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Troupes à la Lieue de Grève. — La peur de l'Anglais.— Hébergement des soldats. Patrouilles

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Pendant des années encore, la population de Saint-Nic connaîtra les réquisitions, sous une forme ou sous une autre. Le 28 Frimaire an IV, Guillaume Le Droff, devenu agent national, en remplacement de Hervé Latreille, et « membre de l'administration municipale du canton de Plomodiern », est tenu de faire exécuter la loi du 7 Thermidor, qui établit une contribution personnelle et une taxe somptuaire. Mais « n'ayant point les coinoisence nécésaire pour l'exécution de cette loi, je me suis arretté, dit-il, à nommer des commissaire dans chaque section de cette commune pour me rendre un état de toute les contribuables... ».

A partir de l'an IV, les Saint-Nicais subissent un genre de réquisition qu'ils ignoraient jusqu'ici : l'hospitalité à donner aux soldats qui surveillent la côte. La France était en guerre contre l'Angleterre et l'on craignait un débarquement de troupes anglaises sur nos côtes. Cette crainte n'était d'ailleurs pas vaine, puisqu'un essai de débarquement avait eu lieu à Saint-Cast, sur la côte Nord de la Bretagne.

Dès les premiers bruits de guerre, en 1792, les habitants de Saint-Nic demandaient déjà naïvement au Directoire du District « des éclaircissements sur les Anglais », ce qui suppose une certaine émotion.

Jusqu'à l'an IV, cependant, la surveillance et la défense n'avaient été assurées que par une demi-douzaine de douaniers. Mais le 14 Pluviose de l'an IV, « un poste de correspondance » est établi à la Lieue-de-Grève. C'est par là, nous l'avons dit, que passait la grande route de Brest à Quimper. A partir de ce moment, les courriers de Brest et de Quimper se croisent à Pentrez, à l'extrémité de la Grève, et là quelques soldats font un triage sommaire de la correspondance. Un sergent et cinq volontaires du régiment d'infanterie de marine, cantonné à Crozon, remplissent cet office. Le sergent a eu soin de passer à la « maison municipale demander un local pour loger son détachement à portée de la Lieu-de-Grève enfin (sic) de remplir plus exactement l'objet de service ».

Le sergent, chef du poste, devra noter l'heure de l'arrivée et du départ des estafettes de Lanvéoc et de Locronan. Il signalera celle qui n'aura pas fait la route dans le laps de temps jugé suffisant. De plus, il sera responsable des cinq volontaires qui sont sous ses ordres. Il fera des appels quotidiens et veillera bien à ce qu'il y ait au poste le nombre d'hommes requis à l'arrivée et au départ de la correspondance. Ceux qui refuseront de marcher ou manqueront au service commandé par le chef seront reconduits à Crozon et punis militairement, suivant la gravité des cas.

Dans les circonstances difficiles, le chef du poste fera appel à l'administration de la commune, que devra faire son possible pour lever les difficultés que pourraient contrarier le service.

Mais il faut ravitailler ces soldats, ou du moins leur donner les moyens de se ravitailler. L'agent national donne ordre à Guillaume Castric, de Kerninet, de se mettre lui-même et de mettre sa monture à la disposition du détachement pour le transport des vivres. Dans ce but, il devra tous les trois jours se rendre à Pentrez, dès 7 heures du matin.

Quant au logement, Guillaume Le Droff, agent national, y a pourvu. Il décide de prendre chez lui, à Lessirguy, deux des volontaires, et impose à ses voisins, Louis Lastennet et Guillaume Lezenven, de loger les quatre autres pendant huit jours.

Lessirguy n'est pas précisément « à portée de la Lieue-de-Grève ». Voilà pourquoi, sans doute, quatre jours plus tard, l'agent national requiert Hervé Latreille, de Keréon, de loger deux des militaires ; Jacques Paul, de Pentrez, logera le sergent, chef du détachement, et un volontaire, et Marie Broennec, veuve de Jean Le Roux, de Porzmoro, en hébergera deux autres, cela pendant un mois à partir du mercredi 21 Pluviose. Ils ne fourniront pas seulement le logement, mais encore « une place à feu, la chandelle, les légumes et du sel pour faire la soupe !... ».

La relève a lieu le 21 Ventose. Le sergent et les cinq soldats de l'infanterie de marine sont remplacés, par un sergent et quatre canonniers de la première compagnie d'artillerie de la Seine-Inférieure. « Le sergent de la marine remettra la consigne et donnera tous les éclaircissements du service du poste qu'il quitte au sergent de la Seine-Inférieure qui relève... ».

Les relèves se succèdent ainsi, de mois en mois, pendant longtemps, et les soldats continuent à loger chez l'habitant.

A partir de Pluviose an VII (1799), les postes sont renforcés et la surveillance de la côte devient plus active. Le 27 Pluviose, un caporal et onze chasseurs, reçoivent l'ordre de se rendre avec armes et bagages à Cameros « pour y faire le service jour et nuit ». Et l'agent national de Saint-Nic doit s'occuper de leur fournir le logement, dans les fermes environnantes.

Le 4 Germinal, le détachement est de 18 hommes, et le commandant du cantonnement de Pentrez écrit à l'agent national « Je vous requiert de faire fournir le logement pour 18 hommes dans les maisons les plus proches de la grève de votre commune, et tout de suite, et le tout sous votre responsabilité personnelle. J'espère de votre zèle, sur l'ordre du général que je vous envoie..., etc... ».

Vers la même époque, des colonnes mobiles passaient fréquemment dans le pays. Dans un Compte général de la situation morale et politique du canton de Plomodiern du 1er au 25 Messidor an VII, on lit (Archives départementales) : « Une colonne mobile a passé dernièrement. Elle s'est bien conduite ». Mais on ajoute qu'une maison de détention serait nécessaire. Dans le Compte général de la situation du mois suivant on dit : « On n'a eu jusqu'ici qu'à se louer de la conduite des colonnes mobiles qui ont circulé dans le canton ».

Ces documents donnent toutes sortes de renseignements. Celui de Messidor an VII dit :

« La bonté de l'esprit public résulte dans ce canton de ce que chacun y est réellement attaché à l'ordre de choses établi, c'est-à-dire à la Constitution et aux lois, et que personnes n'y voudraient y voir porter atteinte. Les derniers évènements de Paris, les revers momentanés de nos armées commençaient à donner des inquiétudes ; quand la cause en a été connue, toutes les inquietudes ont cessé.

L'instruction publique est nulle ici. Quimper est la commune où l'on fait instruire les enfants surtout pour le français.

Le canton continue à jouir de la plus parfait tranquillité. Cet ordre est particulièrement dû à l'absence.

Des ci-devant prêtres réfractaires. Personne ne les souffre, ils n'y sont pas seulement haïs, mais généralement voués à l'exécration publique.

Point de sonneries de cloches, depuis longtemps. Rien de relatif au culte ne transpire hors des édifices destinés à son exercice.

L'agriculture ne présente aucun changement utile. La récolte prochaine ne parait pas devoir être mauvaise ».

Les renseignements que fournit le Compte général du mois suivant sont à peu près les mêmes :

« L'esprit public continue à être bon. Les derniers, événemens politiques et militaires ne l'ont nullement altéré, témoin l'empressement des citoyens à acquérir des biens nationaux.

L'instruction publique est radicalement nulle.

La tranquillité publique n'a jamais été troublée dans ce canton. La sécurité y est parfaite. Point de turbulent politique. Aucun émigré, réfractaire ou déporté n'existe dans ce canton.

Les lois de la police des cultes sont exécutées rigoureusement. Depuis longtemps les cloches ne se font plus entendre, et tout ce qui est relatif au culte se renferme strictement dans l'intérieur des édifices.

L'agriculture continue sur le pied antique. Le froment est bon, mais renfermant beaucoup de carie. Le seigle est bon, l'orge médiocre, l'avoine mauvaise. Le blé noir vient d'être extrêmement battu par une tempête qui l'a brûlé en grande partie... » (Archives départementales).

Pendant tout ce temps-là, les détachements de soldats se succédaient à la Lieue-de-Grève. Le 26 Nivose an VIII, il est ordonné à un lieutenant de s'y rendre avec douze hommes, dont un sergent et deux caporaux.

Deux mois plus tard, on recommande au chef de « surveiller particulièrement le service des ordonnances et les étrangers dont il vérifiera les passeports ».

Toutes ces allées et venues de troupes causaient, à coup sûr, de l'émotion dans le pays. L'Anglais était l'ennemi héréditaire, l'ennemi de toujours. On en parlait aux veillées, comme d'un être terrible et cruel. Personne à Saint-Nic n'ignorait qu'il était déjà venu autrefois. Là-bas, sur la frontière d'Argol, n'y avait-il pas un lieu, Toul-Koad-Anken, le Trou du Bois de l'Angoisse, pour, en garder encore le souvenir ? Ar Saozon s'étaient arrêtés là. Ne reviendraient-ils pas bientôt ? Les Saint-Nicais en avaient bien peur, puisque déjà, en 1792, ils demandaient des renseignements sur eux. Et les patrouilles incessantes de nos soldats n'étaient pas faites pour diminuer leurs craintes.

Les Anglais revinrent en effet, mais pas comme se les représentait l'imagination populaire. Ceux que virent nos grands-pères étaient des prisonniers, pris sur quelque navire, et on les conduisait de Crozon à Locronan. Quelques cultivateurs des environs de Pentrez furent invités à fournir huit chevaux bâtés, pour le transport de ces prisonniers anglais de Pentrez, à Locronan.

A partir du 1er Germinal de l'an VIII, la surveillance se fit encore plus étroite et plus assidue. Un renfort de 11 chasseurs et deux caporaux vint cantonner à Pentrez. Le rivage était bien gardé. De jour, si l'ennemi survenait on le verrait de loin. Mais la nuit c'était plus dangereux. Il pouvait facilement, à l'improviste, débarquer dans quelque crique, sans être vu. C'est pourquoi, il était bien recommandé à l'officier commandant le détachement, de surveiller strictement cette partie de la côte, tout particulièrement la nuit, et à cet effet, de faire faire de fréquentes patrouilles.

Peu après, les onze chasseurs furent relevés par un détachement de 20 soldats qui, avec armes et bagages, devaient rester cantonnés à la Lieue-de-Grève jusqu'à nouvel ordre.

Il faut croire que la population eut parfois à se plaindre de ces bandes peu disciplinées, car le 12 Floréal, le commandant reçut l'ordre de tenir sa troupe en bonne discipline militaire et de faire respecter les personnes et les propriétés.

Pendant les dernières années de la Révolution, à part les réquisitions nécessaires pour le transport ou l'approvisionnement des troupes de la côte, les cultivateurs furent laissés à peu près tranquilles. Quelquefois, cependant, ils se voyaient réquisitionner fourrages et avoine, pour le camp de Quélern, et ils étaient obligés de les livrer à très bas prix : 7 francs 70 centimes le quintal d'avoine, 18 francs le millier de paille le 23 Fructidor de l'an VIII.

Le conseil municipal avait eu pour mission, tout au long de la Révolution, de désigner les hommes soumis au recrutement de l'Armée. Il continue cet office jusqu'en 1803. Le 5 Thermidor de cette année, il désigne 15 jeunes gens pour devenir canonniers garde-côtes : Guilaume Le Droff, Jean Le Quéré, Mathieu Bideau, Jean Queffélec, Pierre Thomas, Hervé Parcheminou, Jean Moulinec, Alain Lagadec, Germain Ménez, Nicaise Le Roy, Thomas Mignon, Corentin Péton, Hervé Caradec, Jean Gourlay et Joseph Bauguion.

Le lendemain, il s'aperçoit que Jean Quéré et Thomas Mignon n'ont pas l'âge requis. Pour les remplacer, il désigne Jean Le Droff, de Saint-Côme, et Thomas Moguen, de Kerninet.

La Révolution est finie. Mais son oeuvre demeure en partie, ses ruines aussi. Et de nombreuses années s'écouleront avant que ne soit relevé ce qu'elle a détruit...

(Abbé Corentin Parcheminou).

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