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LA CHAPELLE SAINTE-CANDIDE DE LOCUNDUFF A TOURCH

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C'est une petite chapelle (16 m. x 7), toute en pierres de taille. Elle est située au croisement des anciennes routes de Scaër à Elliant et de Tourc'h à Kernével, à deux kilomètres et demi, environ, au Sud du chef-lieu. Elle touche le village de Locunduff. Sainte Candide en est la patronne.

Mais quel rapport y a-t-il entre les noms de Candide et de Locunduff ?

Chapelle Sainte-Candide de Tourch (Bretagne).

On le cherche encore. En 1672, on écrivait Loqunduff et Loquinguff. Les archives locales n'apprennent pas autre chose.

Voici, intégralement, une étude sur la question, par M. de Villiers :

Ce nom même de Locunduff appelle l'attention et on peut se demander quel est le saint personnage actuellement oublié, qui rappellent les noms des deux villages voisins, Locundu-Tourc'h et Locundu-Scaër situés de part et d'autre de l'Aven. Quel rapport pouvait-il y avoir entre ce personnage et sainte Candide ?

Je crois avoir trouvé l'explication dans l'aveu déjà cité d'Auffray du Chastel, où en 1619, le nom de la Sainte désignée comme patronne de la chapelle, avait d'abord paru inexplicable. Sur ma demande, M. Léon Maître a bien voulu établir de nouveau le texte original et il m'écrit qu'il ne peut lire autre chose que Sainte Vengu, patronne de Locunguff.

Cette lecture paraît très admissible. Vengu serait alors une forme intermédiaire, qui est devenue dans la langue parlé Uengu ou Ungu, et qui dériverait elle-même d'une forme Guenguff où l'on trouve l'adjectif gu ar guff « doux » (primitivement cune) avec le mot guen, blanc, comme équivalent de Candide.

J'estime donc que Loscunduff n'est autre chose que Locguengu. Mais si sainte Guengu est complètement oubliée à Tourc'h et à Scaër, son nom se retrouverait légèrement modifié dans le surnom de sainte Minnoc Guurguestl. La légende de cette sainte, que M. l'abbé Abgrall m'a signalée, a été écrite par Gurbéden, moine de l'abbaye de Sainte Croix, de Quimperlé, vers 1100. Elle est analysée dans la Vie des Saints, de M. de Garaby, et reproduite assez complètement dans l'édition d'Albert Le Grand, annotée par M. de Kerdanet. Le texte complet acta santœ Minnocœ se trouve dans les Bollandistes à la date du 4 juin ; il est long et diffus et dom Lobineau l'écarte dédaigneusement au point de vue historique. La légende est toutefois intéressante et peut notamment servir à expliquer le surnom de sainte Minnoc.

Guenguth, surnom qui, premier point à établir, est correctement transcrit. Cela n'est pas douteux, car une forme analogue, sent Urgustle, se trouve dans le Cartulaire de Landévennec (folio 142).

Je ne reproduirai pas, même en l'abrégeant, la vie de sainte Minnoc, et me bornerai à rappeler les circonstances qui ont précédé sa naissance. Le roi gallois Brochan et sa femme Meneduc avaient eu 14 fils (d'après une autre légende dix fils et deux filles, d'après les légendes galloises 24 fils et 26 filles) qui avaient tous quitté leurs parents pour aller au loin prêcher l'Evangile. Le roi n'ayant plus d'héritier de son royaume se désolait, et après avoir beaucoup prié, fait d'abondantes aumônes, il finit par se retirer sur une montagne pour jeûner et implorer Dieu. Après quarante jours, l'avant-veille de Pâques, un ange lui apparut pour lui annoncer qu'il aurait eu une fille et que cette fille serait la cause d'une grande joie dans toute la montagne. Cette promesse se réalisa et l'enfant baptisée après sa naissance par saint Columchill reçut de lui le nom qui avait été indiqué par l'ange, c'est à dire Guengustle.

Cette fille grandit en sagesse et en beauté, mais arrivée à l'âge de se marier, elle s'y refusa absolument, parce qu'elle s'était promis de se consacrer au Seigneur. Ses parents furent très attristés ; ils finirent cependant par lui accorder la permission de s'embarquer pour l'Armorique avec ses parrain et marraine. Elle débarqua à Poulilfin, en Plœmeur (Morbihan) et fonda dans cette paroisse un monastère de femme, le premier dit-on qui ait existé dans les Gaules. Il était situé à Lannenoc, autrefois Landuennoc, en Plœmeur.

On peut donc dire que la sainte avait été vouée et consacrée au service de Dieu par la parole de l'ange avant sa naissance, ce qui permit d'expliquer le mot gustl au moyen du verbe goestla, consacrer, vouer.

Si aujourd'hui les paroisses de Tourch et de Scaër n'ont conservé aucun souvenir dans leurs offices de sainte Minnoc, de sainte Veugu, ou de sainte Candide, on y voit encore deux anciennes statues de cette dernière sainte. L'une situé à Locundu a été déjà citée et représente incontestablement une abbesse. L'autre, qui est conservée à Scaër, était placée sur la façade de l'église paroissiale démolie il y a une vingtaine d'années ; elle présente une ressemblance très grande avec la statue de Locundu, par le costume, par la pose et les attributs, consistant en un livre dans la main gauche et dans la main droite une crosse qui est brisée à la hauteur de la main.

Il y a une concordance qui permet d'affirmer que la sainte patronne de Scaër et de Locundu était une abbesse. J'ajouterai que cette abbesse ne peut être que sainte Minnoc qui a joui dans ce temps éloigné d'une grande célébrité comme fondatrice d'un monastère peu éloigné... où la ferveur religieuse se soutenait avec la plus grande édification.

Il serait au contraire impossible de justifier la présence de ces attributs si on voulait les appliquer au nom de Candide. Ce nom a été porté par 16 saintes dont l'histoire est en général complètement inconnue, mais rien de ce que l'on sait pour quelques-unes d'entre elles ne leur donne le caractère d'abbesse. C'est comme vierge et martyrs qu'est honorée sainte Candide mentionnée seulement comme compagne de sainte Ursule et pouvant, à ce titre, avoir été connue en Armorique.

Il reste toujours à expliquer comment a disparu le nom de sainte Minnoc, si cette sainte a été réellement !a première patronne de Scaër. En tout cas, il n'y aurait pas là un changement de patron, fait qui s'est souvent produit et quelquefois sans que les motifs du changement soient bien appréciables. Il s'agirait seulement de la substitution au nom d'une sainte tombée dans l'oubli, d'un surnom qui en avait été inséparable. Quand le changement s'est-il produit ? Il est impossible de le dire, mais on peut supposer qu'il se rattache aux circonstances qui ont amené la suppression du monastère de femmes de Landrennoc au XIème siècle et son remplacement par un prieur d'hommes dépendant de Sainte-Croix de Quimperlé.

Le surnom de la sainte traduit en latin par Candida (en breton Candid, vulgo Canita) sera devenu le nom du patron de l'église de Scaër. Dans la campagne plus isolée de Tourc'h, le surnom a également remplacé le nom principal, mais en conservant la forme bretonne contractée Guengu ou Vengeu jusqu'au commencement du XVIIème siècle. A partir de 1619, ce nom disparaît et il n'est plus question que de sainte Candide.

Il y a en Bretagne et dans le reste de la France de nombreux exemples du changement de vocables des églises et chapelles. Ils paraissent quelquefois difficiles à expliquer, et il faut alors remonter aux sources, comme le dit très judicieusement un auteur l'abbé Déric que je me garderais bien de citer, s'il s'agissait d'étymologie. « Ces différents noms que l'on a donné dans les premiers temps aux mêmes personnes n'empêchaient pas de les reconnaître, parce que soit qu'ils fussent latins ou celtiques, on savait ce qu'ils signifiaient et que les causes qui les avaient fait donner ne pouvaient être ignorées, mais comme elles sont insensiblement tombées dans l'oubli et comme le celtique est relégué de nos jours dans la Basse-Bretagne et dans le pays de Galles, la différence de ces noms est propre à jeter de la confusion dans l'histoire si on n'a pas l'attention de remonter à la source ».

« J'ajouterai qu'il faut étudier non seulement les sources, mais encore les formes intermédiaires qui ont aussi leur importance. C'est ce que j'ai cherché à faire pour établir l'indentité de sainte Minnoc et de sainte Candide, en attendant la découverte d'un document qui permettrait de trancher la question définitivement » (Soc. arch. tome XX, page 564).

Tout le monde désigne la chapelle sous le nom de Sainte-Candide. Faisons-en d'abord un tour extérieur. La hauteur de la construction est bien en rapport avec les autres dimensions. Elle est d'aspect vétuste, sous le lichen blanc qui recouvre la pierre et sous la toiture, dont toutes les ardoises ont été rejointoyées au ciment blanc.

Le clocher n'a d'autre prétention que celle de porter une cloche.

Cependant, il nous présente, à l'angle Nord-Ouest, une curieuse tête de curé, au nez retroussé.

Au Sud-Est, on voit une tête de chien de chasse aux longues oreilles, pendantes.

Au Nord-Ouest, c'est une triste tête de roturier qui paraît suinter la misère et enfin l'angle Sud-Ouest est orné d'une tête arrogante de gentilhomme, bien frisé, bien pommadé.

Le pignon du clocher est percé d'une porte ogivale. Les colonnettes, les moulures, qui en forment la grande arcade, ont tous les caractères du XVIème siècle. On n'y voit aucune date. Mais voici, au-dessus de la porte, un écusson bien conservé :

D'argent au greslier de sable accompagné de trois merlettes de même (Le Canaber) [Note : Canaber (Le), Seigneur de Kerlouët, de Restarvez, de Cleuzmeur : D'argent an greslier de sable accompagné de 3 merlettes de même (alias chardonnerets) de même. 2. 1.]. Il y a en outre un chef chargé de trois roses. C'est Canaber, seigneur de Coathéloret. Or, une branche de Kerlouët portait : Chef de gueules chargé de trois quintefeuilles d'argent. Nous avonc donc les armes de la famille de Kerlouët, fondues dans Le Canaber qui, dès lors, associa ce blason au sien propre.

Continuons. La porte Midi, moins importante, est de fort bonne structure. L'ogive se termine par une pointe couronnée par le même écusson, avec cette différence que le haut du chef a été martelé.

Au chevet, les meneaux de la verrière sont élégamment découpés en une belle fleur de lys. L'ouverture est surmontée d'un blason intact, portant une couronne de comte.

C'est encore, à gauche, les armes de Kerlouët-Canaber. Mais, qu'y a-t-il à droite ?

C'est une alliance de la famille Le Canaber, peut-être, avec une branche de la famille de la Bourdonnaye qui portait : De gueules à trois bourdons d'argent.

Les autres ouvertures ont peu d'importance. A défaut de date, ces signatures de prééminenciers nous permettent une approximation. Dans un manuscrit du XVIIIème siècle dernier, nous lisons que « à la fin du XVème siècle, le seigneur de Coathéloret qui possédait plus de la moitié de la paroisse, bâtit cette chapelle ».

Coathéloret a dû passer par acquêt des barons du Pont-L'Abbé aux Canaber vers 1560, peut-être après le massacre de la Saint-Barthélémy, où périt M. du Quélennec, seigneur du Pont.

La chapelle doit dater de cette époque. Entrons. Ce qui frappe d'abord, c'est la nudité des bois de la charpente ; puis, des deux côtés, longeant la muraille, deux longs bancs de pierre couverts de taille et paraissant encastrés dans la paroi murale.

Dans le mur Midi, au chœur, existe une armoire ou crédence, en pierre taillée, d’environ 70 x 40 avec tablette intérieure. Elle pouvait servir aux saintes huiles. Du même côté, près de la porte, se trouve un bénitier en pierre, moitié en saillie, moitié dans le mur.

L'autel, tout en maçonnerie, est recouvert d'une grande dalle, en pierre, débordant de tous côtés.

Elle est agrémentée d'une double moulure. Au-dessus du tabernacle, un énorme saint Eloi moderne, cache, en partie, la fleur de lys de la verrière.

Du côté Midi, au chœur, on voit la statue en pierre d'une sainte. Elle a les yeux démesurément ouverts d'une personne effrayée : de la main gauche, elle relève son manteau ; de la droite, elle tient un missel et, à ses pieds, une miniature de tour avec créneaux, à la toiture arrondie, est surmontée d'un oiseau. Ne serait-ce pas sainte Barbe ?

Le côté Nord du chœur est orné de deux statues : celle, en bas, d'une sainte tenant un missel à la main gauche, un sceptre à la droite et la statue, en pierre, de sainte Candide en abbesse. Cette statue est du XVème ou XVIème siècle. Elle est curieuse par son costume. La sainte est coiffée d'un voile retombant en deux pointes sur sa poitrine, d'une robe à longs plis et d'une sorte de surcot à manches formant manteau en arrière. Elle tient dans sa main droite une crosse d'abbesse avec son fanon, dont le haut est brisé, et, sur sa main droite, un missel fermé, posé sur le champ.

Auprès du chœur, on remarque une console, finement travaillée, mesurant 160 x 55. Elle présente de face trois moulures avec, au milieu, une croix.

Cette pierre soutient une lourde pieta. La Sainte Vierge, assise, tient le Christ sur ses genoux. Elle est assistée des deux autres Marie, debout. Le tout est taillée dans un seul bloc de granit.

***

La chapelle de Locunduff avait un chapelain attitré jusqu'à la révolution. Il desservait les fondations et assurait la messe dominicale à la partie Sud de la paroisse. La maison presbytérale se trouvait au milieu du village et se reconnaissait, jusqu'à ces dernières années, au calice qui ornait le linteau de la porte Est.

La chapelle et le terrain qui l'entoure ont été aliénés pendant la révolution. L'an XII on y nomma un marguillier : le culte y fut rétabli.

De nos jours (vers 1934), il y a deux pardons par an : l'un en l'honneur de saint Eloi, et l'autre en l'honneur de sainte Candide, la patronne.

Le pardon de saint Eloi se fait le dimanche qui précède immédiatement l'Ascension. Tous les offices sont célébrés à la chapelle. Des chevaux de Tourc'h et des paroisses voisines sont conduits, dès l'aube, à Locunduff. On leur fait faire trois fois le tour de la chapelle. A sept heures, chevaux en tête, la procession se déroule autour de l'ancien placitre. Arrivé au calvaire, le prêtre monte sur les plus hautes marches, chante la prière rituelle et bénit les chevaux, qui tous en ce moment font face à la croix.

Le pardon de sainte Candide a lieu le deuxième dimanche de juillet. Sainte Candide est invoquée pour les enfants qui marchent tardivement ou qui marchent mal. Elle a sa fontaine à 50 mètres à l'Ouest de la chapelle. On y plonge les enfants. Parfois, la fontaine est vidée, et l'enfant y fait ses premiers pas pour attendre l'eau envahissante.

Dans la paroisse, plusieurs personnes portent le nom de Candide.

La cloche de la chapelle porte l'inscription suivantes : Sanctœ Candidœ data fui a magnifico vice comite de Villiers du Terrage ex Kerminihy. Ab ipso et a M. J.

Guyader ex Kervéguen, patrinis, nominari gaudeo :
LUDOVICA MARIA
23 augusto M CCC LXXXX Henricus Couïc, parochus.
A. Havand, Villedieu.

Elle sonne les glas pour tous les deuils survenant dans la partie Midi de la paroisse.

Voici un acte de donation de la chapelle :

Ce jour, dix huit septembre mil huit cent six, devant les soussignés Nicolas-Marie Gaillard du Port Lazou, en Corai, et François Le Vaillant du bourg communal de Leuhan, notaires cautionnés, furent présents, Henri Le Quéré et Françoise-Isabelle Carnot, sa femme, de son mari à sa requête autorisée, demeurant au lieu de Kerhoaler ; ladite Carnot, veuve en premières noces de Pierre-Joseph Gourmelen et tutrice de leurs enfants mineurs sous l'autorité dudit Henri Le Quéré, son mari actuel et Joseph-Pierre Gourmelen, fils majeur, demeurant au lieu de Kerfraval, tous sur la commune de Tourc'h, et cultivateurs.

Lesquels faisant tant pour eux en privés que pour lesdits mineurs pour lesquels ils déclarent stipuler garantir et cautionner, ont par le présent fait donation au profit de la commune et fabrique du Tourc'h, de la chapeille nommée sainte Candide, située au lieu de Locundu, dite paroisse du Tourch et pouvant valoir quatre vingt dix francs en principal, la présente donation faite à la charge à la commune de faire faire les réparations ainsi qu'elle verra et payer les impôts qui peuvent ou pourraient être assis sur ladite chapelle, sans recours ni répétition vers les donateurs aux quels il sera porté tout acquit libération et garantie dans le cas où l'on vienne pour quelque cause que ce soit, répéter quelqu'indemnité pour cause de l'objet donné.

Fait et passé au Port Lazou en Corai, après lecture donnée aux partie au rapport de Maître Gaillard, l'un de nous son collègue présent, sous nos seings, toutes les parties comparantes disant et affirmant ne savoir signer de ce interpellées lesdits jour et an.

Signé sur la minute : Gaillard et Le Vaillant.

Plus bas est écrit : enregistré à Châteauneuf, le 1er octobre 1806, folio 55, verso, case 9 ; reçu : 5 fr. 50, décimes compris. Signé illisiblement.

(F.-M. Calvez).

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