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LES CÉRÉMONIES DE LA SEMAINE-SAINTE ET DES FÊTES DE PÂQUES A SAINT-PIERRE DE RENNES AU XVème SIÈCLE.

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Nous avons déjà eu occasion de faire des emprunts à un ancien recueil manuscrit intitulé : « Le Livre des Usages de liglise de Rennes, » qui fut rédigé en 1415, pour servir d'enseignement et de règle en ce qui concerne les rites observés dans le service divin de temps immémorial par le clergé et le chapitre de Saint-Pierre de Rennes. Ce vénérable document, conservé jusqu'à nous, est un témoin précieux des coutumes de nos pères ; et ceux qui aiment à se reporter aux anciens jours pour constater l'origine et la filiation des usages liturgiques, ceux qui prennent intérêt aux souvenirs de la piété des ancêtres le consulteront avec fruit.

Nous en détacherons, aujourd'hui, ce qui a rapport au cérémonial observé pendant la quinzaine de Pâques ; nous ferons observer qu'on retrouve parmi les rites usités à Saint-Pierre de Rennes une grande analogie avec ceux qu'a recueillis le savant bénédictin D. Martène (Tractatus de antiqua Ecclesie disciplina in divinis celebrandis officiis), surtout dans les livres sacramentaux, missels, rituels, bréviaires des anciens diocèses de France.

Au folio 17 du manuscrit de notre Cathédrale, se lit la rubrique suivante : « Toute lordrenance de la feste de Pasques, à commancer le jour de Pasques flories, et chacun jour de la sepmaine penouse. — Lordrenance du jour de Pasques et de la sepmaine ensevante est comme il en sieult ».

On sait que le nom de Pâques fleuries a désigné, dès le XIème siècle, le dimanche des Rameaux, à cause de la procession qui se fait en ce jour avec des palmes, des rameaux et des fleurs. « La foule, dit à ce propos Guillaume Durand, évêque de Mende, dans son Rational, court au devant du Seigneur avec des fleurs et des palmes, et nous aussi, nous devons lui offrir les fleurs de nos vertus et les palmes de nos victoires sur le péché ».

On appelait au moyen âge la Semaine-Sainte la Semaine penouse, « hebdomada, pœnosa, pœnalis », à cause du souvenir des souffrances de N. S. et de sa mort sur la croix, aussi bien que des jeûnes et des travaux de la pénitence qui devaient consacrer en ces jours la mémoire de la Passion.

Donc, le jour de « Pasques flories », voici les rites observés à Saint-Pierre de Rennes : « Et premier, len benesquit les rameaulx, [Note : L'usage de bénir et de porter en procession les rameaux, le dimanche avant Pâques, n'est pas antérieur au VIIIème siècle, suivant D. Marlène] à liglise, et d'ilec len sen va à Saint-Estienne en procession o les rameaulx, au sermon et au salut de la croez, et puis, du revenir, len dit à liglise la messe et l'office de la Passion Nostre Seigneur ».

Le mercredi de la sepmaine penouse « cessent les Houres [Note : Les Heures de N.-D., c'est l'office de la Sainte Vierge, que les chanoines récitaient en outre de leur office canonial] de N. D. en cueur jucques au lundi de Quasimodo. Et aux matines et tenèbres que len dit celui jour de mercredi, le tresaurier (première dignité du chapitre de Rennes) y doit treze cierges, chacun de demie livre ».

Le jeudi absolu, c'est-à-dire le jeudi saint, « après Prime et Tierce dictes, va la procession à la porte de liglise pour mettre les pénitenciers en liglise [Note : Il s'agit ici de la réconciliation et de l'absolution des pénitents qui se faisaient solennellement le jeudi saint, d'où lui est resté le nom de « Jeudi absolu »] ; et puis sen va len à la chappelle de la Cité ; et puis du revenir len vient au sermon... et va len à la Absolucion en après, et dilec à la messe et au service du Cresme ». — Et à la messe du jour, « le tresaurier doit fournir de quatre cierges pour l'auter [Note : L'autel, le maître-autel ; c'était une des charges incombant au trésorier, de fournir le luminaire pour le maître-autel pendant les offices] ; et doit fournir à la procession du Cresme, que len fait par liglise, de sept cierges. — Item, celui jour, après disner, la procession doit estre ordrenée à laver les aultex. — Item ès tenèbres et matines que len dit celui jour du Jeudi, le tresaurier y doit fournir de treze cierges, chacun de demie livre ».

Le vendredi « aouré et benoist » (le vendredi-saint) « y doit fournir le tresaurier, au mystère du jour, de quatre cierges; et y a procession par la Cerche [Note : La « cerche » ou « recherche », « circata » en latin, c'était le collatéral régnant autour du choeur et de l'abside, appelé encore « deambulatorium »] ; et doit estre portée la croez par un des seigneurs de liglise couverte jucques à l'entrée du cueur, que celui qui fait le mistère de l'auter la va encontrez et querre à lentrée du cueur. — A celui jour len doit monstrer et apparoir les Reliques ovecques la châsse de Saint-Goulvin [Note : Saint Goulven, évêque de Saint-Pol-de-Léon, célèbre par sa participation à la victoire du grand comte Even sur les Normands, et mort à Rennes dans le Xème siècle. Ses reliques étaient conservées partie à l'abbaye de Saint-Melaine, et partie à Saint-Pierre de Rennes] ».

Le « samadi veille de Pasques. — Après que len a leu les prophéties et fait en cueur la stacion de la Letanie, len va en procession feire les fons [Note : C'est-à-dire procéder à la bénédiction des fonts baptismaux] ; et les prieurs de St. Denis, de St. Morran et de St. Martin ont accoustumé à y porter les empoules [Note : Les ampoules, « ampullae » ; ce sont les urnes ou vases destinés à contenir les Saintes-Huiles et le Saint-Chréme]. — Et va len, celui samadi, après Complie, en procession et stacion solempnelle, en chappes d'or et de saye devant le crucifist, et non ailleurs ; — le cueur doit estre paré et tendu de ses draps moult honnestement [Note : C'est-à-dire garni de tapisseries, dont plusieurs avaient été données à cette fin par les Ducs de Bretagne et les anciens évêques de Rennes]. La Complie, dicelui samadi doit estre sonnée o prime et mathelin [Note : Ce sont les noms de deux cloches auxquelles on donnait le nom générique de « Sains », dérivé de l'italien « Segno », traduction du latin « Siguum » ; l'orthographe primitive était « Seint »] et puis o les deux gros sains de la tour ».

« Le jour de Pasques est double de toutes choses... o la plus grant sollempnité que len puet. Et avant la Messe, n'a stacion ne y a procession. Après disner y a sermon. Puis, après vespres, celui jour, il y a procession solempnelle en chappes dor et de saye, à aller ès fons o le cierge benoist et o les empoules que ont accoustumé à portez les­diz prieurs de St. Denis, St. Moran et St. Martin …  et fait len stacion devant le crucifist, et y dit len les versez accoustumés Exultemus, etc. — Il y a rastel [Note : Rastel, c'est une espèce de candélabre en forme de râteau à dents inégales, où l'on plaçait des cierges allumés] entièrement celui jour et à Complie quatre cierges. — A celui jour doivent estre monstrées toutes Reliques ès deux aultex, dune et autre partie de l'entrée du cueur.

Le lundi de Pasques, ... va la procession à St. Meleine chanter la grant messe, touz en chappes, si le temps n'empesche à porter chappes ; — item, après ves­pres d'icelui jour, il a procession ès fons et stacion tout en la manière du jour de Pasques.

Le mardi de Pasques,,... va la procession à St. George en chappes semblablement et dire la grant messe. Et à celui jour et lieu labesse et couvent de St. George doivent au colege de liglise de Rennes, bouillie de froment au leit, preste à manger et bien honnestement fecte et bien appareillée …. — Et au vespre d'icelui jour, après vespres de liglise, len va en procession ès fons en chappes, comme au jour de Pasques.

Le mercredi de Pasques, et tous les autres jours de la sepmaine de Pasques jucques au samadi, y a procession ès fons et stacion en la manière devant dite : et le chappelain qui fait l'office, les deux bacheliers et ceulx qui portent les empoules, y doivent porter chappes et non aultres ».

On voit, d'après ce texte, et en le conférant avec les anciens rituels de l'église de Tours, auxquels Dom Martène a fait de fréquents emprunts, que le cérémonial observé à Rennes pour la Semaine-Sainte et les fêtes de Pâques se rapprochait beaucoup des usages suivis dans l'église métropolitaine de Saint-Martin : notamment la coutume immémoriale de ces processions solennelles aux fonts baptismaux, pendant les vêpres du jour de Pâques et des jours suivants, se retrouve consignée dans l'ancien Ordinaire de Tours, cité par le docte bénédictin. Elle semble même prendre son origine au berceau du christianisme dans nos contrées ; car saint Paulin y fait allusion dans la Vie de saint Martin, et saint Grégoire de Tours en parle comme d'une coutume adoptée de son temps. (Voir D. Martène, De antiqua ecclesiœ diciplinœ in divinis celebrandis officiis, pages 502, 508, etc.). (P.D.V.).

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