Web Internet de Voyage Vacances Rencontre Patrimoine Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Bienvenue !

Communauté religieuse des Ursulines à Saint-Pol-de-Léon.

  Retour page d'accueil      Retour page "Ville de Saint-Pol-de-Léon"   

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

Boutique de Voyage Vacances Rencontre Immobilier Hôtel Commerce en Bretagne

1629. — « Madame Anne de Perrien, douairière de Trévigné, [avait] mis trois Demoiselles ses filles, en pension au nouvel établissement des Ursulines de Tréguier. L’aînée s’y étant rendue Religieuse, la seconde voulut en faire autant » [Note : « Chroniques de l'Ordre des Ursulines, Paris 1673. 2 vol. in-4°. Cet ouvrage, auquel l’auteur n’a mis que les initiales de son nom, est de la Mère de Pomereu » (Tresvaux, Vie des Saints de Bretagne, t. IV, p. 8)].

Voici une pièce concernant cette double entrée en religion et les dotations correspondantes [Note : Les règlements royaux adjugeaient un fonds de 3.000 livres pour la dot de chaque religieuse (Archives Départementales, H. 411)] :

11 Juin 1629, au matin. — « Au parloir des Religieuses Ursulines de Tréguier ont été présentes : Seurs Louise Guays dite de Jésus, Mère Supérieure, Thérèse Aubry dite du St Amour, Mère préfète, Anne Aubry aussi dite de Jésus, en leurs noms et faisant pour les autres religieuses de l’ordre de Madame Sainte Ursule, établies en cette ville de Tréguier, d’une part ;

Et haut et puissant Messire Pierre Le Moyne [Note : D’après une pièce des Archives Départementales (Minimes, H. 313) du 10 Juillet 1638, le fondateur de la chapellenie de l'Annonciation de Notre-Dame desservie en la cathédrale de Léon est un seigneur de Trévigné. Une autre pièce du 30 Novembre 1632 nous apprend que le patron de cette chapellenie est Messire Pierre Le Moyne, en son vivant seigneur de Trévigné. Il est vrai que, dans une troisième pièce du 31 Juillet 1640, nous lisons que cette chapellenie a été fondée par défunt noble et discret Messire Hervé de Kéranguen, chanoine de Léon (recteur de Guimiliau)], chevalier de l’ordre du Roy, et noble et puissante Dame Jeanne (Anne ?) Quinemant [Dame de Perrien], sa compagne, Seigneur et Dame de Trévigné et autres lieux, demeurant à présent à Morlaix, en la maison de maître Mathurin Renaudin, paroisse de Saint-Mathieu, d’autre part ;

Lesquels Seigneur et Dame de Trévigné, portés d’une sainte affection et bonne volonté en l’endroit de Demoiselle Anne Le Moyne, leur fille, à présent novice dudit Ordre, et en conséquence du contrat passé par Dame Anne de Perrien, douairière des dits lieux, le 12 Mai 1627, pour icelle Anne Le Moyne être reçue et admise à faire les voeux et profession, ont les dits Seigneur et Dame de Trévigné, présentement payé, et délivré comptant aux dites Dames Ursulines, la somme de 600 livres, en outre et par dessus la somme de 300 livres par elles touchées, suivant et au désir du dit contrat sus daté.

Et ont promis aux dites Dames Religieuses, la somme de 200 livres par chacun an, pendant la vie de ladite Anne Le Moyne pour sa nourriture et entretien au couvent, et après son décès, la somme de 60 livres tournois annuelles et perpétuelles.

En outre, pour Demoiselle Catherine Le Moyne [Note : « En 1614, au baptême de Catherine Le Moyne, fille de Vincent et de Anne du Perrien, Yves de Coetquis et Catherine de Kérouzéré signent en qualité de parrain et marraine » (Tanguy, Plougoulm, p. 60)], sœur de la dite Anne, aussi novice dudit Ordre, lesdits Seigneur et Dame de Trévigné ont promis de payer par chacun an, la somme de six vingts livres tournois pendant la vie de la dite Catherine, et 60 livres par an après son décès.

Et ont pour cela, gagé leurs biens présents et futurs, et par exprès, deux lieux et convenants nobles avec toutes et chacune de leurs appartenances et dépendances, situés en la paroisse de Plonéour-Trez, évêché de Léon ; l’un, le petit Kermor, possédé par Yves Peschard, pour en payer l’an 240 livres, 2 charrettées de foin, 1 mouton gras, 4 boisseaux d’avoine, 2 boisseaux de pois, 6 chapons et 6 poussins ; et l’autre, le petit Trévigné, tenu par Yves Bodennec, pour en payer l’an, 150 livres par argent, 3 boisseaux d’avoine, 1 mouton gras, 6 chapons et 6 poussins » (Archives Départementales, H. 411).

Ayant ainsi favorisé rentrée de deux de ses filles aux Ursulines, Mme de Perrien se sentit portée « de procurer un monastère de l'Ordre en la ville de Saint Paul, proche de ses terres ». Elle en obtint facilement le consentement de Mgr. de Rieux, évêque et comte de Léon, comme aussi de Mgr. Guy Champion, évêque de Tréguier [Note : Mais les habitants devaient, comme ceux de Lesneven, en 1654, faire quelques difficultés à l’établissement projeté des Ursulines (voir Délibérations de la Communauté de Saint-Paul, 2 Septembre 1629)].

De plus, elle trouva une maison propre à les loger, la meubla et en paya le louage, avec d’autres charitables femmes. Monseigneur de Tréguier donna l’obédience à la Mère Louise Guays, dite de Jésus, lors supérieure à Tréguier, d’aller cinq ou six mois à Saint-Paul [Note : Ce fut elle encore qui vint de Tréguier fonder, une dizaine d’années plus tard, le couvent de Morlaix], jeter les fondements d’un monastère, et de mener avec elles six professes de choeur. Toutes se mirent en chemin le 5 Septembre 1629, et firent leur entrée dans Saint-Paul (Saint-Pol-de-Léon) le neuvième ensuivant, étant conduites par M. Thépaut de Rumelin [Note : Chanoine et pénitencier de Tréguier, recteur de Plougasnou et de Pleubian. Ce fut lui qui, en 1645, fut délégué pour porter le Saint-Sacrement dans la procession générale qui conduisit les Ursulines de Morlaix à leur nouveau monastère], chanoine de la cathédrale de Tréguier, et reçues par Mme de Trévigné et Mme de Leformel, sa bru.

Mgr. de Rieux leur envoya sa bénédiction par le R. Père Bauny [Note : Le P. Bauny prêcha l'Avent et le Carême suivant, en 1628 et 1629. à Saint-Pol de Léon. Il dut profiter activement de ce séjour pour traiter, avec Mgr. de Rieux, de la question du collège projeté (voir Délibérations des 16 Avril et 2 Septembre 1629). Le P. Bauny semble avoir été particulièrement persona grata près de Mgr. de Rieux, qui lui confia la publication des Statuts diocésains en 1630 (Ogée, Dictionnaire historique, t. II, p. 865). Nous retrouvons encore le P. Bauny dans la Vie d'Amice Picart], Jésuite, à leur sortie du carrosse, d’où il les mena dans leur chapelle, au chant du Veni Creator ; puis elles furent complimentées par les plus considérables de l’assemblée. Enfin, Mme de Trévigné qui, jusqu’alors, avait fait tous les frais, les régala encore le soir, leur laissa des provisions pour huit jours, et les gratifia du don d’une belle pièce de terre.

Dès le lendemain 10 de Septembre, le même P. Bauny bénit leur chapelle et y célébra la sainte messe. La clôture fut faite, et les Religieuses commencèrent fervemment, tant les observances régulières que les fonctions d'Ursulines. Elles eurent d’abord vingt-cinq pensionnaires et beaucoup plus d’externes. Le premier jour de l’an 1630, Mgr. de Rieux donna le voile blanc aux deux premières novices. Ce même prélat étant ensuite longtemps absent de son diocèse, donna pour supérieur aux Ursulines de Saint-Paul, M. René du Louet, sieur de Kerguilliau, chantre de Léon, lequel les gouverna avec un très grand soin, et une admirable charité, particulièrement en leur distribuant le pain de la parole de Dieu très souvent, et très utilement, jusqu’à ce qu’au bout de neuf ans, il fut pourvu de l’évêché de Cornouailles [Note : Cette nomination eut lieu en 1640. René du Louet ayant été choisi neuf ans auparavant, comme supérieur des Ursulines, par Mgr. de Rieux, avant que ce dernier quittât le diocèse, on peut en déduire que Mgr. de Rieux était absent de l’évêché depuis 1631. Par contrat du 21 Novembre 1659, les Ursulines s’engageront à payer au Chapitre de Léon, 60 livres de rente, intérêt d’une somme de 900 livres à elles remises, à la suite de la fondation en la cathédrale, par Mgr. René du Louet, évêque de Cornouailles, de trois doubles offices solennels annuels, l’un à la fête de saint Charles Borromée, l’autre à la fête de saint René, évêque d'Angers, et le troisième à la fête de saint Corentin, premier évêque et patron de Cornouailles].

Il pria alors M. Rolland Poulpiquet, sieur de Feunteunspeur et de Villerandré [Note : Un des prêtres les plus distingués du diocèse de Léon. Théologien et jurisconsulte fort habile. Licencié dans l’un et l’autre droit, premier dignitaire, doyen, chanoine, official et vicaire général de Léon. Il composa plusieurs ouvrages, entre autres « un traité des Confréries religieuses, et quelques vies de Saints de Bretagne, saint Sulliau, saint Ténéran, et des Annales léonoises » sous formes de Mémoires consultés par Albert Le Grand ; Mgr. Cupif le donna comme confesseur à Amice Picart. A sa mort, vers 1656 ou 1657, il fut inhumé dans la cathédrale de Saint-Pol, dans la balustrade de Notre-Dame de Cael, du côté de l'Epître, près de la tombe du Recteur de Notre-Dame. Ce fut aussi près de cette chapelle que fut inhumée Amice Picart, en 1652 (Abbé Tanguy, Plougoulm, p. 60 ; et Albert Le Grand, p. 250 ; Peyron, la Cathédrale de Saint-Pol, p. 59). Ajoutons que, pour soustraire Amice Picart aux importunités des visiteurs, on lui avait donné logement dans la maison des Ursulines (sans doute vers 1636). Mais bientôt « on jugea à propos d’ôter la vue de tant de choses extraordinaires à ces personnes retirées du monde, qui en étaient néanmoins édifiées » (Vie d’Amice Picart, par le Vénérable Père Maunoir et Tresvaux, t. IV, p. 254)], qui prit sa place de chantre en la cathédrale, de lui succéder pareillement dans la qualité de supérieur des Ursulines. Il accepta cette charge et s’en acquitta très dignement, se rendant même sept ans durant comme chapelain et prédicateur de la communauté. Il prit le soin d’y faire faire un beau tabernacle, dont il paya la moitié.

Davantage, M. Christophe de Lesguen, grand archidiacre de Léon, « se rendit fondateur du monastère, l’an 1639, et peu après lui acquit une terre pour y construire les bâtiments » (Chronique de l'Ordre des Ursulines).

Voici le contrat de fondation auquel il vient d’être fait allusion.

2 Mai 1639. — A la grille et parloir des Rév. Mères Ursulines, en la maison en laquelle elles demeurent à présent, paroisse de Notre-Dame, en attendant bâtir leur couvent, ont été présents : Messire Christophe Lesguen, prêtre, licencié aux droits, grand archidiacre (Recteur de Ploudiry en 1619), doyen et chanoine du Chapitre de Léon, protonotaire du Siège Apostolique, chevalier du Saint-Sépulcre de Jérusalem (en 1625), demeurant en sa maison prébendale, en la ville de Saint-Paul, paroisse de Saint-Jean d’une part,

Et Soeur Anne Duchemin, supérieure, Soeur Anne Chevillé, préfète, Soeurs Renée Charbonel [Note : Un peu plus tard, une Mère Ursule Charbonnel, dite de l'Assomption, devient supérieure de la Communauté de Morlaix, en remplacement de la Mère Louise Guays], Françoise Kérouartz [Note : A la date de 1696, Françoise de Kérouartz est supérieure des Ursulines de Lesneven], Françoise Jobart, Elisabeth Duchemin, et Marie Kerléan, toutes religieuses professes, faisant pour les autres religieuses de la communauté, d’autre part,

Lequel Sieur Archidiacre ayant représenté avoir depuis quelque temps en sa dévotion et volonté, pour la plus grande gloire de Dieu, augmentation du culte et divin service, de se rendre fondateur de leur couvent en cette ville, non encore fondé ni bâti, aux conditions ci-après :

Savoir, que le dit Sieur Archidiacre et, après sa mort, son héritier principal et noble, jouiront privativement à tous autres, des droits, honneurs, prérogatives et prééminences, en l’église et couvent des dites Mères Ursulines, et comme tels, y auront leurs armes et écussons, tant dans la principale et maîtresse vitre, tant au choeur de l’église, que dans la vitre du pignon du bas-bout, et les dites armes en bosse aux deux pignons de l’église, dehors et au-dessus des principales portes et entrées de l’église et couvent, avec faculté de faire mettre une tombe enlevée qui se fera dans la muraille costière du choeur, du côté de l'Evangile, avec l’écusson de ses armes, et au bas et jouxte ladite tombe, un escabeau et accoudoir, et dans la voûte au-dessus la dite tombe, pourra faire mettre une pierre de marbre ou placard en cuivre qui contiendra. sommairement les points de la présente fondation ; et le dit Sieur fondateur seulement pourra avoir la faculté d’entrer quand bon lui semblera, dans le dit couvent, sans que néanmoins ses héritiers puissent prétendre au même droit d’entrée après sa mort.

Outre les prières générales qui se feront au dit couvent pour le dit fondateur, les Religieuses seront tenues de faire une communion par chacun premier dimanche du mois à l’intention du dit fondateur, et faire dire et chanter par leur chapelain, une messe qui sera répondue par les Religieuses, à pareil jour que le couvent aura été fondé pour le repos des âmes de ses père et mère, parents et amis trépassés, et pour l’âme du dit Sieur fondateur lorsqu’il plaira à Dieu l’appeler de ce monde, à commencer le jour que la première pierre fondamentale sera jetée, et ainsi à perpétuité, à pareil jour, par chacun an.

Et au jour du décès du dit fondateur, les dites Religieuses ou celles qui leur succéderont seront tenues et obligées en outre de faire célébrer un service à notes par le dit chapelain répondu d’elles, et à l’issue, chanter le De profundis, avec les trois collectes : Deus qui inter apostolicos, Deus veniae largitor, et fidelium, pour le repos de l’âme du fondateur, et de ses parents et amis trépassés, et ainsi continuer à pareil jour, par chacun an, à perpétuité.

Comme aussi chanteront tous les jours à perpétuité, à l’issue des complies, le De profundis, disant les trois collectes ci-dessus pour le dit Sieur fondateur.

Et à chacun vendredi du Carême, chanter le Stabat Mater avec l’oraison Interveniat, et ensuite le De profundis avec les dites collectes, et le samedi de Pâques, le Regina cœli avec l’oraison accoutumée, à 4 heures du soir, et avant commencer à chanter le Regina cœli, feront sonner les cloches un demi-quart d’heure pour avertir le peuple qui y aura dévotion de s’y trouver, à commencer au samedi de Pâques prochain après la dite pierre fondamentale posée, et ainsi continuer à pareil jour, à jamais.

Offrant le dit Sieur Archidiacre, pour être, comme dit est, fondateur, fournir 6.000 livres pour construction et bâtiment dudit couvent.

Lesquelles Religieuses, louant et approuvant la dévotion et pieux dessein dudit Sieur Archidiacre, et l’ayant reçu pour fondateur dudit couvent, en quelque endroit de la dite ville qu’il puisse être bâti, aux points, charges et conditions ci-dessus, à l’exécution desquels, elles obligent tous et chacun les biens dudit couvent, présents et futurs.

A le dit Sieur Archidiacre promis fournir la dite somme de 6.000 livres en trois termes, savoir : 1.200 livres le 1er Juin à venir, 1.800 livres à la Saint-Michel, et 3.000 livres à la Saint-Michel en un an que l’on comptera 1640.

Et en outre les dites Religieuses s’engagent à tenir en réparations les vitres dans lesquelles seront les armes du dit Sieur fondateur, et pour ce, le dit sieur Archidiacre promet leur fournir 18 livres tournois de rente annuelle garnie de la levée à la Saint-Michel prochaine après les dites vitres faites, ou la somme de 300 livres une fois payées, pour employer en acquit d’héritage, ou en rente constituée pour l’effet ci-dessus.

A tout quoi faire et fournir, le dit Sieur Archidiacre oblige et hypothèque tous et chacun ses biens meubles et immeubles, présents et futurs.

Le tout fait en la présence et par l’avis de Messire Rolland de Poulpiquet, prêtre, seigneur de Feunteunsper, archidiacre d'Acre, chanoine de Léon et directeur des Mères Ursulines, et aussi en la présence de Messire Nicolas Lemaistre, sieur de Beaulieu, aussi chanoine. DINÉRIC et Du TERTRE, notaires (Archives Départementales, H. 413).

« Lorsque Mgr. Cupif fut nommé par le Roy évêque de Léon en la place de Mgr. de Rieux, il s’affectionna fort à cette communauté, et ayant appris de la supérieure, la Mère Claude de Kérouartz, que depuis dix à onze ans qu’elle était établie, on avait toujours payé grand louage de la maison, il lui permit de chercher où se mieux placer. Elle fit accord pour le logis d’un gentilhomme qui leur manqua de parole du soir au matin [Note : Il s’agit, la suite le montrera, de Claude de Kéret, sieur de Kéravel. Deux de ses filles, Isabeau et Claude-Ursule de Kéret, entrèrent chez les Ursulines de Saint-Pol, comme novices, vers 1673. Dans le rentier des Ursulines, on lit aussi que, par contrat de dotation du 6 Juin 1634, la Mère Louise de Kéret avait apporté 30 livres de rente à perpétuité sur des terres en Cléder (Archives Départementales, H. 413 et 414)] ; de quoi le bon prélat fut si choqué, que dès le même jour il acquit un autre lieu, où il planta la croix le dimanche suivant. Ce lieu, néanmoins, n’étant pas à leur gré, au bout de deux ans, elles regagnèrent le premier vendeur. Mais quand vint le terme du paiement, elles ne purent jamais trouver d’emprunt que 1.300 écus ; et cependant il leur fallait 6.000 livres. Alors, la Supérieure supplia la Sainte Vierge de lui fournir le surplus, et bientôt après, une personne inespérée vint se présenter à la Supérieure et lui offrir en prêt la somme nécessaire ».

Nous allons reproduire, presqu'en entier, le contrat d’achat de la propriété de Claude de Kéret, où habiteront les Ursulines jusqu’à la grande Révolution ; mais auparavant, rappelons que, par délibération des habitants, le 1er Octobre 1643, il avait été accordé aux Ursulines, sur les deniers communs, un subside de 800 livres par an.

4 Mai 1644. — « A la grille et parloir des Mères Ursulines ont été présents écuyer Claude de Kéret, sieur de Kéravel et Ruroux, et dame Isabeau de Cabornais, sa mère, veuve de feu autre écuyer, Hamon de Kéret, d’une part,

Et Soeur Claude de Kérouartz, supérieure, Soeur Françoise Jobart, préfète, Soeurs Françoise de Kérouartz, et Elisabeth Duchemin, et faisant pour les autres, et Messire Christophe Lesguen, archidiacre, d’autre part ;

Lesquels Sieur de Kéravel et sa mère ont vendu aux dites religieuses et de Lesguen, archidiacre, le lieu et manoir noble de Ruroux, situé ès-mottes de cette ville, en la paroisse de St Jean, avec tous les bâtiments et les dépendances et appartenances ci après ; plus le jardin de jouxte avec le clos cerné de murailles, vêtu de palissades de fruits, plus un bocage situé hors l’enclos, plus une maison de nouveau bâtie par le vendeur, joignant la muraille dudit clos avec un courtil, plus une pièce de terre close étant vis-à-vis de la croix nommée Ruroux, contenant terre à semer six boisseaux de blé, mesure comble de St Paul, plus un autre courtil, plus une autre maisonnette, ses jardins et courtil, plus autres maisonnettes.

Tous les dits héritages cernés des chemins de toutes parts, menant de cette ville à Kérom, à la Chaise et la venelle du bas-bout joignant la muraille du clos du sieur de Kéramprat, fors d’un bout qu’ils font sur un parc vulgarisé Parc-ar-Gador, appartenant au Sieur Evêque de Léon [Note : Il est assez curieux de remarquer qu’à leur retour de Belgique, au cours de la guerre de 1914-1915, les Ursulines aient trouvé à s’établir à peu près sur l’emplacement de leur ancien monastère, dans une maison appartenant à M. du Halgouet].

La dite vente faite au prix de 12.000 livres payables en deux termes 8.000 livres à la prochaine fête de Saint-Michel, et le surplus dans le dit jour en un an. De laquelle somme de 12.000. livres, le dit Sieur Archidiacre, par le contrat de fondation du 2 Mai 1639, a promis de payer 6.000 livres, savoir dans le jour de la Saint-Michel prochaine, la somme de 2.000 livres, dans lequel temps les Mères Ursulines paieront pareillement 6.000 livres, et le surplus qui est de 4.000 livres, le Sieur Archidiacre s’oblige de le payer à la Saint-Michel de l’année 1645.

Et pour plus grande sûreté et assurance des obligations, ont fourni à plege et à caution, savoir : les Dames Ursulines, la personne de noble homme Louis Kerguz, seigneur de Troufagan, Goazhallec, etc..., demeurant en cette ville ; et le sieur de Lesguen, Dame Françoise Kerbic, dame douairière de Kérouartz, demeurant en cette ville, paroisse de Saint-Jean.

Les dits vendeurs réservent 500 plants du jeune semis et bocage étant hors la ceinture du clos, et pareillement font expresses retenues et réservation des escabeaux, enfeux et primautés leur appartenant ès églises de Saint-Paul, Saint-Pierre et Chrisquear. HENRY, Notaire royal ».

A la suite de cette pièce, on lit : « Nous connaissons avoir fait don et remise aux Mères Ursulines de ce qui pourrait nous être dû pour les lodes et ventes du contrat ci-dessus. Fait ce 30 Mai 1644. Robert CUPIF, Evêque de Léon » (Archives Départementales, H. 413).

Le bruit s’étant répandu de la façon inespérée dont la Sainte Vierge était venue au secours des Mères Ursulines, la dévotion s’augmenta fort en leur chapelle [Note : « Elle était dédiée sous le titre de N.-D. de Vrai Secours à cause d’une image en relief (statuette en jais noir), qui avait été donnée par M. Tanguy de Saint-Georges (de Plouescat), commandant un vaisseau lors de l’occupation des Iles de Sainte-Marguerite (reprises aux Espagnols, vers 1635) ; car comme les soldats étaient occupés au pillage, un capitaine hérétique se saisit d’une image de la Sainte-Vierge, qu’il trouva dans le trésor d’une église, et la jeta par terre pour en retenir la châsse qui était toute d’or ; ce que voyant, le Seigneur de Saint-Georges, il la releva de terre, pour la garder avec honneur. En suite de quoi, prenant congé du capitaine huguenot, il l’embrassa ; et comme leurs deux têtes étaient jointes ensemble, celle de l’hérétique fut emportée d’un coup de canon qui tua encore un homme qui le suivait, sans que le Seigneur de Saint-Georges reçût aucun mal. Il s’en crut entièrement redevable à Notre-Dame, et médita, à son retour, de faire rendre à son image tous les honneurs qui seraient en son pouvoir, vu même que, par sa protection, il avait échappé à plusieurs autres périls pendant son voyage. Pour cette fin, il la donna à ce monastère, lequel en reçut de très grands biens et tout le pays aussi » (Chronique de l'Ordre des Ursulines). En 1657, on trouve comme supérieure à Saint-Paul, une Mère Françoise de Saint-Georges (Archives Départementales, H. 413). Les Ursulines ont toujours conservé cette statuette de la Vierge, qui leur rappelle tant de protections miraculeuses. Antérieurement à tout ceci, il y avait à Saint-Thégonnec une statue fort vénérée de Notre-Dame de Vrai-Secours, et le Chapitre de Léon y venait en pèlerinage dans ses nécessités (Voir Albert Le Grand et Cyrille Le Pennec)].

« La Supérieure ayant fait bâtir dans cet emplacement sa nouvelle chapelle, et accommoder la maison à l’usage régulier, en prit possession le 29 Septembre 1644 [Note : Ce jour-là, on l’a vu, les Ursulines payaient 8.000 livres pour leur nouvelle demeure] et la mit en état de s’y loger dès l’été suivant, avec l’aide des libéralités de Mgr. de Léon, qui assigna l’entrée des Ursulines en leur couvent le dimanche 9 Juillet, jour auquel se célébrait dans Léon la fête de la Dédicace de l’église cathédrale. Il ordonna que de quantités de processions des paroisses voisines qui venaient en la ville, il s’en fît une générale, pour accompagner le St Sacrement à la sortie des Religieuses. Il commanda de tapisser les rues, de ranger le peuple en haie, et de poser des gardes pour éviter le trouble.

Le jour venu, après les vêpres de la cathédrale, ce soigneux pasteur, assisté de son clergé, alla processionnellement à la maison prébendale [Note : Sans doute, la maison de l’archidiacre Christophe de Lesguen, le grand bienfaiteur des Ursulines], où les Ursulines étaient en hospice depuis quinze ans. On ouvrit la clôture, et le clergé ayant chanté en musique un motet du St Sacrement, Monseigneur le prit entre ses mains et se mit sous le poile ; puis le clergé sortit en ordre, et les Religieuses ensuite. Le corps de la Justice marchait après la Noblesse, puis quantité d’autres, tous le cierge à la main, passant par la cathédrale, le R. P. de Morlaix [Note : Peut-être s’agit-il du R. P. Joseph, de Morlaix. Ce qui le donnerait à penser, c’est que le R. P. Joseph prêcha pour la pose de la première pierre du couvent des Ursulines de Morlaix l’année précédente (1644), et qu’il était, en Juin 1645, quelques jours par conséquent avant la cérémonie que nous relatons, au Chapitre des Capucins réuni en leur couvent de Morlaix, et où il fut élu comme provincial pour la deuxième fois], capucin, fit un sermon, lequel fini, la procession s’achemina dans la nouvelle chapelle des Ursulines. Le St Sacrement y fut posé dans le tabernacle ; et le bon prélat, après avoir introduit toutes les Religieuses dans leur clôture, exhorta l’assemblée de leur faire aumône, pour être participante de leurs bonnes œuvres, se plaçant lui-même dans la sacristie pour les recueillir, et montrant l’exemple aux autres, en donnant tout le premier cette fois, outre les biens qu’il leur avait déjà faits.

De là en avant, il allait leur dire la messe conventuelle toutes les fêtes et dimanches, sans train, comme un simple prêtre ; et connaissant que le revenu de la maison n’était pas suffisant pour entretenir les Religieuses, il leur permit de faire une quête générale en son diocèse, leur donna 20 pistoles, une quantité notable de froment et de vin ; et leur promit des avantages plus considérables qu’elles auraient assurément reçus, si Dieu leur eût laissé plus longtemps ce charitable Evêque.

L’hiver de 1641, un grand incendie, allumé par la négligence d’une fille du tour, fut éteint par les Religieuses, sans autre aide que l’invisible main de Notre-Dame de Vrai Secours, qu’elles avaient invoquée, et aussi la glorieuse Sainte Barbe. La Supérieure en fit faire de publiques reconnaissances dans la Communauté. C’était lors la Mère Claude de Kérouartz [Note : Le 14 Juillet 1652, à la tête de cinq autres Religieuses Ursulines, elle fonde la maison de Quimperlé], à laquelle succéda peu après, sa soeur, la Mère Saint François de Paule, qui eut recours à la bourse de Mme de Kérouartz, sa mère, pour l’entretien des Religieuses durant sa première année.

Une personne de qualité lui fit signifier de lui payer une grosse somme, qu’elle disait lui être due, à faute de quoi elle ferait saisir leur peu de bien. La Supérieure, dans cette fâcheuse conjoncture, se jette aux pieds de son Crucifix, le suppliant d’être sa caution. Cette affaire traîna quelques années, et au bout, la personne mourant, laissa en paix la communauté [Note : Nous croyons qu’il s’agit de Gabriel Billés, sieur de Kerfaven, receveur du domaine du Roi. Sur la fin de 1644, en sa qualité de fermier du Seigneur marquis de Carman, il réclame les trois quarts des lods et ventes, à raison du contrat d’achat du 4 Mai de la même année, que nous avons relaté. Il avait épousé en secondes noces, Dame Marie Le Nobletz, lui avait laissé de grands biens, et sans doute aussi sa charge. Car on la trouve fermière des domaines du Roi à Lesneven, Saint-Renan et Brest, « ce qui lui procure de grands profits et émoluments » (Archives Départementales, H. 411 et 413). Elle-même se remaria au sieur Charles de Pontangrolle, conseiller du Roi et son procureur au siège de Lesneven, qui fut député aux Etats de Dinan en 1675. De son premier mariage, Marie Le Nobletz avait eu une fille, Marie-Anne Billés, Dame de Pratanlouet, entrée au Noviciat des Ursulines de Saint-Pol, en 1662. Son contrat de dotation, du 20 Septembre, est dressé en la maison prébendale, résidence du grand vicaire, Jean de Kerlerch, seigneur de Rucat, alors supérieur des Ursulines. Marie-Anne Billés est supérieure du couvent de Saint-Pol, en 1698. En 1682, il y a aussi comme supérieure des Ursulines de Lesneven, une Sœur Renée Billés, religieuse venue du couvent de Saint-Pol (Archives Départementales, H. 411 et 413)].

A la fin de l’année 1648, Mgr. de Rieux fut rétabli en son siège épiscopal de Léon [Note : Il est dit, dans les Actes du Clergé, 1645, que Messire Charles de Montebal, archevêque de Toulouse, adressa une requête à la Reine Régente en faveur de Mgr. de Rieux, injustement dépossédé de son siège. Ce Prélat, dit-il, fit diverses protestations publiques et secrètes. S’étant pourvu par appel, on s’est excusé à Rome sur les empêchements, que les ambassadeurs du Roi y apportent, « de lui rendre la justice qu’on ne refuse à personne »], et recommença à donner aux Ursulines toutes les marques de tendresse d’un bon père, ce qu’il continua jusqu’à sa mort, qui arriva le 8 Mars 1651 [Note : Le 9 Mars 1657, Guillaume de Penancoat, seigneur de Keroual, Cheff du Bois, et autres lieux, et Marie de Plœuc, sa compagne, fondent un obit et service solennel à célébrer le 8 Mars de chaque année en la cathédrale de Saint-Paul (Saint-Pol), pour le repos de l’âme de Mgr. de Rieux, oncle maternel de Marie de Plœuc. Pour cela, 240 livres sont versées au Chapitre qui les remet aux Ursulines, moyennant la constitution d’une rente annuelle (Archives Départementales, H. 413)].

Le 17 Février 1657, Mgr. Henry de Laval de Bois-Dauphin, évêque de Léon, posa la première pierre du bâtiment que les Ursulines entreprirent sous la protection de leur bonne et perpétuelle supérieure, la Sainte Vierge, « n’ayant que 300 livres, aussi doit-on. lui en attribuer le bon succès » (Chronique des Ursulines).

(Archives de l'Evêché).

 © Copyright - Tous droits réservés.