et du chant ». Après avoir reçu la prêtrise à Saint-Brieuc le 22 décembre 1781, cet ecclésiastique devint d'abord aumônier de marine, puis il fut envoyé vicaire à Trigavou, où il signe la première fois comme tel le 28 octobre 1788.

Lors de la Révolution, M. Sarrazin se modela sur son recteur et refusa de s'assermenter. Il reçut pour la dernière fois son traitement en mai 1792 et s'exila à Jersey en même temps que M. Chartier. Sur le passeport qu'on lui délivra afin de s'embarquer, la municipalité de Trigavou prit soin de noter « qu'il n'a jamais occasionné aucun trouble », et, comme signalement, se borne à indiquer qu'il mesure « cinq pieds deux pouces, a le front haut et les sourcils blonds ».

Revenu de l'étranger en 1802, M. Sarrazin était alors devenu incapable d'exercer le ministère paroissial et dut se faire, pour subsister, instituteur à Saint-Servan. C'est dans cette ville qu'il mourut le 5 novembre 1810.

Vers 1925, quatre prêtres encore vivants, ont vu le jour à Trigavou. Outre le recteur, étaient natifs de cette paroisse à l'époque de la Révolution [Note : Nous trouvons au moins de 1760 à 1782, six autres prêtres natifs de Trigavou, vraisemblablement trépassés avant 1790 ; c'étaient MM. Chevalier, Le Moine, Josselin, Lucas, Tricot et Merven], MM. :

GUILLAUME–FRANCOIS CHARTIER, né dans le bourg le 1er juin 1745, de Jean, sieur du Rocher, et de Guillemette Bobet, qui moururent de bonne heure, le laissant jeune encore aux soins de l'abbé Joachim Chartier avec 18 livres de rentes en terres et une maison pour tout avoir. Après avoir fait son cours au collège des Laurents, où il achevait sa cinquième en 1762, Guillaume Chartier entra au Séminaire, où on le note comme « donnant des espérances, mais doué d'une faible voix ». Cet ecclésiastique reçut le sacerdoce à Rennes par dimissoire, le 4 avril 1772, puis nous le trouvons l'année suivante simple prêtre à Pleslin, et quelque temps après vicaire à Vildé-Guingalan. De 1785 à 1788, l'abbé Chartier remplit à Trigavou les fonctions de « curé » prés de son oncle, qu'il quitta vers la fin de la prédite année pour s'en aller, dans les mêmes conditions, à Dingé, dans le canton actuel de Combourg, où nous le voyons en 1789 concourir, mais sans succès, pour l'important rectorat de Ploubalay.

Nommé curé d'office de Dingé le 24 février 1791, à la mort du recteur, M. de Trégelin, l'abbé Chartier refusa de s'assermenter et dut, pour cette raison, s'éloigner de sa paroisse, sur l'injonction du Directoire d'Ille-et-Vilaine, le 19 juin suivant. Les mêmes autorités l'obligèrent ensuite à venir se fixer à Rennes, où il élut résidence le 1er mai 1792, chez l'abbé Gohin, rue aux Foulons, près de l'Hôtel d'Arbois. On l'y saisit, le 14 du mois d'août de cette année, pour l'interner à l'abbaye Saint-Melaine, d'où on le déporta d'office à Jersey par Saint-Malo, le 13 septembre suivant. (Cf. sur cette déportation la biographie de l'abbé Poussin, à l'article Pleudihen. Voir aussi le récit que nous en a laissé l'abbé de Châteaugiron, publié dans la Vie de l'Abbé Carron, in-8, Paris, 1866, p. 293).

M. Chartier passa toute la Révolution dans l’île de Jersey, où il résidait encore l'an 1800. Une communication de M. le chanoine Le Masle, nous apprend qu'il rentra en France vers cette époque. Malheureusement, il nous a été impossible de retrouver ses traces. Toutes les recherches de M. l'archiviste de la Rogerie pour découvrir la date de son décès sur les actes de l'état-civil de Dingé ont été inutiles.

Sur le séjour de M. Chartier à Dingé, voir Delarue : Le District de Dol, op. cit., V, p. 35 et sq.

MATHURIN-JEAN LE MOAL, né à Trigavou le 17 mai 1750, de Jean et de Marie Boulard, étudia au collège des Laurents, où il achevait sa cinquième en 1767, et fut ordonné prêtre en 1779, après avoir été noté au Séminaire comme « bon sujet, répondant bien ».

Selon G. de Corson, dans ses Confesseurs de la Foi de l'Archidiocèse de Rennes, M. Le Moal aurait desservi en 1790 l'une des chapellenies de la cathédrale de Saint-Malo, quoiqu'il puisse faire que cet ecclésiastique n'eut simplement que rempli les fonctions de chantre dans cette église. En tout cas, il est certain qu'en 1790, M. Le Moal était chapelain du château de Saint-Malo, ce qui, d'après sa déclaration, lui valait 264 livres par an à cette époque. (Pouillé Historique de Rennes, op. cit., VI, p. 142). De même que la très grosse majorité du clergé malouin, M. Le Moal defusa nettement de s'assermenter, et, le 31 juillet 1791, la municipalité de Saint-Malo lui intimait l'ordre de sortir dès le lendemain de la ville et même du district de Saint-Malo, pour le punir de ne pas assister aux offices de l'assermenté Duhamel. (Cf. C. Maréchal : La Famille de la Mennais, in-8, Paris, 1913, p. 268). Enfin, devant les sévères mesures que s'apprêtait à prendre le Directoire d'Ille-et-Vilaine à l'égard du clergé fidèle, il crut meilleur de mettre la mer entre lui et ses persécuteurs, et s'embarqua pour Jersey sur le sloop Le Guernésiais, le 14 avril 1792.

Au rétablissement du culte, l'abbé Le Moal se fixa de rechef à Saint-Malo de l'Isle, et exerça les fonctions de chantre à la cathédrale. Il mourut à Saint-Malo le 24 juillet 1810, dans une maison de la Cour La Houssaye. (Cf. Additions à la fin).

Firent du ministère à Trigavou lors de la Révolution :

CHARLES-PHILIPPE ROBICHO ne à Cancale le 22 août 1751, du mariage de Charles et Angélique Hamon, lequel étudia comme boursier au collège de Dinan. Excellent élève au Séminaire, où nous le trouvons noté comme « très bon en tous genres », M. Robichon reçut la prêtrise à Dol en septembre 1775.

N'ayant pas voulu s'assermenter comme vicaire de Saint-Servait en 1791, cet ecclésiastique fut déclaré déchu de ses fonctions par arrêté du District de Saint-Malo en date du 16 mai suivant et dut s'éloigner de cette ville. Bien plus, les autorités servannaises poussèrent l'infamie jusqu'à faire figurer le nom de M. Robichon parmi ceux des émigrés servannais, bien qu'il n'ait jamais quitté la Bretagne et qu'il ait passé presque toute la Révolution dans la région de Dinan, où il fit beaucoup de ministère caché.

Il se retirait le plus souvent au manoir de la Rougerais, en Trigavou, quoiqu'un rapport de police le signale en juin 1797 « sans domicile fixe, mais ayant eu des passeports des généraux ». Au mois d'octobre suivant, une dénonciation du sectaire Hannelais l'indique comme travaillant dans le canton de Plancoët, sous le pseudonyme de « Ma Tante », et nous savons par ailleurs qu'il a baptisé à Languenan, à Bourseul et à Corseul. Une lettre de Marchix, agent national de Mégrit, en date du 12 février 1798, dénonce une fois de plus M. Robichon comme parcourant les campagnes de Plélan, Vildé, La Landec, Corseul, Trébédan, Trédias, Trémeur, Mégrit et Lescouët, et ajoute : « C'est l'apôtre le plus fanatique qui puisse exister ». (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 115). On n'en pouvait faire plus bel éloge, car pour un bon jacobin, tout prêtre qui remplit son devoir ne peut être qu'un « fanatique ». Du reste, M. Robichon, dont le zèle comme les forces étaient inlassables, faisait aussi parfois de courts séjours à Saint-Servan, et feu le chanoine Bondon nous a aimablement avisé que ce prêtre a administré plusieurs fois le baptême à des enfants de Saint-Lunaire.

Au Concordat, cet admirable ecclésiastique reprit modestement ses fonctions de vicaire à Saint-Servan, et mourut dans cette ville le 3 janvier 1834, âgé de 82 ans.

MICHEL-FRANÇOIS CAPPREL, naquit à Saint-Lunaire de Pontual le 15 juillet 1767, du mariage de Michel-Joseph, maître de barque, et de Françoise Journeaux, lesquels donnèrent aussi le jour à deux filles dont l'une se fit religieuse à Dinan et l'autre à Vitré [Note : La première s'appelait Jacquemine. La seconde, Marie-Anne, décéda dans sa famille en 1841, après avoir fait longtemps l'école aux petites filles de sa paroisse natale]. Le jeune Capprel entra au Séminaire, où ses examens furent jugés « assez bons et sa conduite irréprochable ». Ordonné sous-diacre le 29 mai 1790 et diacre le 17 septembre suivant, M. Capprel, qui n'avait aucune sympathie pour l'Eglise constitutionnelle, crut prudent de s'exiler à Jersey le 25 avril 1792. Au reste, il profita de son séjour dans cette île pour recevoir la prêtrise et revint ensuite en Bretagne à la pacification du printemps de 1795. Il se fixa alors à Trigavou, où, durant les mois de l'été de cette année, il célébra publiquement le culte dans l'église de cette localité, qui avait été ouverte sur requête de Jeanne Le Moinne, dame Le Court de la Villethassetz, par permission du district de Dinan, en date du 3 mai 1795. Ce prêtre baptisa aussi neuf enfants à Languenan, dont le dernier à la date du 10 octobre 1795. Il quitta Trigavou le 26 de ce même mois et se retira à Saint-Malo, où il habita rue du Cimetière jusqu'au 14 mai 1800. (Archives Nationales, F 7, 5151). M. Capprel mourut recteur de Saint-Ideuc, le 22 avril 1838. D'après le chanoine G. de Corson, il exerçait le ministère dans cette paroisse depuis 1810.

Sur les autres prêtres qui travaillèrent à Trigavou durant les mauvais jours : MM. Margely, Gicquel et Avril, voir à l'article Pleslin ; sur l'abbé Lesage, voir à l'article Corseul.

Le 7 septembre 1791, M. André Bodinier, recteur insermenté de Saint-Jouan, des Guérets, prit un passeport à Trigavou pour s'exiler à Jersey. Ce prêtre s'était réfugié dans cette paroisse pour échapper aux mesures rigoureuses qui le frappaient alors dans l'Ille-et-Vilaine. (Archives Nationales, F 7, 5150).

Devint recteur de Trigavou le 16 janvier 1804 : l'abbé FRANÇOIS-JOSEPH BEAUDOUARD, né à Plouër le 18 avril 1751, du mariage d'Alain et de Thérèse Sauvage, que nous trouvons en sixième à Dinan, en 1767.

Après avoir été ordonné prêtre dans la chapelle Saint-Sauveur, à Saint-Malo, le 15 mars 1777, M. Beaudouard remplit les fonctions de vicaire de Tréméreuc du 20 mai 1780 au mois de mai 1786, date à laquelle on le désigna comme chapelain des bénédictines de la Victoire, en Saint-Malo de l'Isle. C'était alors, au dire de M. Fouace, son parent, « un gros homme d'une bonne figure, brun et d'une taille médiocre ». Cet ecclésiastique ne s'assermenta pas et, à la dispersion de ses religieuses [Note : M. Beaudouard vivait encore ouvertement à Saint-Malo le 4 mai 1792], il serait resté caché à Saint-Malo pour y faire du ministère, si l'on en croit MM. Guillotin de Corson et Herpin. Selon ce dernier auteur, ce serait même l'abbé Beaudouard qui aurait béni le mariage religieux de l'illustre Chateaubriand. Cependant, d'après les propres dires de l'abbé Beaudouard lui-même, ce prêtre aurait vécu à Saint-Coulomb (dit Coulomb-Rocher, en phraséologie révolutionnaire), depuis le 9 mai 1792 jusqu'au 12 octobre 1795, époque à laquelle il revint à Plouër, ce qui n'empêchait pas les Jacobins de Saint-Malo, le 6 décembre de cette année, de faire perquisitionner à Saint-Coulomb chez un appelé Pagneul, dans l'espoir d'y pouvoir arrêter ce bon prêtre.

Entre temps, si nous en croyons la correspondance de Charles Beslay, l'agent national du district de Dinan, M. Beaudouard s’employa activement à obtenir de ses confrères la promesse de soumission aux lois de la République exigée le 11 prairial an III (29 mai 1795), comme condition de l'exercice public du culte. Du reste, un rapport de police note l'abbé Beaudouard comme « homme de mérite et tranquille », et le signale en septembre 1797 en résidence à Plouër, au village de la Herviais. (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 121). Ce même ecclésiastique y vivait encore le 5 mai 1800, lorsqu'il fit devant le secrétaire de la municipalité plouéraise sa déclaration de se fixer dans la dite commune, « où il a toujours payé ses impôts ». Quelques jours plus tard, on lui accordait un certificat de résidence dans son pays natal. Nous y relevons son signalement que voici : « taille 1 m. 62, visage rond, menton idem, front découvert, yeux bleus, nez moyen, cheveux et sourcils gris. ».

Nous retrouvons M. Beaudouard le 26 août 1800 parmi un certain nombre d'insermentés, plus ou moins prévenus d'émigration, auxquels le préfet Boullé accorde « la surveillance ». Un peu plus tard, ce même Boullé notait M. Beaudouard comme « non déporté, instruit, spirituel, propre à faire un curé ». Cependant, malgré ces excellents renseignements, M. Beaudouard mourut recteur de Trigavou le 23 mars 1814, âgé de 63 ans. Son successeur fut l'abbé Coupeaux.

Fut nommé vicaire de Trigavou en 1804 : M. François Haguez, dont nous parlons à l'article Pleslin, d'où il était originaire.

 

CLERGÉ CONSTITUTIONNEL.HONORÉ-THOMAS LE MOIGNE, né à Valognes le 20 mai 1758, et alors vicaire assermenté à Saint-Malo de l'Isle, fut élu le 16 septembre 1792, curé constitutionnel de Trigavou ou de Pleslin à son choix, mais heureusement pour ces deux paroisses, ce Monsieur préféra devenir curé intrus de Miniac-Morvan, où il apostasia à Saint-Malo le 22 mars 1794, et se maria la même année.

Après l'exode des prêtres insermentés en septembre 1792, les électeurs réunis à Dinan le 25 novembre de cette année, désignèrent l'abbé CHAUSSEBLANCHE pour occuper la cure de Trigavou, mais ce constitutionnel demeura insensible à cet honneur. Les enquêtes préfectorales de l'an XI publiées par Sévestre, nous montrent ce prêtre fixé à Rennes en 1801 et alors âgé de 69 ans. Du reste, nous croyons qu'un assermenté eût été difficilement accepté à Trigavou. Une lettre adressée le 30 octobre 1795 par le District de Dinan à la municipalité de cette commune, nous apprend en effet que les parents, depuis l'impossibilité pour eux de faire enregistrer la naissance de leurs enfants à l'occasion de leur baptême à l'église, négligeaient en grand nombre de les présenter à la mairie, et privaient ainsi leur descendance d'état-civil. (A. Lemasson).

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