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LA PAROISSE DE SAINT-AUBIN (après la Révolution)

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Construction de la Nouvelle-Église de Saint-Aubin.

 

1) Les Travaux Préliminaires

La vieille église de Saint-Aubin, avait échappé à la pioche des démolisseurs au moment de la Révolution. Rendue au Culte Catholique elle devint trop petite par suite de l'augmentation du chiffre de la population au cours du XIXème siècle.

Voici en quels termes le Conseil de Fabrique s'exprimait à ce sujet dans un rapport présenté au Conseil Municipal. Nous le reproduisons car les raisons que la Fabrique mettra en avant pour hâter la construction seront reprises par les Commissions des Travaux Publics et des Finances au sein du Conseil Municipal et serviront de base à la discussion du projet : « Plus de 8.000 habitants, un très grand nombre de familles laborieuses et pauvres animées de sentiments chrétiens qui se manifestent chaque jour par leur affluence à tous les exercices religieux, demandent à la ville de leur donner enfin une église assez vaste pour les recevoir. Une église vraiment digne du Culte divin. D'ailleurs le voeu de Bonne-Nouvelle et la dévotion au Rosaire attirent à Saint-Aubin un grand nombre de fidèles de toutes les paroisses de la ville [Note : Rappelons que Saint-Aubin à cette époque était le seul centre de dévotion Mariale. La statue de Notre-Dame des Miracles ne fut placée qu'en 1876]. De puissantes considérations de convenance et d'hygiène doivent déterminer un vote favorable du Conseil Municipal, car il est certain qu'une grande partie des habitants de notre pauvre paroisse si humble et si déshéritée entre toutes les églises de Rennes, ne trouve pas de place dans son étroite enceinte. Sous ces voûtes si basses, la foule des fidèles ne peut, pendant les offices solennels du dimanche, respirer un air salubre. Pour renouveler l'air les portes doivent rester ouvertes malgré les intempéries des saisons et le bruit de la rue. Un grand nombre de personnes ne peuvent assister à l'office divin qu'en remplissant la sacristie même et la cour sur laquelle ouvrent deux portes de l'église. Comment pourrait-il en être autrement ? L'élévation de la voûte de la grande nef est de 11m. 50 seulement sous la clef ; celle des bas-côtés est très inférieure. L'espace superficiel qui reste libre pour les fidèles, déduction faite du choeur, des fonts, des confessionnaux, est seulement de 400 m2. Cette surface à raison de 2 personnes par m2 ne donne que 800 places convenables pour une population qui dépasse 8.000 habitants. Pour placer 1.200 personnes, il faut remplir le choeur et la sacristie, laisser ouvertes les portes qui donnent sur la cour, où s'entassent les derniers rangs des fidèles ». Le rapport ajoutait en note : « Très fréquemment, les jours de fêtes, surtout, des personnes, indisposées par la privation d'air, sont obligées de quitter l'église pendant les offices. Si une Commission hygiénique était chargée de faire une enquête, il n'est pas douteux qu'elle reconnût l'insalubrité de l'église » (Rapport du 14 Mai 1875).

Déjà sous le rectorat de M. de Léon, en 1829, une démarche avait été faite auprès du Conseil Municipal [Note : M. de Lorgeril était maire à cette époque], pour entreprendre des travaux d'agrandissements dans l'église. La Municipalité avait voté 50.000 frs qui ne furent jamais versés, mais avait repoussé tout projet de reconstruction.

Le 14 Mai 1830, le Conseil de Fabrique, sans renoncer au plan de reconstruction de l'église, soumit au Conseil Municipal un nouveau projet. Il demandait de prendre l'église des Dominicains beaucoup plus vaste et plus aérée et de consacrer à sa restauration les 50.000 francs votés précédemment par la Municipalité. Comme l'église en question était occupée par l'administration militaire depuis le départ des Dominicains, on lui donnerait en échange la vieille église Saint-Aubin. La Municipalité qui avait accueilli très favorablement ce plan, fut obligée de démissionner à la suite de la Révolution de Juillet 1830. La poussée anticléricale qui se fit sentir au début du règne de Louis-Philippe ne permit sans doute pas de reprendre ce projet très heureux puisqu'il permettait de replacer l'Image de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle dans son cadre historique.

Sous le règne de Napoléon III, on fit encore une démarche auprès de la Municipalité pour reconstruire l'église de Saint-Aubin. Il y fut répondu par une fin de non-recevoir « Le Conseil Municipal, étant donné les charges écrasantes qui pèsent sur la ville, ne croit pas devoir donner suite à la demande de la Fabrique de Saint-Aubin pour la reconstruction de l'église qui est encore solide ».

Au cours de l'année 1872, une nouvelle demande fut adressée à la Municipalité. Le 21 décembre 1872, la Commission des travaux publics fut chargée d'étudier le projet, et l'année 1873 fut consacrée à l'étude d'un plan d'ensemble : où fallait-il situer l'église ? Les uns, dont M. Philouze (Président de la Fabrique), la voulaient en partie sur l'emplacement de l'ancienne, et dans la même orientation, les autres sur la place Sainte-­Anne et sur les terrains adjacents [Note : Ce projet entraînait une dépense de 1.500.000 francs d'expropriations]. Enfin d'autres préconisaient l'emplacement actuel de l'église au Nord de la place Sainte-Anne. Ce dernier projet (projet Martenot) fut adopté en définitive parce qu'il permettait de ne pas dépasser la somme de 700.000 francs pour les frais d'expropriations et parce que le Culte pourrait continuer dans l'ancienne église jusqu'à la construction de la nouvelle.

Quel style devrait-on choisir ? M. Martenot dans une lettre du 12 Juillet, ne le savait pas encore, mais déjà son plan était de faire une église de 72 m. de long, soit 58 mètres pour le vaisseau et 14 mètres pour la chapelle absidiale de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, mais l'église n'aurait eu qu'une seule nef [Note : Selon le modèle de la cathédrale d'Angers] et une seule tour.

Le 13 août 1873, le Conseil Municipal après avoir entendu le rapport de la Commission des travaux publics présenté par M. Le Pord fit admettre au Conseil l'utilité de reconstruire l'église Saint-Aubin. M. le Maire fut invité à faire étudier immédiatement un plan et un devis de construction.

Le 9 juin 1874, la même Commission des Travaux publics mit le Conseil Municipal au courant du projet de M. Martenot, mais comme celui-ci « ne connaissait même pas approximativement les dépenses qu'entraînerait l'exécution du projet » le Conseil Municipal ne prit aucun engagement.

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2) Le Traité entre la Fabrique et le Conseil Municipal.

Une Sous-Commission, établie au sein du Conseil Municipal, avait été chargée d'étudier la question de la construction d'une nouvelle église. L'architecte de la ville, M. Martenot, présenta un plan qui donnait toute satisfaction au point de vue artistique. La Sous-Commission reconnut l'insuffisance et le mauvais état de l'ancienne église, et admit l'emplacement proposé pour le futur édifice dans l'axe de la rue Châteaurenault [Note : L'un des membres de cette Sous-Commission voulait l'édifier plus à droite pour ne pas gêner la réalisation du plan d'une rue qui devait partir du Champ-Jacquet pour rejoindre plus directement la route de Saint-Malo]. Toutefois, elle ne manqua pas de signaler que les dépenses directes et indirectes seraient beaucoup trop élevées pour l'économie du budget municipal et semblait regretter les proportions que l'on voulait donner à la nouvelle église.

Voici comment cette Sous-Commission envisageait le total des dépenses :

Expropriations : 600.000 fr. [Note : Ces 600.000 frs. étaient pris en charge par la commune. On envisageait dans cette dépense les expropriations et le percé de la rue de Bonne-Nouvelle dans le prolongeaient de la rue Saint-Melaine].

Construction complète : 1.400.000 fr. [Note : Sanctuaire, transept et nef : 900.000 frs - Façade principale : 240.000 frs - Etages du Beffroy : 90.000 frs - Flèches : 170.000 frs].

Accessoires (vitraux, sculptures) : 300.000 fr.

Total : 2.300.000 fr.

La Commission des Finances, à son tour, discuta le projet. Quelques membres de cette Commission demandèrent de le réduire aux 10/11ème ; d'autres dirent qu'il fallait se contenter d'acheter les terrains strictement nécessaires [Note : A cette époque existait la rue Sainte-Anne, qui partait de l'angle des Halles pour aller rejoindre la rue Saint-Malo à peu près à la hauteur du transept ouest de l'église actuelle. La Municipalité désirait assainir ce quartier, et elle avait raison].

La Commission des Finances n'avait pas l'espoir d'achever complètement l'édifice. Toutefois on ne voulait pas le laisser à l'état de ruine neuve. Il suffirait « donc de construire le vaisseau principal et de laisser à nos enfants, même aux siècles à venir, le soin d'édifier les tours et la façade de Saint-Aubin ». Aussi pour le moment, la Commission des Finances, « n'entendait concourir qu'à l'expropriation des terrains et à la construction de la partie indispensable au culte ».

Le 13 Août 1875, les Conseillers municipaux discutèrent ferme le rapport de la Commission des Finances jusqu'à 11 heures du soir. Certains d'entre eux auraient voulu que l'on donnât moins d'importance à la chapelle de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle proprement dite, destinée à recevoir le Vœu, mais leurs collègues ne voulaient rien changer au plan de M. Martenot « pour cette considération que c'était par suite du culte pour un objet de vénération que les fidèles avaient donné et donneraient largement ».

La discussion du projet fut reprise aux séances du Conseil Municipal du 24 Novembre et du 1er Décembre [Note : A cette dernière séance, M. Lecourant proposa de construire pour abriter les gens un péristyle provisoire à la porte sud de l'ancienne église et d'édifier une nouvelle église « sur l'emplacement de l'ancienne prolongée jusqu'à l'alignement projeté ». Sa voix n'eut pas d'écho], mais rien de bien intéressant n'y fut décidé et il faudra attendre jusqu'au 4 décembre 1876 pour assister à la discussion au sein de l'Assemblée Municipale. Pendant ce temps la Commission des Finances avait travaillé et avait résolu de porter la subvention de la ville à 700.000 frs et de consacrer 100.000 frs à la reconstruction de l'école laïque de garçons qui se trouvait alors au nord-est de l'église actuelle [Note : A la suite du renvoi des Frères qui occupaient l'école de la rue d'Echange en 1881, cette nouvelle école fut affectée à l'instruction des filles. Mgr Saint-Marc avait offert à la municipalité de mettre un local dépendant du Grand Séminaire, rue Saint-François, à la disposition des maîtres et élèves pendant la construction de l'école et de l'église].

Les membres du Conseil Municipal se divisèrent en deux camps de force égale. Les bons arguments ne faisaient pas défauts aux adversaires. Exposons leur point de vue en toute impartialité.

Le groupe qui avait comme représentants de marque MM. Le Bastard, Fouqueron, Sirodot et Lecourant, demandait le remaniement des paroisses. Pour ces Messieurs une église de 500.000 frs aurait largement suffi. Le Conseil Municipal s'était déjà engagé dans une quantité de travaux. La question de l'adduction des eaux, alors au chapitre était beaucoup plus urgente. D'ailleurs les sommes recueillies par M. le Curé et les subventions de la ville seraient insuffisantes pour mener à bien l'entreprise... A quoi bon édifier une deuxième cathédrale ?... Pourquoi ne pas faire de la Métropole une paroisse ?

On le voit les arguments contre la construction de la basilique étaient de taille.

A cela, les autres membres du Conseil Municipal groupés autour de MM. Doret, adjoint, Jouin et Massieu, répondirent que M. le Curé de Saint-Aubin ne manquerait pas de trouver les fonds nécessaires, que la situation de la ville était assez prospère pour entreprendre ces travaux... que cette dépense était non seulement nécessaire, indispensable, mais obligatoire, que l'on pourrait contraindre la ville à la faire ; puis, ajoutait M. Jouin, « c'est un devoir moral d'assainir le quartier et de donner à sa population ouvrière, qui n'a d'autre consolation que la prière et les offices, une église qui fera honneur au Conseil Municipal à tous les points de vue. Jusqu'ici on n'a rien fait pour ce quartier pauvre et cependant au premier appel on a trouvé 400.000 frs [Note : C'était exagéré]. Or on demande une somme peu importante 700.000 frs. Le Conseil ne peut la refuser et doit profiter de l'occasion. La question des eaux n'est qu'une question d'emprunt qui ira toute seule. Ce serait un profond chagrin pour les habitants de voir le Conseil ajourner le projet » [Note : M. Massieu apporta un argument qui ne pouvait manquer d'impressionner les ennemis des Jésuites à supposer qu'il y en eut au sein du Conseil Municipal. « Le rejet du projet, disait-il, serait un acte d'intolérance. Les gens qui ont souscrit pour l'église porteraient leur argent chez les Jésuites ou ailleurs... Il y a même dans le cas présent un intérêt à les faire contribuer à l'érection d'un monument qui appartiendra à la ville »].

L'opposition ne s'avoua pas vaincue. Elle essaya de faire ajourner la question jusqu'au moment où celle des eaux serait résolue. Son amendement fut repoussé par 11 voix contre 12, grâce à M. Martin, maire, qui jeta sa voix pour faire pencher la balance. Une commission fut chargée de préparer un Traité avec la Fabrique de Saint-Aubin.

Le Traité fut signé le dimanche 8 Avril 1877 entre M. Pierre-Marie Martin, maire de Rennes, et MM. Philouze, Petit, Briand, de Lesquen, Samuel-Denis, Pinault, Dauphin, fabriciens, M. Charil des Mazures, curé. La ville s'engageait à verser 700.000 frs payables en 14 annuités à partir de 1882 « et sans que ce chiffre ne puisse être en aucun cas dépassé ».

La Fabrique s'engageait à trouver pour la même date 400.000 frs.

Le soir de ce jour mémorable pour les annales de Saint-Aubin, M. Charil des Mazures dut aller remercier Notre-Dame de Bonne-Nouvelle d'avoir aplani bien des difficultés. Mais son oeuvre ici-bas était achevée ; l'année suivante il était rappelé à Dieu.

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3) Les Débuts de la Construction (1882-1889).

Le 12 Janvier 1879, M. Durant prit possession de la Cure de Saint-Aubin. M. Martin qui assistait à son installation en profita pour faire « toutes les protestations de son plus grand dévouement pour l'oeuvre de N.-D. de Bonne-Nouvelle ».

Dès le début de son ministère, M. Durant eut quelques difficultés au sujet de la succession de M. Charil des Mazures. La situation de la Fabrique était loin d'être aussi brillante qu'on aurait pu le supposer. Il n'y avait en caisse que 150.000 frs : on était encore loin des 400.000 demandés par la Municipalité.

Le 2 Juin 1879, M. Durant fit au prône de la Grand'Messe l'exposé de la situation et demanda à tous de l'aider pour trouver l'argent nécessaire. Les journaux de Rennes, La Bretagne, L'Ille-et-Vilaine et Le Journal de Rennes reproduisirent son appel [Note : A ce sujet il n'est pas inutile de rappeler que le 10 août suivant, Mgr David, évêque de Saint-Brieuc, à la bénédiction de l'église de Saint-Quay, prononça les paroles suivantes « Nous n'avons pu nous défendre d'un sentiment d'envie bien légitime en pensant à notre église de Saint-Aubin de Rennes. Nous nous sommes dit que notre excellent curé et ses paroissiens seraient bien heureux le jour où il leur serait donné de voir Notre Vénérable Archevêque bénir la première pierre du sanctuaire projeté ».

Pendant ce temps la Municipalité s'occupait de l'expropriation des maisons de la rue Sainte-Anne. Il serait trop long d'entrer dans le détail de toutes les démarches faites auprès des propriétaires. Certains se montraient arrangeants, mais d'autres voulaient évidemment profiter de l'aubaine pour vendre des bicoques un prix assez élevé.

Le 29 novembre, M. Martin mis en minorité au sujet de la laïcisation des écoles municipales de garçons dirigées par les Frères (rues d'Echange et Saint-Melaine, et boulevard de la Liberté) donnait sa démission ainsi que M. Doret.

Le 26 janvier 1830, M. Le Bastard était nommé Maire. Les paroissiens de Saint-Aubin pouvaient se demander ce qui allait se passer. M. Le Bastard avait été un des plus ardents adversaires du projet du sanctuaire dédié à Notre-Dame de Bonne-Nouvelle. Heureusement, dans la circonstance, le Maire de Rennes oublia les raisons invoquées par M. Le Bastard, et, dès le 3 avril 1880, il chercha avec M. Durant le moyen d'activer les affaires de l'église. « Des intérêts religieux sont en jeu et vous les comprenez mieux que moi, dit-il, à M. Durant, mais il y a une question de travail et il nous en faut ». D'ailleurs la municipalité avait engagé sa signature et même avait demandé à la Fabrique une avance de fonds de plus de 100.000 francs pour l'acquisition des maisons qui devaient être démolies.

Le 30 juin 1880, le Conseil Municipal fit mettre en adjudication la démolition d'un certain nombre d'immeubles de la place et de la rue Sainte-Anne. M. Durant aurait voulu faire commencer immédiatement les travaux, mais il n'avait pas encore réuni les 400.000 francs exigés par la Municipalité [Note : Quelques dons arrivaient : 1.000 frs de M. Turgis ; 3.000 frs de M. Leray ; 20.000 frs de Mademoiselle Peluet, de Saint. Etienne. C'était bien insuffisant et M. Durant passait son temps à quêter. Le 24 Septembre, il écrivit à M. le Comte de Chambord, qui lui fit répondre par M. de Sèze que sa demande était prise en considération. De fait, il reçut le 4 mars 1881, une somme de 20.000 frs. M. le Maire lui promettait 1.000 frs.]. M. Le Bastard l'en dissuada en disant : « Moi je ne demanderais pas mieux, mais à votre place, je ne le ferais pas. Entre nous, dans le Conseil Municipal, tous ne sont pas disposés et voudraient bien reprendre les 700.000 francs » [Note : Beaucoup de conseillers croyaient qu'il serait impossible à la Fabrique de réunir 400.000 frs]. C'était un aveu catégorique. Cependant, M. Durant ne perdit pas courage, et le 12 septembre, le jour de la clôture de la Neuvaine, au prône de la grand-messe, il donna à ses paroissiens des paroles d'espoir. Il comptait sur le concours du Maire. L'année 1881 n'apporta toutefois aucune solution aux difficultés en cours [Note : Les plans de M. Martenot n'étaient pas prêts. Chose plus grave, les expropriations n'avançaient pas. Le 26 Octobre 1881, M. Le Bastard disait à M. Durant : « Plusieurs dans le Conseil vous sont bien hostiles. On me fera une objection sur l'emploi des 700.000 francs promis par la Ville. Si vous voulez avoir de l'argent tout de suite, vous perdrez sur l'allocation de la Ville. Vous ne la dépenserez donc pas toute pour la construction et le Conseil aura le droit de se plaindre. L'objection est grave, cherchez un moyen de la résoudre »].

Le 20 février 1882, la Fabrique de Saint-Aubin avait déjà versé 254.520 fr. à la Municipalité pour l'achat des immeubles et pour diverses indemnités, et le 10 mars, elle constatait qu'elle avait été créditée par la Mairie d'une somme de 373.627 fr.54 [Note : M. Durant était en possession de cette somme depuis le 16 Mars 1881]. Il lui restait en caisse 100.593 fr. D'autre part elle espérait recevoir 200.000 fr. de souscriptions, et ainsi, avec les 150.000 fr. (50.000 fr. par an) de subvention de la ville, elle pourrait disposer pour 3 ans d'une somme de 450.593 fr. Elle demandait à la ville de rendre disponibles les annuités de la subvention afin d'imprimer aux travaux toute l'activité désirable. Si cette autorisation lui était accordée, la Fabrique pourrait émettre alors 600.000 fr. d'obligations dont le remboursement serait annuellement effectué par les annuités de la ville. Ces propositions qui émanaient en partie de M. Gicquel, banquier, furent officieusement présentées par M. Le Bastard au Conseil Municipal. Une réunion importante eut lieu chez lui le 20 avril, en présence de MM. Martenot, architecte, et Mouton, secrétaire de mairie, de MM. Chochon et Marçais, adjoints. M. le Maire fit savoir à M. Durant que les propositions faites par la Fabrique paraissaient acceptables, mais « qu'un moyen de les faire adopter complètement et officiellement, c'était de prier les Fabriciens de s'engager individuellement, si besoin était, à payer ou plutôt à répondre des intérêts de l'emprunt ».

Pendant cette même entrevue M. Martenot fut prié de rectifier le devis. Il le porta de 900.000 à 970.000 francs et promit de faire exécuter le plan en 5 ans. Il n'était pas prophète...

Le Conseil Municipal dans la séance du 24 Mai constatait d'accord avec le Maire et la majorité, de la commission des finances, que la Fabrique de Saint-Aubin avait rempli ses obligations et que le moment était venu pour la Ville de remplir celles qu'elle avait contractées, c'est-à-dire fournir chaque année à la Fabrique, à partir de 1882, une subvention de 50.000 francs moins 73.000 francs, prix des immeubles précédemment acquis. Cet argent devait être affecté à la construction de la nouvelle église.

Mais devait-on laisser traîner l'entreprise pendant 14 ans, ou devait-on, à l'aide d'un emprunt, réaliser en quelques années la somme de 970.000 frs nécessaire d'après le plan Martenot ?

La Fabrique demanda l'autorisation d'émettre un emprunt de 400.000 francs à 4 % dont la totalité des intérêts s'élèverait à 32.800 francs. Le remboursement des obligations serait effectué par les sept annuités de la Ville, de 1886 à 1893.

La Municipalité émit un avis favorable à cet emprunt mais elle jugea qu'il devait être parfaitement compris qu'elle n'entendait garantir en aucune manière le paiement des intérêts des obligations et leur remboursement.

Le soir, à 11 heures, M. Durant était averti par un envoyé de M. Le Bastard de l'heureuse issue du débat [Note : Au cours de cette séance un des membres de la Commission des travaux publics, M. Fouqueron, avait essayé de créer des incidents pour empêcher la réalisation du projet. M. Fouqueron voulait étudier à fond la question des 400.000 francs exigés par la Municipalité. Pour lui, ces 400.000 frs n'existaient pas. « C'est simplement ridicule, répondit Monsieur le Maire, je ne peux pas croire que le Conseil s'oppose à l'exécution d'un pareil traité et nier sa parole. Dans ce cas, je m'en vais. Le principal c'est de commencer et de commencer tout de suite. S'il faut plus d'argent, le Curé qui a déjà 76 000 francs de plus qu'il n'était demandé par le traité en cherchera d'autre et en trouvera ». Le 25 Mai, M. Durant va trouver M. Mouton, secrétaire de Mairie. Il voit un homme démonté. La veille il avait eu une altercation très vive avec l'honorable M. Fouqueron qui avait l'audace de nier les chiffres de ses rapports : « Ils n'existent pas, c'est de la fantasmagorie, je veux voir les titres, les examiner, les palper. Les 400.000 francs ne sont pas réalisés. Le contrat par suite est résiliable ». Sans Monsieur Massieu, la dispute allait dégénérer en voie de fait]. Le 11 Novembre la construction de l'église était mise en adjudication. MM. Poivrel ayant proposé un rabais de 13 f. 85 % furent acceptés comme entrepreneurs [Note : La mise en adjudication des travaux fut faite sous les réserves suivantes :

a) L'architecte dans les ordres de service qu'il donnera ne dépassera jamais le montant des ressources versées par la Fabrique à la Caisse Municipale.

b) L'entrepreneur ne pourra réclamer aucune indemnité pour les retards quels qu'ils soient, qui pourraient se produire dans l'exécution des diverses parties de son entreprise].

A ce sujet, M. François Poivrel écrira le 30 Juin 1896 : « Par suite de conventions passées avec M. Durant lors de l'adjudication, mon rabais se réduisait à 5 % ». En effet, M. Durant lui avait remis le 12 novembre 85.845 frs de main à main. M. Durant tenait sans doute à avoir MM. Poivrel comme entrepreneurs. Il faut ajouter qu'il n'y eut en cette affaire aucune injustice vis-à-vis des autres adjudicataires puisque leur remise s'élevait au plus à 4 f. 05 %. Nous verrons par la suite que M. Durant a dû plus d'une fois regretter son geste.

« Il faut marcher et marcher rapidement » disaient MM. Durant, Martenot et Poivrel lors de l'adjudication. Un an après il n'y avait encore rien de fait. Toutes les maisons n'étaient pas encore abattues, la Préfecture croyait que l'intérêt de l'emprunt n'était pas suffisamment garanti par les souscriptions. Heureusement, M. Le Bastard fit agir des influences, et obtint, le 23 Juillet 1883 du Ministère des Cultes, le décret autorisant la Fabrique à faire un emprunt de 400.000 francs.

Enfin le 10 Septembre 1883, au prône de la Grand'Messe, M. Durant pouvait dire à ses paroissiens : « Ces jours derniers nous avons vu comme un bon augure la pioche des démolisseurs s'attaquer aux dernières maisons qui occupent l'emplacement de la future église, dans quelques jours le terrain sera déblayé et rien ne s'opposera plus aux satisfactions de notre légitime impatience. Nous savons d'ailleurs que l'administration municipale désire vivement de son côté le commencement sérieux des travaux et nous nous faisons un devoir de rendre hommage une fois de plus à sa loyale et bienveillante activité ».

Le 23 décembre, M. Martenot livrait les plans des fondations et le samedi 29, M. Poivrel disait à M. Durant : « Vous pourrez annoncer aux paroissiens que les travaux de l'église commenceront la semaine suivante ».

Dès le début on eut une grosse déception : les fouilles et les fondations donnèrent lieu à une dépense dépassant de 100.000 frs la somme qui avait été prévue. « On avait tablé sur les fouilles faites par la Ville pour le puits du marché de la place Sainte-Anne. Mais contre toute prévision on trouva à l'emplacement de l'église actuelle d'anciennes carrières très profondes qu'aucune tradition n'avait pu faire soupçonner ». (Rapport de Martenot).

Le 11 mars 1884, on coulait du béton, le 19 on commençait à maçonner et le 6 mai avait lieu la pose de la première pierre. Cette cérémonie a été décrite avec tous les détails dans la brochure de M. Philouze sur Notre-Dame de Bonne-Nouvelle.

Au lendemain de cette fête les travaux se ralentirent un peu trop au gré de M. Durant qui s'en plaignit amèrement dans une lettre adressée à Monsieur Poivrel, et datée du 27 octobre.

« Permettez-moi de vous faire observer que cette cessation des travaux est d'un effet déplorable. Les cancans se multiplient et les bruits les plus ridicules grandissent au détriment de notre oeuvre. Autant l'activité que vous avez mise dans la construction des fondations suscitait la générosité des souscripteurs et des obligataires, autant sont paralysés par l'état actuel du chantier le dévouement et le zèle. J'ai honte et ne sais plus que répondre à la curiosité inquiète et bien légitime de nos bienfaiteurs ».

La Semaine Religieuse du 20 septembre 1884 donne un extrait du sermon de M. Durant : « ... L'année dernière, à cette époque, on finissait d'abattre les maisons qui couvraient l'emplacement de la future église : aujourd'hui les fouilles sont terminées ... et les murs sortent de terre .... On n'a pas l'idée des sommes enfouies dans les fondations ; outre la subvention de 50.000 francs fournie par la ville, il m'a fallu verser 120.000 frs depuis le mois de juillet. Si j'ai pu jusqu'ici opérer ces versements, c'est grâce à l'emprunt et aux sommes qu'il a mises à ma disposition ..... J'entends dire que notre entreprise est effrayante. On compte les 600.000 francs que coûtera l'expropriation des terrains, les 170.000 versés actuellement pour les fondations, et l'on ajoute : que d'argent pour une église dont on voit à peine les murs ... ».

Suit un appel à la générosité dans lequel M. Durand cite en exemple deux ouvrières qui apportèrent l'une 2. frs, l'autre 6 frs.

Les travaux reprirent, et même le 17 juin 1885, M. Maniez, conseiller municipal, présentait une réclamation des tailleurs de pierre qui se plaignaient de ne voir que 21 compagnons sur le chantier. « M. Le Bastard répondit que la Fabrique avait déjà fait beaucoup plus qu'elle n'avait promis » [Note : Semaine Religieuse du 19 septembre 1885. «Tous peuvent constater aujourd'hui les rapides progrès qui ont été réalisés. Les murs de la nef se dressent, les soubassements de l'abside sont terminés, les piliers sont debout, et l'un d'eux arrivé à la hauteur du chapiteau laisse soupçonner la prodigieuse élévation de l'édifice. L'emprunt émis l'année dernière m'a procuré 322.000 frs : sur cette somme 3 versements ont déjà été effectués dans la caisse municipale, demain je dois en opérer un autre de 60.000 francs auxquels s'ajoutent 781 obligations de 100 frs qui sont encore en portefeuille ». M. Durant avait réussi à faire souscrire 1.416 obligations avant le 1er juillet 1884 et il en réunit 777 du 15 juillet au 31 décembre 1884, soit environ 360.000 frs].

Mais des nuages s'amoncelaient à l'horizon. M. Durant n'était pas au bout de ses peines. Le 16 octobre, le Maire lui fit entendre qu'il continuerait de donner chaque année les 50.000 francs pour les travaux alors que M. Durant comptait sur cette somme pour le remboursement de l'emprunt.

Dans la séance du 27 mai 1882, le Conseil municipal en émettant un avis favorable à l'emprunt de 400.000 francs par la Fabrique, avait bien spécifié que la ville « ne prenait aucun engagement, ni pour le paiement des intérêts des obligations, ni pour le remboursement ». M. Durant n'avait pas eu connaissance de cette clause (on avait oublié de lui envoyer copie du procès-verbal de la séance), et s'était fié à la teneur du décret ministériel du 23 juillet 1883, conçu en ces termes : « Le trésorier de la Fabrique est autorisé à emprunter une somme de 400.000 frs remboursable de 1886 à 1893 au moyen des ressources de la Fabrique et des remboursements votés par la Ville de Rennes ». De là naquit un grave conflit entre la Municipalité et la Fabrique.

M. Durant qui avait déjà versé à la Ville 230.000 francs provenant de l'emprunt, protesta auprès du maire contre cette décision du Conseil municipal, et le 26 janvier 1886, alors qu'on lui réclamait encore 7.000 frs, il écrivait : « Que veut la municipalité ? Que les travaux s'activent et que l'église soit terminée. Mais la ville s'y oppose en me forçant d'immobiliser ce que j'ai et n'ayant, elle, à offrir que 50.000 frs par an. Dans le cas contraire, je donne ce que j'ai au fur et à mesure des besoins, et la Ville sans rien ajouter à ce qu'elle a promis donne chaque année les 50.000 frs pour rembourser ceux qui ont prêté et avancé en quelque sorte à la Ville ».

La Municipalité ne voulait rien entendre, afin de bien montrer que c'était elle et non la Fabrique de Saint-Aubin qui fournissait du travail aux ouvriers. C'est alors que M. Gicquel voyant la situation très tendue, alla trouver le Maire et proposa un compromis que M. Durant, ratifia et exposa dans une lettre au Maire datée du 27 janvier. Il abandonnait à la Ville les 230.000 frs déjà versés et les 70.000 frs qu'il allait donner, ce qui portait à plus de 650.000 f. les sommes mises à la disposition de la Ville par la Fabrique. « Les autres sommes que la Fabrique devait reverser à partir de ce jour dans la Caisse municipale jusqu'à concurrence des 400.000 francs, seront considérées comme une avance faite à la Ville dont elle s'acquittera en consacrant chaque année les 50.000 f. d'annuité au remboursement de l'emprunt ».

Le 22 février, le Conseil Municipal se réunissait, acceptait les propositions de M. Durant et constatait que les termes du décret ministériel étaient en complète opposition avec la délibération du Conseil Municipal. Il lui fallut du temps pour s'en apercevoir [Note : Une difficulté était aplanie au prix de gros sacrifices de la part de la Fabrique. D'autres allaient surgir. M. Poivrel avait besoin de beaucoup d'argent, cela se comprend. M. Durant l'engagea (Lettre du 27 Octobre 1886) à modérer l'activité des travaux en lui disant que pour des travaux de ce genre « l'argent n'est jamais fait d'avance et que des déboursés plus ou moins considérables sont pour l'entrepreneur une quasi nécessité adoucie par les profits et compensations qui doivent suivre ». Dans cette lettre, M. Durant constatait qu'il avait déjà dépensé près de 900.000 frs. De temps en temps, M. Poivrel avait des sautes d'humeur. Il se disait le principal bienfaiteur ! Il allait fermer le chantier ! C'était impossible de continuer !, etc. Mais M. Durant restait calme sous l'avalanche : « Faites ce que vous voudrez, lui répondait-il, mais fermer le chantier n'est pas en votre pouvoir ». M. Poivrel se calmait. A cette époque il avait déjà reçu 700.000 frs et M. Martenot 14.560 frs].

Cependant les ressources diminuaient. Désireux de voir finir l'église, M. Martenot proposa d'employer la pierre de Caen. M. Durant lui répondit le 22 avril 1888 [Note : En 1887, M. Martenot ne savait plus exactement combien il fallait pour terminer l'église] qu'il « aimerait mieux qu'un autre finît l'église et ne la point voir achevée plutôt que de la voir achevée vaille que vaille. Employez la pierre de Caen partout où ne seraient engagées ni la beauté, ni la solidité de l'édifice ».

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4)  Premier procès Poivrel.

Au début de 1889, s'engagea un long procès qui mit aux prises la Fabrique, la Municipalité et l'entrepreneur [Note : M. Poivrel avait pris comme avocat M. Jenouvrier].

M. Poivrel réclamait une partie du 1 / 10° de la garantie qui s'élevait à 86.546 f. 50 — Il se basait sur le fait que le montant du devis primitif était atteint, bien que l'église fût loin d'être achevée. La Municipalité appuyait de tout son pouvoir la réclamation de l'Entrepreneur.

La Fabrique de son côté, se retranchait derrière les clauses du traité de 1877. Elle avait bien soin de rappeler que le devis des travaux dressé par l'Architecte n'avait point été soumis au Conseil de Fabrique. « On n'avait pas songé alors que son agrément fut nécessaire ou simplement utile ».

Sans doute par le traité de 1877, elle s'était engagée « à entreprendre, à ses risques et périls, la construction de l'église, moyennant la subvention de 700.000 francs, mais cela voulait dire seulement qu'elle s'efforcerait de trouver des ressources pour réaliser le plan imposé par la Ville ». D'ailleurs la Municipalité l'avait bien compris, puisque le 27 mai 1882 elle avait fait les déclarations suivantes : « Les travaux seront exécutés au fur et à mesure des ressources, conformément aux ordres qui seraient donnés dans la limite des fonds réalisés. L'entrepreneur ne pourra réclamer aucune indemnité si le défaut de ressources était une cause de retard ». Nous n'allons pas essayer de montrer qui avait tort ou raison dans ce procès et dans ceux qui vont suivre : Nous sommes encore trop près des événements. Il fallait cependant établir la situation anormale de la Fabrique chargée de faire exécuter un travail pour lequel elle n'avait même point été consultée en face de la Municipalité qui avait imposé les plans et qui ne consentait qu'à être une intermédiaire entre la Fabrique et l'Entrepreneur.

Dans cette première difficulté avec M. Poivrel, la Fabrique consentit pour ne pas retarder la marche des travaux à verser la moitié de 1 /10 de la garantie.

Elle ne pouvait pas faire autrement, car dans la séance du 4 juin 1889, le Conseil Municipal avait émis un avis favorable à la demande de subvention de 150.000 frs qu'elle avait adressée à l'Etat le 9 mai précédent [Note : Dans cette lettre adressée au Ministre des Cultes, la Fabrique constate qu'elle a déjà recueilli plus de 700.00O frs en dons, souscriptions et legs, et que son emprunt de 400.000 frs lui a permis de verser 1.100.000 frs].

Dans sa réunion du 21 août, le Conseil général, présidé par M. de la Borderie, sur le rapport de M. Delabrosse, vota une subvention de 500 francs à l'église de Saint-Aubin et décida que cette église aurait le n° 3 dans les propositions pour les secours demandés à l'Etat. Cette demande resta sans effet.

Le 30 août, le Cardinal Place, archevêque de Rennes, prescrivit dans son diocèse une quête tous les ans à la fête de la Nativité jusqu'à l'achèvement de l'église. Longtemps M. Durant avait demandé cette lettre et cette quête. La première quête rapporta 10. 467 f. 20.

Au mois de septembre 1889, M. Martenot ayant constaté que l'entreprise Poivrel avait reçu 20.000 f. de plus qu'il n'était dû pour les travaux en cours, refusa de lui délivrer les mandats de paiement.

A partir de ce moment les travaux continuèrent sans l'intervention de la Fabrique ni de la Municipalité. M. Durant ne voulant pas laisser les travaux en suspens versait des accomptes aux entrepreneurs sans mandat de l'architecte.

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5) Les Garants de Marie.

Voulant venir en aide à M. Durant harcelé par les demandes de remboursement, M. Gicquel étudiait un moyen d'avoir de l'argent. Le plan qu'il élabora de concert avec M. Philouze fut la base de l'Institution des « Garants de Marie » qui fut approuvée par le Cardinal Place le 9 avril 1890.

« Il faut, disait M. le Curé dans l'appel qu'il lança, pour livrer au culte la nouvelle église de Bonne-Nouvelle encore une dépense de 500.000 fr. Avec cette somme mise entre ses mains, l'entrepreneur s'engage à la terminer en dix-huit mois... Que six cents personnes consentent à garantir chacune 1.000 francs, et les 500.000 francs nécessaires au prompt achèvement de Bonne-Nouvelle sont assurés, ainsi que les intérêts des sommes que l'on serait obligé d'emprunter. Le " Garant de Marie " recevra un parchemin constatant la part glorieuse qu'il aura prise à l'édification de l'église et qui constituera pour la famille un véritable titre de noblesse. Un tableau contenant les noms de tous les " Garants " sera placé dans la chapelle de l'image miraculeuse et une messe sera dite à perpétuité pour eux et à leurs intentions pendant l'octave de la Nativité de la Sainte Vierge » [Note : Au mois d'octobre suivant un appel fut adressé aux membres du Conseil Général et aux Députés et Sénateurs catholiques du département, dans lequel on demandait à leur piété et à leur patriotisme breton de concourir à l'édification du Sanctuaire afin d'appeler les bénédictions de Dieu sur leurs familles, sur la ville de Rennes et sur la Bretagne. M. Durant n'a pas noté les résultats de cette démarche].

Au cours de l'année 1891, grâce aux « Garants de Marie », les travaux purent avancer sérieusement [Note : Les ogives de l'étage supérieur du choeur furent achevées fin juin. La charpente fut terminée pour le 26 septembre] et le 6 janvier 1892 M. Durant constatait qu'il avait remis aux entrepreneurs 258.075 francs.

Mais ceux-ci obsédaient tellement M. Durant qu'il refusa de continuer à verser de l'argent sans savoir où il allait. Le 22 juin 1892, il écrivit à M. Martenot en le priant de vérifier les mémoires de MM. Poivrel [Note : A cette époque M. Poivrel estimait avoir dépensé 1.367.166 frs et n'avoir reçu que 1.157.191 frs].

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6) La Fabrique demande une seconde Subvention à la Ville.

Les ressources allaient de nouveau en diminuant, et, le 17 mai 1892, le Conseil de Fabrique demanda une nouvelle subvention à la Municipalité : « Le Conseil de Fabrique considérant que les expropriations du vaste périmètre qui entoure la nouvelle église se sont élevées à un chiffre qui dépasse de 200.000 francs les estimations de l'expert de la Ville et que ces expropriations ont absorbé presque entièrement les subventions de la Ville [Note : Les indemnités s'étaient élevées à 600.000 fr. Il faut remarquer que si les expropriations ont atteint un si gros chiffre, c'est que le périmètre en a été étendu bien au-delà de ce qui était nécessaire pour la construction et dans un intérêt général qui est celui de la Ville plus que celui de la Fabrique. Dans ces conditions, les charges de la Fabrique se trouvent accrues dans une mesure imprévue (Extrait du rapport de la séance du Conseil municipal du 10 juin 1892)], a émis le voeu que le Conseil Municipal consentît à voter de nouvelles annuités compensant cet excédent imprévu du prix des expropriations qui ont embelli et assaini ce quartier ».

Le Conseil de Fabrique en conséquence demandait à la Ville 200.000 fr. payables en dix ans.

Cette demande de la Fabrique était pleinement justifiée, mais la Municipalité, dans la séance du 10 juin 1892, se retrancha derrière le traité de 1877. M. Maloeuvre, rapporteur, déclara « que le périmètre des immeubles n'avait pas été étendu au-delà de ce qui était nécessaire pour la construction et le dégagement de l'église projetée, car je suppose (c'est M. Maloeuvre qui parle) que le Conseil de Fabrique n'a jamais eu l'intention de n'acquérir que les immeubles devant servir à l'emplacement de l'église [Note : C'eût été pourtant très légitime puisque c'était la Municipalité qui avait choisi l'emplacement et imposé les plans] qui n'aurait eu aucun débouché et dont la construction eût été rendue impossible ».

Pour justifier son refus, M. Maloeuvre déclara « que la ville avait été obligée d'acquérir d'autres immeubles vers la rue Saint-Melaine et regrettait même que ces derniers immeubles n'eussent point été compris dans le périmètre indiqué ». Le Maire fit remarquer qu'il y avait tout un programme de travaux fort considérables sur lequel les électeurs avaient voté. Saint-Aubin n'était pas compris.

M. Loiseleur mit les choses au point : « Le chantier de Saint-Aubin est un chantier principal comme les autres, dit-il. La rue Saint-Malo n'a pas de débouché, il faut donc démolir l'ancienne église au plus tôt. De plus : si l'on veut faire le percé du Champ-Jacquet, il faut achever l'église rapidement ». C'était le langage du bon sens, mais c'était peine perdue. M. Le Bastard répondit que les électeurs s'étaient prononcés contre [Note : Au début de l'année, il y avait eu des élections municipales et la liste d'opposition avait demandé la continuation des travaux de Saint-Aubin] et que la rue Saint-Malo allait avoir un débouché au chevet de la nouvelle église [Note : Pour se rendre compte à quel point la Fabrique était aux abois, rappelons qu'elle eut l'idée de demander à la Municipalité la jouissance de l'ancienne église et de ses dépendances pour 15 ans à partir de l'ouverture de la nouvelle. Elle espérait tirer quelque profit de sa location. La Municipalité eut alors la  « bonté » d'accorder cette demande, mais en Mars 1835 la Fabrique constatait que la location de cette église désaffectée ne pouvait donner, pratiquement, aucun résultat appréciable]. Les 200.000 francs furent refusés.

M. Le Bastard mourait subitement le 28 juin suivant. M. Morel fut élu maire et le Conseil de Fabrique fit une nouvelle tentative pour obtenir au moins 150.000 fr. de la Municipalité. Cette demande fut encore rejetée, à la séance du Conseil Municipal, le 23 décembre suivant, malgré les bonnes intentions du Maire qui avoua bien simplement aux fabriciens que le « Conseil Municipal n'était pas toujours de son avis ».

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7) Deuxième procès Poivrel.

Au cours de l'année 1893, les frères Poivrel se séparèrent et demandèrent de retirer le cautionnement de 41.782 fr. 75 et d'autoriser l'un d'eux M. François Poivrel, à le toucher. La Municipalité demanda alors à la Fabrique de consentir à la proposition. Celle-ci répondit que la Ville seule pouvait statuer sur cette réclamation et que d'autre part la Municipalité n'avait pas le droit de modifier le devis et d'augmenter dans d'énormes proportions les charges de la Paroisse. De là, nouveau procès qui dressa les uns contre les autres, Fabrique, Municipalité, architecte et entrepreneur. L'affaire fut portée devant le Conseil de Préfecture, mais ce dernier n'eut pas à se prononcer. Le 4 février suivant, M. Poivrel retira sa demande.

Le 5 janvier 1894, M. Martenot ayant vérifié les mémoires de l'entrepreneur opéra sur ceux-ci une rédaction de 131.000 fr. et constata que la Fabrique avait versé 14.000 fr. de trop.

Tant de difficultés avaient ébranlé sérieusement la santé de M. Durant qui tomba malade. M. de la Villeaucomte, ancien vicaire lui fut adjoint comme vicaire-administrateur. Jusqu'au 3 mars 1894 les travaux furent interrompus. La Fabrique était laissée à ses propres forces et ne pouvait plus faire grand chose. On avait déjà tellement demandé aux fidèles ! Cette construction paraissait un gouffre dans lequel s'engloutissaient des milliers et des milliers de francs. Il fallait encore 400.000 francs. Les travaux reprirent encore un peu le 3 mars 1894. Pour trouver des ressources, un comité de dames patronesses fut fondé. Mais malgré la bonne volonté de ces dames, les résultats furent maigres.

Cependant M. de la Villeaucomte avait confiance. Le Journal de Rennes fait écho aux paroles qu'il prononça le dimanche de la Nativité 1895 au prône de la Grand'Messe. Depuis près d'un an les travaux ont repris, les rosaces sont terminées [Note : M de la Villeaucomte, avait repris les travaux presque à titre personnel, en passant un marché avec M. Poivrel pour un travail bien déterminé : La Rosace du transept ouest], on travaille au pignon du transept. Afin de permettre à tous de participer à l'oeuvre commune, M. de la Villeaucomte avait créé des actionnaires et des obligataires de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle. Les actions étaient de 300 fr. et les obligations de 100 fr. Dons purement gratuits dont le revenu le plus net et le plus appréciable était la très efficace protection de la Très Sainte-Vierge.

A la fin de 1896 une nouvelle demande de subvention annuelle (20.000 frs) fut adressée à la Ville. A cette époque on espérait encore finir avec 500.000 frs [Note : Il restait à faire : les arcs-boutants, la couverture des bas-côtés, les voûtes intérieures, les meneaux et roses des fenêtres, le dallage et les autels. La Fabrique accusait avoir dépensé 1.350.000 francs]. Dans la séance du 23 décembre, M. Poulin, Maire, fit refuser cette subvention.

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8) Troisième procès Poivrel.

Le 4 juillet 1896, M. Poivrel demanda des intérêts, pour le retard apporté dans le payement des indemnités. La Fabrique répondit qu'elle avait versé 14.000 francs de plus qu'il n'était dû, sans faire la retenue qu'elle pouvait exiger. Les travaux furent de nouveau interrompus à la fin de la même année. La Fabrique aurait encore voulu arranger les choses à l'amiable mais, M. Poivrel intenta un procès à la Ville. Ce fut un beau tapage au sein du Conseil Municipal. Un des édiles, M. Legros, ne put s'empêcher de manifester son indignation : « Nous avons fait un beau cadeau, le procès est le résultat bien inattendu de la générosité de la Ville. C'est un avertissement et si jamais le concours de la Municipalité était demandé pour une oeuvre semblable, elle aurait à y regarder de très près avant de l'accorder ». M. Legros n'avait pas raison de parler ainsi.

1° La Municipalité avait donné 700.000 francs. Certes le geste avait été généreux, mais nous l'avons vu, c'est la Ville seule qui avait profité de sa propre générosité en assainissant un quartier de la ville.

2° C'est la Municipalité qui avait imposé l'emplacement et surtout les plans d'une église aussi vaste. Elle se devait donc d'en hâter la réalisation.

3° Si les travaux ont traîné en longueur, c'est grâce à elle, à cause des attermoiements. Une fois le plan voté, elle aurait dû presser l'architecte et l'entrepreneur et faire un contrôle sérieux des dépenses. D'après le traité de 1877, Art. 11, une commission spéciale composée de 2 conseillers municipaux, du Curé et de 2 membres de la paroisse devait être chargée sous la présidence du Maire de surveiller les travaux au point de vue de la stricte exécution du projet approuvé. Cette Commission ne s'est jamais réunie. A mesure que les années passaient les frais devenaient plus élevés et en définitive l'église telle que nous la voyons coûtera deux fois plus qu'on ne l'avait prévu.

L'affaire fut encore une fois portée devant le Conseil de Préfecture. M. Durant mourait au mois de décembre 1897, sans avoir vu achever son œuvre. A son discours d'installation (29 janvier 1898) M. de la Villeaucomte ne désespéra pas de mener à bien l'entreprise.

Le 8 février suivant M. Lejat, maire de Rennes, s'occupa de la reprise des travaux, espérant ainsi se débarrasser du procès ennuyeux intenté par M. Poivrel. De fait au mois de septembre 1898, M. Poivrel écrivait qu'il consentait à reprendre les travaux sous la direction de M. Leray, architecte de la Ville [Note : Depuis 1894 M. Martenot avait été remplacé par M. Leray comme architecte de la Ville, mais avait continué à surveiller les travaux de Saint-Aubin. M. Leray estimait que l'église pouvait être terminée avec 555.594 frs 45. Voilà au moins qui était précis].

Le 31 mai 1899, le Conseil Municipal votait la continuation des travaux en décidant que la Ville garantirait une subvention annuelle de 6.250 francs pendant 40 ans ; mais la Fabrique s'engageait à verser à la Caisse Municipale dans les 5 ans 300.000 f. [Note : M. Legros ne prit pas part au vote]. Le ministre des Cultes refusa d'approuver ce vote.

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9) Procès Martenot.

Un procès était à peine terminé qu'un autre commençait. Dans la convention passée entre le Conseil Municipal et la Fabrique, du 15 juin 1389, il fut décidé « que les travaux seraient exécutés conformément aux plans et devis de M. Leray, architecte de la Ville. Cette convention fut adoptée par le Conseil Municipal, par le Conseil de Fabrique et approuvée par le Préfet ».

M. Martenot se trouvant lésé dans ses droits réclama à la Fabrique 4,5% pour les travaux exécutés et réglés, 3,5 % pour les travaux exécutés et non réglés, 3 % pour les travaux non exécutés, au total 77.504 frs 61.

La Fabrique n'avait été pour rien dans le changement d'architecte. C'est elle encore qui sera obligée pour éviter les longueurs d'un procès devant le Conseil de Préfecture d'accepter une transaction, et de verser à M. Martenot 22.000 francs le 20 mai 1902. M. Martenot avait reçu de la Fabrique, au cours des travaux, la somme de 30.160 frs.

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10) Achèvement de l'Eglise Actuelle.

Les travaux reprirent le 15 septembre 1900, M. de la Villeaucomte pouvait dire aux paroissiens en annonçant la construction de la chapelle des Catéchismes : « Pas d'optimisme outré, pas de pessimisme désespérant, il faut le temps. L'on a fait très grand, nous le concédons. Pourquoi des récriminations inutiles. Je dois vous déclarer que, depuis la reprise des travaux en 1895, je n'ai pas dépensé un centime officiel, et cependant les paiements se chiffrent à 200.000 francs. Tous ces dons n'ont eu qu'une même origine : la charité » (Semaine Religieuse).

Puisque la combinaison du 31 mai 1899 avait été refusée en haut lieu, M. Pinault, Maire, proposa une autre solution. Le 23 novembre 1900, le Conseil de Fabrique prit l'engagement de verser à la Caisse Municipale la moitié de la somme représentant l'annuité à payer pendant 30 ans pour l'intérêt et amortissement d'un emprunt de 300.000 frs au Crédit Foncier, soit environ 8.000 à 8.500 frs par an. L'autre moitié devait être payée par la Municipalité. « Aussi, ajoute le rapporteur de la séance du Conseil Municipal du 23 février 1901, puisque la reprise des travaux a été faite avec les seules ressources de la Fabrique, M. Pinault propose de verser 50.000 frs sur les ressources libres de la Ville et de faire, au nom de la Ville, l'emprunt au Crédit Foncier [Note : M. Aubrée, conseiller municipal, protesta : « Il y avait des travaux à faire dans les hospices, écoles, etc... Si ces Messieurs désirent terminer l'église, qu'ils fassent moins de quêtes pour le denier de saint Pierre qui n'a pas besoin d'argent et plus de quêtes pour terminer leur basilique. S'ils le voulaient sérieusement, elle le serait depuis longtemps. Ils sont tous romains et pas assez français ». M. Pinault obtint un vote de confiance. Les travaux alors s'activèrent et le 17 janvier 1902, la Semaine Religieuse faisait connaître la situation. Les échafaudages extérieurs sont enlevés. Il reste à faire les travaux de l'intérieur, à placer les vitraux et à faire la sacristie].

« Les 300.000 frs empruntés au Crédit Foncier furent bientôt épuisés, il fallait encore 60 à 70.000 f. Un nouvel appel fut lancé pour obtenir cette somme ». Cet appel fut renouvelé le 23 mai et le 11 juillet. M. de la Villeaucomte réussit à trouver ce qui lui manquait. L'église telle qu'elle est a coûté 2.547.442 fr. 96. La Fabrique, à elle seule a trouvé 1.497.442 fr.. La Ville a donné 1.050.000 fr. car la Séparation de l'Eglise et de l'Etat a laissé pratiquement l'emprunt du Crédit Foncier à la charge de la Ville.

Enfin après 26 années d'effort, le nouveau sanctuaire fut livré au culte. Le jeudi 24 mars 1904 commencèrent les cérémonies d'inauguration. A 8 h. le clergé se réunit dans l'ancienne église et se rendit processionnellement à la nouvelle. M. le Chanoine Durusselle, Vicaire général, bénit l'édifice. Puis le clergé retourna chercher le Saint-Sacrement. La procession fit le tour de la place Sainte-Anne ornée d'oriflammes et la première messe fut célébrée dans le nouveau sanctuaire pendant que les chanteuses, formées par les Religieuses Servantes des Pauvres, faisaient entendre des motets grégoriens. C'était presque une nouveauté.

L'après-midi et dans la soirée il y eut différentes cérémonies et une procession du Rosaire. Les orateurs de cette journée furent MM. Plénel et Rondel, prédicateurs renommés de l'époque et anciens vicaires de la paroisse.

Le lendemain 25 mars à 7 h.3/4, tout était préparé pour recevoir S. E. le Cardinal Labouré. Au portail de l'église, M. Pinault, sénateur, maire de Rennes, entouré de ses adjoints et d'un grand nombre de Conseillers municipaux, adressa à l'Archevêque de Rennes une courte allocution dans laquelle il rappelait l'importance du culte de Notre-Dame de Bonne-Nouvelle. Il adressa un dernier adieu à la vieille église qui allait disparaître, fit l'éloge de tous ceux qui avaient participé à la construction du nouveau sanctuaire et souhaita l'achèvement rapide de ce qui avait été si bien commencé.

Le Cardinal Labouré répondit par quelques mots aimables et le cortège se forma. En tête marchait le suisse revêtu de son bel uniforme flambant neuf. Il paraît qu'il fit sensation ! ainsi que les « petits chanteurs de N.-D. de Bonne-Nouvelle » et ses chevaliers. La sainte Messe fut célébrée par le Cardinal.

L'après-midi l'inclémence du temps ne permit pas à la procession du Voeu de suivre le parcours marqué au programme des fêtes. On transporta directement le Voeu de l'ancienne église à la nouvelle.

Un orateur de talent, M. le Chanoine Daniel, curé de Saint-Sauveur de Dinan, fit un magnifique discours qui fut imprimé et dont les exemplaires s'enlevèrent rapidement, et le Te Deum retentit pour « la première fois sous les voûtes aériennes, en action de grâces au Dieu qui avait permis l'achèvement d'une oeuvre si magnifique ».

Quelque temps après, la pioche des démolisseurs s'attaquait à l'ancienne église. Les vieux paroissiens pleuraient.

A Rennes, on se souvient encore du pauvre clocher pointu qui ne pouvait pas supporter que les cloches sonnent sans se mettre lui-même en branle. Et ces litanies de la Sainte-Vierge chantées sur un rythme qui entraînait la procession au pas cadencé ; et la voix du vieux sacristain qui retentissait lugubrement à la tombée de la nuit : « On ferme ». L'écho de sa voix qui semblait sortir d'un tombeau se répercutait et faisait courir sur votre peau un léger frisson, avant-goût de la peur. Tout cela disparu à jamais ! Et pourtant ce n'est pas si vieux (l'abbé Henri Poisson).

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