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LE PETIT TRAIN MICHELOIS

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A la fin du 19ème siècle, les moyens de transport étaient presque inexistants et les déplacements peu fréquents. La population essentiellement rurale ne se déplaçait guère. Les rares déplacements se faisaient à l'occasion des foires et des pardons ou, encore, pour rendre visite à la famille. En 1900, il est déclaré 12 automobiles, dont 8 voitures, 3 motocycles et 1 bicyclette "Werner" pour l'ensemble du département des Côtes-du-Nord.

Le chemin de fer départemental aura pour but de relier entre elles le maximum de communes de chaque département aux différentes gares des autres réseaux et d'ouvrir ainsi l'économie des Côtes-du-Nord vers l'extérieur.

On mentionne déjà ce chemin de fer départemental dès 1894, lors des sessions du conseil municipal de Saint-Michel-en-Grève le 3 juin et le 28 octobre 1894. Deux projets de tracé sont alors en discussion : l'un   relie Plestin-les-Grève, Saint-Michel-en-Grève et Ploumilliau à Plouaret (sans passer par Lannion) et l'autre , qui a le soutien du conseil municipal de Saint-Michel-en-Grève, relie Plestin-les-Grèves, Saint-Michel-en-Grève et Ploumilliau directement à Lannion. Entre 1904 et 1906, le projet de chemin de fer fera l'objet de nombreuses discussions lors des sessions du conseil municipal de Saint-Michel-en-Grève et d'articles de presse.

Les premières lignes construites vont s'arrêter à la limite du département, ainsi le petit train de Morlaix s'arrête à Pont-Ménou en 1912. En 1914, la ligne est prolongée jusqu'à Plestin-les-Grèves. C'est alors que les élus de Lannion s'inquiètent de voir le commerce du canton de Plestin-les-Grèves drainé vers Morlaix et demandent que la ligne de Lannion-Plestin soit placée en priorité dans la mise en place du 2ème réseau départemental (le premier réseau avait démarré dès 1905 avec l'ouverture de la ligne Plouec-Tréguier).

Ils obtiendront satisfaction et la ligne Lannion-Plestin, d'une longueur de 21,1 kilomètres, sera déclarée d'utilité publique le 28 mars 1912. Elle sera ouverte aux voyageurs le 1er Juillet 1916 et aux marchandises le 15 Juillet de la même année. La vitesse de ce train était limitée au début à 25 km/h puis est montée à 40 km/h. A noter que la section entre Plestin-les-Grèves et le Finistère avait été ouverte le 21 Juillet 1914.

Le premier tracé établi faisait passer le petit train à Trédrez et non pas à Ploumilliau. Suite à une pétition datée du 10 Janvier 1907, les habitants de Ploumilliau auront gain de cause et le train passera à Ploumilliau. Ce nouveau tracé de 1910 prévoyait 5 stations (Lannion, Ploumilliau, Saint-Michel-en-Grève, Saint-Efflam et Plestin-les-Grèves) et une halte à Ploulech. Les bâtiments des haltes et des stations ne seront pas construits lors de la mise en service du train. Ils le seront un peu plus tard. Des cabanes provisoires seront donc louées en attendant. Les travaux de construction de la voie commençèrent en 1913. Ils feront d'ailleurs l'objet de nombreuses contestations et protestations. De nombreuses expropriations auront lieu.

La guerre de 14-18 mettra malheureusement un frein à ces travaux. Les ouvriers sont mobilisés, les uns pour la moisson, les autres pour le front et le matériel est en partie réquisitionné (rails, éclisses, boulons, tire-fond, etc..). Pour continuer les travaux, il sera fait appel à des prisonniers allemands. Ces prisonniers de guerre étaient généralement employés au cassage des pierres. Une trentaine de ceux-ci et leur deux gardiens campèrent dans des baraques à la carrière de Lann Vrudec. Les travaux seront achevés en Mai 1916.

La ligne prenait son origine à Lannion-ouest. Elle longeait la ligne à voie normale Lannion-Plouaret puis la franchissait au moyen d'un passage inférieure en obliquant vers le Sud-Ouest pour se diriger vers Ploumilliau. Elle atteignait Saint-Michel-en-Grève en suivant une vallée. A partir de cette station, elle longeait le C.D 786 en accotement, passait au pied du Grand Rocher, contournait Saint-Efflam et rejoignait Plestin-les-Grèves en accotement. La ligne était exploitée jusqu'au 31 décembre 1921 par la Compagnie des Chemins de Fer Armoricains (dont Mr Nanquette était le président et Mr Favre-Robinet l'administrateur délégué). A partir de janvier 1922, elle sera exploitée par le département des Côtes-du-Nord "Régie Chemins de Fer d'intérêt local".

La station était sous la responsabilité d'un receveur appelé familièrement "chef de gare". La gare ne comportait pas de logement; le chef de gare demeurait à proximité et devait venir à la station pendant les heures fixées par la compagnie pour la vente des billets et l'enregistrement des marchandises. Il devait aussi s'assurer du bon état des aiguillages avant l'arrivée du train et ceci afin d'éviter les déraillements.

La gare de Saint-Michel-en-Grève se situait à l'emplacement de l'ancien tennis. Il s'agissait d'un bâtiment en briques rouges avec un petit quai découvert qui servait de rampe d'accès. La gare d'une superficie d'environ 13,4m2 était composée d'un hall pour marchandises, d'une salle d'attente et d'un petit bureau qui faisait office de guichet.

Pierre Kerboriou était le chef de gare de Saint-Michel-en-Grève: mutilé de la grande guerre, il obtint ce poste qu'il conserva jusqu'à la fermeture de la ligne. Beaucoup se souviennent encore de lui et de sa jambe de bois. Sa mère demeurait à Kerdrinquen au passage à niveau. C'est elle qui faisait sa lessive et pour lui faire parvenir son linge, il le mettait dans le petit train. A Kerdrinquen, le conducteur tout en faisant siffler le train, jetait le sac de linge sale et sa mère le récupérait. Une fois la lessive faite, celle-ci redescendait par la route avec sa brouette jusqu'à chez son fils pour lui ramener le linge propre.

Bien que cela ait été interdit, le train s'arrêtait quelquefois en rase campagne à la demande du voyageur (sur un signe de la main). Il lui arrivait même de saluer sur son passage des amis par des sifflements amicaux. Il tombait quelquefois en panne et le mécanicien partait tranquillement en stop chercher la pièce qui avait cassé. Les voyageurs, eux, attendaient sagement son retour. On prenait son temps à cette époque-là. Il n'y avait pas besoin de montre ou d'horloge, c'est le sifflement du train qui donnait l'heure aux habitants de la campagne et qui rythmait leur vie.

La conduite du train nécessitait un mécanicien, un chauffeur et un chef de train. Les mécaniciens étaient : Camille Ollivier, Albert Prioul jusqu'en 1923, puis Jean Marie Bilien de Plestin. Les chauffeurs étaient Peron ou Perou en 1918 puis Le Meur et Prigent. Les chefs de train étaient Quintin et Le Provost.

De nuit, les wagons de voyageurs avaient des lampes à pétrole comme éclairage; le contrôleur ou chef de train avait souvent du mal à vérifier les billets et leur date, car il y avait là, comme ailleurs, déjà de la fraude. Le mécanicien et le chauffeur devaient à cette époque former une équipe bien soudée. Si l'entente n'était pas bonne, la conduite de la locomotive pouvait poser de gros problèmes, tels que déraillements ou autres. Les passages à niveau étaient nombreux et non gardés. Le train devait siffler longuement avant d'aborder ces lieux de passage, surtout à la tombée de la nuit, car le train avait des lampes d'éclairage peu puissantes. Et malgré cela, il y avait de nombreux accidents.

En hiver, par temps de verglas, la locomotive patinait quelquefois dans les montées. Le mécanicien faisait alors marche arrière pour reprendre de la vitesse et monter ainsi la côte. Lorsque la locomotive s'essoufflait et refusait d'avancer, on faisait quelquefois appel à la compréhension des voyageurs qui descendaient alors du train et entamaient à pied une partie du trajet. Mieux même, certains voyageurs s'amusaient à pousser à l'arrière du dernier wagon. Le train pouvait aussi être retardé par une vache refusant obstinément de quitter les rails ou par un agriculteur débitant un arbre qu'il avait abattu sur la voie.

L'entretien des voies de chemin de fer était assuré par deux équipes de cantonniers. Chaque équipe avait à charge environ 9 kilomètres de voies. L'ensemble des équipes était dirigé par un chef d'équipe qui s'appelait M. Festou. Lorsque les cantonniers travaillaient sur la voie, ils posaient des pétards sur les rails à quelques centaines de mètres du lieu où ils travaillaient. Au passage du train, les pétards explosaient et prévenaient ainsi les cantonniers de l'arrivée imminente du train. Pour transporter leur matériel, ils disposaient d'un petit chariot qui se déplaçait sur les rails. Dans les descentes ils montaient dessus et un frein à main leur permettait de stopper l'engin. Par contre dans les montées il leur fallait pousser dessus et ils n'étaient que trois. Parmi les cantonniers ont peut citer Auguste Lamouret, Eugène Turnier et Auguste Le Coz. On les appelait les "gars de la ligne".

Les horaires étaient les suivants:

Lannion - Départ

10h45

13h25 (uniquement le jeudi jour de marché à Lannion)

19h00

Saint-Michel-en-Grève

11h18

13h53

19h33

Saint-Efflam

11h30

14h05

19h45

Plestin-les-Grèves - Arrivée

11h40

14h15

19h55

 

Plestin-les-Grèves - Départ

8h00

12h25 (uniquement le jeudi jour de marché à Lannion)

14h30

Saint-Efflam

8h08

12h33

14h38

Saint-Michel-en-Grève

8h20

12h45

14h50

Lannion - Arrivée

8h50

13h15

15h20

Le trafic de la ligne Lannion-Plestin sera suspendu du 22 au 26 septembre 1918 car le para-lames de Saint-Michel-en-Grève avait été détérioré sur plus de 200 mètres par la grande marée d'équinoxe. Jusque en 1926, le trafic ira en s'accroissant aussi bien côté voyageurs que côté marchandises. Après cette date le trafic routier fera un tort considérable au "Petit Train" et les premiers déficits apparaissent. Le prix du charbon passera de 70F la tonne en 1919, à 180F à partir du 1er Janvier 1920; en Février elle sera de 219F et le 21 Mars elle sera à 336F. Les dépenses du personnel sont également très élevées. Elles représentent en 1929, environ 72% des dépenses totales.

Les déficits chroniques successifs et la baisse constante du trafic voyageur menèrent à l'abandon du trafic voyageurs dès janvier 1933, mais le trafic des marchandises continuera encore quelques années jusqu'au 1er Janvier 1937. Le service voyageur entre Lannion et Plestin sera assuré par autobus du 1er Janvier 1933 au 1er Juillet 1933. Du 1er Juillet au 3 Septembre 1933, trois trains à vapeur seront mis en place dans chaque sens; le matériel routier étant affecté à la desserte de Trégastel. Le 4 Septembre 1933, les autobus reprendront le service. Les marchandises seront transportées soit par camion soit par wagons complets. Finalement la ligne Lannion-Plestin n'aura vécu que 21 ans.

Il ne semble pas y avoir eu des déraillements très importants et dangereux sur la ligne Lannion - Plestin. Ils se limitaient généralement à la sortie des rails de la locomotive et se produisaient la plupart du temps à l'entrée où à la sortie des stations. On descendait alors et on la remettait, aidé par les voyageurs, sur les rails. Leurs causes principales étaient les mauvais fonctionnement des aiguillages provoqué souvent par des cailloux mis entre les rails et qui semblait être le fait des jeunes du village. Les déraillements connus sont : deux déraillement à Ploumilliau (24 août 1917, 15 juillet 1918), un à Saint-Michel-en-Grève (23 octobre 1923) mettant en cause l'état défectueux des traverses, trois à Saint-Efflam (21 octobre 1923, 29 Mars 1924, 30 Mars 1924). Dans le cas du dernier déraillement, le chef d'équipe n'avait pas été prévenu de l'incident de la veille et donc du mauvais état de la voie.

La provision de charbon et d'eau était faite à Lannion ou à Plestin-les-Grèves. Elle était suffisante pour faire tout le voyage Lannion - Plestin. Il y avait généralement 1 ou 2 wagons voyageurs et 1 ou 2 wagons de marchandises. Lorsque on accrochait des wagons supplémentaires, la locomotive avait souvent quelques difficultés pour grimper les côtes. Les jeunes descendaient alors du train en poussant des cris de joie et le suivaient en courant le long du sentier, parfois même en marchant au pas. A noter que le jour des courses à Saint-Efflam, il fallait atteler 2 locomotives pour tirer les wagons remplis de chevaux.

Le jeudi, jour de marché de Lannion, le petit train se transformait en champ de foire. Il y avait foule à se rendre à Lannion. Les arrêts étaient un peu plus longs que de coutume et personne n'y trouvait à redire. Les poulets, lapins et canards avaient l’autorisation de voyager dans les wagons voyageurs. Les cochons par contre qu'on enfermait dans un sac, devaient se contenter du wagon à marchandises. Ils semblaient d'ailleurs ne pas appréciés cet état de fait et ils le faisaient savoir. Quelquefois, certains petits cochons de lait avaient plus de chance que d'autres et voyageaient sagement sur les genoux d’une jeune et jolie fermière qui tenait au bras un panier d’oeufs et qui n’était préoccupée que par la vente des produits de sa ferme.

On raconte l’histoire d’une ancienne micheloise qui se rendait un jour au marché de Lannion portant un couple de jeunes poulets et un coq au plumage éclatant, à la voix retentissante, au regard intrépide, mais qui d’après elle, avait eu le malheur de chanter avant minuit, ce qui l’avait condamné à être envoyé au marché. C’était, semble-t-il à regret, qu’elle exécutait la sentence; mais elle savait qu’il n’y avait pas à hésiter car d’après une tradition très ancienne qui se perpétuait en Bretagne, le chant du coq avant minuit était d’un sinistre augure; il annonçait une grande calamité, et il n’y avait d’autre moyen d’y échapper que de s’en débarrasser rapidement.

Les 3 premières locomotives affectées à la ligne Lannion-Plestin étaient des "Corpet-Louvet". Puis une "Blanc-Misseron". Dans les dernières années de l'exploitation de la ligne, le petit train à vapeur sera remplacé par des automotrices de "Dion Bouton".

Les trains avaient une allure spéciale qui donnait lieu à de nombreux "rimadélou" qui reproduisaient le bruit des roues sur les rails :"Joséphine que fais-tu.J'fais c'que je peux,J'fais ce que je peux.","Patates fayots, Patates fayots","Je te ramène,Je te ramène." ou "N'on Ket Kapab, N'on Ket Kapab (train montant une côte) - Bout a Chass Bout a Chass (train tiré et poussé) - Capab ont Capab ont (train ayant franchi la côte)".

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