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LES DERNIERES ANNEES DE SAINT JACUT.

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Les disciples de saint Jacut se multiplient. — Description et rôle d'un monastère breton aux Vème et VIème siècles. — La règle des moines irlandais et les austérités de saint Jacut. — Il sauve miraculeusement des naufragés. — Son frère Guethenoc s'éloigne de Landoac. — Un mot sur les relations de saint Jacut avec sa famille et les principaux chefs bretons. — Mort de saint Jacut.

[Note : Auteurs consultés ; Bibliothèque Nationale : Manuscrits latins 5296 et 12780. — La Borderie, Histoire de Bretagne, tome premier. Anciens Evêchés de Bretagne, tomes premier et quatrième].

Les vénérables hagiographes dont nous suivons les récits sont unanimes à déclarer que la « renommée de saint Jacut et de son frère s'étant étendue au loin, le nombre de leurs disciples s'accrut en peu de temps d'une façon considérable ».

Ces lignes demandent explication : Quoiqu'aucun de ces auteurs n'en dise mot, il nous paraît probable que le courant d'émigration qui se poursuivit durant plus d'un siècle, de Grande-Bretagne en Armorique, dut contribuer à grossir l'humble monastère de Jacut.

Nous lisons en effet dans les relations de ce temps que des barques chargées de moines, de soldats, de femmes, d'enfants, abordaient sans cesse, tantôt sur un point, tantôt sur l'autre de la côte de Domnonée. Un de ces groupes débarqua sans doute à Landoac et tandis que l'élément laïque se joignait à la population qui se groupait déjà aux environs du lann fondé par Jacut, l'élément religieux fournissait à la communauté naissante de nouvelles recrues.

Bien que nous ne sachions pas d'une façon positive l'endroit précis où saint Jacut avait établi son monastère, tout porte à croire cependant que l'abbaye actuelle de Saint-Jacut occupe l'emplacement de ce moutier primitif. Par son isolement du monde, ce site est en effet merveilleusement approprié à la vie monacale, en même temps que le repli de terrain où sont construits les bâtiments d'habitation offre un abri précieux contre les vents du large.

Nous pouvons nous faire une idée de ce qu'était la première abbaye de Landoac par la description (La Borderie. Histoire de Bretagne, tome I, pages 327, 363 et 509) que les vieux auteurs nous ont laissée des fondations de ce genre. On sait que les anciens monastères bretons n'étaient qu'une réunion de cellules ou plutôt de logettes occupant un assez vaste espace, grâce au soin qu'on mettait à les isoler les unes des autres. Ce fut seulement plus tard que les religieux habitèrent ensemble le même édifice sous la surveillance immédiate d'un supérieur. Aux premiers temps, l'abbé se contentait d'avoir sa cellule un peu en arrière des autres et autant que possible sur une petite éminence, de façon à pouvoir embrasser d'un coup d'oeil toute sa communauté.

Il existe encore, à l'embouchure du Trieux, dans une petite île appelée Enès-Maudès, un spécimen authentique de cette façon de disposer les choses. Au VIème siècle de notre ère, Maudez, l'un des saints les plus populaires de notre Bretagne-Armorique, avait, en effet, construit sur ce rocher sauvage un petit monastère : or, par un heureux hasard, deux des cellules de ce « lann » antique ont subsisté jusqu'à nos jours. Une d'elles demeure encore entière ; on la connaît dans le pays sous le nom de Four de Saint-Maudez. Elle affecte, en effet, une forme circulaire et mesure environ 3 m. 20 d'élévation, sans compter la voûte en forme de cône tronqué qui lui sert de toiture. Les murs ont 75 centimètres d'épaisseur ; ils ne présentent qu'une seule ouverture de la hauteur d'un homme, placée à un mètre cinquante du sol et à laquelle on accède par un escalier. D'après la situation de cet édifice, M. de La Borderie est persuadé que c'était la cellule de l'abbé.

Rien, semble-t-il, ne nous empêche de croire qu'à Landoac les cellules monastiques étaient bâties dans le genre de celle que nous venons de décrire. Peut-être cependant, dans leur construction, le bois, voire même les branches d'arbres entrelacées remplaçaient-ils la pierre, ainsi que cela arrivait fréquemment. En tous cas, au centre de la communauté se dressait un bâtiment mieux bâti et plus considérable que les autres, c'était l'église. D'après une tradition plusieurs fois séculaire, et dont se sont fait l'écho les vieux bréviaires de l'abbaye [Note : Ejus Corpus in ecclesia sui monasterii quae tunc in Beatae Mariae Virginis honorem dedicata erat, sépultum fuit, Lectionarium Dolense Lect. VI], aussi bien que Dom Noël Mars qui avait pu compulser des archives aujourd'hui détruites, saint Jacut avait dédié à la Reine du Ciel le temple qu'il avait élevé au Sauveur à Landoac. C'était également sous le vocable de la Bienheureuse Vierge qu'il avait placé son monastère. Ce ne fut que plus tard que l'usage substitua dans l'appellation de l'abbaye le nom du saint fondateur à celui de la Vierge Marie. Remarquons en passant que si la chose était absolument hors de conteste, ce serait un grand honneur pour la paroisse de Saint-Jacut d'avoir été l'une des localités de la Bretagne les plus anciennement placées sous le glorieux patronage de Notre-Dame.

Mais un monastère qui ne comprendrait que des cellules et une église ne serait point complet : à côté de l'église, quelques bâtiments à un seul étage servaient de réfectoire, de magasins et de cuisine ; puis un peu au-delà des logettes des moines se trouvaient les ateliers, les granges et les étables. Tout cet ensemble, dit M. de La Borderie, formait un assez grand village aux alignements irréguliers sans doute, mais rempli d'animation et d'activité. Nous croyons, en effet, l'avoir dit par ailleurs, l'existence des moines n'était pas seulement consacrée à la méditation et à la prière. Si grands que fussent dans cet ordre de choses, les services qu'ils rendissent autrefois comme maintenant à la société en faisant descendre sur la terre la rosée des bénédictions divines, le travail manuel faisait aussi partie intégrante de leur règle. Leurs saints fondateurs n'avaient eu garde de négliger ce précieux instrument de pénitence et de mortification mis par la Providence à la portée de tous les hommes.

Aussi, durant que les plus habiles d'entre eux s'adonnaient dans les divers ateliers du monastère aux arts mécaniques et formaient autour d'eux une pléïade d'excellents ouvriers, d'autres attaquaient avec énergie un sol depuis longtemps improductif et chaque année voyait couronner leur efforts par la mise en rapport de nouveaux arpents. C'est ainsi que d'anciennes (Brev. Maclov. ann. 1537, folio 196) relations nous montrent saint Lunaire s'attachant avec une vigueur inlassable à faire produire d'abondantes moissons à une terre jusqu'alors couverte de broussailles et de halliers, dont les bois de Pontual sont aujourd'hui les derniers restes. Vers les mêmes temps, saint Thuriau, nous dit son biographe (Vita S. Teliaw, apud L. Landav, p. 104), plantait de ses propres mains, depuis Dol jusqu'à Crai, c'est-à-dire sur une longueur de près de trois milles, une véritable forêt d'arbres fruitiers, dont les pommiers qui peuplent maintenant les environs de Dol, continuent sans doute la descendance. D'ailleurs, c'est à nos vieux moines d'Armorique que nous devons d'avoir mis dans nos pays le cidre en usage. Nous lisons, en effet, en termes formels dans l'extrait de la vie de saint Gwennolé rapporté par D. Morice, au tome premier de ses Mémoires (Morice, Preuves I 227) « que ses moines employaient pour leur usage habituel une boisson tirée du jus de la pomme, qu'ils coupaient avec de l'eau », boisson assez peu en vogue jusqu'alors et, paraît-il, délaissée par les Bretons qui lui préféraient de beaucoup l'hydromel ou la cervoise et surtout le vin quand ils pouvaient s'en procurer [Note : Il est évident que nous ne mentionnons ici qu'une bien faible partie des services que rendirent autrefois les moines à la société ; services si considérables dans l'ordre matériel que les historiens les moins suspects de tendresse pour le catholicisme se sont plu à leur rendre hommage. Quant aux services que le monachisme breton a rendus à notre pays dans l'ordre moral, ils sont inappréciables : « C'est parce que les évêques et les moines ont dès l'origine gravé profondément dans l'âme de la nation bretonne l'idéal chrétien sous toutes ses formes, le signe divin de la foi, que depuis quatorze siècles, tant de Révolutions ont passé sur elle sans pouvoir effacer de son front cette empreinte sacrée ». (Ed. Biré, Univers, 17 avril 1900)].

Serait-il téméraire de supposer que saint Gwennolé, en bon frère, fit part un jour ou l'autre à saint Jacut du secret de cette rafraîchissante boisson et que les moines de Landoac usèrent à leur tour de ce breuvage, que les Bretons d'aujourd'hui s'accordent à trouver délectable ? Heureux encore si quelques-uns d'entre eux, par fragilité plutôt que par malice, ne transformaient pas en instrument de péché, ce qui n'était pour les pauvres moines de ce temps qu'un nouveau moyen d'ajouter à leurs pénitences.

Nous venons de dire que les religieux bretons usaient du cidre comme d'un instrument de pénitence ; leur règle était en effet fort sévère et leur vie très mortifiée ; cependant saint Jacut et saint Guethenoc, comme disciples de saint Budoc, devaient encore pratiquer des austérités toutes spéciales. Saint Budoc, en effet, s'inspirait dans sa direction de la règle des moines Irlandais, laquelle se distinguait des autres par son caractère énergique et son austère rigueur (Dom Gougaud : Les Chrétientés Celtiques, page 96).

L'obéissance, la pauvreté et la chasteté formaient alors comme maintenant le fond de cette vie monastique ; mais la mortification corporelle et la prière y occupaient une place qui depuis n'a jamais été dépassée. Ecoutons quel genre d'existence menait saint Gwennolé, frère de saint Jacut :

« Son vêtement n'était ni de laine, ni de lin, mais de peaux de chèvres. Son lit n'était ni de plume, ni de draps moëlleux ou de paille, mais c'était une jonchée de très dure écorce d'arbre. Son siège était de sable mouvant mêlé à de petits cailloux.

Le pain, dont chaque jour il mangeait la même quantité, soigneusement pesée, était d'orge mêlée de cendres. Sa nourriture était composée d'un peu de farine d'orge et de légumes. Les samedis et les dimanches, il mangeait du poisson et du fromage. Pendant le temps du Carême, il ne mangeait que deux fois par semaine. Il repoussait comme un poison le vin et toute boisson enivrante » (Vie de saint Gwennolé, traduction de Ch. de Barthélemy, page 453. dans Annales Hagiologiques de France).

Si nous en croyons ce que les offices de saint Jacut racontent des rigueurs [Note : Voici une traduction de ces passages que nous empruntons à la Vie des Saints de Bretagne, de Garaby, page 79, lequel s'est inspiré des leçons de l'office de saint Jacut extrait du Bréviaire de Dol. « Jagu passait alors une grande partie de la nuit à méditer la loi du Seigneur et à chanter ses louanges... Il ne buvait que de l'eau. Sa nourriture était un pain grossier et des légumes. La terre lui servait de lit, un caillou de coussin. Ses vêtements étaient les mêmes que ceux du peuple »] que celui-ci pratiquait à Lavré dès sa jeunesse, rien n'empêche de penser que le genre de vie de son frère Gwennolé ne fut aussi le sien. D'autant mieux, qu'élevés à la même école, ils devaient tous deux s'inspirer des mêmes principes, dévorés qu'ils étaient par le même zèle. Aussi l'abbaye de Landoac vit-elle s'accomplir sous la direction de Jacut les merveilles de mortifications et de pénitence dont le cartulaire de Landevennec nous a conservé le souvenir.

L'exemple de saint Jacut, comme une prédication vivante, n'était-il pas là pour animer ses disciples ! Vêtu, selon l'usage du temps, d'une cuculle de peau de chèvre, dont les poils rougeâtres étaient tournés en dehors, les cheveux coupés ras jusqu'au milieu du crâne, conformément aux règles de la tonsure celtique, le visage couvert d'une longue barbe qui ne connaissait pas le fer du ciseau, Jacut partageait lui-même le travail de ses moines. Providence en même temps du pays d'alentour, son influence s'étendait chaque jour davantage et le champ d'action de ses bienfaits et de ses miracles, comme s'il eût été trop à l'étroit sur la terre ferme, s'exerçait même parfois sur les flots.

C'est ainsi que les historiographes de saint Jacut sont unanimes à raconter un miracle dû à son intervention ainsi qu'a celle de son frère Guethenoc et très propre à rendre cher à nos populations maritimes le culte de ces deux saints :

« Un jour donc que la tempête faisait rage et que de malheureux nautoniers (peut-être étaient-ce des pêcheurs de Landoac) se débattaient vainement contre une mort imminente, il leur vint à la pensée — connaissant la sainteté de Jacut et de son frère — d'invoquer le secours de ces deux serviteurs de Dieu. Or, chose merveilleuse, voici qu'au même instant les deux frères apparaissent soudain, l'un à la proue, l'autre à la poupe de la barque, ils rassurent de quelques mots les matelots glacés d'effroi et conduisent miraculeusement leur bateau à bon port » [Note : Nous devons à la vérité de dire qu'un miracle à peu près semblable se trouve aussi raconté dans la vie de saint Gwennolé écrite par le moine Wrdisten].

C'est sans doute après ce dernier miracle qu'il faut placer la séparation de Jacut et de son frère. Il est vrai que le manuscrit 5296 n'en souffle pas un mot ; mais son auteur n'a jamais, je pense, entendu composer une histoire au sens précis de ce terme. De plus, l'on peut remarquer que ce bon moine abrège brusquement la fin de son récit et se met tout à coup à nous entretenir des miracles obtetenus après leur mort, grâce à l'intercession de Jacut et de Guethenoc, sans nous avoir parlé à l'avance du trépas de ces saints personnages. Nous nous en tiendrons donc ici à la tradition constante de l'abbaye de Saint-Jacut, laquelle a toujours rapporté que, vers la fin de sa vie et pour une cause demeurée inconnue, peut-être en raison du grand nombre de moines qui vivaient à Landoac, Guethenoc se sépara de son frère Jacut et s'en fut vers d'autres contrées chercher à son activité un nouveau champ d'action.

La chose en soi n'a rien qui puisse étonner, car ces sortes de pérégrinations rentraient dans les habitudes et le goût des moines bretons ; ce que nous savons moins, c'est le lieu vers lequel Guethenoc dirigea ses pas. A ce propos, l'on a cité les paroisses actuelles de Langueux et de Trégueux et l'on croyait pouvoir justifier ce sentiment par des raisons d'étymologie. Mais M. de la Borderie, au nom de cette même étymologie, s'est élevé contre cette manière de voir et son opinion a prévalu. D'autres avaient prétendu naguère identifier saint Guethenoc avec saint Idunet, qui vivait solitaire sur une montagne près de Châteaulin, du temps de saint Gwennolé. Mais, bien que le cartulaire de Landevennec appelle saint Idunet « le frère de saint Gwennolé » — les progrès de la linguistique empêchent de confondre Ediunet, — telle est en effet la forme la plus ancienne de ce nom, — avec St-Guethenoc ou Guethnoc, car l'on trouve aussi ces deux formes, de même que celles de Weithnoc et de Guezenoc ... Quoi qu'il en soit de ces discussions insolubles, saint Guethenoc est honoré [Note : On retrouve le nom de Guethenoc, écrit M. Loth dans ses Noms des saints bretons, page 55, dans le nom de Lan-Guezenoc, en Pleyben. C'est saint Guethenoc aussi que l'on honore sous le nom de saint Venec dans une petite chapelle près de Quemeneven, ainsi que dans une autre sise à Briec, toutes les deux dans le diocèse de Quimper. — Les Nouveaux Editeurs de la Vie des Saints d'Albert le Grand disent que c'est Guethenoc qui, sous le nom de Cadwan, est le patron de la paroisse de Poullan. Le comte de Laigue ajoute que ce Cadwan fut prêtre et martyr. — A ce propos, nons rappelons pour mémoire, que M. J. Loth écrit quelque part que sainte Gwen, honorée en Elli, dans l'ile de Bardsey (iles Britanniques), fut mère de Guethenoc, lequel, en qualité de guerrier, fut surnommé Cadwan « homme qui combat ». Peut être ce surnom se rattache-t-il un épisode inconnu de la fin de la vie de Guethenoc. A ces époques troublées, il n'était pas rare de voir des prêtres et des moines se mettre à la tête de leurs fidèles pour repousser l'envahisseur] de nos jours encore dans plusieurs paroisses du diocèse de Quimper, et dans un endroit saint Jacut partage avec lui cet avantage.

Saint Jacut, demeuré seul à Landoac, continua d'y mener une vie toute pleine de mérites et de bonnes œuvres. Il semble aussi que certains membres de sa famille, tout au moins sa mère, vinrent l'y retrouver. Plusieurs souvenirs du séjour de cette Bienheureuse dans notre pays, paraissent en effet, avoir subsisté jusqu'à la Révolution Française. Sans parler du culte que la paroisse de Saint-Cast rend à sainte Blanche de temps immémorial, nous avons trouvé de vieux (Archives des Côtes-d'Armor E 333 : Etat des communs de Ploubalay, du 16 juin 1691, et Registres paroissiaux de Ploubalay à la date du 19 février 1701) titres du XVIIème siècle qui appelaient « rivière de la Roche ou de Sainte-Blanche », le minuscule cours d'eau qui se jette entre Ploubalay et Lancieux. Un acte de décès, relevé par M. du Guerny sur les anciens registres paroissiaux de Ploubalay, cite un gentilhomme du nom de la Boüexière qui fut trouvé noyé dans le ruisseau qui passe devant les salines « dites de Sainte-Blanche ». Or ces salines occupaient naguère l'emplacement des vastes marais, enclos maintenant par la digue qui part de la Roche, en Lancieux, pour aboutir au pont de Drouet.

C'est d'ailleurs vers les débuts du VIème siècle que, suivant la tradition, saint Scieu, disciple de saint Brieuc et patron de Lancieux, vint, après la mort de son maître, débarquer sur nos côtes. Si sainte Blanche habitait Ploufragan, l'on peut penser qu'elle profita du voyage de ce saint moine pour se joindre à lui et venir rendre visite à son fils qu'elle n'avait pas vu depuis longtemps.

Saint Gwennolé sans doute n'oublia pas non plus son frère aîné. Nous pourrions citer à l'appui des relations qui existèrent probablement entre les deux frères, les noms de plusieurs saints qui ont attaché leur souvenir à notre pays : Saint Walay [Note : On retrouve les noms de ces saints dans plusieurs localités des environs de Saint-Jacut. Saint Walay ou Balay se reconnalt dans Plou-Balay, saint Ayde ou Théï a encore maintenant une chapelle à Pluduno, enfin saint Rieul a attaché son nom à plusieurs endroits de la paroisse de Saint-Cast] ou Balay, saint Rieul, saint Theï ou saint Deï. Mais, paraît-il, les conclusions de la critique contemporaine ne permettent plus d'affimer maintenant comme autrefois, que ces saints personnages aient jamais été moines à l'abbaye de Landevennec...

Un autre point détruit radicalement encore par la critique, ce sont les fameuses relations qu'auraient entretenues ensemble le roi Gradlon et notre saint Jacut.

Malgré le grand nom de Mabillon et le sentiment des auteurs des Anciens Evêchés de Bretagne, l'on ne peut douter que cet épisode de la vie de saint Jacut ne soit copié de toutes pièces sur la vie de saint Gwennolé. L'autorité de Gradlon ne s'est jamais étendue jusqu'à notre contrée et l'on doit chercher des raisons plus solides pour expliquer les nombreuses donations dont l'abbaye de Landoac fut de bonne heure l'objet. Il est fort possible qu'à la recommandation de Fracan, père de saint Jacut, quelque chef breton alors régnant [Note : En ce cas, c'est à Riwal qu'il faudrait attribuer ces libéralités. Voir La Borderie, tome I, page 850] sur la Domnonée ait grandement favorisé l'établissement naissant de Landoac.

Le P. Noël Mars [Note : Bibliothèque Nationale. Manuscrit latin 12780, Relation de la Vie de saint Jacut] parle à son tour d'un seigneur nommé Théotin qui aurait gratifié l'abbaye de sa munificence. Rien n'empêche de croire à la véracité de cette allégation, avec cette restriction cependant que ce nom de Théotin a dû être défiguré au cours des temps et ne se présente plus à nous sous sa forme primitive. Il est certain d'ailleurs que le monastère de Saint-Jacut dut recevoir de nombreuses et considérables donations territoriales, sinon du vivant de son saint fondateur, du moins quelque temps après sa mort. C'est ainsi que les importants domaines que possédait saint Jacut à Lanmeur et aux environs, doivent avoir une origine très ancienne, car on n'en trouve nulle trace dans les titres du moyen-âge qui nous sont demeurés [Note : Quelques-uns prétendent que Lanmeur aurait été donné à saint Jacut au lendemain des invasions normandes]. Il est vrai qu'il en est de même pour la plupart des possessions temporelles de l'abbaye de Saint-Jacut, dont l'origine semble se perdre dans la nuit des temps.

Mais les plus belles existences ont une fin ici-bas : il arrive un jour où Dieu juge que l'heure de la récompense a sonné pour ses bons serviteurs. Aussi, nous dit Noël Mars (Bibliothèque Nationale, Manuscrit latin 12675, Histoire de l'abbaye de St-Jacut), auquel nous empruntons les lignes qui vont suivre : « Après que saint Jagu eut administré un long temps son monastère, plein de jours et de mérites, il rendit l'âme à son Créateur le huitième jour de février, dans la première moitié du sixième siècle, car l'on ignore la date exacte de sa mort [Note : Nous rectifions ici la date donnée par Noël Mars qui s'appuie sur une chronologie manifestement erronée].

Son corps fut enterré, écrit notre historien, en l'église de ce monastère qui était dédié à Notre-Dame [Note : Remarquons qu'à la fin du Xème siècle, un calendrier breton, maintenant déposé à la bibliothèque dédiée de Copenhague, nous fait connaître que l'église de Landevennec était dédiée à la fois à sainte Marie et à Saint Gwennolé (Bréviaires et Missels bretons, par l'abbé Duine, page 160). L'église paroissiale de Saint-Jacut-de-la-Mer est actuellement dédiée à la Très Sainte Vierge sous le vocable de Notre-Dame de Landouard et saint Jacut dans la paroisse qu'il a évangélisée n'est ni titulaire de l'Eglise, ni patron du lieu], quoique à raison des miracles que saint Jagu y a opérés, elle a été depuis appelée de son nom ». Malheureusement les guerres et les dévastations qui suivirent firent perdre la mémoire de l'endroit où l'on avait primitivement déposé le corps de notre saint, si bien que le bénédictin D. Le Gallois (Bibliothèque Nationale, Recueil de Gaignière, Manuscrit latin 1709-2 folio 205, Archives de Saint-Jacut) pouvait écrire à la fin du XVIème siècle : « L'on a cru, mais sans nulle autorité, que l'on avait déposé le corps de saint Jacut dans une grande arcade proche Notre-Dame ».

Quoi qu'il en soit, « les restes de saint Jagu, ajoute Noël Mars, demeurèrent dans l'église qu'il avait fondée, jusqu'à la descente des Normands en Bretagne, qui fut environ l'an 878, auquel temps il fut transféré en France avec les autres reliques des saints de Bretagne, encore bien que l'on ne sache au vrai le lieu où il fut transporté ». Heureusement que le souvenir de notre saint Abbé ne disparut pas des coeurs, en même temps que ses ossements sacrés quittaient un sol qu'ils avaient si longtemps sanctifié, pour prendre le chemin de l'exil. Longtemps encore saint Jacut continua d'être invoqué dans notre pays, aussi bien que dans un grand nombre de paroisses de la Bretagne. (abbé Lemasson).

 Vie de Saint-Jacut et Saint-Guethenoc (page n°1).

 

Vie de Saint-Jacut et Saint-Guethenoc (page n°2).

 

Vie de Saint-Jacut et Saint-Guethenoc (page n°3).

 

Vie de Saint-Jacut et Saint-Guethenoc (page n°4).

 

Vie de Saint-Jacut et Saint-Guethenoc (page n°5).

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