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LES TABLEAUX DU PEINTRE VALENTIN

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On s’imagine généralement que la chapelle de Kergoat possède deux toiles originales de Valentin. C’est là une erreur. Les deux tableaux qui figurent aux autels latéraux de la chapelle ne sont que des copies faites sur les originaux.

Extrait du Rapport de M. Desquatrevaux (2 janvier 1857).

Il y a dans la chapelle deux tableaux de Valentin. Voici un extrait de L'Armoricain, journal de Brest du jeudi 27 décembre 1838 (n° 842, feuilleton).

« Deux tableaux de Valentin. — Près de la forêt du Duc, versant de l’une des branches des montagnes noires, dans la belle chapelle du Kergoat, en Quéménéven, existaient deux tableaux, dons religieux de la piété des anciens seigneurs de Keroullas. Ces tableaux étaient de Valentin, mais livrée à l’humidité dans une chapelle environnée de bois, l’oeuvre de notre compatriote était menacée d’une destruction prochaine et les inhabiles réparations qu’y avaient déjà faites quelques ouvriers n’avaient pas peu contribué à en précipiter la perte, quand un jour le desservant de la paroisse, depuis longtemps préoccupé du riche dépôt qu’il possédait, invita deux amateurs de Quimper à venir reconnaître l’état où se trouvaient les tableaux de Valentin.

L’un de ces tableaux, le plus beau, était dans un tel délabrement qu’il fut mis en question s’il pourrait jamais être restauré. D’abord on eut l’idée d’en faire une copie et l’on regardait ce moyen comme seul possible de conserver la pensée de Valentin. A la réflexion et après un examen plus sérieux on s’est arrêté au parti de les transporter tous deux et d’en tenter la restauration.

Cette restauration vient d’avoir lieu au château de Kerem, près de Quimper, par les soins de M. Gowland, artiste et amateur anglais, qui habite ce lieu. Nous avons suivi de près cette restauration et nous sommes resté étonné du succès complètement inattendu que M. Gowland est parvenu à obtenir. Tout Valentin nous a en effet été rendu par les mains de M. Gowland et d’un jeune artiste nommé Ervago qu’il a constamment employé sous ses yeux.

Reportés sur de nouvelles toiles les deux tableaux de notre compatriote qui sont datés par lui de 1772 et 1774, peuvent durer encore longtemps et c’est réellement une bonne fortune pour le pays que de voir ainsi remis en état deux des morceaux les plus remarquables que nous ayons vus de l’artiste qui a laissé parmi nous une réputation si populaire et si méritée.

L’un de ces tableaux est en effet fort remarquable, une jeune femme encore au printemps de la vie et lorsqu’elle peut jouir de toutes les illusions que sa position et ses richesses lui assurent est tout à coup frappée et conduite à la porte de la mort. Ainsi menacée d’une violente séparation avec sa famille la marquise de Keroulas demande à être exposée aux yeux des siens sur une litière de paille, où le pasteur de Quéménéven vint la visiter et lui porter les dernières consolations de la religion. Son mari, ses enfants, le prêtre sont près d’elle, celui-ci la met en extrême-onction, les autres sont frappés de la douleur la plus vive.

De la fermeté dans le dessin, une vérité déchirante dans l’attitude et la figure de la Marquise, une entente habile et heureuse dans l’ensemble de cette scène forment évidemment de ce sujet une des compositions le mieux entendues que nous connaissions de l’école de Vien à laquelle appartenait Valentin.

Encore une fois donc nos empressés et sincères remerciements à M. Gowland et au jeune desservant de Quéménéven pour l’éloge mérité que sa sollicitude éclairée appelle suivant nous. Car comme nous le disions il y a peu de jours, l’art fait partie essentielle du culte, et le catholicisme ne saurait jamais se passer du secours que les arts d’imitation peuvent lui prêter quand appliqués avec discernement ils fournissent un aliment aux nobles pensées ».

Et M. Desquatrevaux ajoute :

« Quoi qu’en dise L'Armoricain, article rédigé par M. du Chatellier, habitant Kerlagatu à l’époque, cette réparation n’a été que de courte durée, il paraît que l’on avait coulé sur le tableau un vernis qui a disparu au bout de deux ans, ce que voyant le conseil, il se décida à en parler à Mgr. Graveran qui l’autorisa, après qu’il lui fut prouvé qu’ils ne pouvaient plus être restaurés, à en faire tirer deux copies. Il indiqua M. Barret, professeur de dessin au collège de Quimper, comme étant le plus capable de ce travail. En effet, lorsque ces copies furent terminées, elles reçurent la visite de M. le Préfet, de Monseigneur, de MM. les Grands Vicaires et enfin de tous les amateurs de Quimper qui les trouvèrent bien exécutées et en firent l’éloge. Ces deux copies ont été placées à la chapelle le 12 août 1847.

Les originaux devenant inutiles à la fabrique, elle crut pouvoir en faire offre à Monseigneur qui les accepta pour sa chapelle.

M. du Chatellier dit que ces tableaux sont un don de la famille Keroulas ; cela peut être, car cette famille était très riche et en grande vénération dans la paroisse par sa piété et sa générosité. Cependant une délibération de juillet 1774 dit que la boiserie étant terminée, M. Maillard, recteur de la paroisse, fut autorisé par le Conseil à faire exécuter deux tableaux pour être placés un de chaque côté dans cette boiserie, on lui indiqua le tableau du saint Rosaire et celui des agonisants. Dans l’intervalle la Marquise de Keroulas sera-t-elle tombée malade ? ou aura-t-elle posé simplement ? on dit qu’elle revint de cette maladie et qu’elle émigra avec sa famille ».

Correspondance au sujet des deux Tableaux de Valentin [Note : Peintre célèbre, né à Guingamp le 10 avril 1738, mort à Quimper le 3 fructidor an XIII (21 août 1805). Sa tombe avoisine le porche de l’église de Kerfeunteun, où une plaque eu marbre blanc rappelle sou souvenir].

8 juillet 1845. — M. le Recteur de Quéménéven à Monseigneur Graveran.

« Ne lisant pas la Vigie du Finistère je ne sais ce que ce journal a pu dire au sujet des tableaux du Kergoat, ce qui est vrai c’est qu’il a été question il y a quinze mois (avril 1844) de les céder à la ville de Quimper à la condition d’avoir en échange des copies pour la chapelle. Voici ce qui a déterminé la fabrique à faire cette démarche. Depuis longtemps elle voyait avec peine les tableaux menacés d’une entière destruction, car le Kergoat est très humide et ils y sont depuis 1772 (1774). Comme je connaissais M. Gowland, artiste anglais, je fus chargé par mon conseil de le prier de vouloir bien les restaurer de son mieux afin de prolonger leur existence. Il se rendit avec générosité à ma prière et vint examiner l’état des tableaux. Il les trouva tellement abîmés que la seule réparation qu’il jugea à propos de leur faire fut de les reporter sur de nouvelles toiles. Après cette restauration qui eut lieu en 1838 ils sont restés assez bien pendant deux à trois ans et le 21 juin 1841, lorsque vous êtes venu ici ils vous ont paru encore passables, mais depuis ils se couvrent d’une moisissure qui laisse à peine apercevoir les figures. Les toiles aussi commencent à se décoller et à tomber par morceaux. Dans cet état de choses, comme ces tableaux sont considérés comme des monuments, j’ai cru devoir faire des démarches auprès de M. le Préfet pour avoir les fonds nécessaires afin de les faire restaurer à Paris. Après les avoir fait examiner il m’a répondu qu’ils étaient trop détériorés pour mériter une telle dépense. Alors plutôt que de voir notre chapelle privée de tableaux, puisque la fabrique n’a pas les moyens d’en avoir de neufs, je suis revenu à la charge et j’ai fait à M. le Préfet, la proposition de lui céder les deux tableaux de Valentin pour la ville de Quimper, ville adoptive du grand maître, et ce, moyennant toutefois deux copies de ces mêmes tableaux pour la chapelle, mais notre proposition a encore été rejetée par le Conseil municipal.

Depuis nous sommes dans le statu quo, et si l’on travaille à des copies de nos tableaux, assurément ce n’est pas ici. On m’a dit seulement que M. Gowland avait fait une promenade au Kergoat voilà trois semaines ; il a même été chez M. Laroque, mais il ne lui a rien dit de son prétendu projet, du reste, Monseigneur, s’il y avait un échange ce ne serait que d’après votre agrément et le jugement d’une commission dont ferait partie M. Dufretay, connaisseur en peinture et maire de Plonévez-Porzay. DESQUATREVAUX, desservant de Quéménéven.

P. S. — Je crois, Monseigneur, vous avoir parlé, dans le temps, de ces projets, M. le Préfet qui a présenté ma proposition au Conseil municipal de Quimper avait aussi donné son consentement à cet échange. Voici le jugement porté de ces tableaux par trois amateurs dont un de Rennes : le tableau de l’extrême-onction est à peu près perdu, celui du rosaire peut être conservé, dans celui-ci les poses ne sont pas toutes bien, dans les deux, les peintures sont inférieures, enfin ces tableaux ne sont pas les plus soignés de Valentin ».

3 décembre 1846. — M. Boullé, Préfet, au Recteur de Quéménéven.

« Par la lettre que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire le 27 novembre dernier, au sujet des deux tableaux de Valentin qui décorent la chapelle du Kergoat, vous me demandez les secours qui vous sont nécessaires pour les faire convenablement restaurer.

J’ai écrit plusieurs fois à M. le Maire de Quimper pour qu’il invite le Conseil municipal de cette ville à se procurer ces deux tableaux moyennant deux copies qui vous auraient été remises, ainsi que vous le demandiez d’abord, mais le Conseil a déclaré qu’il ne peut accepter ce projet d’échange.

J’ai en outre sollicité un secours de M. le Ministre de l'Intérieur dont la décision n’est pas intervenue à cet égard.

Ne pouvant moi-même disposer d’aucun fonds pour les dépenses qu’occasionnerait cette restauration, il m’est impossible, bien qu’à regret, M. le Recteur, de satisfaire à l’objet de votre lettre précitée. Je vais rappeler au Ministre la demande que je lui ai faite ».

26 décembre 1846. — Le Recteur à Monseigneur :

« Le conseil de notre fabrique me charge de vous faire offre des tableaux du Kergoat à telle condition qu’il vous plaira de les prendre. M. Barret qui les a visités a décidé qu’ils pouvaient être restaurés, mais qu’après cette opération ils demanderaient pour être conservés, à être placés dans un lieu sec à l’abri de l’humidité, vous pourrez aussi je pense, obtenir de M. le Préfet le secours qu’il nous refuse, par scrupule sans doute, puisque son secrétaire intime me disait un jour en sa présence qu’il y avait des fonds disponibles pour ces sortes de réparations, peut-être aussi que la réponse de M. le Ministre de l'Intérieur sera favorable.

Dans la supposition donc, Monseigneur, que vous acceptiez notre proposition, il serait bon, je pense, que l’artiste que vous chargerez de cette restauration, présidât lui-même à l’enlèvement de ces toiles et que je m’entendisse avec lui pour le mode du transport à Quimper.

Quant à nous, nous pouvons nous passer des monuments, il nous faut simplement des tableaux qui puissent flatter pieusement l’attention de nos bons laboureurs, sans être pourtant dédaignés des soi-disant connaisseurs qui visitent en passant notre chapelle ».

Sur la lettre est écrit de la main de Mgr. Graveran :

« 11 janvier 1847, répondu à M. des 4 v. (Desquatrevaux), nos finances ne permettent pas la restauration et le remplacement par deux copies des tableaux du Kergoat, ce serait au moins 2.000 fr. Promis d’écrire au Ministre de l4Intérieur ».

19 janvier 1847. — L'Evêque écrit au Ministre de la Justice et des Cultes pour lui transmettre la requête du Recteur de Quéménéven.

« M. Barré, peintre estimé, consent à faire chaque copie pour la modique somme de 350 francs, il paraît que la ville de Quimper ne se trouve pas en mesure de faire cette dépense. La même proposition vient de m’être faite pour la chapelle de mon palais épiscopal. Ne pourriez-vous pas, Monseigneur, vous entendre avec votre collègue le Ministre de l'Intérieur pour faire cette dépense, ce serait arracher ces deux beaux tableaux à une destruction prochaine, contribuer à l’ornement de ma chapelle qui est à peu près nue et aussi stimuler le zèle d’un jeune peintre dont le talent mérite les plus grands encouragements ».

22 février 1847. — Le Ministre de la Justice répond :

« ...Vous me proposez, Monseigneur, d’acquérir pour 700 francs les deux tableaux (du Kergoat) pour la chapelle de votre palais épiscopal.

Les tableaux religieux sont placés dans les églises pour y servir de décoration et d’ornement et il convient de les y maintenir dans l’intérêt même du culte ; la grande valeur que peuvent avoir ces tableaux est un motif de plus pour ne pas en dépouiller l’église où ils se trouvent.

Il est du devoir de la fabrique de la commune, même des habitants de Quéménéven, d’employer tous les moyens en leur pouvoir pour la restauration de ces deux tableaux ; ce n’est que dans le cas ou tout espoir de les conserver serait entièrement perdu qu’on pourrait s’occuper d’en faire la vente à un prix préalablement fixé par des experts.

Signé : S. DUMAY, secrétaire d'Etat des travaux publics chargé par intérim du département de la Justice et des Cultes ».

Le Préfet fut plus heureux que l'Evêque dans ses démarches au ministère, car par lettre du 8 mars 1847 il écrivait au Recteur die Quéménéven.

« Son Excellence le Ministre de l'Intérieur par une dépêche en date du 2 de ce mois, m’informe qu’un artiste choisi par la division des Beaux-Arts va être chargé de la restauration de ces deux tableaux.

Je m’empresse de vous faire connaître cette décision en vous priant de vous entendre immédiatement avec M. le Maire de Quéménéven pour envoyer au Ministère de l'Intérieur les deux tableaux dont il s’agit ».

12 mars 1847. — Le Préfet écrit à Monseigneur :

« Par une lettre du 10 de ce mois M. le Maire de Quéménéven vient die me faire connaître que les deux tableaux de Valentin qui décoraient la chapelle du Kergoat ont été déposés à l'Evêché.

M. le Ministre de l'Intérieur m’ayant informé qu’un artiste choisi par la Direction des Beaux-Arts va être chargé à Paris de la restauration de ces deux tableaux moyennant une somme de 600 francs accordés à cet effet par Son Excellence, je vous prie, Monseigneur, de mettre ces deux tableaux à ma disposition afin que je les transmette au Ministère de l'Intérieur pour qu’ils soient restaurés ».

12 mai 1847. — L'Evêque répond au Préfet :

« Les deux tableaux de Valentin n’ont pas été déposés à l'Evêché mais bien chez M. Barret, peintre à Quimper. chargé de les copier. Cet artiste a déjà commencé la copie du tableau le plus détérioré et il voudrait pouvoir terminer son oeuvre avant l’envoi des originaux à Paris ce qui demanderait trois ou quatre semaines.

Je dois aussi vous faire observer, M. le Préfet, que le transport de ces deux tableaux demandera les plus grandes précautions à cause de leur état de dégradation. Il serait à désirer qu’un homme de l’art, par exemple M. Gowland, combinât avec M. Barret les moyens à prendre ».

Les trois ou quatre semaines demandées pour M. Barret se prolongèrent jusqu’à trois ou quatre ans, et les choses en restèrent là, c’est-à-dire que les tableaux furent copiés mais non restaurés. Les copies furent placées au Kergoat en août 1847.

Mais le bon Recteur de Quéménéven songeait toujours à une restauration intelligente des originaux, nous l’apprenons par la lettre suivante qui lui est adressée de Paris le 15 septembre 1850 par M. Letarouilly.

« Pour la restauration des tableaux il faudrait suivre la marche administrative.

Monseigneur ferait une demande au Ministre de l'Intérieur pour obtenir que les deux tableaux de Valentin fussent restaurés par les artistes attachés au Musée du Louvre en qualité de restaurateurs de tableaux et non à d’autres peintres qui, bien qu’habiles, mais inexpérimentés, pourraient porter préjudice aux oeuvres du maître bas-breton, les peintres dont je vous parle ont été dernièrement attachés au Musée du Louvre à la suite d’un concours.

Je ne pense pas qu’il vous soit possible d’éviter les frais d’emballage et de transport.

Je ne sais si les tableaux que vous possédez sont des oeuvres des plus remarquables de Valentin, ils seraient vus avec grand plaisir des amateurs et pourraient peut-être augmenter la réputation de l’auteur, il serait même possible qu’on les copiât avant de vous les renvoyer, mais que vous importe si les originaux vous restent.

Je vois que vous avez dans le coeur des sentiments patriotiques et que l’illustration de notre Bretagne vous est chère, peut-être grâce à vous, deux belles œuvres du pinceau breton seront-elles conservées à l’art, pour moi en général je crains beaucoup les retouches qui le plus souvent enlèvent au tableau ses finesses et sa franchise, cependant quand ces retouches sont faites avec conscience et réserve elles peuvent être d’une grande utilité pour la conservation du tableau. Cherchez donc aujourd’hui toutes les garanties d’une restauration intelligente ».

Cette dernière tentative de M. Desquatrevaux demeura sans résultat, et les originaux demeurèrent à l'Evêché à la disposition de Monseigneur. Nous ignorons ce qu’est devenu le tableau du Rosaire qu’on disait le mieux conservé. Quant à l’autre représentant l'Extrême-Onction donnée à une personne agonisante, il était dans le corridor du second étage de l'Evêché au moment où Yan D'Argent peignait les fresques de la Cathédrale, vers 1871. L’artiste entreprit la restauration de ce tableau qui se voit en 1928 dans la sacristie du Chapitre à la cathédrale de Quimper (M. Pérennès).

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