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ENTRÉE SOLENNELLE DES ANCIENS ÉVÊQUES DE RENNES

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La première entrée d'un évêque dans la ville dont il porte le nom a toujours été une belle et imposante manifestation de l'esprit de foi. Au moyen-âge surtout on reconnaissait si bien la sainteté du caractère épiscopal que l'on rendait des honneurs extraordinaires aux prélats nouvellement nommés ; voici comment se faisait la réception solennelle des évêques de Rennes :

La veille du jour fixé pour la cérémonie, le nouvel évêque se rendait à cheval au monastère de Saint-Melaine, situé en dehors des murs de la ville, et dont l'abbé était tenu de lui donner à souper et à coucher, ainsi qu'aux gens de sa suite. Le baron de Vitré était obligé d'accompagner le prélat jusqu'à cette abbaye et de lui tenir l'étrier droit quand Sa Grandeur descendait de cheval ; en revanche, « ledit cheval avec son harnois et caparaçonnement demeurait audit seigneur de Vitré, comme a luy acquis à raison de ce service ». Entré à Saint-Melaine, où tous les moines venaient le saluer, l'évêque allait vénérer les reliques du monastère, acceptait le repas que lui offrait l'abbé et passait la nuit « en veilles et oraisons ». Le lendemain matin, l'abbé de Saint-Melaine, assisté de tous ses religieux revêtus de leurs plus précieux ornements, conduisait processionnellement le prélat de ce couvent à l'église paroissiale de Saint-Etienne ; cette église était alors considérée comme la première de Rennes, après la cathédrale, quoiqu'elle fut située dans un des faubourgs. Le recteur de Saint-Etienne attendait dans son cimetière l'arrivée de l'évêque, et ce dernier, agenouillé sur un prie-Dieu préparé à cet effet, prêtait entre ses mains un premier serment de fidélité aux coutumes du diocèse ; se relevant ensuite, le pontife entrait dans l'église et y trouvait l'attendant les dignitaires et les membres du Chapitre, ainsi que les quatre seigneurs principaux de l'évêché, auxquels incombait la charge de porter la chaise épiscopale. Après s'être revêtu de ses ornements pontificaux, l'évêque prenait place sur ce siège d'honneur, que soutenaient les barons de Vitré, d'Aubigné, de Châteaugiron et de La Guerche ; il s'avançait ainsi triomphalement, précédé d'une longue suite de chanoines, de prêtres et de religieux, et suivi de la foule. La procession s'arrêtait devant la porte Mordelaise qui se trouvait fermée : le capitaine ou le gouverneur de Rennes se présentait alors et l'évêque prêtait un second serment de respecter les franchises de sa ville épiscopale ; la porte s'ouvrait ensuite et l'on se remettait en marche ; mais à l'entrée de la cathédrale se tenait le trésorier ou un autre dignitaire du Chapitre. L'évêque, arrêté de nouveau, prêtait sur les saints Evangiles un troisième serment de respecter les libertés de l'église de Rennes ; il pénétrait enfin dans le sanctuaire, y adorait Dieu et y recevait les hommages de ses chanoines et de son clergé ; puis, se retirant en son palais épiscopal, il y offrait un dîner, à la suite duquel le seigneur d'Aubigné « se saisissait de toute la vaisselle qu'on y avait servie, pour récompense d'avoir soutenu un des pots de la chaire pontificale » (Dom Lobineau, Hist. de Bret. — Du Paz, Hist. généal. de Bret. — Le Grand, Chronologie des évêques de Rennes, etc.).

Dans la suite des siècles ce beau cérémonial subit quelques changements dont le seul très important fut la substitution, des quatre bourgeois de Rennes aux quatre barons du Diocèse. Malgré sa longueur, nous croyons devoir transcrire ici le procès-verbal de l'entrée solennelle du dernier évêque de Rennes avant la Révolution. Ce fut le 14 et le 15 septembre 1770 que Mgr François Bareau de Girac fit son entrée dans sa ville épiscopale. « Le vendredi 14 septembre, MM. le Mintier, de la Motte-Morel, de la Croix et Le Provost de Bourgerel (tous quatre chanoines) nommés par le Chapitre pour aller au devant du seigneur Evêque sont partis à cet effet en carosse vers les deux heures de l'après-midi, revêtus de manteaux longs et en chapeau, et se sont rendus jusqu'au pont de Cesson, où, après avoir attendu quelque temps ils ont apperçu le carosse de Monseigneur près d'arriver à l'endroit où ils s'étaient arrestés ; et étant descendus de leur carosse ils ont vu Monseigneur descendre du sien en rochet et camail pour venir à leur rencontre ».

« L'ayant abordé, M. Le Mintier lui a fait un compliment auquel Monseigneur a répondu de la manière la plus obligeante pour le Chapitre et pour ses députés. Ensuite ils l'ont prié de monter dans leur carosse, ce qu'il a fait ; il en occupait seul le fond, MM. le Mintier et de la Motte se sont placés sur le devant, et MM. de la Croix et de Bourgerel ont monté seuls dans le carosse du seigneur Evêque. Dans la marche on a suivy l'ordre accoutumé ; le carosse où était Monseigneur avec deux premiers députés était précédé de la maréchaussée qui vint à sa rencontre et suivi immédiatement du carosse ou étaient montés les deux autres députés ».

« Cependant MM. du Chapitre s'étaient assemblés après complies au son de la cloche capitulaire, et de là s'étaient rendus chez les Pères Bénédictins à l'abbaye de Saint-Melaine ; entrants par la porte de côté dans le cloître, ils avaient été conduits dans la grande salle où ils attendirent Mgr. dont l'arrivée fut annoncée par le son de toutes les cloches de la ville au moment qu'il descendit dans la cour de Saint-Melaine. Il y fut reçu selon l'usage, par les religieux de l'abbaye ; les quatre députés se séparèrent de lui et allèrent rejoindre leur compagnie ».

« Peu de temps après, Mgr conduit par les RR. PP. Bénédictins entra dans la salle où M M. l'attendaient ; ils s'avancèrent au-devant de lui et lui firent tous ensemble une profonde révérence. Alors, M. le trésorier (Maurille Hay de Bonteville) prenant la parole, le bonnet en tête, lui fit au nom du Chapitre un compliment où il exprimait avec dignité les sentiments du corps ; Mgr lui fit une réponse remplie de tous les témoignages d'estime et d'amitié que pouvait espérer le Chapitre. Ensuite, avant de recevoir les compliments du clergé et des religieux entrés dans la salle, il monta dans la chambre qui lui était préparée, suivi de MM., auxquels il réitéra ses témoignages d'affection pour tous en général et pour chacun en particulier, lorsque M. le Trésorier les lui nomma l'un après l'autre. Ils lui demandèrent à quelle heure il désirait faire son entrée le lendemain, et s'étant informé de l'usage, il assigna aux neuf heures du matin son départ des Bénédictins pour se rendre à Saint-Etienne. MM. se retirèrent et retournèrent à la salle capitulaire dans le même ordre qu'ils étaient venus, et là il fut arresté que le lendemain l'on partirait à huit heures trois quarts pour arriver à Saint-Etienne avant Mgr. MM. les dignitaires (MM. Hay de Bonteville, trésorier, — de la Corbière, chantre, — de Caqueray, archidiacre de Rennes, — Gibon du Pargo, archidiacre du Désert, — et de Vendemois de Saint-Aubin, scholastique) et les quatre chanoines députés furent invités à souper ce même jour, avec Mgr chez les Pères Bénédictins ».

Le lendemain, samedi, 15 septembre, le Chapitre se rendit processionnellement de l'Hôpital Saint-Yves, dont la chapelle servait alors provisoirement de cathédrale [Note : La cathédrale de Rennes menaçant ruine avait été démolie en 1756], à l'église de Saint-Etienne.

« Les cloches de cette paroisse sonnèrent à l'arrivée de MM. du Chapitre, qui s'arrestèrent au bas de la nef, rangés en haie sur deux lignes. Quelque temps après arriva le Seigneur Evêque, précédé du clergé de Saint-Etienne en teste (qui était allé au devant lui), et des Pères Bénédictins de Saint-Melaine (qui l'avaient amené processionnellement) ; il était en rochet, camail et sans étole, sous un dais porté par quatre marguillers de Saint-Etienne. Au moment que Mgr entrait dans l'église, le premier massier lui mit un carreau sur lequel s'étant mis à genoux, il baisa la croix et prit de l'eau bénite au goupillon que lui présenta M. le Trésorier (considéré comme recteur primitif de Saint-Etienne), celui ci, après une profonde révérence au Seigneur Evêque qui s'était levé, se couvrit et le complimenta pour la seconde fois. Après la réponse, le chœur chanta en musique l'antienne Ecce Sacerdos magnus, durant laquelle Mgr, précédé de MM. du Chapitre avança vers le sanctuaire où les Pères Bénédictins occupaient le côté de l'évangile. MM. du Chapitre se placèrent du côté de l'épitre ; on avait eu soin de faire défendre l'accès par deux fusiliers envoyés exprès de la part du Chapitre. Après avoir fait sa prière au pied de l'autel, Mgr étant monté sur la plus haute marche, M. le trésorier lui donna l'étole à baiser et la lui passa au col, lui mit au doigt l'anneau pastoral, le revêtit d'une chappe, lui mit la mitre en tête et la crosse en main. Ainsi revêtu de ses habits pontificaux, Mgr donna la bénédiction au peuple et aussitôt la procession générale commença à défiler dans l'ordre accoutumé ; suivait sous un dais porté par les quatre marguillers, le Seigneur Evêque qui, durant la marche, donnait des bénédictions au peuple assemblé en foule ; en sortant de l'église, on chanta l'antienne Sacerdos et pontifex, et durant la marche on chanta successivement les hymnes Iste confessor, — Jesu redemptor, — Perpes corona, etc. ».

« Arrivé à la porte Mordelaise le cierge séculier et régulier passa outre et au moment que le porte-croix de l'église cathédrale toucha le pont (tombant sur les douves de l'enceinte de ville) la porte fut fermée, MM. les Echevins et Communauté de ville en corps étaient restés en dedans ; le sieur Minihy, en l'absence de M. le maire, avec deux autres Echevins, passant au milieu du Chapitre rangé en haie avancèrent jusqu'au dais pour faire prêter à Mgr les serments ordinaires et accoutumés ; après quoi ils retournèrent rejoindre leur corps, la porte fut ouverte, l'Eglise cathédrale entra et au passage du Seigneur Evêque il fut complimenté par un des Echevins et il lui fut présenté un dais de satin blanc parsemé d'hermines, garni de franges d'argent, chargé sur le fond et sur les deux pentes de côté des armes de Mgr et sur les deux autres des armes de la ville ; quatre Echevins le portèrent sur le Seigneur Evêque, précédés des tambours, fifres et trompettes de la ville et suivis des autres Echevins en habit de cérémonie jusque dans l'église, tandis que le chœur chantait eu plein chant l'hymne Exultet cœlum laudibus ».

« Au bas de l'église de Saint-Yves, vers le milieu de la nef était placé un prie-Dieu couvert d'un tapis avec un carreau sur lequel Monseigneur se mit à genoux et prit de l'eau bénite que M. le Trésorier lui présenta avec le goupillon ; puis se leva, bénit l'encens et fut encensé de trois coups par ledit sieur Trésorier, qui ayant rendu l'encensoir, et s'étant profondément incliné, fit au Seigneur Evêque une troisième harangue à laquelle Mgr ayant répondu, se mit de nouveau à genoux pour prêter les serments accoustumés. M. le Trésorier lui demanda par trois fois différentes : Est-ne ingressus tuus pacificus? et chaque fois Mgr répondit : Est pacificus ; M. le Trésorier ajouta : Juras-tu statuta libertates et consuetudines hujus Ecclesiae Rhedonensis servare ? Mgr répondit : Juro ; M. le Trésorier lui montrant le livre des Evangiles lui dit : Tange sacra. Mgr y portant la main répondit : Tango ; M. le Trésorier lui demanda en outre : Juras-tu bona hujus Ecclesiœ non alienare et alienata revocare pro posse ? Mgr répondit : Juro — Tange sacra, reprit encore le sieur Trésorier ; Mgr portant de nouveau la main sur le livre des Evangiles répondit : Tango ; alors M. le Trésorier le saluant lui dit : sic intrabis fidelis ».

« Aussitôt Mgr s'étant relevé fut conduit de la nef jusqu'à la porte du chœur, sous le dais, porté par les mêmes Echevins : MM. du Chapitre se placèrent dans les hautes stalles du côté de l'Epître, les PP. Bénédictins dans les basses stalles du côté de l'Evangile, le Seigneur Evêque entré dans le chœur alla se mettre à genoux sur un prie-Dieu couvert d'un tapis avec carreaux, placé entre l'Aigle et l'autel à l'endroit où est ordinairement le Moyse que l'on avait ôté [Note : L'aigle et la statue de Moïse tenant les tables de la loi étaient d'antiques lutrins provenant de l'ancienne cathédrale], et ensuite s'étant levé, M. Gibon de Pargo, archidiacre du Désert, et M. de Rommilley, chanoine, député pour faire la fonction de l'autre archidiacre, vinrent en chappes se placer à ses côtés et demeurèrent debout ; en même temps, M. Picaud de la Pommeraye, chanoine, député pour faire la fonction de chantre, entra au chœur, portant le bâton cantoral, précédé des deux chanoines assistants, du sous-chantre et des deux chappiers ; lorsqu'ils furent rendus à l'escabeau, la musique entonna le Te Deum, pendant lequel M. le Trésorier, revêtu d'étole et de chappe, vint accompagné du diacre et du sous-diacre aussi en chappes et se tint debout au pied de l'autel ; à la fin du Te Deum M. le Trésorier, après une profonde révérence au Seigneur Evêque et génuflexion au pied de l'autel, y monta, le baisa et se tournant du côté de l'Epître vers Mgr qui s'était remis à genoux sur son prie-Dieu, il chanta à haute voix l'oraison Deus fidelium pastor dans un livre soutenu par le diacre et le sous-diacre ».

« L'oraison finie. Mgr assisté des deux archidiacres avança au pied de l'autel où on lui mit la mitre en tête, ayant fait génuflexion, il monta à l'autel, le baisa et fut conduit à son trône pontifical, où il se plaça dans un fauteuil, ayant les deux archidiacres assis à ses côtés. Alors M. le Trésorier et les autres dignitaires et les chanoines chacun suivant l'ordre de sa réception se présentèrent, l'un après l'autre, au Seigneur Evêque et après une profonde inclination, baisèrent son anneau pastoral, l'embrassèrent aux deux joues et lui faisant une seconde inclination avant de se retirer, lui dirent : Ad multos annos pater reverendissime ».

Après le baiser de paix, auquel se présentèrent les sieurs semi-prébendés et le sieur sous-chantre, Monseigneur quittant son trône, vint au milieu de l'autel accompagné des deux archidiacres et donna la bénédiction solennelle ; ensuite étant descendu de l'autel, il entra dans la sacristie ; il y fut suivi de Messieurs qui le reconduisirent au palais épiscopal et entrèrent avec lui dans la salle de compagnie et quelque temps après se retirèrent ; alors arrivèrent MM. de Rommilley et de la Motte-Morel, en manteaux longs et bonnets carrés, précédés des deux massiers, pour présenter les honneurs du Chapitre consistant en douze petits pains de demi-livre et douze bouteilles de vin rouge ; et ainsi se terminèrent les cérémonies de la réception du Seigneur évêque » (Reg. des délibérations du chapitre en 1770 - Archiv. départ. d'Ille-et-Vilaine).

(abbé Guillotin de Corson et Extrait du Pouillé historique de l'archevêché de Rennes).

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