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LES SEIGNEURIES DE COETQUEN, GUERCHE, GANTERIE

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§ 1. — L'IMPORTANCE DE CETTE SEIGNEURIE. LES CHATELAINS AU MOYEN AGE.

Les sires de Coetquen en Saint-Hélen étaient encore plus puissants que ceux de la Bellière, leurs voisins de la Vicomté. En 1750, ils étaient réputés seigneurs supérieurs de l'église et du cimetière de Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance). Dans le sanctuaire de cette paroisse, il n'y avait que les écussons et armoiries des Coetquen et la Bellière, du côté de l'épître pour les la Bellière, du côté de l'évangile pour les Coetquen, ce qui indiquait la prééminence de ces derniers.

Le presbytère en ruines de Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance), sis près de la Gravelle, relevait de Coetquen ; et quand, vers 1703, on le remplaça par la maison de campagne actuelle de M. le docteur Botrel au bourg, celle-ci fut transférée de la juridiction de la Bellière à celle de Coetquen, dont continua ainsi de dépendre la maison curiale pleudihennaise.

Au civil, l'importance de la seigneurie de Coetquen était non moindre à Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance). C'est ainsi qu'on trouve, près de Mordreuc, une série de champs, appelés encore la campagne de Coetquen, parce qu'elle devait ressortir à cette juridiction. En dépendait aussi à Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance), en 1272, le fief ès-Morins, dont Agathe de la Barre engagea les dîmes au Chapitre de Dol pour assurer dans la cathédrale de cette ville un anniversaire à son père, à sa mère et à son mari défunt, Tison de Saint-Gilles (Preuves de D. Morice, I, col. 1028).

La plupart des actes de partage et de vente de Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance) étaient passés devant les notaires de Coetquen et de la Bellière.

A plus forte raison, les Coetquen tenaient-ils une grande place dans l'église de Saint-Hélen, dont la maîtresse vitre contient le portrait de deux d'entre eux, et dans cette paroisse où s'élevait leur château achevé et fortifié en 1440, sous la protection spéciale du duc de Bretagne.

Dans les Actes de Jean V, on ne trouve pas moins de quatre pièces relatives à cette construction.

En janvier 1440, le sire de Châteauneuf menaçant de s'opposer aux congé et licence donnés « par le duc à son bien-aimé cousin et féal chevalier et chambellan, le sire de Coetquen, de fortifier et emparer son hôtel et manoir de Coetquen », Jean V charge Pierre de l'Hôpital de décider entre les parties et enjoint à celles-ci, jusqu'à nouvel ordre, de laisser les choses en l'état, sous peine d'une amende de 1.000 écus d'or.

En février 1440, le duc renouvelle à Raoul de Coetquen « congé et license de faire faire et édifier chastel et forteresse en ses ville et hôtel de Couasquen, où bon lui semblera ».

En mai, le duc défend de toucher aux biens de son chambellan Coetquen, sous peine de 10.000 marcs d'or, appliqués par moitié à ce seigneur, qui est autorisé à « mettre les pennons, sceaux et écussons ducaux aux huis et portes de ses manoirs et habitations ».

Enfin, en octobre 1440, le duc renouvelle au sire de Coetquen le pouvoir de « édifier et faire un chastel et forteresse sur une motte de nos seigneuries et fiefs ducaux, près son manoir, et blâme l'opposition de Michel de Rieux, sire de Châteauneuf ».

Plus tard, en 1474, le duc François II délégua des commissaires pour fixer le nombre des sentinelles que pouvaient comporter le guet et la garde du château de Coëtquen.

Ce château fortifié s'élevait au nord-est de la forêt de Coetquen (Coet guen ou bois blanc), ainsi appelée à cause des bouleaux qui la garnissent principalement. Il était au confluent des deux ruisseaux de la Chénaye et de la Rouvraye, et avait le pied baigné par un étang considérable, qui alimentait d'eau les douves et est aujourd'hui transformé en vastes prairies. Sur le bord opposé de cet étang, plus au Nord-Est et du côté de Saint-Pierre de Plesguen, on voit les restes du manoir primitif de Coetquen, remontant environ au XIème siècle.

Du second château fort, achevé en 1440, après les démolitions systématiques de la Révolution en 1794, il ne reste aussi que les bases de tours en ruines, avec un corps de bâtiment assez considérable, offrant de larges cheminées et servant actuellement d'habitation au garde de la forêt.

Auprès de ces bâtiments, vers le Nord, se trouve tout un groupe de maisons antiques, qui, à l'encontre du château, sont bien conservées, entourent une vaste cour, présentant au centre un puits monumental. C'est sur cette place que, de temps immémorial, se tenaient, le 5 juillet et le 10 novembre, les deux fortes foires de Coetquen, récemment transférées au bourg de Saint-Hélen.

Il y avait là jadis une agglomération d'habitants assez notable pour être appelée « ville », dans l'acte ci-dessus, par le duc Jean V, qu'imite bientôt François II.

Les premiers seigneurs Dinan-Coetquen. — Les anciens seigneurs de Coetquen avaient pour blason : Bandé d'argent et de gueules de six pièces. Faisons rapidement la biographie des principaux d'entre eux, d'après l'Histoire de Bretagne et les Preuves de Dom Morice, les Juveigneurs de Dinan par Mme de la Motte-Rouge, le Pouillé de Rennes et surtout la Bio-bibliographie de Kerviler.

Olivier, arrière-petit-fils d'Olivier II de Dinan, par son grand-père Raoul, naquit de Guillaume et de Denise de Dol. Avant 1200, peut-être au retour d'une croisade, il épousa Hervoise ou Havoise de Coetquen, héritière de cette maison, dont il prit le nom et les armes, fondant ainsi les Dinan-Coetquen.

En 1203, il assiste aux États de Vannes, qui décident de venger Arthur, le jeune duc de Bretagne, lâchement assassiné par son oncle propre Jean-Sans-Terre, roi d'Angleterre. Avant 1210 — date du départ de son frère Thomas avec Juhel de Mayenne, seigneur de Dinan, pour la croisade contre les Albigeois — il est témoin d'une donation en Hénanbihen, faite à l'abbaye Saint-Aubin des Bois par Olivier IV, sire de Dinan et de Jugon. En 1218, il figure à une donation analogue, en faveur du prieuré de La Madeleine du Pont en Lanvallay.

Il est mentionné dans la charte déjà citée, retrouvée en 1886 aux archives dominicaines par le R. P. Chapotin et ainsi conçue : « 1221, N., Seigneur de Coetquen, donne et lègue mes dîmes de la paroisse de Pléguen à l'abbaye N.-D. du Tronchet, pour le salut de mon âme et celle de mes ancêtres, en échange de ce que ledit abbé me donne le manoir (à Dinan près du casino) qu'il a échangé avec l'évêque de S. Malo, et que j'ai cédé aux Frères-Prescheurs de Dinan ».

La confirmation de cette charte se trouve à Paris, au fonds des Blancs-Manteaux, et y est conçue dans les mêmes termes, avec le nom d'Olivier et avec la date 1241.

En 1225, avec d'autres seigneurs, ayant rejoint à Nantes le duc Pierre Mauclerc, Olivier de Coetquen prit part à la délibération où fut arrêtée la construction du château de Saint-Aubin du Cormier, destiné à protéger la Bretagne contre les entreprises des Français. Au contraire, en 1231, comme Henri d'Avaugour, gendre de Juhel de Mayenne ci-dessus et futur fondateur des Cordeliers de Dinan, il rendit hommage et s'allia à saint Louis, roi de France, contre les Anglais et contre le duc de Bretagne, Pierre Mauclerc, tout en réservant, en sauvegardant les droits du fils et successeur de celui-ci.

Son fils, Guillaume Ier de Coetquen, fait un accord avec le recteur de la paroisse du Crucifix, sans doute la première paroisse de Dol en date, établie dans la chapelle Notre-Dame de l'église cathédrale. Cet accord était relatif aux dîmes de Mordreuc en Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance), que son père, feu Olivier de Coetquen ci-dessus, avait laissées au Chapitre de Dol pour l'entretien de ladite chapellenie Notre-Dame.

En 1267, Guillaume lui-même emprunte 80 livres à l'évêque et autant au Chapitre de Dol, leur engageant pour sept ans les dîmes qu'il possédait entre Saint-Pierre de Plesguen et la forêt de Coetquen, et qui devaient être acquises aux créanciers, après un retard de deux ans pour le remboursement.

Ses relations répétées avec Dol s'expliqueraient par la supposition que Clément de Coetquen, qui fut évêque de Dol de 1231 à 1241, était son frère.

Sa fille Agnès de Coetquen avait, en 1246, vendu au monastère du Tronchet tout ce qu'elle possédait à Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance), devant Robert Hervé, sénéchal d'Henri d'Avaugour à Dinan.

Raoul Ier, fils de Guillaume ci-dessus, est sans doute en cause dans la pièce suivante, relatée à la date 1295 dans les Preuves de Dom Morice (T. I, col. 1117), qui montre la seigneurie de Coetquen dépendante juridiquement de celle de Châteauneuf : « En la court au Chastel-Neuf de la Noë en dreit (droit) establi, Raoul seigneur de Quoyquen chevalier et Raoullet de Quoyquen, fils audit seigneur, o l'autorité de Renault de Lanvallay donné tutour et curatour audit Raoullet... voudrent (veulent)…, que les lettres que le Prieur et le couvent de Léhon ont sur les moulins de Brachesac... saient (soient) en lour vertu ». Il s'agissait de moulins au bord de la Rance, près de Dinan.

Après Raoul II et Guillaume II de Coetquen, leur descendant Jehan Ier de Coetquen accompagne Du Guesclin dans ses guerres d'Espagne et combat pour Charles de Blois, au service duquel il est fait prisonnier et conduit en Angleterre, où il meurt en 1360.

Marguerite de Coetquen, abbesse de Saint-Sulpice de Rennes en 1363, était sans doute sa fille.

Son fils Raoul III épousa Marie de Guébriac, qui, en 1362, fit un testament exprimant sa volonté d'être enterrée, comme tous les membres de sa famille, dans l'église des Jacobins ou Dominicains de Dinan, près du sire de « Quoiquen son sieur ».

 

§ 2. — LES SEIGNEURS DE COETQUEN AUX XIVème ET XVème SIÈCLES.

Le maréchal de Bretagne, Raoul IV. — Fils du précédent, Raoul IV de Coetquen sert en Espagne et en France sous Du Guesclin, qu'il voit mourir à Châteauneuf-de-Randon, en 1380. Sieur du Vauruffier en Plouasne, par son mariage avec Philippote Ruffier, il devint chevalier banneret d'après une montre de 1386, capitaine de Léhon, en 1402, ambassadeur auprès du duc de Bourgogne, en 1408, puis auprès du roi de France, en 1411, chambellan du duc, en 1419, et enfin maréchal de Bretagne, en 1420.

Il avait mérité ce titre en jurant, avec les bourgeois de Dinan, « d'employer son corps et ses biens, jusqu'à mourir », pour délivrer le duc Jean V, prisonnier des Penthièvre. Dans ce but, avant d'aller à Chantoceaux assiéger Marguerite de Clisson, il passa en revue les troupes du baron de Rieux, du vicomte de la Bellière et autres, troupes montant à 50.000 hommes.

Ensuite il lutte contre les Anglais. Il les oblige à lever le siège de Châteaubriant, avec le sire de Beaufort, en 1423.

Moins heureux contre eux à Avranches, il laisse, en 1425, entre leurs mains, son compagnon d'armes, Olivier de Mauny.

En 1427, il passe en revue le ban et arrière-ban de Bretagne dans les landes de Vaucouleur, en Trélivan. Mais, au lieu de répondre à l'appel du roi Charles VII, il traite avec le duc de Bedfort et signe, comme le duc de Bretagne, le traité déplorable de Troyes, qui eût livré la France aux Anglais, si Dieu, pour la sauver, n'eût miraculeusement suscité Jeanne d'Arc.

En 1433, à la suite de difficultés avec l'évêque de Dol, au sujet des Normands qui y résidaient, il quitta le commandement de cette ville pour échapper à l'excommunication. Il mourut vers 1440, ayant eu pour fils, outre Jean II, tué à Azincourt, le cadet suivant :

Raoul V, le constructeur de Coetquen. — Grand maître d'hôtel de Bretagne, chambellan du duc, puis, en 1450, du roi de France Charles VII, Raoul V reçut du duc Jean V, en 1440, les trois ou quatre lettres ci-dessus, l'autorisant, l'encourageant à achever de fortifier Coetquen, malgré l'opposition du sire de Châteauneuf. Un mandement de Gilles de Bretagne, lieutenant général pour le duc, défendit encore, sous peine de 10.000 livres d'amende, d'exploiter en justice, à la requête du seigneur de Châteauneuf, contre le même sire de « Couaquen ». Raoul V guerroyait, en 1449, avec le duc François Ier, en Normandie.

Le grand maître d'hôtel de France, Jehan III de Coetquen. — Héritier des honneurs de son père Raoul, Jehan III fut nommé capitaine de Léhon, en 1453, par le duc Pierre II, puis commandant d'une compagnie d'ordonnance, en 1465. Il rendit de tels services au duc François II, que celui-ci, pour les reconnaître, exempta la ville et les habitants de Coetquen de toutes sortes de taxes, impôts et subventions quelconques.

En 1466 et 1475, et deux autres fois, notamment en 1486, le grand maître d'hôtel de Bretagne, Coetquen, est député par le duc, vers le roi de France, pour négocier la paix.

En 1485, il est élu capitaine d'une compagnie noble, et reçoit, grâce à Landais, favori du duc, le commandement de 4.000 hommes. Avec M. de la Moussaye, il quitte Vannes pour aller défendre, contre le roi de France, Dinan, dont il est gouverneur.

Dans cette ville, il assiste à la pose de la première pierre du couvent Sainte-Claire, en 1482, et de l'église Saint-Malo, en 1489. Il y restaure, près du château de la duchesse Anne, la tour dite de Coetquen, qui porte en effet ses armes comme son nom.

Il fut donné comme otage à Charles VIII, par le duc François II, après le traité du Verger, en 1490. Opposé à l'alliance d'Anne de Bretagne avec Maximilien d'Autriche, il est député par la duchesse, en 1490, et à nouveau, en 1491, pour négocier avec le roi de France. Il accompagne sa souveraine à Langeais et signe son contrat de mariage avec le prince, en 1492, ainsi que Jean de Pontbriand. Aussi devient-il conseiller et chambellan, en 1488, puis, en 1491, grand maître d'hôtel du roi Charles VIII.

Il meurt en 1520, précédé dans la tombe, en 1502, par son fils Jehan IV, et laissant ainsi pour héritier le petit-fils qui suit.

François de Coetquen, capitaine de cent lances, commandant de la noblesse du ban et de l'arrière-ban des évêchés de Dol et de Saint-Malo, en 1536, chevalier de l'Ordre du roi en 1547, fut enterré en grande pompe, en 1557, aux Jacobins de Dinan.

Son coeur, renfermé dans une boîte de plomb et déposé dans la vieille église de Plouasne, sans doute près de celui de Françoise de Malestroit, dame d'Uzel, son épouse, a été retrouvé sous le pic des ouvriers, lors de la translation du cimetière de ladite paroisse. Identifié en 1908 par M. de Lhommeau, il est, au début du XXème siècle, conservé au musée du château de Dinan, du consentement de la famille, qui, pourtant et avec raison, aurait préféré le voir encore déposé dans un sanctuaire.

Quoi qu'en dise Kerviler, ce ne serait pas Raoul V de Coetquen qui serait figuré à la maîtresse vitre du choeur de l'église de Saint-Hélen. D'après M. de la Messelière, ce seraient son fils et son petit-fils ci-dessus. Du côté de l'évangile, cette vitre offre, avec le texte Miserere mei : Jean III et Jeanne de Tournemine, sa dame. Du côté de l'épître, avec l'invocation à demi effacée : Sancte Joannes, ora pro nobis, elle présente Jean IV de Coetquen, et sa femme, la poitevine Hardouine de Surgères.

Le testament de celle-ci, daté de 1514, porte que son mari a été enterré au choeur de l'église des Jacobins de Dinan, où elle veut l'être elle-même. Après avoir donné son âme à Dieu, son père et créateur, l'avoir recommandée à la benoîte Vierge Marie, à Mgr. saint Michel, à son bon ange, aux benoîts S. Pierre et S. Paul, à Mr. S. Dominique et à Mr. S. François, à Mme. Sainte Claire et à toute la benoîte compagnie du Paradis, elle demande à mourir en l'habit franciscain et à avoir quatre annuels aux églises de Saint-Elen, de Plouasne, des Jacobins de Dinan et des Franciscains de l'île de Sézembre.

Le premier marquis, Jean V de Coetquen. — Fils de François ci-dessus, époux de Philippe d'Acigné de Combourg, comte ainsi de Combourg, vicomte d'Uzel, baron du Vauruffier, Jean V, entre tous les Coetquen, s'illustra au temps de la Ligue, en combattant en Bretagne pour le roi, comme il l'avait déjà fait à Dreux, à Saint-Denis.

Créé marquis, en 1575, par Henri III, il accourt à Rennes, en 1587, pour servir ce prince avec son fils Combourg, contre Mercoeur et contre son propre gendre d'Avaugour Saint-Laurent, fils de Bonne de Belouan, dame du Bois de la Motte, en Trigavou.

Ainsi que La Caunelaye, il seconde le comte de Soissons et le prince de Dombes, lieutenants de Henri IV en Bretagne. Il retourne à Rennes après la campagne des royalistes contre Lamballe et Moncontour en 1590. Cette même année, son château de Coetquen est pris par les ligueurs de Dinan, conduits par le marquis de Chaussein, avec des canons prêtés par les prudents Malouins, « moyennant caution bourgeoise de les restituer ».

En 1591, il bat son gendre Saint-Laurent à Loudéac et fait échouer le siège de Moncontour. Il était à l'arrière-garde du prince de Dombes, lorsque celui-ci à Corlaix se trouva en face de Mercœur, qui se replia sur Pontivy. En 1592, il fut encore présent lors de l'escarmouche de Saint-Méen et suivit le prince de Dombes au siège de la ville de Craon.

En 1593, il est nommé lieutenant du roi aux évêchés de Saint-Malo, Dol, Rennes et Nantes.

Avec de Boiséon-Coetnizan, vicomte de la Bellière-Dinan, il aide le maréchal d'Aumont au siège de Morlaix et, en 1594, à celui de Crozon.

Créé chevalier du Saint-Esprit, en 1595, et pourvu du titre de gouverneur de Saint-Malo, qui va devenir héréditaire dans sa famille, il conduit, en 1597, deux petites pièces d'artillerie au siège, d'ailleurs malheureux, du Plessix-Bertrand, en Saint-Coulomb.

En 1598, il reçoit du roi Henri IV l'ordre d'envoyer 1.500 hommes de Saint-Malo pour prendre Dinan aux ligueurs.

Il en expédie seulement 300 par terre et 500 par mer, dont 250, embusqués au prieuré Saint-Joachim de Dinan, franchissent la porte Saint-Malo et s'emparent de la cité, vu l'absence de Mercoeur mystifié, grâce surtout à la connivence du syndic de la ville Robert Hamon, du prieur de Saint-Malo de Dinan, François de Saint-Cyr, et du sénéchal, Marot des Alleux, qui mérite d'être anobli.

L'un des chefs malouins, Pierre Pépin de la Planche, aussitôt la ville prise, saute à cheval et galope d'une traite jusqu'à Paris. Au débotté, il se fait introduire auprès du roi et s'avance hardiment au milieu de la cour. Encore tout hors d'haleine, il crie sans préambule, dans son fruste langage Malouin, relevé de l'accent de la côte :

« Sire, j'avons prins Dinan ».

Et comme le maréchal de Biron exprimait un doute :

« Vê ! i le sçara mieux que ma, qui y étas ».

Après le récit palpitant du hardi coup de main, il ajouta :

« Est-ce ici la maison de Dieu, où l'on ne boit ni ne mange ? ».

Henri IV, loin de se formaliser, fit naturellement fête à Pépin ; et le cheval de celui-ci, suivant son expression, « ayant crevé comme un pot » par suite de son voyage à fond de train, il lui donna un des meilleurs coursiers de l'écurie royale et le renvoya enchanté.

Jean de Coetquen dirigea encore sur Dinan deux couleuvrines et six canons pour braquer sur le château, qui seul résista une douzaine de jours aux royalistes.

Jehan V mourut en 1604, à son château du Vauruffier en Plouasne. Il avait survécu à son fils Jehan VI, qu'on a cru généralement jusqu'ici tué à la bataille de Loudéac, le 3 avril 1591, mais qui, en réalité, décéda en son château de Combourg, le 27 juillet 1602.

Gilonne, fille de Jean V, avait, en 1576, épousé Etienne du Hallay, avec la convention que, si le nom de Coetquen venait à s'éteindre, leurs descendants le prendraient, le ressusciteraient, ce qui a eu lieu en 1802, comme nous allons le voir.

 

§ 3. — LES DERNIERS SEIGNEURS, LES ARCHIVES ET LES LÉGENDES DE COETQUEN.

Jusqu'à l'extinction des rejetons mâles, de père en fils,  les descendants de Jean V de Coetquen furent, comme lui, gouverneurs de Saint-Malo et portèrent presque tous ce prénom. Citons :

1° Son petit-fils Louis, 1604-1628, marquis de Coetquen, mestre de camp d'un régiment et conseiller d'Etat ;

2° Malo Ier, 1611-1674, né à Saint-Malo. Capitaine des gardes du cardinal Richelieu, il se montra fort dur pour sa femme Françoise de la Marzelière, qui dut se retirer à Rennes dans un couvent. La reine Anne d'Autriche adressa deux fois à cet égard des reproches sentis à M. de Coetquen ;

3° Malo II, 1634-1679, lieutenant général du roi en Bretagne dés 1663, marié, comme son fils qui suit, à une dame de famille illustre, à Renée de Rohan-Chabot ;

4° Malo III Auguste, 1678-1727, époux d'abord de Marie de Noailles. Pour sa belle défense de la ville et de la citadelle de Lille, il fut nommé maréchal de camp, en 1708, et, après la bataille de Malplaquet, où il eut une jambe emportée, il devint, en 1708, lieutenant général des armées du roi. Il mourut à Combourg, laissant de sa seconde femme, Marie Locquet de Granville, une fille qui fut la dernière personne à porter, par descendance, le nom de Coetquen et qui était mariée au maréchal de Duras, commandant, en 1768, pour le roi en Bretagne. Du premier lit, il avait eu le fils suivant, qui fut aussi le dernier rejeton mâle de la famille ;

5° Jules-Malo, 1697-1727, marquis de Coetquen, mort la même année que son père. De son épouse, Marie de Nicolaï, il n'eut qu'une fille, Augustine, mariée deux fois, mais morte sans enfants en 1747. Aussi, après le décès, survenu en 1802, de la maréchale de Duras, le nom éteint de Coetquen a été repris et porté, suivant la clause matrimoniale ci-dessus, par les du Hallay, puis par les de Poilly, héritiers des du Hallay.

Les Archives de Coetquen. — Elles ont été transportées et sont conservées au château de Follembray, dans l'Aisne, par la baronne de Poilly. Le marquis du Hallay-Coetquen en a fait imprimer, en 1851, un catalogue très sommaire.

Ces archives ont été consultées avec fruit par le P. Chapotin pour ses « Souvenirs Dominicains dans le diocèse de Saint-Brieuc », édités en 1887. Elles sont citées par lui assez fréquemment, vu que les Coetquen, d'après ce qui a été dit, avaient contribué à fonder les Jacobins de Dinan et avaient dans le choeur de l'église de ce couvent leur sépulture (Actes du duc Jean V, par BLANCHARD), à l'exclusion de toute autre famille.

Le sire de Coetquen tenait tellement à ce droit exclusif, qu'il fit un moment briser les tombes à plate-forme, établies par les du Breil, au bas du même choeur du côté de l'épître. Il ne consentit à les tolérer qu'en 1469, sur la prière des religieux, ses prérogatives de fondateur étant sauves.

Les Légendes de Coetquen. — Dans la susdite chapelle des Jacobins par lui détenue, M. Charles Néel, sous-préfet de Dinan, aurait, d'après l'Annuaire Dinannais de 1836, fait exécuter des fouilles peu avant 1800, pour rechercher le coeur de Du Guesclin et sa pièce tumulaire qui, cachée par les gradins d'un autel, ne fut effectivement retrouvée que plus tard, sur les indications d'un vieux religieux rentré de l'exil.

Au cours de ces premières fouilles, on aurait ouvert le tombeau des sires de Coetquen, voisin (?) de celui de Du Guesclin, et sur l'un des cercueils qu'il contenait, on aurait lu l'épitaphe suivante :

« Ci-gît très-haute et très-puissante dame Marie L., épouse de très-haut et très-puissant seigneur N. marquis de Coetquen, comte de Combourg, baron de Vauruffier, laquelle trépassa le 13ème jour de Décembre, l'an 16.. ».

Ce cercueil, au lieu d'ossements, n'aurait contenu qu'un fort morceau de bois, entouré de linge et de filasse.

A peu près à la même époque, porte toujours l'Annuaire Dinannais, des soldats étaient cantonnés à Coetquen, pour dissiper les rassemblements d'insurgés, qui pouvaient se former dans la forêt. Un jour, pour occuper leurs loisirs, quelques-uns de ces militaires se munirent de lanternes et de pioches et se mirent à visiter les caves et les souterrains du vieux château, espérant y découvrir un trésor.

Ils arrivèrent ainsi devant une solide porte de fer, qu'ils trouvèrent fermée. Ils dégagèrent de la pierre le pêne et pénétrèrent dans un cachot à moitié rempli d'eau bourbeuse et infecte, dans lequel ils rencontrèrent un squelette humain, étendu sur des planches pourries.

Ils donnèrent avis de cette découverte à leur commandant, et, sur son ordre, rassemblèrent les ossements, pour les inhumer. Alors, à l'un des doigts du squelette, on aperçut quelque chose qui brillait. C'était un anneau d'or, qu'on remit à l'officier et sur lequel celui-ci, non sans peine, aurait lu ces noms : Marie L et N. marquis de Coetquen.

Ce récit consigné, dans l'Annuaire Dinannais de 1836, est manifestement fantaisiste. Il rapproche à tort l'enfeu des Coetquen, situé au fond du choeur des Jacobins, à l'est de la rue actuelle de la Halle, à Dinan, et le tombeau des Du Guesclin, qui, à partir du sanctuaire du côté de l'Évangile, venait le second dans l'unique nef de l'église, vis-à-vis la tombe des Raguenel. Tout au plus avait-on pu faire des recherches du côté de l'Épître, dans cette dernière, qui contenait les restes de Typhaine, première femme du connétable, et qui aurait pu renfermer aussi le coeur de celui-ci.

Néanmoins le récit de l'Annuaire Dinannais a donné naissance à la légende d'une dame de Coetquen, choisie par son mari dans une famille de riches négociants nantais, prise en haine par ses beaux-frères, qui auraient eu intérêt à ne pas supporter longtemps cette mésalliance, séquestrée par eux et réduite à mourir de faim dans une des oubliettes du château, pendant qu'on aurait simulé aux Jacobins de Dinan son enterrement solennel. D'où les deux romans de Raoul de Navery, intitulés : Patira et le Trésor de l'Abbaye.

La famille de Coetquen, d'une façon générale, a excité l'imagination des romanciers. Charles du Boishamon a encore écrit en 1862 Marguerite de Coetquen, et Bertrand Robidou a fait paraître La Dame de Coetquen.

 

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Les Propriétaires modernes de Coetquen et de la Guerche, avec ceux de la Ganterie.

 

§ 1. — LES PROPRIÉTAIRES MODERNES DE COETQUEN ET LES ANCIENS HABITANTS DE LA GUERCHE.

Possédé en 1789 par M. Baude de la Vieuxville, marquis de Châteauneuf, le château de Coetquen appartient au début du XXème siècle et depuis longtemps déjà à la famille Guéhenneuc de Boishue, en Lanhélin, représentée au début de la Révolution par Jean-Baptiste Guéhenneuc, comte de Boishue, qui, par sa femme Sylvie de Bruc, détenait alors le château important et fortifié d'Yvignac. Il y fut menacé d'un pillage analogue à celui de Châteauneuf, et il ne l'évita que grâce à l'intervention, le 24 janvier 1791, de cinquante dragons de Lamballe, qui, pour dissiper 700 à 800 émeutiers, durent en tuer plusieurs.

Après sa mort, en 1802, au château de Boishue, sa dame, qui lui survécut jusqu'en 1821, obtint en 1807 de Napoléon Ier la restitution de la forêt de la Hunaudaie, que lui-même avait acquise en 1787, par retrait féodal, comme descendant des Tournemine par les femmes. Les deux grandes forêts du pays de Dinan, la Hunaudaie et Coetquen, sont donc entre les mains de sa famille.

Cette famille a pour armoiries : D'azur, au lion léopardé d'argent, accompagné en chef de deux fleurs de lys.

Comme descendants de Jean-Baptiste Guéhenneuc ci-dessus, habitant à titre d'aînés le château de la Guerche, en Saint-Hélen, au moins une partie de l'année, citons :

1° Jean-Baptiste Guéhenneuc, comte de Boishue, 1769-1865, époux de dame Augustine Prioul de Saint-Léger ;

2° Marc-Antoine Guéhenneuc, 1810-1896, époux de dame Marie de Sémallé ;

3° Léon Guéhenneuc, 1841-1912, époux de dame Henriette de Chabrefy ;

4° Charles Guéhenneuc, comte de Boishue, officier, époux de dame Geneviève Cochin.

Dans le passé, comme dames, sieurs ou seigneurs de la Guerche en Saint-Hélen, on trouve :

1° Jeanne du Bouays, marraine, en 1615, de Jeanne Chauchart, issue de N. H. Gabriel Chauchart, sieur des Murs, décédé en 1627, et de Françoise Chesnel ;

2° Écuyer Pierre Martin, inhumé, en 1632, dans l'église de Saint-Hélen, devant l'autel Saint-Michel ;

3° Écuyer François Martin, d'abord sieur de Crohan, second époux en 1627 de Françoise Chesnel ci-dessus, dame des Murs, en Saint-Hélen ;

4° Jean Martin, leur fils, né en 1633, sieur aussi des Murs ;

5° Écuyer Charles Martin, époux d'Anne Cochon, dame des Murs, vivant vers 1680 ;

6° Jules-César Martin, seigneur de la Guerche, marié, en 1723, à Rennes, à Marguerite du Boisboissel.

Peu après 1789, la Guerche était occupée par haut et puissant messire Pierre Mourin d'Arfeuille, chevalier, officier au régiment royal, époux d'Olympe du Fournet en Saint-Judoce, qui deux fois est mentionné par le registre de la mairie de Pleudihen (Pleudihen-sur-Rance), relatif à la Révolution.

 

§ 2. — LES DARTIGE DU FOURNET, PROPRIÉTAIRES DU MANOIR DE LA GANTERIE.

La descendance de Pierre Mourin d'Arfeuille ci-dessus s'est alliée aux Louaisel-La Vieuxville, qui lui ont apporté le vieux manoir de la Ganterie, en Saint-Hélen, et surtout aux Dartige, originaires du Limousin, comme les d'Arfeuille eux-mêmes.

Le 27 août 1877, les Dartige ont obtenu de reprendre le titre du Fournet, et outre le propriétaire actuel de ce dernier manoir, le capitaine de frégate en retraite Charles Dartige du Fournet, marié, en 1794, à dame Marguerite de Lorgeril, ils ont produit le vice-amiral Louis Dartige du Fournet, au sujet de qui la Croix des Côtes-du-Nord insérait, le 7 février 1915, l'article suivant :

L'Amiral Dartige du Fournet contre les Turcs.

« Une partie de notre flotte de guerre agit contre les Turcs, à l'est de la Méditerranée. Le contre-amiral Guépratte, combinant son action avec un amiral anglais, bombarde les forts des Dardanelles.

De son côté, notre compatriote, le vice-amiral Dartige du Fournet, né en 1856 à la Ganterie en Saint-Hélen, naguère préfet maritime de Bizerte, faisant flotter son pavillon sur le " d'Entrecasteaux ", a dissipé, à coups de canon, les troupes turques, qui, à l'aide de chaloupes en aluminium de provenance allemande, s'efforçaient de franchir le canal de Suez, pour envahir l'Égypte et la soustraire au protectorat britannique. En dernier lieu, longeant la côte nord de la Syrie, il vient d'y canonner, d'y démolir certains sémaphores et points fortifiés.

Ces jours-ci, il opérera sans doute lui-même contre la capitale des Turcs, qu'il connaît fort bien, pour y avoir récemment séjourné. En 1912, durant la première guerre des Balkans, il commandait en effet les forces navales chargées de maintenir l'ordre à Constantinople, au nom et dans l'intérêt des grandes puissances européennes.

L'amiral Dartige du Fournet n'en est pas à sa première action d'éclat. Déjà, et c'est ce qui a contribué à le mettre en évidence, avec un autre lieutenant de vaisseau, plus ancien de grade, mais commandant aussi une simple canonnière, il a, en Indo-Chine, forcé, 1893, les passes de la Meïnam, et en remontant la rivière, pénétré de vive force dans le port de Bangkok, capitale du roi de Siam, qui créait des difficultés continuelles à la France, représentée par le Dinannais M. Pavie, et qui, voyant son palais menacé par les canons de l'escadrille française, céda enfin à l'ultimatum de l'énergique Le Myre de Villers, notre nouveau ministre plénipotentiaire.

Rien d'intéressant à lire, comme le récit, fait par le futur amiral Dartige du Fournet, de ses croisières ou voyages sur " la Comète " dans les mers et fleuves de l'Extrême-Orient.

Dans ce livre primesautier, dans ce " Journal de la Comète ", couronné en 1898 par l'Académie Française, après le coup audacieux contre Bangkok, il faut voir le résultat comique des instructions données au cuisinier annamite ou chinois de la canonnière, à qui le commandant avait un jour signalé diverses recettes, pour varier le menu de la table des officiers du bord, et qui, au repas suivant, servit d'emblée tous les plats indiqués, ce qui valut aux matelots l'avantage de participer au festin, de faire un régal tout à fait inattendu.

Dans sa rude vie de marin, l'amiral Dartige du Fournet a trouvé le moyen d'écrire d'autres ouvrages, de pure littérature. Il n'est pas d'ailleurs le seul écrivain de sa famille. Son jeune frère, Henri, tout en remplissant, comme son père, d'importantes fonctions dans l'Enregistrement, s'est lui-même, par ses livres d'imagination, conquis une réputation méritée et ouvert la porte de la Société des Gens de Lettres. ». Signé : UN DINANNAIS.

(abbé Eugène Brébel).

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