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LES PEINTURES MURALES DE L'ÉGLISE DE SAINT-PIERRE EN LÉON.

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En restaurant l'église de Saint-Pierre, l'une des sept paroisses composant anciennement le Minihy de Léon, on a découvert, sous un épais badigeon qui se détachait par écailles ainsi que l'enduit de dessous, un fragment de fresque, absolument irréparable, mais dont M. Clec’h, professeur de dessin au collège de Saint-Pol a bien voulu, à ma demande, reproduire, avant leur complète destruction, les parties encore visibles.

Cette fresque se compose de trois scènes distinctes disposées entre deux arcades. Le surplus de l'église n'avait sur ses parois que le monogramme de Notre Seigneur I H S.

La scène de droite représente un évêque nimbé, agenouillé, les mains jointes, entre deux autres personnages, également nimbés, debout et les mains jointes, au-dessus d'une arcade ogivale du XVème siècle, mais peints au siècle suivant. En effet, le temple de Jérusalem qui figure à la seconde scène, a une voûte en plein cintre sous laquelle s'ouvre une fenêre aussi en plein cintre, décorée de meneaux flamboyants, d'où la conclusion que la fresque est postérieure d'un siècle à l'arcade ogivale sur laquelle elle est peinte.

L'évêque nimbé de la première scène pourrait être saint Pol Aurélien, quoique dépourvu de son attribut ordinaire (un dragon qu'il tient en laisse par son étole) ; mais quels seraient ses deux acolytes également nimbés ? Sous les pieds du saint on voit l'écusson du donateur, mi-parti de gueules à la fasce ou à la croix pattée d'argent et d'or plein, armoiries dont nous n'avons pas retrouvé l'attribution.

A gauche de ret écusson la devise bretonne Pret ve (il serait temps) se rapproche beaucoup de celle de la famille de Kersauson, (Pred eo, il est temps) ; mais les Kersauson possessionnés au XVIème siècle dans le Minihy de Léon portent une boucle d'argent, sur champ de gueules, et il nous a été impossible de retrouver une boucle dans la fasce ou la demi-croix pattée du 1er parti. Le second parti en champ d'or, dont les pièces héraldiques sont entièrement effacées, serait les armes de la femme du donateur.

La scène centrale s'explique par l'inscription suivante qui se déroule le long de la voussure de l'arcade : Comment le grant prestre de la loi refusa l'offrande de Joachim et sainte Anne ........ deffans.

Les deux avant derniers mots ont des abréviations qui ne nous ont pas permis de les déchiffrer ; nous proposerions d'y lire « pour pauvreté d’enfants ».

Le grand prêtre de la loi, mitré et en chape d'évêque refuse, du haut d'une galerie à balustres, l'offrande dont Joachim et sainte Anne nimbés et agenouillés, sollicitent en vain l'acceptation.

Pourquoi ce refus ? — Parce que les mariages stériles étaient chez les Juifs une sorte de déshonneur. Ce refus est ainsi motivé dans une vie de la sainte Vierge, composée au XIIème siècle par Epiphane, hagiographe grec, dans la cité mystique de la vénérable mère Marie d'Agreda, publiée en 1670 et dans l'iconographie chrétienne de l'abbé Crosnier. Ces diverses légendes nous apprennent qu'après l'humiliation éprouvée par Joachim, de la part du prêtre refusant son présent, « il résolut de recourir à Dieu avec plus d'ardeur et de le conjurer de mettre enfin, un terme à l'opprobre de sa maison. Il se soumit à un jeune rigoureux de quarante jours qu'il passa sur le sommet d'un rocher, gardant ses moutons ». Cependant Anne, renfermée dans l'intérieur de sa maison, adressait de son côté, au ciel, de ferventes prières. Tout à coup un ange apparut à Joachim et le bénit, en lui disant que ses supplications avaient trouvé, grâce devant Dieu ; en même temps Anne recevait, la même faveur, et l'ange en la bénissant lui annonçait la fin de sa stérilité, lui assurant qu'elle donnerait au monde une fille qui apporterait la paix à la terre et qui remplirait le ciel de joie. « Joachim après que l'ange eut disparu, fit retentir l'air de ses chants d'allégresse et de reconnaissance ; et aussitôt il se mit en mesure de regagner sa demeure, pour faire part à son épouse de l'heureuse nouvelle ; elle, de son côte, était déja en route pour le rejoindre. Les deux époux se rencontrèrent à la porte dorée et se firent mutuellement part de ce qui leur était arrivé ; ils s'embrassèrent dans l'excès de leur bonheur, et après 20 ans de mariage, donnèrent naissance à la sainte Vierge ».

Cette gracieuse légende n'est pas seulement peinte à l'église de Saint-Pierre du Minihy ; on l'a retrouve à la maîtresse vitre de la chapelle N.-D. de La Cour, paroisse de Lantic, et il est à notre connaissance qu'elle est également sculptée sur l'un des cinq portails de la cathédrale de Bourges.

La 3ème scène de notre fresque n'a pas la même suavité. Satan assis de face, au milieu des flammes, les mains ou plutôt les griffes posées sur les genoux, les articulations des épaules, des coudes et des genoux formées par des têtes de serpents ; la tête ceinte d'une couronne murale au-dessus de laquelle est une chaudière, remplie de feu ; voilà sans doute une représentation fantastique de l'enfer mais quelle interpretation donner à ce jeune guerrier, couronné de fleurs, armé d'un corselet, de brassards, de cuissards et de jambières, debout au-dessus des flammes, avec un épée en pal suspendue sur la tête comme celle de Damoclès ?

Ici la discussion est ouverte et j'inviterai mes honorables confrères à résoudre l'énigme qui pour moi est insoluble.

Uno avulso non deficit alter, comme le dit la devise non moins énigmatique des Rosmadec.

Il est facile de constater la corrélation qui existe entre le Satan peint à Saint-Pierre du Minihy et un autre Satan peint sur une miniature du XVème sicle, ornant le manuscrit d'une histoire du Saint-Graal, conservé à la bibliothèque nationale.

Ce second Satan préside une assemblée de diables, délibérant sur la naissance de Merlin, issu, disent les romans de la Table ronde, d'un démon incube et d'une religieuse, et destiné à réparer le mal que Jésus-Christ par sa mort et sa descente aux enfers a fait au démon.

Cette miniature a été gravée dans l'iconographie chrétienne de Didron, sur laquelle nous l'avons copiée.

Dans ces deux exemples, Satan a les articulations des épaules et des coudes formées par des têtes de serpent ; mais dans le roman du Saint-Graal, il représente, avec ses trois têtes couronnées de cornes de cerf et n'ayant entre-elles que trois yeux, trois nez, trois bouches et trois mentons, la Trinité du mal, par opposition à la Sainte-Trinité, fréquemment interprêtée dans les livres d'heures du XVIème siècle, par une figure à trois visages, et dont on voit un autre spécimen peint sur une voûte de la cathédrale de Léon.

Avec le regret de nee pouvoir présenter moi-même les observations qui précèdent au membres de la section archéologique, je prie M. le président de faire appel à leurs lumières collectives pour élucider ce qu'elles ont de problématique.

(le baron de Courcy).

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