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Création de deux compagnies de gardes-nationaux. Volontaires. — Perception des impôts. Contrainte. — Protestations.

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Dans l'anarchie qui avait suivi la prise de la Bastille, l'armée et la police avaient disparu. Pour les remplacer, il fallut créer des gardes-nationales. A Saint-Nic, on attendit le 19 Août 1792 pour songer à cette organisation. Une compagnie de grenadiers et une compagnie de chasseurs devaient former la garde-nationale de la commune.

Donc, le 19 Août 1792, à une heure de l'après-midi, le maire et les officiers municipaux se rendirent « à la chapelle de Saint-Yves, située au bourg paroissial de Plomodiern [Note : Il ne reste plus de trace de cette chapelle. Elle s'élevait près de l'endroit où se trouve le cimetière actuel], chef-lieu du canton », et c'est là qu'ils choisirent les hommes qui feraient partie de la garde-nationale. On commença par donner lecture de la liste des citoyens destinés à composer la compagnie des grenadiers, puis on procéda au scrutin pour l'élection des officiers à donner à la compagnie.

Pierre Larour, de Brénalen, réunit le plus de suffrages et fut en conséquence proclamé, quoiqu'absent, capitaine des grenadiers.

Guillaume Le Droff, de Lessirguy, fut élu lieutenant et proclamé tel, bien qu'il arguât de son titre de greffier de la municipalité, c'est-à-dire secrétaire de mairie, pour essayer de repousser les galons.

Un troisième scrutin élut comme sous-lieutenants : Pierre Bideau, de Landévadé, et Etienne Le Droff, du Petit-Launay.

Par un quatrième vote, Louis Lastennet, de Lessirguy, et Corentin Le Bris, de Coatérel, furent proclamés sergents. Ils acceptèrent.

Enfin, un cinquième scrutin désigna quatre caporaux : Yves Le Breton, de Brégalor ; Guillaume Le Gannat, de Lessirguy ; Thomas Join, de Quellien, et Henry Join, de Gorréker-Penc'hoat. Ils acceptèrent, à l'exception de Guillaume Gannat, peu flatté sans doute de n'être que caporal, alors qu'il était procureur de la commune.

Après lecture de la liste des citoyens qui feraient partie de la compagnie de chasseurs, on procéda, toujours par voie de scrutin, à la nomination des officiers de la compagnie.

Le maire, Hervé Guéguéniat, de Penanvoez, se vit élire capitaine. Mais il s'empressa de déclarer qu'il ne pouvait accepter, « attendu que la loi déclare incompatibles les fonctions de maire et celles d'officier de la garde-nationale ».

Jacques Piclet, de Ruyen, élu lieutenant, déclara également ne pouvoir accepter, étant officier municipal.

Des deux sous-lieutenants, Corentin Le Roy, de Pen-ar-C'hréac'h, et Corentin Queffelec, de Créac'h-Milin, le premier refusa, « attendu qu'il est officier municipal », et l'autre était absent.

Au quatrième tour de scrutin, Alain Le Droff, de Lescorvo, et Jean Horellou, du moulin de Brénalen, furent proclamés sergents et acceptèrent.

Enfin, furent élus caporaux : Pierre Le Bris, de Stanquélen ; Guillaume Thomas, du Grand-Launay ; Guillaume Hascoët, de Penanvoez, et Hervé Lastennet, de Gorré-Leuré.

***

La guerre avait été déclarée en Avril, et il fallut faire appel aux volontaires. Quatre Saint-Nicais se présentèrent : Hervé Passéménou (forme populaire de Parcheminou), de Stanquélen ; Jean Quinaou, du Bourg ; Corentin Passéménou, de Penanvoez, et Yves Lastennet, de Penanvoez. Ils s'offraient pour server comme volontaires, sur les batteries de Quélern ou de Cornouaille, conformément à l'arrêté du département du Finistère du 5 Août 1792 et à l'arrêté du district de Chateaulin du 14 Août. Le Conseil municipal « donne ordre aux quatre volontaires ci-devant dénommés de notre commune de se rendre à Chateaulin, chef-lieu du district, jeudi prochain vingt-trois du présent mois d'Août, à dix heures du matin, et pour se rendre le lendemain à Quimper, où ils seront organisés par des commissaires du département, d'où ils passeront à Quélern et environ. Nous avons observé à noz volontaires que le logement leur sera fourni et qu'ils seront payés à raison de quinze sols par jour à compter du jour du rassemblement ; et que le service sur les Batteries ne sera que de trois mois pour ceux qui ne voudront servir plus longtemps, et, à la fin de chaque trimestre, les gardes nationales qui désireront retourner dans leurs foyers seront remplacés par un nombre égal pris dans les communes qui auront fourni les volontaires qui réclameront leur retour... ».

Ce serait une erreur de croire que c'est par pur patriotisme que s'enrôlent ces volontaires. Ce sont de pauvres gens et la vie devient difficile. L'émission des assignats jusqu'à l'inflation a commencé ses ravages. Les denrées les plus indispensables sont rares et chères. Sans doute, les récoltes de 1789 et 1790 ont été bonnes, mais celle de 1791 a été mauvaise. Et c'est pour parer à ces inconvénients que nos quatre volontaires cherchent une situation moins misérable. Ils seront payés 15 sols par jour. C'est un salaire qui peut paraître magnifique, si l'on considère qu'en 1914, à Saint-Nic, les journaliers agricoles ne recevaient pas davantage et que certains ouvriers touchaient moins encore, mais il ne faut pas oublier qu'en 1792 les paiements se font en assignats, et qu'étant donné leur dépréciation rapide, ces quinze sols se réduisent en fait à peu de chose.

***

La vie devient difficile, et la preuve en est que les impôts ne rentrent plus ou ne rentrent que péniblement. En Avril 1792, il faut une contrainte présentée au Conseil municipal par le gendarme chargé par le receveur du district d'accélérer la perception des contributions foncière et mobilière pour que les officiers municipaux lèvent la somme de 1.444 livres, 19 sols. Et encore cette somme ne représente-t-elle que le quart des contributions dûes pour l'année 1791.

En Mai, Pierre Laouénan, de Porz-Carzic, est nommé collecteur « pour recevoir le dernier terme de la contribution du don patriotique ». Le même jour, afin de faciliter la réforme de la contribution foncière, les officiers municipaux font l'évaluation du territoire de la commune, « suivant le prix qu'ils trouvent le plus convenable ». Ils estiment « la terre chaude 6 livres le journal, la terre grise 4 livres, la terre froide la meilleure 15 sols, la terre froide mauvaise 7 sols 6 deniers, les prés fauchables les meilleurs 6 livres, les prés fauchables mauvais 4 livres, les meilleurs bois taillis 6 livres, les bois taillis mauvais 4 livres, les prateaux sauvages 7 sols 6 deniers ».

En Juin, la perception des contributions foncière et mobilière et des patentes est mise aux enchères trois dimanches de suite, au sortir de la messe, sur la place publique. Le premier dimanche on offre 6 deniers par livre. C'est sans succès, personne ne se présente. Le second dimanche, on offre 9 deniers, toujours sans succès. Le troisième dimanche, on offre 12 deniers par livre. C'est en vain. Personne ne veut se charger de la collecte, peut-être parce que le prix n'est pas assez élevé, plutôt afin de ne pas entendre les doléances et les jérémiades de tous ceux qui se croient trop imposés, c'est-à-dire de la population tout entière. Et les officiers municipaux sont obligés de se charger eux-mêmes de la perception. Le procureur de la commune, Guillaume Le Gannat, de Lessirguy, fera la section du Gorré ; Pierre Bideau, de Landévadé, fera la section du Deochmeur (partie Sud de la commune) ; Jacques Piclet, de Ruyen, se chargera de la section du Leuré, et Guillaume Cornec, de Créac'h-Milin, de la section de Penc'hoat. Ils sont déclarés « responsables solidairement l'un pour l'autre ».

Il semble bien qu'ils ne furent pas bien reçus partout et qu'ils entendirent maintes récriminations pendant leur tournée. De maison en maison, c'est la même plainte : vie chère, mauvaise récolte de l'année précédente, impôts trop lourds. Peut-être les met-on eux-mêmes en cause et les rend-on responsables du taux élevé des contributions qui pèsent sur leurs administrés.

C'est pourquoi, le 8 Juillet, a lieu à la sacristie une réunion extraordinaire de protestation. Au Conseil municipal sont venus se joindre les douze notables qui forment le Conseil général de la commune : Corentin Le Bris, de Coatérel ; Hervé Le Droff, du Petit-Launay ; Jean Le Droff, de Lescorvo ; Jean Le Bris, de Stanquélen ; Jean Calvez, de Penanvoez ; Jean Le Roux, de Porz-Moro ; Jean Nicol, de Kervengar ; Alain Le Goff ; Jacques Paul, de Pentrez ; Jean. Latreille, de Porz-Quentric ; Jean Piriou, de Costéker-Penc'hoat, et Nicaise Le Breton, de Brégalor.

Considérant que la contribution foncière de la commune monte à 4.118 livres 2 sols et la contribution mobilière à 1.661 livres 14 sols, ils trouvent que les « dites sommes sont extréordinairement trop fors à supporter sur les contribuables de notre communauté (sic) ». Et ils ajoutent : « Nous avons commis et commettons Guillaume Le Droff, de Lessirguy ; Pierre Larour, de Brénalen ; Hervé Latreille, de Keréon, et Corentin Didailler, de Costéker-Penc'hoat, auxquels nous donnons pouvoir et procuration de prendre les moyens nécessaires à faire une requette pour remettre à Messieurs les Administrateurs du Directoire du département pour demander réduction sur les contributions tant foncière que nobiliaire desquelles nous sommes trop imposés ».

Sous l'Ancien Régime, les protestations et les plaintes réussissaient quelquefois. « On harcelait l'intendant de réclamations et de plaintes, dit Gaxotte (Histoire de la Révolution française) ; on faisait intercéder le seigneur, le juge et le curé. On gémissait, on criait, on protestait sans arrêt, et c'était à qui gémirait, crierait et protesterait le plus fort et le plus longtemps. En nombre d'endroits, les paysans avaient obtenu des arrangements qui réduisaient considérablement les anciens taux ». Mais en 1792, ce sont là des façons de faire qui ne réussissent plus. Et la demande d'exonération d'impôts, des contribuables de Saint-Nic demeura sans réponse.

Quelques-uns ne se laissèrent pas déconcerter par cette fin de non recevoir, et le 10 Août, tandis qu'à Paris on détrônait le Roi, Hervé Latreille, de Keréon, et Sulliau Colin, du moulin du Rible, demandent de nouveau un dégrèvement d'impôts.

N'ayant rien obtenu, ils reviennent à la charge le 11 Décembre. Le Conseil municipal se réunit pour délibérer sur la requête qu'ils ont présentée à « Messieurs du district de Chateaulin ». Après examen, les officiers municipaux reconnaissent qu'en effet, Latreille et Colin sont trop imposés, mais qu'ils n'y peuvent rien. En effet, l'évaluation de la commune ne s'élève qu'à 7.979 livres. Or, la part d'impôt de la commune est de 4.118 livres 2 sols pour la seule contribution foncière. De sorte que l'impôt pour tous les contribuables de Saint-Nic est de 10 sols 4 deniers par livre d'évaluation. Ce qui signifie que chaque cultivateur était contraint de donner chaque année à l'Etat plus de la moitié de la valeur de ses terres ! Il faut faire remarquer, cependant, que lors de l'évaluation des terres, nos paysans prévoyants les estimèrent prudemment à un prix notoirement inférieur à leur valeur réelle. Ce tour leur permit d'être moins grugés. Le Conseil constate que Colin et Latreille sont imposés comme les autres, ni plus ni moins ; ils n'ont donc pas plus de raison de se plaindre que les autres.

Pour ce qui est de la contribution mobilière, le Conseil fait remarquer à Latreille que si en 1790 la commune n'était taxée qu'à 835 livres, en 1791 elle l'était à 1.661 livres 14 sols 1 denier, c'est-à-dire le double. Or, il se trouve que par hasard la taxe de Latreille n'a pas été augmentée aussi fortement que celle de la plupart. Alors, de quoi se plaint-il ? Pour un peu, au lieu du dégrèvement qu'il réclame, on lui imposerait une augmentation ! « Messieurs, nous vous laissons à juger comme, vous serez à propos. Pour nous, nous ne pouvons leurs accordée aucune dégrèvement moyenant dans donnée à tous les autres contribuables parceque tous les autres sont imposés plus que eux. S'il est juste à Latreille et à Colin d'avoir une dégrèvement, tous les autres sont plus fondé d'envoir aussi... ».

Et l'affaire n'eut pas d'autres suites. Latreille et Colin durent se contenter de faire comme tout le monde : rechigner en silence et maudire l'Etat qui les ruinait.

(Abbé Corentin Parcheminou).

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