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 Noyal-Muzillac durant la Révolution

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Le 5 février 1792, M. Jacques Joüin, recteur depuis 1772, assemble les membres de la fabrique et quelques notables. Il leur dit : — « Vous voyez comme moi la tournure périlleuse que prennent les affaires publiques en France. Avant longtemps, je serai sans doute obligé à de grands sacrifices ; déjà je ne puis plus m'occuper de l'administration de l'église ; veuillez donc recevoir les comptes que je vous apporte et m'en donner décharge. Vous savez que j'avais, en 1784, placé, de mes propres deniers, une somme de 3.800 francs sur les fonds du clergé, et une autre somme de 2.000 francs chez les Dames religieuses du petit convent à Vannes. Les rentes de ces deux sommes avaient été destinées par moi, et cela à perpétuité, à donner des exercices périodiques d'une mission dans la paroisse, et à soulager les pauvres. Depuis plusieurs années déjà, nous n'avons point touché de rentes ; rentes et principal vont être engloutis. Conservez, retirez quelque chose, si vous le pouvez ». — Les fabriciens terminèrent leur acte de délibération par ces mots : « Les membres de la fabrique reconnaissent avec gratitude que le sieur recteur a fait, jusqu'à ce jour, avec autant de zèle que d'équité, l'emploi des rentes perçues des fondations qu'ils avaient faites ». Le 24 août suivant M. Joüin partait pour l'exil. Il alla en Espagne. 

Trois prêtres, originaires de la paroisse, demeurèrent sur les lieux : MM. Foucault, Plessix et Rault. Pendant dix ans, ils remplirent les fonctions de leur ministère avec un zèle admirable, souvent très-imprudent pour leur existence, menacée de toutes parts. En maintes occasions, ils furent dénoncés. M. Girard, chef de la gendarmerie de Muzillac, aurait pu les faire arrêter mille fois. Républicain décidé, il poursuivait les chouans, les réfractaires, mais jamais les catholiques inoffensifs. Il avait dans sa femme une chrétienne discrète et bonne, qui trouvait moyen d'avertir les prêtres de changer de demeures, au moment du passage et des recherches de son mari. 

Un jour, ou plutôt une nuit, il tomba, avec ses gendarmes, sur M. Foucault, à la ferme de Trevinet. Comme il marchait le premier, et à une certaine distance de ses hommes, il entendit un bruit de prières vocales qui lui fit tout comprendre. Sous prétexte qu'un chouan allait l'attaquer dans l'ombre, il tira un coup de fusil. Aussitôt ses compagnons accoururent ; il les mit à la recherche de l'ennemi prétendu. Un instant après, ils se retrouvaient. Une visite dans la ferme était inévitable. En ce moment M. Foucault achevait sa messe. Comme il était très-mince, il avait eu l'idée de revêtir un habillement de femme ; mais n'y pouvant parvenir, il prit un canal qui conduisait de la maison principale dans un petit appartement à côté et qui était rempli de fagots. M. Girard entra dans la ferme ; elle était pleine de gens, venus pour entendre la messe. On fit sortir séparément chaque personne ; et, avant de lui donner la liberté, on l'examinait de très-près. Les notables furent emmenés à Muzillac et relâchés le lendemain. M. Foucault fut sauvé. 

Non loin de cette ferme, dans la lande, était un souterrain, qu'on avait creusé pour cacher les prêtres réfractaires. Souvent il y en avait plusieurs dans ces nouvelles catacombes. Les fidèles avaient la messe presque tous les dimanches, tantôt dans un endroit, tantôt dans un autre. Les granges isolées servaient surtout à la célébration du saint sacrifice. Les sacrements étaient administrés, les malades visités. 

Pour nous représenter l'état de la commune à la même époque, le registre des délibérations de la municipalité va nous être ici d'un grand secours. Il est conservé ; nous allons faire le dépouillement des faits qu'il renferme. 

Pierre-Paul de Bodevran est nommé maire, le 7 février 1790. Le 2 avril suivant, il reçoit une lettre des commissaires de Vannes, qui demande l'état des biens ecclésiastiques situés dans la commune, dont le Guerno faisait partie. Le 27 juin, la municipalité délibère sur le décret de l'Assemblée nationale, qui requiert que des députés des divers districts soient envoyés au pacte fédératif du 14 juillet suivant à Paris. On élit vingt-huit hommes, qui devront se rendre à la Roche-Bernard, chef-lieu du district, pour l'élection dés députés. 

Le 29 juin, grande solennité : tous les hommes censés de la milice nationale sont réunis sur la grande place du bourg, ils se mettent sur deux rangs, et le maire leur adresse le discours suivant, qu'il n'avait pas fait : « Messieurs, vous avez déjà juré d'être fidèles à la constitution, à la loi et au roi ; nous ne pouvons douter de votre civisme. La liberté est le plus grand des biens : elle anéantit les privilèges et l'orgueil des hommes, habitués à nous voir ramper comme des esclaves. Nous ne pouvons douter que ces hommes n'aient par leurs brigues excité des révoltes dans certaines provinces et dans la nôtre, afin d'arriver à une contre-révolution. Le moyen d'y mettre un obstacle invincible est de nous unir fortement et de nous opposer avec courage à tous les troubles. Nous maintiendrons, Messieurs, la tranquillité dans notre localité. Ainsi unissez vos efforts à ceux de la municipalité et aux miens ; les lois vous y obligent et vous prescrivent un serment qui est déjà formé dans vos cœurs »

Les membres de la milice, officiers et soldats, lèvent la main et jurent fidélité à la constitution, à la loi et au roi, et promettent de les maintenir, au péril de leur vie. 

Le 11 juillet, la municipalité fait savoir qu'en vertu d'une adresse des citoyens de Paris, tous les citoyens français doivent prêter un serment fédératif, le 14 courant, et que cela doit se faire dans tout le royaume, d'un concert unanime, à la même heure, c'est-à-dire à midi. — Le mercredi 14, tous les habitants, le maire et la municipalité en tête, se rendent à l'église, à onze heures précises. M. Jacques Joüin, recteur, dit une messe du Saint-Esprit, pour demander l'assistance divine, et à l'issue de la messe, tous se rendent sur la place publique. Ils y prêtent le serment que voici : — « Nous jurons de rester à jamais fidèles à la nation, à la loi et au roi ; de maintenir la constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi ; de protéger, conformément aux lois, la sûreté des personnes et des propriétés, la libre circulation des grains dans l'intérieur du royaume, la perception des impôts, sous quelque forme et nom qu'ils soient prescrits, de demeurer unis à tous les Français par les lieus indissolubles de la fraternité »

« Après ce serment, tous les membres, dit le rapport, sont retournés à l'église pour assister à un Te Deum, qui a été chanté avec la piété la plus touchante et la plus sainte allégresse »

Le 27 septembre 1790, le président du district de la Roche-Bernard arrive et demande à la municipalité les rôles des impositions personnelles et patriotiques. M. Jacques Joüin fut imposé à 160 livres. 

Le 13 février 1791, à cinq heures du matin, le maire est éveillé brusquement. Cinq hommes inconnus et armés lui présentent une lettre sans signature, qui lui demande de sonner le tocsin, de ramasser vite des hommes pour aller à Theix, et qu'il y a ordre de fusiller tous ceux qui ne voudront pas marcher. — Aussitôt que le tocsin sonne, les cinq inconnus se retirent en réitérant leurs ordres avec fureur. Le maire se rend à Theix avec trente-deux hommes et n'y trouve rien. 

Le 18 novembre 1792, les citoyens actifs sont convoqués pour élire les membres d'une nouvelle municipalité. Dix-sept votants se présentèrent et firent les élections. Julien-Paul fut nommé maire par 12 voix sur les 17. 

Le 20 janvier 1793, plusieurs habitants demandent des certificats de civisme à la municipalité. On les leur délivre ; ils en avaient besoin pour leur sûreté personnelle. J'en donne un pour modèle — « Nous accordons un certificat de civisme à J. P. F, en conformité à l'arrêté du département du 15 décembre dernier, et nous nous fondons pour cela sur ce que, - 1° il s'est fait inscrire dès le principe dans les cadres des gardes nationales ; - 2° a assisté à toutes les élections, tant celles de la fédération qu'aux autres ; - 3° s'est fait inscrire pour le jury de 1791 ; - 4° a assisté aux différentes assemblées primaires des communes et y a fait le serment civique ; - 5° a rempli avec civisme les fonctions de secrétaire de la municipalité dès 1791 ; - 6° à toujours montré dans sa vie privée des sentiments conformes aux principes de la révolution et engagé les citoyens à l'obéissance aux lois ; - 7° n'a jamais été lié avec les prêtres réfractaires, notoirement connus comme perturbateurs de l'ordre public ; - 8° est regardé dans la contrée comme citoyen ferme et ami de la révolution ». - Tous ceux qui ont connu les membres de la municipalité et le brave homme auquel elle délivra ce certificat, on affirmé et affirment que tout y était supposé, que la crainte seule les faisait agir. Ce citoyen, qui n'était point lié avec les prêtres réfractaires, les recevait dans sa maison et leur donnait l'hospitalité. 

La commune de Noyal-Muzillac fut une des premières à se révolter contre la réquisition. Les jeunes gens ne voulurent point devenir soldats, ils se firent chouans. 

Le 3 mai 1793, une garnison arrivait ; son entretien était mis aux frais des habitants. On leva le double des contributions mobilières, et les parents des réfractaires furent imposés extraordinairement. Ce n'était là que le commencement des peines. Ecoutons : — Le jour de dimanche, onze frimaire, an second de la République française une et indivisible, environ les onze heures du matin, le citoyen Le Batteux arriva au bourg de notre commune (de Noyal-Muzillac), à la tête du 5ème bataillon du Bas-Rhin, bataillon dit armée révolutionnaire. Il trouva les habitants sortant de l'église, où ils étaient rassemblés pour faire leurs prières et entendre la lecture des lettres et ordonnances qui leur étaient adressées par les membres du district de la Roche-Sauveur (Roche-Bernard), et la municipalité allait leur distribuer des billets de réquisition d'avoine pour le lendemain dans cette ville. Les soldats firent rentrer à l'instant tout le monde, en disant qu'on ne devait pas craindre et que personne n'aurait de mal. Ils frappèrent à coups de sabre ceux qui ne voulaient pas rentrer assez vite. Quand tous furent réunis, des gardes furent mises à toutes les portes, et des soldats furent envoyés dans les maisons du bourg pour y prendre les hommes et les amener à l'église. 

Le Batteux, pendant ce temps-là, s'en fut à la municipalité, qu'il trouva rassemblée pour pourvoir au moyen de fournir l'avoine dont il a été question. Il lui dit qu'il venait de la part du citoyen Carrier, représentant du peuple, résidant à Nantes, duquel il tenait des pouvoirs illimités ; qu'on avait à lui livrer immédiatement les armes et la poudre qu'on tenait d'Ambon, les révoltés de Silz, nommer tous les coupables, compter 6.000 francs pour les frais de guerre, deux barriques de cidre pour sa troupe ; qu'il ne leur accordait qu'une dernière heure pour lui procurer le tout, et que si, au moment fixé, il n'avait pas pleine satisfaction, il les fusillerait tous. Il ajouta : — De crainte que la mémoire ne vous fasse défaut, je vous laisse ce billet : « Au NOM DE LA LOI : Moi, commissaire civil, je donne une demi-heure aux officiers municipaux de Noyal-Muzillac pour dénoncer et fournir les coupables qui ont pris les armes à Ambon, me donner les barils de poudre, me livrer les Silz et 6.000 francs pour frais de guerre. Signé : NOGUES, secrétaire. A Noyal, 11 frimaire ». 

Cela fait, il se transporta à l'église, avec les hommes qui l'accompagnaient, et où se trouvait déjà une partie de son armée. Il fit mettre les femmes à la porte, et les hommes sur plusieurs rangs. Quelques soldats se promenaient entre les rangs, demandant la dénonciation des coupables et des chefs de brigands, la poudre, et ajoutant que, sans ces aveux, ils allaient tous périr. Le Batteux fit transporter à la municipalité tous les papiers qui étaient à la sacristie et déchirer les ornements qui s'y trouvaient encore. Les soldats portèrent du bois et de la lande sur un des autels, disant à tous qu'on allait les rôtir et griller s'ils ne dénonçaient pas. Le Batteux tenait lui-même ces propos dans la chaire, où il était monté. Il retourna à la municipalité, demanda si on avait délibéré sur ses ordres. On lui répondit qu'on n'avait aucune connaissance des faits allégués. Il sortit furieux, et, de retour à l'église, il ordonna à ses volontaires de charger leurs armes. Un jeune homme, appelé Jacques Mari, âgé d'environ vingt-six ans, voulut se sauver par la porte du midi. Saisi par les cheveux, traîné au portail, il est attaché, avec un autre jeune homme d'environ trente-trois ans, François Lescop. On les met dans le cimetière et on les fusille. Jean Rival, de la première réquisition est interrogé par un gendarme, à la figure noire, qui lui demande, sans le connaître, si ce n'est pas lui qui a empêché de faire la liste des garçons requis. Rival répond qu'effectivement il a bien fait quelque chose de pareil, mais qu'aujourd'hui il est prêt à partir, et même à l'instant. On le mène dans le cimetière et on le fusille. Le même gendarme, chargé de mettre les hommes dehors un à un, leur demande toujours leurs noms. Guillaume Dréno, âgé d'environ vingt-neuf ans, donne aussi le sien ; on lui lie les bras et on le fusille. Ignace Lescop vient à son tour et prend le nom de Guain. Le gendarme demande au maire, qui était à côté, s'il dit vrai. Celui-ci répond qu'il doit mieux savoir son nom que tout autre. Le jeune homme tout effrayé dit : — « Oui, je m'appelle Ignace Guain.... » et la vérité sortant avec ses larmes, son nom lui tombe des lèvres.... Lescop ! Le gendarme alors : « Votre frère vient d'être fusillé ; c'est votre tour ». On le fusille. On observe que Le Batteux n'était pas à la porte, mais à une petite distance. Le gendarme tenait un papier entre les mains, et de temps en temps jetait les yeux sur lui. Un autre jeune homme, de la réquisition, nommé Pierre Méter, saisi de peur, brise un vitrail et veut fuir par une fenêtre. Il réussit, mais trois cavaliers le poursuivent et l'atteignent à trois cents pas, caché dans une haie. Ils le hachent à coups de sabre. Le Batteux fait mettre le feu dans la chapelle de Bengué, qui est dans le bourg, et tous les ornements sont brûlés ou pris ; cela, à trois heures de l'après midi. Des soldats sont envoyés au village de Breulis et mettent le feu à plusieurs maisons, qui furent incendiées avec ce quelles renfermaient. Dans le bourg, différents vols furent commis. Les soldats prirent six chevaux aux pâturages. 

Le Batteux remit l'ordre suivant à la municipalité : « AU NOM DE LA REPUBLIQUE FRANÇAISE : Moi, Le Batteux, commissaire auprès du cinquième bataillon du Bas-Rhin, dit révolutionnaire, en vertu des pouvoirs illimités que m'a donnés le représentant Carrier ; vu que la municipalité de Noyal-Muzillac m'a promis de me fournir la somme de 6.000 livres pour frais de guerre, toutes les armes et munitions de la paroisse, et que le tout me serait remis demain ; c'est-à-dire sous vingt-quatre heures à Questembert ; que tous les jeunes gens de dix-huit à vingt-cinq ans se rendraient, sous le même espace de temps, à la Roche-Sauveur ; — attendu qu'il est du caractère d'un bon patriote d'être toujours porté à pardonner, quand le peuple veut rentrer dans le devoir et reconnaître les lois, je veux bien faire grâce aux coupables. — Signé : LE BATTEUX. Plus bas : NOGUES, secrétaire. 11 frimaire »

Le lendemain, 11 frimaire, un détachement du même bataillon se rendit au village de la Grée-Bourgerel en Noyal, et mit le feu aux maisons de Guillaume Le Pautremat, qui étaient remplies de mobilier ; 230 francs en argent, son linge et son cheval lui furent enlevés, et tout cela, parce qu'un mois auparavant, les chouans, venant de l'affaire d'Ambon, s'étaient battus dans le village contre des cavaliers patriotes, et avaient pris du grain chez ledit Pautremat, et l'avaient mené à Questembert. 

La municipalité de Noyal-Muzillac se rendit, le 12 frimaire, à Questembert. Le Batteux leur fit restituer les six chevaux pris la veille, et leur donna la quittance suivante : — « Le commissaire auprès du cinquième bataillon du Bas-Rhin, après avoir imposé une somme de six mille livres aux habitants de Noyal-Muzillac pour frais de guerre, parce qu'ils s'étaient révoltés au mois de mars dernier et même depuis peu, reconnaît que les officiers municipaux de cette localité lui ont compté cette somme ; à eux maintenant de se faire rembourser par les habitants ; ce à quoi je les autorise. — Signé : LE BATTEUX, commissaire, NOGUES, secrétaire. Ce 12 frimaire, an II de la République »

Tout ce que nous venons de raconter se passait le 1er et le 2 décembre 1793 ; car le 11 et le 12 frimaire, an II, me semblent correspondre à cette date. 

Le 11 décembre, la municipalité se réunit pour recouvrer les 6.000 livres, dont elle avait fait les avances ; c'est-à-dire qu'elle avait empruntées. Il est entendu qu'on imposerait à tous le triple des contributions mobilières, et deux hommes sont choisis pour le recouvrement dans chaque frairie, le Guerno excepté, attendu qu'il vient de s'ériger en commune séparée. Le même jour, on nomme deux hommes, également par chaque frairie, pour faire la liste de tous les garçons de la première réquisition, qui ne sont pas partis et les avertir de se rendre à la Roche-Sauveur, sous les peines portées par les décrets. 

Le 25 frimaire (14 décembre 1793), ordonnance du district de la Roche-Sauveur, qui prescrit de faire la liste de tous les garçons de vingt cinq à quarante ans, pour le recrutement de la cavalerie. Deux jours après, les citoyens Toquin et Rigon, membres de la commission administrative du Morbihan, arrivent à Noyal-Muzillac et déposent sur le bureau de la municipalité leurs pouvoirs, ainsi conçus : — « L'administration du département, suivant la réquisition du citoyen Julien, commissaire du comité du salut public, a nommé les citoyens Toquin et Rigon, deux de ses membres, à l'effet de se transporter à Muzillac, Noyal-Muzillac et autres lieux, pour y prendre tous les renseignements sur les exécutions qui ont eu lieu en ces communes par l'armée révolutionnaire, ses chefs civils et militaires ; elle les autorise en conséquence à sommer les municipalités à leur donner tous les éclaircissements qui seront en leur pouvoir. — Signé : RIOSE, HAUMONT, MANCEL ». — Nous avons donné ci-dessus le rapport de la municipalité, qui fut plus tard envoyé à Paris, lors du procès de Carrier. 

Le 20 janvier 1794, on prie de nouveau la municipalité de faire connaître les biens de la ci-devant fabrique. Elle déclare que l'église n'avait ni biens, ni rentes, mais était entretenue par le casuel et les offrandes avant la Révolution. 

Le 25 janvier, on fait connaître qu'il y a dans la commune deux cavaliers réfractaires, que ceux qui les rencontreront sont obligés de les avertir de se rendre, et que ceux qui les recevront chez eux seront responsables des frais occasionnés par la troupe qui vient d'arriver à leur recherche. 

Le 17 février, sur les réquisitions du district de la Roche-Sauveur, la municipalité arrête : 1° que la commune a à fournir quatre milliers de foin au citoyen Girard, maître de poste à Muzillac ; 2° à procurer les charrois nécessaires pour transporter les grains de l'émigré Bavalan, de la maison de Trébenan à Muzillac ; 3° à donner au citoyen Jouan, sous les peines de droit, les selles, brides, bridons, licols, mors, sangles, éperons, peaux de toute nature, propres à la cavalerie. Elle nomme des hommes qu'elle charge de pourvoir à toutes ces demandes en allant dans toutes les maisons. 

Le 24 février, la municipalité est requise de composer une société populaire, dite de Surveillance générale sur toute la commune. Elle nomme quatorze hommes, pris sur les frairies et le bourg, qu'elle déclare membres de ce comité. Le même jour, on est obligé de faire à la République don de cinquante sacs de grain, qui sont répartis sur les citoyens les plus aisés. Une commission est nommée pour faire la liste et donner les noms de tous les hommes de vingt-cinq à soixante ans, afin d'en envoyer copie au district. 

Le 24 mars 1794, la municipalité est requise de se faire rendre compte de toutes les armes qui seraient dans la commune et d'on donner avis au district ; — d'envoyer pour la marine tous les fers des édifices nationaux, qui ne leur seraient pas absolument nécessaires ; — d'obliger tous les jeunes gens réfractaires à se rendre le lendemain à la Roche-Sauveur ; — de faire toutes les diligences, afin de former une somme d'argent pour aider à payer les pensions et indemnités aux défenseurs de la patrie et à leurs parents ; — de rendre la culture de la pomme de terre générale et populaire ; — de faire le recensement de tous les chanvres et d'en envoyer copie. — Bientôt des chanvres furent expédiés à la Roche-Sauveur. 

Le 9 juillet, on descend la croix du clocher de l'église, et on donne des certificats de civisme à plusieurs membres de la municipalité soupçonnés. Ces certificats sont affichés, pendant trois jours, à la porte de la maison commune. 

Le 16 août, le citoyen Férinet, commandant en second le 4ème bataillon du Calvados, arrive avec sa troupe, demande des renseignements à la municipalité sur les réfractaires et les citoyens suspects, et, avec des membres du district de la Roche-Sauveur, parcourt toute la commune. 

Le 25 août, le citoyen Verger est envoyé par le district de la Roche-Sauveur, avec plein pouvoir pour saisir les déserteurs et les réfractaires ; s'il ne les trouve pas, il doit prendre leurs pères, mères, frères et sœurs. Il est entouré de la force armée. Saisie est mise sur les foins et gerbes du citoyen Daniélo et de dix autres. Ordre est donné de faire récolter gratuitement par les voisins et de tenir compte du tout au profit de la République. En partant, Verger réclame et obtient 2.633 francs, 6 sols, 6 deniers, pour frais de la force armée qui l'accompagne. Par suite, la municipalité, le 8 septembre, prend l'arrêté suivant : — « Il est juste, dit-elle, que celui qui, par sa conduite et sa désobéissance aux lois, occasionne des frais et des pertes susceptibles de réparation, les supporte. Or, les réfractaires, déserteurs et réquisitionnaires ont été seuls cause que la force armée est venue différentes fois dans cette communes et y a valu des dépenses et des pertes. Ainsi, depuis peu, on a payé la somme de 2.845 francs, 9 sols, à différentes reprises. De là, la municipalité et le comité de surveillance sont d'avis que les susdits insoumis, remboursent proportionnellement cette somme, et, à leur défaut, leurs pères et mères, tuteurs, et cela, solidairement. Si le conseil du district n'approuvait pas notre arrêté, le tout serait prélevé sur les contributions mobilières ». — Le conseil du district approuva, et les parents des réfractaires payèrent. 

Le 10 septembre 1794, le conseil du district de la Roche-Sauveur demande et exige 600 quintaux de froment, 140 d'avoine, 100 de paille, 200 de foin. La commune ne peut satisfaire à tout, réclame, et fait observer qu'elle vient déjà de fournir sept quintaux d'avoine à l'étape de Muzillac, et 36 à la gendarmerie du même lieu. — A une autre requête elle répond : — « En vertu de la loi du 19 octobre 1790, nous avons envoyé au district cinq calices et cinq patènes, un ostensoir, un ciboire, des custodes, pesant 21 marcs d'argent. Nous en avons conservé le reçu. Les ornements furent brûlés par Le Batteux, le 11 frimaire dernier »

Le 14 septembre, l'agent national publie un décret de la République concernant la mendicité, et prie tous les pauvres de venir recevoir un secours accordé par elle.... Il ne manquait pas de pauvres ; aucun ne se présente. 

Le 6 octobre, on reçoit l'ordre de faire vendre les blés noirs de plusieurs réfractaires insoumis encore, et de conduire à Muzillac les cochons gras, au-dessus de huit mois. — On reçoit une adresse des détenus de Vannes, le 8 octobre. Ils exposent leurs motifs d'élargissement, fondés sur leur "inculpabilité". Le 10, la municipalité de Noyal-Muzillac approuve cette pétition et demande qu'on renvoie les détenus de la paroisse dans leurs foyers, comme on l'a déjà fait pour les districts de Vannes, Josselin et autres.

Le 28 octobre, deux commissaires arrivent. Ils exigent que l'on rende dans la ville de Rennes, sous quinze jours, 200 quintaux de foin et 150 de paille. On fournira, en outre, 140 quintaux d'avoine, et le tout, même le transport, aux frais de la commune. 

Le 1er novembre, Jean Fonchais, tailleur d'habits, se présente devant la municipalité. — « J'ai, dit-il, été nommé officier municipal par mes concitoyens, et toujours j'ai désiré répondre à leur confiance. Les événements malheureux qui ont frappé cette commune, les menaces personnelles qui m'ont été faites, m'avaient épouvanté. Craintif, j'avais quitté mon domicile, j'avais été mis au nombre des suspects. Ma femme est en prison à Vannes ; elle y languit depuis huit mois ; la proclamation du représentant du peuple Boursault m'a rendu l'espoir. Cependant elle ne me concerne pas, car je n'ai ni suivi, ni favorisé les ennemis de la République. Je viens de vous dire ce que j'ai fait, et vous le saviez. Je puis donc, à plus forte raison, compter sur ma grâce et sur celle de ma femme. Je vous prie d'intercéder pour moi auprès de l'autorité. Je vous donne ma démission, et je redemande mon domicile ». — Ce brave homme obtint ce qu'il sollicitait. 

Le 6 février 1795, la force armée entre à Noyal et contraint les habitants à transporter du bois de corde à Muzillac, pour l'usage de la troupe qui y résidait. — Depuis ce jour, jusqu'à l'an XI, notre registre des délibérations de la commune garde le silence. 

Le 16 mars 1802, on vote une imposition extraordinaire pour faire les réparations les plus urgentes à l'église et au presbytère. Une somme de 500 francs est allouée au recteur pour son existence annuelle ; les vicaires auront les offrandes des quêtes des fidèles. — La Révolution est passée.

(abbé Piéderrière - 1867)

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