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LA FÊTE DE NOËL A SAINT-PIERRE DE RENNES, EN 1415

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Le chapitre de la cathédrale de Rennes possède encore un curieux manuscrit rédigé au commencement du XVème siècle par Jehan de Beaumont, chanoine de Saint-Pierre de Rennes. Relié en veau gauffré et fixé sur ais de bois avec clous de cuivre fleuronnés aux quatre angles, ce volume, de format in-4°, contient 73 folios de parchemin numérotés sur le recto.

Sur le premier folio on lit le titre suivant : « Cest est le livre des usages de liglise de Rennes, fait et compillé en ce present an de grace mil quatre cens et quinze, extrait et assemblé de plusours livres et martiroges (sic) anciens dicelle yglise, avecques les recordz et avisemens de plusours notables anciens et expers personnes qui par longtemps ont veu gouverner liglise et mesmes esté au fait de lestat et gouvernement dicelle yglise, lesquelles choses doivent estre tenues pour vroyes et aprouvées, et dont len puet savoir par les faiz et anciens tesmoins dessur nommez ».

On y trouve jour par jour et fête par fête, dans l'ordre du calendrier ecclésiastique, les cérémonies et usages observés, au XVème siècle, dans l'ancienne cathédrale de Rennes. Il semblera curieux et intéressant d'en citer ce qui a rapport au cérémonial gardé à l'occasion des fêtes du temps de Noël.

Les jours qui précédent cette grande solennité sont marqués, dans la Liturgie, par le chant des grandes antiennes qu'on appelle vulgairement les O de l'Avent, parce qu'elles commencent toutes par cette exclamation. A Rome, elles sont au nombre de sept. Toutes ont rapport au grand avènement du Fils de Dieu dans le monde. Dans l'Eglise de Rennes, on en chantait huit, et par conséquent on les commençait le 16 décembre, jour de Sainte-Barbara, vierge et martyre. Voici comment notre manuscrit parle de cette coutume : « A cest jour se commencent les 00z de l'église de Rennes. — Pour savoir qui doit les ouyt 00 de liglise de Rennes : — Le mestre escolle (c'est-à-dire le « scolastique, une des dignités du Chapitre) doit le premier 0, et ensevantement selon qu'ils sont nommez : Larcediacre du Désert, Larcediacre de Rennes, le Tresaurier de Rennes, le Chantre de Rennes, le Chapitre de Rennes dous 00, et Monseigneur de Rennes le derrain et ouyctieme O. Et à celui derrain O doit estre fourni de quatre torches ardantes aux vespres de celi 0, comme au commencement de l'O ; et doivent ardoir (brûler) à Complies. Chacun des autres dessus nommez y doivent fournir, chacun à son 0, de douz torches semblables, qui doivent ardoir toutes celles torches de chacun 0, en la procession, lorsque len yra es hosteulx ou len tendra chacun O ; et durant le temps que len sera à les tenir, doivent estre alumées.

Pour savoir le service des 00. — Pour savoir le service qui y doit estre fait. — Les seigneurs et les gens de liglise, touz vestuz des draps de liglise, sen doivent ensemble aler de liglise honestement pour aler au lieu où len tient chacun 0. Les torches de l'O doivent estre portées ardantes devant elx, et pour ardoir durant l'O. Celui qui doit l'O, leur doit bailler et les faire servir honestement des bons et des grans vins et suffisans que len puet finer (trouver) en la ville et appartenances. Et, à leur venue, doivent estre serviz de vin, puis en après de bonnes et fines confectures et ensevantement de vin. Et en après raisonnable distance, len leur doit bailler et les en servir bonnes et fines dragées et confectures, puis après le bon vin. Et au service de l'O et de cestes choses, pourrait len bien qui voudroit, leur bailler neilles [Note : Ou « nielles, » sorte de pâtisserie légère], gauffres et pain, que a esté bien accoustumé à faire plusours foiz. E. qui plus reverentement le fait, il fait plus son honour et le honour de liglise. Et durant chacun O, le colége de liglise [Note : C'est-à-dire l'ensemble des chantres et des enfants de la Psalette, réunis à MM. les chanoines et aux clercs du choeur] doit paciennement et reverentement se contenir : il doit chanter hignes (hymnes) et chans diglise, tant de Noël, que dautres chans diglise. Et au départir de chacun O, il appartient bien et est raisonnable chose accoustumée que les gens du Cueur facent compaignie et honnour ès Seigneurs de liglise (c'est-à-dire aux chanoines), à sen aler o eulx à lours hosteulx et demores, et pour le honour de liglise.

..... Vigillia Nativitatis Domini. — Il y a rasture [Note Mesure de police intérieure, ordre à tous les gens du choeur de se faire raser la barbe et la tonsure sous peine d'être chassés du choeur] generale de tous ceulx de liglise, ou lesser (laisser) le Cueur et le service de liglise. La messe de vigille doit estre sonnée en double de tous sains [Note « Sains, » on appelait ainsi les cloches qui, à Saint-Pierre de Rennes, étaient au nombre de six] ... et ensuilt à la feste de la Nativité, et y doit le Tresaurier, de luminaire seix cierges outre son cotidian (c'est-à-dire ce qu'il en doit chaque jour). Celui Tresaurier fournit de luminaire à rastel [Note Sorte de candélabre en forme de rateau où l'on fixait des cierges], les premières Vespres, à Matines, es trois Messes et es secondes Vespres, à chacune dicelles houres de trente troys cierges, et ès dous Complies de la veille et du jour, à chacune quatre cierges. Et ny a, au jour de Noël, procession ne stacion accoustumée, s'il n'est dimaine (dimanche). Les Seigneurs auront chappes d'or, et les gens du Cueur chappes de soye.

NATIVITATIS DOMINI. — Nulle procession ne stacionny a. Le Tresaurier fournit de luminaire à rastel, comme dit est.... Et tous les seigneurs doivent estre en chappes d'or et les chapelains en chapes. Les sonneries doubles o grande sollempmité, et les distribucions doubles. Et là où elle avendra au dimainche, il y a stacion comme au jour de Pasques ».

Pour compléter ce qui concerne le cérémonial de la fête de Noël, voici un extrait d'une description inédite de l'ordre du choeur dans la Cathédrale de Rennes, avant 1754. « La sainte et sacrée nuit de Noël, au pupitre de Moyse tenant les tables de la Loi, qui est sous la lampe ardente, deux chapiers chantent les cinq versets du psaume par excellence, Venite exultemus. Ces deux voix, choisies entre les douze chantres, remplissent parfaitement bien ce premier morceau de l'office. Dans ce silence nocturne, l'organe de leurs voix charme et enlève les esprits et les coeurs jusqu'au triple trône de la Divinité : elles pénètrent de dévotion tout le peuple et attendrissent tout le monde : on se donne bien garde d'en interrompre l'harmonie. Pendant le chant majestueux et lent des trois psaumes du premier nocturne, l'Ecolâtre-Theologal-Scolastique arrive au choeur, vêtu d'un surplis de fin lin, d'une chape très-riche, portant sur le bras gauche l'aumusse, et tenant de la main droite son bonnet carré plié, précédé d'un massier tenant un pain de bougie allumé. Ce dignitaire annonce à huit MM. les chanoines, et en dernier au prélat, les neuf bénédictions qu'ils doivent demander et les neuf leçons qu'ils doivent lire successivement, durant les trois nocturnes de cette veille sacrée. L'évêque, pour lire la 9ème, demande la bénédiction et le Grand-Chantre le bénit. Le Te Deum terminant ces Matines augustes, est chanté très-solennellement. Au premier coup de marteau de l'heure fixée pour l'office du jour, à l'instant les portes sacristines s'ouvrent, les massiers entrent au choeur, suivis de deux cierges ardents : six jeunes ordinants portant les attributs épiscopaux, la crosse, les deux mitres, le chandelier du prélat, les parfums et l'encensoir ; les six chantres du second ordre ; les six autres chantres du grand lutrin ; les deux diacre et sous-diacre d'office ; les deux grands archidiacres, et le prélat suivi de ses valets de chambre et du suisse. Ces trois derniers dignitaires montent au trône, les autres se rendent au choeur, tous en leurs places, dans un profond et religieux silence. Le Grand-Chantre donne le signal que tout est disposé pour célébrer la gloire du Dieu trois fois saint, par le bruit de son bâton cantoral, et le Pontife commence aussitôt l'office sacré. Il n'est point besoin ici de livre de cérémonies : tous rubricaires et savans dans le culte de Dieu, chacun sait ce qu'il a à faire. Quelle gravité, quelle majesté dans toute cette auguste pompe ! Quel silence ! Les cantiques saints ne sont troublés ni interrompus, ni par le bruit des pas, ni par la toux ou les crachements. Rien ne ressemble plus au ciel que cette sainte congrégation ! » (P. D. V.).

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