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Saint-Pol-de-Léon : Confrérie des Trépassés.

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21 Avril 1533. — Nous traduisons, en la résumant, la pièce latine qui relate l’érection, à la date ci-dessus, de la confrérie des Trépassés, à Saint-Paul de Léon :

Non seulement les anciens Patriarches, Prophètes, Prêtres, Rois et Chefs de l'Ancien Testament, furent pleins de foi en la résurrection des défunts, d’un très ferme espoir en l’éternelle vie, et d’une grande piété pour les morts envers lesquels ils manifestaient leur charité par diverses cérémonies religieuses, mais les Géants eux-mêmes, les Gentils, les Incirconcis, et les Idolâtres, malgré leur oubli de la loi naturelle et la fausseté de leurs cultes, ont fait preuve d’une piété extrême et d’un culte pompeux à l’égard des morts.

Ainsi, chez la nation païenne des Scythes, dont Trogue Pompée et son abréviateur Justin, de même que Valère Maxime, ont, entre autres choses, rapporté qu’ils vénèrent les sépulcres des ancêtres à l’égal des autels des dieux.

Le barbare Hannibal nous est aussi montré célébrant avec solennité les funérailles des défunts.

Rien d’étonnant par suite, si nous chrétiens, qui vivons sous la loi de la vérité et dans la vraie lumière, nous exerçons les oeuvres de charité envers les âmes des fidèles défunts du Christ, nous rappelant d’ailleurs la parole de l'Ecriture : « Sainte et salutaire est la pensée de prier pour les morts, afin qu’ils soient délivrés de leurs péchés ».

C’est pourquoi. nous Hamon Barbier [Note : Fils cadet de Yves Barbier, Sr. de Kerjean et de Marguerite de Keroulguen, Abbé commendataire de Saint-Mathieu, conseiller au Parlement, chanoine de Nantes et de Cornouailles, recteur de Plougoulm, Plounévez-Lochrist, Ploujean, Guipavas, Plougras, Plounéour-Trez, Lannilis, Guimiliau, Sizun, Plourin, Tréguier, prieur de l'île de Batz, etc... On dit qu’à sa mort, 24 Décembre 1544, plus de 50 vacances se produisirent, et que le Pape Paul III surpris, demanda si tous les bénéficiers de Bretagne étaient morts en même temps. Il fut créancier de quantité de gentilshommes du Léon ; même des plus hautes familles, les Kermaven, du Louet, de Bouteville, etc., et acquéreur d’un grand nombre de terres nobles (par exemple le manoir de Kerhoent, au Minihy) et roturières, et de rentes en argent ou froment, dans les paroisses du Minihy, Saint-Vougay, Plounévez, Guipavas, Cléder, etc. (Association Bretonne. Congrès de Saint-Pol de Léon, année 1912). Etude du marquis de Beauchesne], professeur dans l’un et l’autre droit, archidiacre de Quiminidilly, chanoine, et vicaire général de Mgr. Christophe de Chavigné, en l’absence de l’Evêque, vu la requête présentée par Vén. missires François Richard, archidiacre de Léon, Guillaume Fougay, recteur de Plouarzel, Yves Barbier, doyen de la collégiale du Folgoat, scholastique et chanoine de Tréguier, François Parcevaulx [Note : Grand vicaire, quelques années plus tard, de Mgr. de Chavigné], recteur de Plouguerneau et Plounéventer, Conan Le Scaff, recteur de Carantec, Laurent Le Scaff, recteur de Landéda, François Le Veyer, chanoines de Léon, d’une part, et des nobles, bourgeois, marchands et habitants de cette ville et Minihy de Léon, d’autre part, tous désireux de voir ériger une Confrérie pour le soulagement de l’âme des défunts, lesquels habitants, dans l’assemblée tenue au Creisker, ont unanimement consenti à l’établissement d’une telle Confrérie, et ont nommé vénérables personnes Jean Kerahes, vicaire de la paroisse de Saint-Pierre à la cathédrale [Note : Etait aussi organiste à la cathédrale] et Henri Béleryt, procureur des cours ecclésiastique et séculière de Léon, et habitant de cette ville, pour Abbés de ladite confrérie, pour deux ans, et nobles et discrètes personnes, Guillaume Le Jacobin, sieur de Keramprat, remplaçant Mgr. de Léon pour le vicariat du Crucifix devant le choeur ; écuyer Maudet de Forest, sieur de Kernevez, pour le vicariat de Notre-Dame de Cahel ; Michel de Coetanlem, sieur de Keravel, pour le vicariat de Saint-Pierre, Bizien de Kersaintgilly, sieur de Kersaliou, pour le vicariat de Toussaint ; Yves Kerannou, sieur de Kerantraon, pour le vicariat de Trégondern ; Hervé Kerredan Merluzec, sieur de Kergoff, pour le vicariat du Crucifix devant le trésor ; et Guillaume Crasseur, marchand, et procureur de la cour épiscopale, pour le vicariat de Saint-Jean-Baptiste, comme conseillers de la dite confrérie.

Avons approuvé et approuvons les statuts et ordonnances qui suivent pour la confrérie des Trépassés fondée à l’église de Saint-Pierre [Note : Pour prévenir toute confusion, il faut noter que cette église de Saint-Pierre, située « ès faubourgs de la ville », n’était pas le siège du culte de la paroisse de même nom desservie, avec les six autres du Minihy, à la cathédrale, et n’avait même pas de relations spéciales avec cette paroisse. Laquelle église eut pour armes : « D’or à la croix d’azur ». (Echo Paroissial de Brest, 10 Décembre 1905)], et pour l’office célébré pour les défunts chaque lundi ; à savoir, seront chantés bien matin les Vigiles des Morts et 3 psaumes et 3 leçons avec les recommandations, versets et répons y accoutumés avec une messe de Requiem à note, à diacre et sous-diacre, solennellement, sur le grand autel de l’église Saint-Pierre, en laquelle messe sera faite prière pour les frères, soeurs et bienfaiteurs de la dite Confrérie ; ... et aussi sera chanté à l'Elévation et Ostension du Corpus Dni, Ave Verum, etc...

La messe finie, le célébrant avec les autres prêtres et choristes assistants, avec la croix devant, iront processionnellement, chantant : Qui Lazarum, De Profundis, Inclina, Fidelium, etc... jusqu’aux reliquaires de la dite église, où chanteront : Avete omnes animae fideles, etc... avec les versets, répons et oraison, Dne J. C. salus et liberatio animarum, etc...

Après ira ladite procession entour le cimetière, et on chantera Libera me, avec les autres versets, répons, suffrages, et oraisons, jusqu’à la chapelle de Madame Sainte Catherine au dit cimetière, en laquelle chapelle, en l’honneur de Madame Sainte Catherine, on chantera Virgo flagellatur, etc..., les versets, répons et l’oraison : Deus qui dedisti legem Moysi

Au départ de la dite chapelle, les prêtres chanteront les litanies jusqu’à l’église de N.-D. de Creisquer, pour prier Dieu et Notre-Dame et tous les Saints de garder la cité et les habitants, et les frères, soeurs et bienfaiteurs de la dite Confrérie, de mal et de contagion, en laquelle chapelle de Notre-Dame et devant son image et grand aultier d’icelle, les prêtres et choristes chanteront, Inviolata, integra, etc., ou autre antienne, selon le temps, les versets, répons et oraison, dévotement, en la meilleure sorte qu’ils pourront bonnement le faire, et après iront jusqu’à l'aultier de Monseigneur Saint Roch en la dite église, ou chanteront en l’honneur de mondit Sieur Saint Roch, Amavit eum Dominus, les versets, répons, et oraison Deus qui beato Rocho pour prier Dieu de garder la cité et habitants, et les frères, soeurs et bienfaiteurs de la Confrérie, de tous maux, périls, et de mauvaise contagion.

Et en temps d’hiver, depuis la Toussaint jusqu’à la Chandelleur, sera le dit office célébré à l’issue des matines de la cathédrale, pour tant que l’heure du matin y est suspecte.

Pour tant que aucunes fois et signalement au temps de peste, et au dit temps d’hiver, et que le dit office est célébré bien matin ; et parce que les enterrements se font en la dite église et au cimetière d’icelle, spécialement au dit temps de peste, on ne pourrait y célébrer et ouïr le dit office sans danger de contagion, est dit et ordonné que en temps de peste, dont Dieu nous veuille garder, le dit office sera célébré totalement en l’église et cimetière de Creisquer [Note : C’est ainsi que, pendant la peste de 1621-1622, l’église de Saint-Pierre ayant été choisie pour loger les malades, les Carmes qui devaient s’y rendre processionnellement, chaque premier lundi du mois, en vertu d’une fondation faite le 7 Février 1607, par Prigent Le Ny, chanoine et trésorier de Léon, s’en trouvèrent dispensés et purent, du consentement du fondateur, s’acquitter de leurs obligations dans leur église (Notes de M. le chanoine Peyron). Au terme de cette fondation, les Carmes, à l’aller et au retour de la procession, chantaient les Litanies des Saints, puis célébraient, à Saint-Pierre, la grand'messe des Morts, avec Libera ; après avoir fait le tour du cimetière, les Religieux devaient, comme ils disaient, se rendre « à Saint-Paul », c’est-à-dire à la cathédrale, où se chantait le De profundis avec oraison, sur la tombe du dit Sieur Trésorier, en attendant son décès, dans la chapelle de Keraultret ; après quoi la procession se rendait à la chapelle de Lorette, où se terminaient les Litanies ; puis le chant du Salve Regina. A la sortie, on entonnait encore le De profundis ; le tout clôturé à la sacristie du couvent par l’oraison Fidelium (Archives Départementales, H. 224 et 226)].

Item, avant le dit office, à chacun jour de lundi, la grosse cloche de Notre-Dame de Creisquer sonnera et fera trente coups de gobet, et s’il vient fortune de guerre telle qu’on ne pourra sonner la cloche, les abbés fourniront d’un homme avec une cloche qui ira par la ville avertir de l’heure de l’office.

Item est ordonné que le prêtre qui dira la messe recevra 6 livres par an et qu’il y aura cinq autres prêtres ou choristes qui répondront et chanteront avec les diacres et sous-diacres, lesquels auront pareillement pour salaire, chacun d’eux, 40 sols par an, sauf augmenter ce salaire à l’égard des abbés et conseillers, et seront les dits prêtres muables à la discrétion des abbés et conseillers.

Item pour la peine du gouverneur d’icelle église de Saint-Pierre à servir la dite Confrérie qui sera tenu parer l'aultier, garder et allumer les cierges, garder les ornements, 40 sols par an.

Item pour sonner la cloche du Creisquer, aura le gouverneur de cette dite chapelle 40 sols par an.

Item tous bénéficiers qui bailleront 100 sols de rente à perpétuité avec 4 sols pour une livre de cire par devoir d’entrée, et aussi les gens mariés payant pareille somme pour l’homme et la femme, pourront être reçus en la dite Confrérie, et auront voix à l’élection des abbés et conseillers, et d’ouir les comptes, pourront être élus abbés et conseillers.

Item pourront être reçus ceux qui bailleront aux abbés 5 sols par an, avec 4 sols pour une livre de cire pour devoir d’entrée, et pourront pareillement être élus abbés et conseillers.

Après le trépassement des confrères et soeurs, les abbés feront célébrer pour chacun d’eux en la dite église ou en l’église du Creisquer, un service et office solennels d’une messe à note à diacre et sous-diacre, avec les vigiles des Morts à 3 psaumes et 3 leçons, après laquelle messe le célébrant dira à basse voix pour le dit frère ou soeur trépassé, le psaume De Profundis, avec les oraisons et suffrages aux Morts, Inclina, Deus veniae largitor et fidelium, etc.

En outre, feront les dits abbés célébrer au dit service une messe à basse voix du précieux nom de Jésus, lequel office sera célébré de la forme ci-devant, dedans 15 jours après le décès, et à l’issue de la dite messe, les dits prêtres feront spéciale recommandation sur la tombe du défunt s’il est enterré dans la dite église, auquel jour sonnera la grande cloche du Creisquer 30 coups de gobet avant l’office.

Item les veufs et veuves, prêtres et autres non mariés, seront pareillement reçus baillant chacun d’eux 50 sols une fois payés, ou 2 sols 6 deniers par an, et 7 sols pour une demi-livre de cire pour devoir d’entrée.

Item avertiront les dits abbés le principal héritier du frère ou soeur trépassé en contre le jour du dit service afin qu’il puisse faire son honnêteté et ce qu’il voudra en outre faire pour son parent trépassé.

Item, pour éviter abus et afin que les biens de la dite Confrérie soient bien employés à prier Dieu pour les trépassés, est ordonné qu’il y aura deux abbés, un homme d’église et un bourgeois de la ville avec 7 conseillers dont il y aura l’un d’eux de chacune des 7 paroisses du Minihy, lesquels deux abbés et sept conseillers auront la totale administration de la dite Confrérie, biens et deniers d’icelle.

Et si aucun des dits frères choisi pour être abbé ou conseiller, refuse la dite charge, sera tenu payer 10 sols, lesquels une fois payés, il ne pourra jamais plus être contraint d’accepter la dite charge.

Item, si aucun des frères, par hasard ou fortune, et sans sa coulpe, devient à pauvreté, est ordonné qu’il sera aidé des biens communs de la dite Confrérie selon sa condition, à la discrétion des abbés et conseillers.

Item, tous ceux qui seront reçus jureront entretenir paix et union entre les frères et soeurs d’icelle Confrérie et aussi procurer son profit et utilité et son dommage éviter.

Item est ordonné que les abbés et chacun d’eux auront pouvoir de recevoir ceux qui voudront se mettre en ladite Confrérie, et seront tenus d’écrire sur les registres d’icelle les noms et surnoms de ceux qu’ils auront reçus.

Le jour pour l’élection des abbés et conseillers sera le lundi de la Quasimodo, en l’église de Creisquer, à l’issue de la procession, au son de la cloche, où se trouveront tous les frères et soeurs à peine de 10 deniers d’amende chacun, au profit de la dite Confrérie.

Et néanmoins l’absence des défaillants, l’élection des abbés et conseillers faite à la maire voix, sera valable et canonique et ne vaudra que pour 2 ans ; et sur leur compte seront les dits abbés et conseillers payés et contentés de leur peine à la raison, s’ils en demandent.

Item, afin que nul ne soit frustré d’un si grand bien, mérite et profit, est ordonné que tous ceux qui bailleront de leurs biens à leur discrétion et dévotion pour entretenir ledit office seront participants ès messes et oraisons faites en la dite Confrérie, sans que les dits abbés soient tenus, après leur trépassement, de leur en faire aucun service ou office en espécial.

Nous, vicaire général surnommé, ayant lu et mûrement considéré les dits articles, par les présentes approuvons, louons et ratifions l’érection de la dite Confrérie en laquelle sommes nous-mêmes humblement et dévotement entrés, et accordons aux fidèles qui vraiment pénitents et confessés, entreront ou lui départiront quelque chose de leur bien, et toutes les fois qu’ils le feront, 40 jours d’indulgence.

Fait en la chapelle du Creisquer, en présence de maître Hervé Fichou, notaire de la Cour ecclésiastique de Léon, et Yves Morvan, habitant de cette ville, et de plusieurs autres témoins pour ce appelés, le 21 Avril 1533 (Archives Départementales).

BILLETS D’ADMISSION. — Ils se libellaient sur de petits parchemins, et à peu près comme le suivant, sauf quelques variantes insignifiantes :

« Yvon Abguéguen et Marguerite Le Jacobin, sa femme épouse, et chacun d’eux, ont été ce jour, pris et reçus à frère et soeur dans la frairie des Trépassés, fondée, dotée et desservie en l’église de Monsieur Saint-Pierre près et ès faubourgs de la ville et cité de Saint Paul, parce que présentement ils ont payé à maître Jehan Kerahès et Henry Béleryt, abbés et procureurs de la dite frairie, prenant et acceptant, la somme de 104 sous monnaie, pour la perpétuation et continuation de la rente, et devoir d’entrée en icelle frairie, de laquelle somme les dits sieurs abbés se tiennent contents et bien payés, et ont aussi quitté et quittent les dits mariés, promettant tenir bon compte aux frères et conseillers de la dite frairie des dites sommes, et jouiront les dits Abguéguen et sa femme des suffrages, prières et oraisons qui en l’avenir seront faits en icelle, selon et au désir des statuts de la dite frairie ; et en outre s’obligent les dits abbés de faire mettre et écrire les noms et surnoms du dit Abguéguen et de sa dite femme sur le livre et martyrologe de la dite confrairie. En témoignage de vérité de tout quoi, avons signé cette de nos signes manuels et baillé aux dits mariés le pénultième jour d'Avril l’an entrant 1538. Signé : KERAHÈS, et H. BÉLERYT ».

Au-dessous : « L’office du dit Abguéguen, décédé, a été fait en l’église de Creisquer, le 24 Mai 1564 ».

Sur certains billets, il y a aussi un cachet représentant une tête de mort, avec une inscription qu’il est impossible de lire.

6 Juin 1574. — Dans une lettre adressée aux, fidèles, Mgr. Rolland de Neuville leur écrit au sujet de la confrérie, que, depuis qu’elle a été érigée dans le diocèse, la piété des fidèles jointe à la bonne administration des Abbés, en a si magnifiquement augmenté les revenus, qu’ils suffisent maintenant à fonder et doter plusieurs messes nouvelles.

C’est pourquoi, vénérable et discrète personne Hervé Morice, prêtre, à présent Abbé, demande l’autorisation d’ajouter à la fondation primitive de chaque lundi, cinq messes à basse voix, chose déjà en partie établie par les précédents Abbés qui, depuis longtemps, font dire chaque lundi, dans l’église de Saint-Pierre, en plus de la messe des Morts, quatre autres messes, la première du Saint Nom de Jésus, la deuxième de la Croix, la troisième des Cinq Plaies, la quatrième du jour ; après quoi a lieu la procession accoutumée à laquelle assistent les chapelains et suppôts, in albis, portant, chacun à son tour, la croix.

Monseigneur de Léon autorise la célébration d’une cinquième messe ; laquelle messe sera de la Sainte Vierge et dite au grand autel du Creisker.

L’Abbé demande, de plus, à ce que chaque samedi, à la même heure que le lundi, on célèbre pour les associés vivants, trois messes, dont l’une à notes, de la Sainte Vierge ; et les deux autres à basse voix, à dire, au même moment que la précédente, au Creisker, une de la Sainte Trinité, et l’autre des Saints Anges, avec mémoire des défunts.

Après quoi, les chapelains de la Confrérie, in albis, et portant la croix, viendront en procession de Creisker à la cathédrale, dont ils feront le tour à l’intérieur, en chantant le Libera, avec les répons, versets, collectes et oraisons accoutumés, et spécialement le De profundis, avec les oraisons Inclina, Fidelium, près de l’ossuaire de ladite cathédrale, situé près du portique méridional [Note : A propos de ce portail, indiquons ce qui se lit dans l’enquête de 1578 instituée à la requête de Mgr. de Neuville : « A la cathédrale, au dessus de la porte appelée le portail de l'officiant, devers le midi, avons vu un écusson en bosse contenant 2 tours tournant sur une roue d’argent en champ d’azur, 2 lions d’azur en champ d’or, avec une crosse et mitre, qui sont, sauf la crosse et mitre, armoiries de Kermavan ». A la suite, on lit encore ceci : « Dans la chapelle de St. André... (où sont d’autres écussons avec les mêmes armes), se trouve une tombe à fleur de terre sur laquelle se voient deux semblables écussons avec une crosse ». Est-ce la tombe que se serait préparée Mgr. de Kermavan, et dont parle M. Peyron], puis on fera mémoire, en chantant, de saint Sébastien, martyr ; de saint Pol, évêque, et de saint Roch, pour demander pour la cité et ses habitants d’être préservés de tous maux de l’âme et du corps, ainsi que de toute peste et contagion.

A la prière du dit Hervé Morice, abbé, l'Evêque déclare approuver la première fondation [celle de 1533], ainsi que ce qui y est ajouté pour chaque lundi et samedi. Fait au Palais épiscopal de Saint-Paul, le 6 Juin 1574. ROLLAND DE NEUVILLE, évêque, LE GALL, secrétaire.

LES FONDATIONS. — Le nombre des fondations, même des plus importantes, est trop considérable pour permettre d’en faire ici la publication. Que nous n’en ayons plus tous les titres, la chose ne surprendra pas. Mais déjà, au milieu du XVIIème siècle, bien des pièces manquaient aux archives de la Confrérie.

Ecoutons ce qu’en dit le scolastique Picart : « Il n’y a qu’à jeter un coup d’oeil sur les comptes, de quelques Abbés qui se succèdent, pour voir la quantité d’excuses dont ces comptes sont chargés, faute de titres. On ne sait le plus souvent si ce sont les fondations de ceux qui payent que l’on dessert, ou celles dont on ne peut plus exiger le paiement [Note : C’est peut-être ce qui explique que, en 1757, les revenus ne sont déclarés que de 1.420 livres, alors qu’une pièce de 1629, indiquait le chiffre de 1.500 livres], et les Abbés sont tentés d’accuser leur prédécesseur immédiat, d’une négligence intolérable [Note : L’accusation ne tombait pas toujours à faux. On trouva, par exemple, qu’il y eut incontestablement incurie, chez missire Guillaume Léost], jusqu’à ce qu’ils aient pénétré jusqu’à la source des dérangements des papiers de ladite Confrérie. L’abbé, M. Pen, quoiqu’il fût le plus laborieux des hommes, n’y tint qu’un an, et aima mieux s’en retourner à Paris ».

Un certain nombre de titres avaient disparu, parce qu’on les avait confiés aux familles qu’ils intéressaient, lesquelles familles, par négligence, ou même par dol, pour faire disparaître toutes traces de leurs obligations, ne les avaient point rendus [Note : Pareille manoeuvre s’était produite pour les actes du Creisker. Ainsi, dans la séance de la communauté du 28 Juin 1667, présidée par Mgr. Visdelou, le Syndic remontre à l'Evêque, que l’église du Creisker a été longtemps gouvernée par des marguilliers nommés par les habitants, mais que les garants qui justifiaient leur possession ont été soustraits par une lâcheté qui a causé que la disposition de cette église a été transférée à la puissance de l’état ecclésiastique, et commise, depuis quelques années, à des particuliers, lesquels ne peuvent maintenir ni justifier leur nomination par aucun titre valable, et qui en ont perçu les fruits, bien que négligeant de faire aucune réparation. Nous voyons aussi (délibération du 17 Avril 1638, Bulletin diocésain, 1914, p. 45) que les titres et garants de la communauté étaient pareillement dispersés], et les préoccupations qu’avait pu montrer à cet égard la communauté, étaient trop tardives pour tout réparer [Note : On en trouvera la trace dans les Extraits des délibérations de la Maison de ville, où ont été rapportés au fur et à mesure, les faits relatifs à la Confrérie des Trépassés].

Les contrats de fondation fournissent certains renseignements : par exemple, suivant les intentions des donateurs, les services se faisaient non seulement à Saint-Pierre et au Creisker, mais à la cathédrale et aux Carmes [Note : Fondation du 18 Décembre 1595, par demoiselle Françoise de Kerhoent, dame de la Villeneuve, douairière de Kerouazle, demeurant à Saint-Paul, paroisse de Notre-Dame (Archives Départementales)].

Voici, à titre de spécimen, un résumé des dispositions reproduites en beaucoup d’actes :

4 Mai 1592. — Ecuyer François de Kersauzon, et Marie de Kergadiou, sa femme, sieur et dame du Penhoat, demeurant à Saint-Frégan, trêve de Plousezny, payent à missire Alain Favé, gouverneur du Creisker et Abbé des Trépassés, demeurant dans la maison du gouvernement de N.-D. du Creisker, proche de cette dite église, paroisse du Crucifix, 20 écus d’or sol pour achat d’un écu sol de rente, pour l’entretenement et fondation que le dit Abbé fera célébrer par les suppôts de la frérie, à la cathédrale, au premier jeudi de Janvier chaque année, à savoir : un office et cinq messes, l’une à notes avec diacre et sous-diacre, pro defunctis, sur l’autel du Saint-Nom de Jésus, et les quatre autres à basse voix sur les prochains autels, où assisteront [les] cinq pauvres de ladite frérie, « garnis » chacun d’un cierge ardent, et qui auront, à l’issue l’aumône (de pain), à la mode accoutumée en la première institution d’icelle frérie [Note : Cf. avec ladite fondation de Kersauzon, celle du 16 Décembre 1585, de Guillaume Calvez, chanoine de Léon et recteur de Sibiril, au deuxième vendredi de chaque mois ; celle de Françoise Pertuis, épouse de Guillaume Quéméner, du 11 Octobre 1606 ; ladite Pertuis inhumée au Creisker, dans la troisième tombe, vers le Nord, du bout de l’autel des Saints Roch et Sébastien, etc. (Archives Départementales)] ; aumône de 5 sols, dit un règlement de 1756.

Les « grandes » fondations étaient celles qui constituaient une obligation périodique, par exemple d’un service par mois ; soit en tout, à raison de 3 livres 6 sols par service, 39 livres 12 sols.

Le nombre de cinq messes, quatre basses et une chantée, invariablement indiqué dans les fondations un peu importantes, devait correspondre au nombre, primitivement fixé à cinq, des suppôts de la frérie.

En ce qui concerne la perception des revenus, il est fréquemment déclaré qu’ils seront touchés à la Saint-Michel, « in monte Gargano ». Cette fête de l’apparition de Saint Michel au mont Gargan, se célèbre, comme on le sait, au 8 Mai.

LES ABBÉS ECCLÉSIASTIQUES. — Voici, avec les dates, ceux dont nous avons rencontré les noms :

Jean Kerahès, 1538-1552 ;

Guy de Kergoet, 1553-1554 ;

François de Parcevaux, chanoine, 1556 ;

Jehan de Kerguy, chanoine, recteur de Kersent, 1558-1562 ;

Hervé Morice, 1569-1576 ;

Alain Favé 1585 ;

Christophe Falhun, 1596-1600 ;

Yves Madec, vicaire du Crucifix-des-Champs, 1606-1607 ;

Christophe Falhun, 1610 [Note : Faisait partie de la Confrérie des Maîtres ès Arts de Lesneven] ;

Guillaume Léost, 1610-1637 ;

François Tréguier, chanoine, 1637-1640 ;

Hervé Le Milbeau, 1641-1644 ;

Claude Bervas, 1644-1650 ;

François de Kersaintgilly, sieur du Ménec, recteur de Cléder, 1650-1656 ;

Jean Daniel, sieur de Gouélétanénez, 1656-1659 ;

Hervé Prigent de Kersaintgilly, sieur de Meshellou, 1659-1662 ;

François du Châtel, sieur de Pratalédan, 1662-1665 ;

Vincent Hamon, chanoine et promoteur de Léon, 1665-1668 ;

Christophe Grall, 1668-1669 ;

Jean de Runarvot, 1669-1673.

On peut s’en tenir là. Avec ce dernier Abbé, se réalise un projet étudié dès 1629, et par lequel les habitants purent proposer à Mgr. de Rieux de moyenner l’établissement d’un collège, sans faire appel aux Pères Jésuites (Peyron).

Il s’agissait de réunir sur une même tête les deux charges et prébendes de scolastique et d'Abbé des Trépassés. Dans son Histoire d’un Collège breton, M. Le Grand dit n’avoir pu découvrir la date exacte de l’accomplissement de ce projet. Si la combinaison en question ne doit être fermement et couramment adoptée que plus tard, du moins elle se trouve réalisée une première fois, lorsqu'après la mort de missire Christophe Grall, fin Novembre 1669, on choisit comme Abbé des Trépassés, Jean de Runarvot, originaire de Plouider, licencié aux lois, naguère aumônier de l'Evêque d'Auxerre, et scolastique de Léon depuis le 1er Septembre 1668 (Délibération de la Maison de Ville, 12 Décembre 1669).

L'Evêque se réservait d’agréer la nomination faite par les habitants des Abbés de la Confrérie. Aussi assiste-t-il fréquemment aux séances où ces élections avaient lieu.

En Avril 1656, les choses ne se passent pas de façon aussi paisible que d’habitude. Les députés du Chapitre, missires Guillaume Crenn, vicaire général, et Guy de Kerscau, scolastique, ainsi qu’une partie des gentilshommes « voulant faire chacun leur corps à part et partager l’assistance en trois groupes », l’ensemble des habitants s’y oppose et refuse de délibérer.

Néanmoins, après une séance orageuse, est élu missire Jean Daniel, comme Abbé des Trépassés.

Mgr. Henri de Laval du Bois-Dauphin, alors évêque, décide d’intervenir et porte le règlement suivant brièvement résumé :

Pour les affaires temporelles de la Confrérie, les séances seront présidées par le Sénéchal ou le Bailli.

Pour le spirituel, en particulier pour la nomination des Abbés, on ne délibérera que sous la présidence de l'Evêque, ou à défaut, de son Grand Vicaire ou de l'Official ; et c’est aussi devant eux qu’aura à prêter serment l'Abbé choisi.

Pour ce qui est des suppôts, les prêtres originaires de la ville seront préférés aux autres du Minihy, ces derniers aux externes, et les plus anciens aux plus jeunes.

Quant à missire Jean Daniel, qui, ajoute l'Evêque, s’est depuis peu fait nommer Abbé, par des brigues et formes extraordinaires, nous déclarons son élection nulle, abusive, clandestine, comme obtenue par des moyens inacceptables et trahison de droit.

En fait, cependant, Monseigneur dut revenir aussitôt sur cette sentence, car nous trouvons missire Daniel en charge jusqu’en 1659.

LES SUPPOTS. - Chargés d’aider l'Abbé ecclésiastique dans la célébration des services et des messes, ils n’étaient d’abord que cinq. En 1656, il y en a six ; et une délibération des habitants, du 6 Octobre 1664, semblerait même indiquer que leur nombre est désormais de sept.

Une supplique collective, qu’ils adressent à Mgr. Henri de Laval, en 1656, exprime leurs plaintes : les vivres ont renchéri, mais leur salaire est demeuré tel qu’au début, c’est-à-dire modique, un sou et demi à chacun d’eux, par office. Cependant, les revenus de la Confrérie ont augmenté notablement. Tels offices, arrentés d’abord une cinquantaine de sols, le sont maintenant avec des sommes allant de 3 à 6 livres, produisant un total de 1.400 à 1.500 livres par an.

Or, font observer les suppôts, il suffit que là-dessus, l'Abbé prélève une quarantaine de sols par office, pour le paiement des chapelains, les cloches, les ornements, le pain, le vin, les cierges ; plus 9 sols à distribuer entre tous les suppôts (lui-même recevant une part de suppôt) [Note : On a vu accorder la chose à titre de faveur à missire Guillaume Léost, lorsque d'Abbé il redevint simple suppôt] ; cela fait, tout le reste revient au dit Abbé, qui se trouve ainsi bénéficier d’environ 300 livres par an.

En conséquence, les suppôts demandent à Monseigneur d’imposer à l'Abbé, en leur faveur, une rétribution double, soit 3 sols par office.

Ce qu’accorde l'Evêque, le 10 Septembre 1656.

Mais missire Daniel n’entend pas se rendre si vite. Peut-être aussi les suppôts réclament-ils plus que de raison. Car en 1660, un aréopage de conseillers anciens et actuels de la Confrérie évalue à 2 sous et demi seulement, par obit et service, ce qui devrait revenir à chaque suppôt.

Forts de cette appréciation, les suppôts donnent mission à missire Claude Bervas, l’un d’entre eux, de soutenir leurs prétentions à Rennes, devant les juges délégués de l'Archevêque de Tours, près de qui l’abbé Jean Daniel a fait appel de la sentence rendue contre lui à Saint-Paul de Léon.

Par un règlement ultérieur, on voit que les suppôts finissent par avoir gain de cause, en ce sens qu’ils touchent leurs 2 sous et demi par office.

Ajoutons, relativement aux suppôts, ce qu’en dit le gouverneur du Creisker, en 1671. Il prétendait que ses revenus (de 7 à 800 livres) étaient à peine le sixième de ceux de l'Abbé des Trépassés, dont le bénéfice eût ainsi été de 4 à 5.000 livres. Pour être exagéré, cela montre du moins combien était abondamment pourvue la Confrérie que nous étudions, où « 9 ou 10 prêtres ne suffisent pas », dit encore le gouverneur du Creisker (Archives Départementales, 8. G. 31).

RANG AUX PROCESSIONS. — Une autre affaire où paraissent encore les suppôts, est celle qui concerne leur rang dans les processions.

Devant le Chapitre assemblé le 15 Juin 1593, et où se trouvaient missires Guy de Kergoet, Prigent Le Moyne, François Coetelez, Guillaume Calvez, Guillaume Kerguz, Guillaume Trousson, Louis Le Jacobin, Prigent Le Ny, Auffroy Kerbic, tous chanoines, les Carmes remontrent que, par une louable coutume de toute immémoriale antiquité gardée, et, par plusieurs et réitérées fois rappelée par des décisions capitulaires, les Carmes auraient toujours été, dans les processions tant ordinaires qu’extraordinaires [Note : De par la coutume, les Carmes assistaient, convoqués ou non, aux processions générales ordinaires. Mais pour les processions extraordinaires, comme pour les prières publiques ou en action de grâces pour une victoire, ils attendaient la convocation que leur adressait l'Evêque (Archives Départementales, H. 224)], les plus proches immédiats des sieurs chanoines.

Néanmoins, plusieurs prêtres des églises de Notre-Dame de Creisquer et de Saint-Pierre, qui n’ont ni collège ni privilège, se sont, depuis deux ou trois ans, efforcés avec violence, par un grand et intolérable scandale, de priver les dits remontrants de leur possession, nommément le jour du sacre en la procession et conduite du Saint-Sacrement, où les dits prêtres, entre autres Mre. Pierre Richart, poussé par une animosité et haine particulière, aurait proféré des injures publiquement aux dits Religieux, au scandale des bonnes gens, et au mépris et étonnement des sieurs du Chapitre et contre leurs statuts et ordonnances.

Sur quoi, les chanoines, délibérant, décident une fois de plus que, dans les processions, les prêtres habitués de l’église Saint-Pierre et de la Confrérie des Trépassés suivront la croix de la cathédrale, et précéderont la croix des Religieux, qui demeureront les plus proches de la croix des dits sieurs Chanoines (Archives Départementales, H. 226).

INDULGENCES. — Le 13 Septembre 1688, le pape Innocent XI accorde aux associés de la Confrérie des Trépassés de Saint-Paul, desservie à la cathédrale, sur l’autel de Jésus, une indulgence plénière, le jour de leur entrée dans la Confrérie, à l’article de la mort, pour la Fête des Morts ; plus 7 ans et 7 quarantaines pour la visite de la dite église et du dit autel, à quatre jours déterminés par an, avec approbation de l'Ordinaire [Note : En 1713, les jours choisis sont : les fêtes du Saint Nom de Jésus, le 14 Janvier, de l'Annonciation, de saint Pierre et de saint Michel. Donné dans la ville de Léon, ce 2 Janvier 1713, F.-M. Le Jacobin de Keremprat, vicaire général (Pièce des Archives de la Cathédrale de Saint-Pol)] ; et 60 jours pour les diverses oeuvres de charité et de piété.

Pour terminer, nous ne saurions dire s’il y aurait à chercher une relation quelconque entre les coutumes des Confréries de Trépassés, et l’usage toujours en vigueur au début du XXème siècle, à Saint-Pol, par exemple, d’indiquer les agonies par le tintement d’une cloche de la cathédrale, ou, en sonnant les glas, de faire connaître, par leur plus ou moins grande solennité, la qualité du défunt, ou enfin de faire annoncer le décès par un des pauvres de l’hospice, homme ou femme suivant le cas, qui parcourt la ville armé d’une sonnette et s’arrête aux carrefours pour la traditionnelle proclamation : « On recommande à vos bonnes prières celui qui a été N., mort hier, et qui sera enterré demain à .. heures, au cimetière de Saint-Pierre. Dieu fasse miséricorde aux Trépassés ! ».

(Archives de l'Evêché).

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