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Justice et Police. — Instruction et Bienfaisance. — Commerce (foires et marchés). — Artisanat. — Corporation des Potiers. — Culture.

I. - JUSTICE ET POLICE.

L'exercice de la justice dans le Comté de Rieux appartient au sire de Rieux qui vient immédiatement après le duc de Bretagne. Tous les Aveux portent qu' « il a droit de haute, moyenne et basse justice dans l'étendue de toutes les paroisses qui composent le Comté, avec connaissance de tous les cas civils et criminels, prisons, fourches patibulaires élevées, ceps, colliers pour la punition des criminels, droit de déshérence, bâtardise, police ; et droit d'obliger les seigneurs de Beaulieu et de Villeneuve en Rieux de garder les prisonniers entre les mains de l'exécuteur de la haute justice ».

A cause de son étendue, le Comté est partagé en trois sièges de juridiction, ainsi dénommés : Rieux à Rieux, Rieux à Peillac, Rieux à Fégréac. Pour les deux premiers, l'appel fut reçu d'abord à la sénéchaussée de Vannes, puis à celle de Ploërmel, pour le troisième, au présidial de Nantes.

En la juridiction de Rieux à Rieux, la justice se rend le mercredi à l'auditoire de la ville, situé au-dessus des halles. Le premier juge est le sénéchal et le second, l'alloué. Le procureur-fiscal défend les droits du seigneur et les intérêts publics ; les avocats et les procureurs ou avoués assistent les demandeurs et les défendeurs. Le greffier rédige les actes et y appose le sceau seigneurial. Les sergents et les huissiers assurent l'exécution des sentences et le recouvrement des amendes. La juridiction juge aussi les appels des fiefs inférieurs de cette partie du Comté.

Le Droit civil et criminel d'après lequel se font les jugements n'est autre que les us et coustumes de Bretagne, codifiés au début du XIVème siècle sous ce titre La très ancienne coustume de Bretaigne qui est jouxte raison, admirable monument de Droit chrétien, reflet de cette belle maxime : « Justice fut establie pour charité, amender les mauvaises voies et soutenir les pauvres ménagiers pour l'amour de Dieu ». La juridiction de Rieux à Peillac tient ses audiences le vendredi en son auditoire des halles.

Dans ces deux cours de justice, le sire de Rieux jouit de la prérogative d'être appelé à la menée et plaids généraux quatre fois l'an, aux jour et lieu accoutumés, et alternativement, après le baron de Malestroit.

A Peillac, sur une place à l'Est des halles, se dressait une potence patibulaire pour l'exécution des criminels, tandis que, à certains endroits du bourg, de grandes bornes servaient à la castigation publique (fouet). Les cadavres des suppliciés étaient enterrés dans la pièce nommée le Carré, en dehors et à l'Est du bourg.

 

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II — INSTRUCTION ET BIENFAISANCE.

A Rieux, le prieur de Saint-Melaine avait « l'obligation d'entretenir à ses frais un maître d'école pour instruire les enfants de la paroisse ». Et lorsqu'il négligeait ce devoir, le Général (assemblée des fidèles) se chargeait de le rappeler à l'ordre. Cette obligation lui avait été imposée par le sire de Rieux, fondateur de ce prieuré. En cela, il obéissait à l'église qui demandait aux seigneurs, comme aux abbayes, de fonder des écoles pour « apprendre aux enfants à lire, à compter et à connaître la religion ».

Par ailleurs, la bienfaisance était également voulue de l'Eglise. Aussi, le sire de Rieux veillait-il, avec le clergé et les moines, au soin des malades. Il y avait particulièrement à Rieux une Maladrie (ou Maladrerie). C'était une sorte de village de lépreux.

La lèpre, cette terrible maladie où « la corruption de la mort envahit la chair vivante », originaire de l'Orient, avait passé dans nos pays dès les premiers siècles de notre ère et l'histoire de nos vieux saints, de Saint Martin, par exemple, en parle souvent [Note : Elle ne fut pas apportée par les Croisés, contrairement à l'assertion de certains historiens antireligieux]. Objet d'horreur dans le monde païen, les lépreux devinrent « les pauvres de prédilection de la charité chrétienne ». Au Moyen-Age, on les appelait aussi les ladres, du nom de Saint Lazare, dit vulgairement Saint Ladre ; par suite, leurs asiles se nommaient ladreries, ou maladries et maladreries. Celle de Rieux, dont le nom subsiste toujours, était située à l'Ouest de la ville, tout près du Perron. Elle était sous le vocable de Saint Thibaud (ou Thibault), ainsi que le cimetière paroissial. Ce saint ermite champenois était alors souvent Patron des Maladries ; ainsi celle de Notre-Dame de Bermont, fréquentée par Jeanne d'Arc [Note : La statue en granit du saint et sa fontaine existent encore. Autres patrons principaux de ces maladries : saint Lazare, sainte Madeleine (Malestroit), saint Denis (Ploërmel), etc. ].

Pour éviter la contagion, l'autorité, aussi bien religieuse que civile, ordonnait de séparer les malades d'avec les gens sains.

Cette séparation était réglée par tout un cérémonial. Voici ce qui se passait à Rieux.

Lorsqu'un habitant était reconnu atteint de lèpre, le recteur au jour convenu, se rendait à sa demeure, aspergeait le malheureux d'eau bénite et le conduisait processionnellement à l'église Saint-Melaine. Là, devant le maître-autel, sur deux tréteaux, était étendu un drap mortuaire ; derrière ce catafalque, le lépreux se tenait agenouillé. La messe célébrée était primitivement celle des Morts, puis on lui substitua la messe pour les malades ou celle du jour. Après, c'était l'Absoute. Puis le ladre était conduit processionnellement à la Maladrie. Encore une aspersion et le prêtre lui adressait des paroles d'encouragement à supporter ses misères, en rappelant que, pour un vrai chrétien, la pire des maladies, c'est le péché mortel, et que, par la souffrance acceptée en union avec le Divin crucifié, l'on gagne le ciel. Et la porte se refermait.

Vers le XVème siècle, les ducs de Bretagne autorisèrent les lépreux à sortir de la Maladrie, à condition de porter sur leur robe une marque rouge et d'agiter leur cliquette quand ils apercevaient quelqu'un.

Le but des cérémonies de la séparation était de donner aux lépreux une sorte de consécration religieuse, afin de les protéger contre la violence des gens hostiles aux contagieux et aussi d'écarter d'eux-mêmes le désespoir : Morts au monde, revivez en Dieu ! tel était le beau souhait final de l'église à ses pauvres enfants atteints de la lèpre.

Mais, de plus, l'Eglise les entourait d'attentions délicates et implorait pour eux les charités des seigneurs, des prêtres, des moines et des fidèles.

Parmi les grands bienfaiteurs des Maladries bretonnes, signalons la Sainte de Rieux, Françoise d'Amboise. Elle dut, lors de ses nombreux séjours à Rieux, visiter souvent les pensionnaires de la Maladrie et les combler de ses dons pour améliorer leur sort. Eux-mêmes se procuraient certaines ressources en exerçant les métiers qui leur étaient réservés, les métiers de cordiers, tonneliers et barattiers. Ils pouvaient ainsi se procurer une meilleure nourriture et un mobilier plus confortable pour leur maisonnette en plus du « lit à couette et à coussin (matelas), de l'escrin (armoire), de la table et de la chaière (chaire, chaise) ».

 

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III. — COMMERCE.

A la suite des invasions des Barbares, le commerce qui avait donné de l'importance à Durétie, était tombé. Il reprend peu à peu avec l'installation des sires de Rieux. Leur cour occasionnait en effet de fréquents va-et-vient de vassaux, d'amis, d'hommes d'armes, de plaideurs, voire d'illustres visiteurs, tels que les ducs de Bretagne. D'autre part, le passage de la Vilaine, surtout après le rétablissement du pont, attirait de nombreux voyageurs. Enfin le port voyait accoster beaucoup de navires.

Le port. — Le sire de Rieux, par ses officiers, veillait au maintien et au développement du commerce, source de prospérité pour son fief. Le transit fluvial était particulièrement objet de surveillance et de réglementation. C'est que, à cette époque où il y avait peu de routes — encore étaient-elles mal entretenues et peu sûres — les commerçants trouvaient des facilités de transport appréciables par la Vilaine.

Ils jouissaient d'ailleurs d'une sécurité complète dans le havre de Rieux, à l'abri des tempêtes et des pillards de grandes routes. Ils y trouvaient également tout ce dont ils avaient besoin : hôtelleries, aumôneries tenues par les Trinitaires, foires actives, surtout la foire des Milleries, centres commerciaux achalandés, etc. Les navires du pays amarrés le plus habituellement étaient : la Notre-Dame, la Saint-Julien, la Loyse (Louise), la Sainte-Catherine, la Saint-Pierre, la Chevillarde, qui faisaient de 5 à 10 voyages par an, et contenaient chacun environ 20 muids (500 hectolitres). Mais il en venait bien d'autres, surtout des Charentes et d'Espagne. Sur le port, les indigents guettaient l'arrivée des voiliers et se précipitaient pour aider de leurs bras le halage à travers les méandres des basses eaux. Parfois, au lieu de bras, on se servait de chevaux ; ainsi il en fallait 27 pendant trois jours pour haler une gabarre de la Roche-Bernard à Rieux. Il n'est donc pas étonnant que ce port si sûr fût sillonné de bateaux importateurs de produits divers, surtout de vins bretons et de vins d'Aunis, de sel, de fers, d'étoffes, et exportateurs de blés, de bois, de laine, etc.

Dans une enquête ordonnée en 1408 par Jean V, un témoin centenaire, très lucide, dépose ceci : « Paravant les guerres et la mort du duc Jehan en 1341, entre autres denrées, les vins du Poitou, d'Aunis, de l'isle de Ré, le sel de Guérande et d'ailleurs, le fer d'Espagne, affluaient au port de Redon, que c'était une infinité... Il venait au port plus de 1.500 tonneaux de vin par an ; il en était même entré 500 en une semaine. Les salorges regorgeaient de sel ; une seule marée amenait parfois 150 embarcations de 3.000 muids... [Note : Le muid égalait environ 270 litres]. Les rues en estoient si remplies qu'à peine un homme à cheval pouvait-il passer. Et les marchands de Rennes, de Saint-Malo, d'Angers, de Normandie et du Maine accouraient pour, de là, transporter en leurs provinces toutes sortes de marchandises... » [Note : Chronique de Redon (M. de Corson)].

Or le port de Rieux, proportions gardées, bénéficiait de ce trafic. Son seigneur, en effet, avait « droit de péage, sur les vaisseaux et bateaux descendant et montant la Vilaine, avec pouvoir de les arrêter au port et havre de Rieux, comme aussi le droit de coutume sur leurs marchandises et le droit de bris sur la rivière ».

Les foires et marchés. — Ce qui contribuait encore à l'expansion du commerce, c'étaient les foires et les marchés.

Les foires étaient au nombre de cinq : « le mercredy avant les Rameaux, le mercredy avant la Pentecôte, le mercredy avant Notre-Dame de la My-Aoust, le six octobre et le trois novembre ».

La principale était celle du 6 octobre, dite foire des Milleries « A cause de l'affluence des foirandiers, porte un Aveu, les sieurs de Beaulieu, Villeneuve, la Bousselaye, la Lande en Rieux, du Vaudequis en Allaire, et les religieux de Rieux doivent chacun un homme noble, armé de haut-bergeon, brigandine, espée, dague et cotte de maille, pour empêcher le désordre et remettre à la justice les malfaiteurs. Lesdits hommes armés sont obligés de prêter serment devant les juges dudit sieur de bien se comporter et agir en ladite foire, faire payer la coutume, mais rien au-dessus sous peine d'amende et de concussion. Le sieur de la Bousselaye est obligé tous les ans de fournir une boîte de fer ou de fort bois pour y mettre les deniers reçus pour la coutume.

Ledit sieur a les droits de louage, terrage, étalage, mesure de grains dans ladite ville de Rieux et autres paroisses du Comté ; et la mesure de Rieux est la même que le demé et le boisseau de Ploërmel. Il y a aussi la mesure de vin pour le Comté à l'usage de ceux qui vendent en détail, et elle doit avoir la marque du seigneur sous peine de confiscation, brisement et amende. Et il appartient audit sieur de fixer les prix des vins et des cidres ».

Ces mesures des débitants devaient être étalonnées par le sénéchal. La mesure de Rieux déposée à l'auditoire se nommait le jaillon. C'était un étalon en fonte armoriée portant ces mots :

« C'est la mesure étalon de la Cour de Rieux, par Robert Gougeon, châtelain de la Cour et fiefs en l'an 1530 ».

La mesure des grains, d'après un Aveu de 1497, était « de profondeur, 8 pouces 2 lignes pied de Roy ; de circonférence en dedans, tant au fond qu'en haut, 4 pieds 1 pouce. Remplie de blé et pesée, elle égalait 48 livres 2 quarts. Deux boisseaux équivalaient à une mine de Ploërmel » [Note : Le pied de Roy égalait 0 mètre 325 ou 12 pouces ; le pouce, 12 lignes ; la livre, 490 grammes ; le boisseau, 150 litres].

Un compte de 1431 prouve que les foires de Rieux étaient alors très fréquentées. On y faisait notamment d'amples provisions de sel, aussi le seigneur se réservait-il le produit du salage — droit sur les bateaux de sel — la veille de la foire des Milleries et les huit jours suivants.

En plus des foires, un marché se tenait tous les mercredis « sur la place vague appelée communément le Fresche, au milieu de la ville, fort spacieuse, située en belle aire non marécageuse ».

Les places pour les diverses marchandises étaient fixées par le juge de la juridiction, particulièrement sous les halles.

Le jour des marchés à Peillac était le vendredi.

Déclin du commerce. — Vers la fin du XIVème siècle, l'activité commerciale se ralentit et le port connaît la décadence. La cause en est la Guerre de Bretagne qui entrave la navigation. Cependant de Normandie et d'ailleurs l'on vient encore s'approvisionner en sel et en vin aux ports de la Vilaine, car on évite de descendre au Croisic et à la Rochelle par crainte des Anglais.

L'affaiblissement du commerce est dû aussi aux impositions nouvelles. Pour payer sa dette de 17 millions à Edouard d'Angleterre et pour entretenir ses milices, le duc Jean IV recourt à l'impôt, jusque-là inconnu en Bretagne. Il établit alors la contribution foncière, dénommée fouage (par feu ou ménage) et la contribution indirecte sur les entrées et issues (marchandises) ; et cela, en plus des droits du seigneur. Ainsi à Rieux, en 1365, le muid de sel (270 litres) est taxé à 2 sols 6 deniers ; le tonneau de vin (200 litres) est taxé à 16 sols ; le millier de fer d'Espagne, à 11 sols, et de fer breton, à 10 sols 6 deniers.

Ces taxes, considérables par rapport à la valeur des denrées, raréfièrent les arrivages et par suite les acheteurs étrangers. « Naguère, affirme un témoin de l'enquête ducale de 1408, est advenu qu'il y avait grande vinée en Aulnis, et allèrent plusieurs marchands de Vitré et d'ailleurs pour quérir vins, qui avaient plus brieff (court) chemin de la mer à leur pays par Redon (et Rieux) que par ailleurs, mais pour les imposts, les emmenèrent par charroy, sans qu'il qu'il fut amené tonnel ni pippe par Redon (et Rieux) » (Trévédy, Le port de Redon).

Relèvement. — Après la Guerre de Cent ans, accompagnée de disettes et de pestes, le pays ne tarde pas à réparer ses désastres et à jouir d'une véritable prospérité : « S'il y eut, écrit Gabriel Hanoteaux (Histoire de Richelieu, I), une époque où notre peuple connut la douceur de vivre, ce fut vers la fin du XVème siècle ».

Rieux participe à cette relance. Les ruines s'en vont ; les demeures s'agrémentent de portes et de fenêtres en arcs brisés ou en anse-à-panier, dont le cordon dessine une accolade. La rue principale se borde de boutiques dont l'auvent est surmonté d'originales enseignes : forgées ou peintes, cliquetant à la brise, ces enseignes figurent le véritable blason du maître, hôtelier, marchand, artisan. De ceux-là, plusieurs s'enrichissent, acquièrent les manoirs de gentilshommes ruinés et, ajoutant à leur nom celui d'un de leurs domaines, deviennent seigneurs de fiefs nobles.

En même temps, fermiers et métayers se débarrassent peu à peu de leurs redevances et se transforment en propriétaires libres. De leur côté, artisans et ouvriers vivent dans l'aisance. « Ce fut, écrit M. d'Avenel (Histoire des salaires et denrées, de 1200 à 1600), une période de bombance où la population mangea largement à sa faim ». Surtout chez nous : « Le duché de Bretaigne, rapporte un contemporain, est bon pays, spécialement Bretaigne gallo où l'on parle français... En ce pays, grand foison de bons ports de mer, de boeufs, de vaches, et bons petits chevaux, grandes landes et forêts, et petites rivières, et grands seigneurs, et fortes gens, et les menues gens sont vêtus de bureau » (Grossière étoffe de laine). Ne dirait-on pas une description de Rieux ?

A cette date, c'était la nièce de Jean IV de Rieux qui était duchesse de Bretagne, si universellement aimée que le peuple l'appelait la Bonne Duchesse Anne. Bien des fois, elle séjourna chez son oncle, par exemple, de septembre 1488 à février 1489, et c'était toujours pour la population de Rieux une joie de la posséder tant elle était aimable et charitable.

 

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IV. — L'ARTISANAT.

Le Comté de Rieux possédait toutes sortes d'artisans et d'ouvriers que les Aveux citent comme exposant leurs ouvrages aux foires et marchés : « sabottiers, cordonniers, chapeliers, tessiers (tisserands), tanneurs, boulangers, etc. ». Mais il s'y trouvait une industrie toute spéciale : l'industrie des Potians — telle est leur antique appellation — autrement dit, des Potiers. Ils méritent une notice à part dans l'histoire de Rieux, car ils furent de cette commune jusqu'au milieu du XIXème siècle.

La Corporation des Potiers.

Leur origine. — Des érudits font remonter leur origine à la fondation de Durétie. « On n'ignore pas, écrit l'abbé Héligon (Registre paroissial manuscrit, au presbytère de Saint-Jean-la-Poterie), l'importance des briques et des vases d'argile dans la vie économique romaine. Les briques entrent dans la construction de tous les monuments ; les vases sont employés à tous les usages domestiques. Lorsque la colonie romaine s'établit sur la Vilaine, les différents corps d'artisans dont le besoin se faisait sentir suivirent les premiers émigrants et s'installèrent dans le pays, où ils trouvaient en abondance la matière première et un sûr écoulement de leurs produits, notamment les potiers.

On peut apporter plusieurs preuves en faveur de cette thèse. La première, c'est la similitude qui existe entre les différentes poteries découvertes à Rieux-Durétie et les poteries modernes, et comme pâte et comme forme : identiques vases trapus à large panse. Même les amphores de l'antique Rome ressemblent aux buies de la Poterie, à part cette légère différence que l'extrémité des amphores romaines est en pointe, tandis que les autres ont un fond plat, parce qu'on les posait debout. Cette fabrication dut donc se faire dès que la colonie romaine fut prospère et beaucoup de vases antiques exhumés dans les fouilles de Durétie durent y avoir été fabriqués ».

Après la destruction de Durétie par les Barbares et la disparition de ces derniers, les familles de Potiers échappées aux massacres rentrèrent et reprirent leur industrie, avec la faveur des sires de Rieux. Pour être plus forts ils s'organisèrent en corporation, dès que parurent ces associations. Cette corporation eut ses règlements particuliers, ses anciens chargés de veiller à leur observation, sa chapelle, chapelle Saint-Jacques (le Mineur), et son chapelain, enfin ses droits et devoirs envers les seigneurs du Comté.

Leur travail. — Il consiste à fabriquer des pots avec l'argile [Note : Attribué par les savants à la période pliocène de l'âge tertiaire. Cet âge dont il reste de nombreux fossiles aurait duré 70 millions d'années. Avant lui, l'âge archaïque ou primaire : 350 millions d'années, et l'âge secondaire : 130 millions. Après lui, l'âge quaternaire — le nôtre — vieux déjà d'un million d'années. (Mgr Léon CRISTIANI, Monstres et merveilles de la préhistoire)] et le sable rouge qui forment le fond du sol dans le marais de la Poterie, et que l'on nomme la Lize. L'extraction de cette terre à pots se fait dans des puits creusés en forme ronde. Glaise et sablon sont ensuite foulés pour en extraire les corps étrangers. Le mélange opéré, le potier — ou plutôt la potière — prend place sur une roue de charrette posée à plat, la met en mouvement et pétrit l'argile en lui donnant une forme, avec un fond et, suivant les cas, des anses. Une fois séchés et vernis, les pots sont cuits dans des fours rudimentaires chauffés uniquement par des aiguilles de pins. En somme, l'industrie des temps antiques n'avait pas varié jusqu'au milieu du XXème siècle.

Aveu au seigneur. — En principe, les habitants du village de la Poterie sont tous potiers et relèvent du sire de Rieux qui a la maîtrise de la corporation. C'est pourquoi, à chaque mutation de seigneur, les Potiers lui rendent Aveu de ses droits. Même obligation pour un nouveau potier ; le seigneur ne pouvait d'ailleurs n'en établir qu'un au cours de sa vie. Voici quelques passages d'un Aveu du 21 janvier 1420.

« Sachent tous que, par notre Cour, le duc de Bretaigne présent en droit, et personnellement Guillaume Diocres confessa tenir à foy, hommage et rachapt, du très honoré seigneur de Rieux, les pièces de terre, devoirs, rente et obéissance qui s'ensuivent :

Une pièce de terre chevante (joignant) d'un bout au chemin par où l'on vet du Temple à l'ostel Perrot, et d'autre bout en Terre aux Potins (potiers).

Item, une pièce de terre d'un journal, chevante au vieil duyt (vieux doué) de Juhel, etc.

Sur lesquelles... fut confessant ledit Guillaume devoir au seigneur de Rieux 4 deniers de rente, appelés douves, au terme de la mi-ougst (mi-août).

Item fut confessant tenir dudict seigneur son usage et avenant des communs de la Poterie : sur quoy est dûe au Sr une lipvre de pesvre (poivre) à être payée à Nouel entre les deux messes matinales, et 10 sols de rente appelée garde, le premier mercredi de Karesme... ».

Règlements. — Seuls, les potiers avaient le droit de tirer les lizes et les sablons dans la pièce des Lizières et dans la Grande Clôture joignant la précédente. Seuls également ils se procuraient leur combustible dans la Forêt des Potiers que traversait la Voie romaine.

Certaines entraves arrêtaient la concurrence illimitée. D'abord, l'interdiction de fabriquer depuis la Saint-Nicolas (6 décembre) au 1er mars. Les neuf autres mois, chaque ménage ne pouvait fabriquer que trois douzaines et demie de pots par jour, plus trois pots par enfant incapable de travailler, chaque enfant capable ayant droit à une douzaine par jour. Aux vigiles des fêtes commandées, interdiction de cuire les pots et de les exposer à la vente les dimanches.

Dix Anciens, désignés chaque année par le seigneur, dont quatre compteurs et six revoyeurs (contrôleurs), veillaient à l'observation des règlements ; les revoyeurs devaient opérer dans chaque maison. Les contraventions coûtaient 60 sols 1 denier, dont un tiers pour le sire de Rieux, un tiers pour le compteur, un tiers pour la chapelle Saint-Jacques. L'un de ces compteurs, constitué bâtonnier, devait prendre soin de la communauté.

De plus, à Noël, les potiers élisaient un Abbé. Son emploi était de nettoyer la chapelle, d'y apporter l'eau nécessaire pour l'eau bénite et de sonner la cloche aux enterrements de potiers. Faute de bien remplir sa charge, l'Abbé était condamné en justice à 60 sols 1 denier d'amende, de même que le chapelain.

L'étranger désireux d'entrer dans la corporation devait avoir l'agrément du sire de Rieux et celui du général de la frairie. Admis, il payait un droit d'entrée de 90 livres dont un tiers revenait au seigneur, un tiers au général, un tiers à la chapelle.

La vente des pots. — Ceux qui « faisaient oeuvre de pots », suivant l'expression consacrée, se partageaient les paroisses d'alentour sans empiéter l'un sur l'autre « sous peine d'être honnis et disqualifiés ». Leur rayon s'étendait sur toute la Bretagne.

Le jeudi ou le vendredi, ils entassaient sur leurs immenses charrettes jusqu'à 70 douzaines de pots et ils partaient à pied, au pas de leur cheval, pour Nantes, Rennes, Saint-Brieuc, Quimper et même Brest. Au loin comme auprès, ils devaient éviter d'enlever les clients aux autres. Aux foires auxquelles ils prenaient part, ils devaient 2 sols par charretée, 2 deniers par charge ; en dehors des foires, moitié moins.

Longtemps les potiers voyagèrent comme les saulniers, conduisant de longues files de chevaux portant la marchandise, soigneusement emballée dans les bâts ou panais. Puis l'ouverture de routes leur permit de se servir de charrettes. Ils utilisaient également les voies d'eau : sur la Vilaine, il était dû « par vesseau de poterie, un pot, avec devoir d'appeler le fermier pour recevoir ce pot ; s'il ne se présente pas, le maistre de vesseau doit mettre ledict pot en la rivière et s'en aller ; par vesseau vendu, le droit est de 4 deniers. En plus du maistre de vesseau, le marchand doict douze pièces de poterie sur son lot, au choix du coustumier ».

 

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V. — LA CULTURE.

Si la région de Rieux est traversée d'Est en Ouest par une crête de grès armoricains et de schistes d'Angers, crête joliment couronnée par des landes d'ajoncs, on y rencontre aussi de plantureuses prairies et de fertiles terres cultivées. Depuis toujours, on y a récolté le seigle et le froment, voire même le mil — d'où vient le nom de Milleries donné à la grande foire du 6 octobre.

Malheureusement, il survenait parfois de terribles vagues de froidure, comme en janvier 1423 où, note un contemporain, « la tête des poules et des coqs gelait ». De même en 1432 et 1439, et en d'autres années encore. C'était alors la misère noire dans les campagnes.

Au Moyen-Age paraît un nouveau grain : le blé noir, dit encore sarrazin, parce que importé au temps des Croisades du pays des Sarrasins [Note : Tribu spéciale d'Arabie. Les Croisés donnèrent ce nom à tous les Musulmans]. Ce blé s'accommodait parfaitement du sol breton et il servait surtout à fabriquer ces larges galettes si appréciées en nos campagnes.

Une autre culture, de pratique courante jadis, c'était la culture de la vigne. Un Aveu du 15 janvier 1530, rendu au sire de Rieux par Guillaume Coppale, sieur de la Vénuraye, constate « qu'il y avait de nombreuses vignes, dont le vin était bon, moins alors qu'autrefois, les vignes, ayant été arrachées pour y mettre du seigle et autres grains ». Avant cette date, les vignobles étaient donc assez considérables à Rieux. On commençait à débiter le vin nouveau à la grande foire du 6 octobre. Cet usage s'est conservé longtemps après la disparition des vignes, mais le vin breton était remplacé par le vin nantais.

Les Archives ont gardé le nom de quelques vignobles anciens, tels que la Vigne du Couvent, replantée en mai 1562 par le ministre Yvon ; la Vigne du presbytère ; la Vigne de la Garoulais ; la Vigne du Perron, en ville, très étendue ; la Vigne de Vincent Chesnais ; la Vigne de la Bucherie, d'un journal et demi, etc.

Citons encore un produit du sol qui fut longtemps une source d'importants revenus pour le pays : la châtaigne. De superbes châtaigniers parsemaient la campagne, étendant par dessus les haies leurs puissantes frondaisons, issues de troncs majestueux et portant à l'automne une abondante récolte. Il en a été abattu qui ont fourni plus de 67 stères de bois. Aux foires de Rieux, de Redon et de La Roche-Bernard, d'énormes quantités de ces châtaignes se vendaient sous le nom de marrons de Redon ; beaucoup prenaient le chemin de Saint-Nazaire d'où on les expédiait en Angleterre.

Ajoutons quelques mots sur les Communs. Ce sont des terres qui appartiennent à une collectivité et dont les habitants d'une ville, d'un bourg, d'un village, peuvent jouir à certaines conditions. Autrefois, la paroisse de Rieux possédait, en communs, une étendue de 596 hectares 22 ares. En parcourant les Registres du Général, on constate que cette assemblée eut souvent maille à partir avec certains propriétaires touchant la jouissance ou l'aliénation de ces communs. Tout le long des âges s'échelonnent des procès relatifs à cet objet, surtout, comme nous le verrons, à partir du XVIème siècle (abbé Henri Le Breton).

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