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Première apparition de la Vierge Marie, le 15 août 1652.

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En l'an de grâce 1652, le pape Innocent X gouverne l'Eglise, et le jeune Louis XIV, qui n'est pas encore le Roi-Soleil, regarde Condé, rebelle et vaincu, ramener son armée derrière les murailles de Paris, protégé par le canon que tire la grande Mademoiselle [Note : La duchesse de Montpensier, cousine du roi]. En Bretagne la puissante famille des Rohan, calviniste depuis un siècle, revient à la Foi Catholique par le baptême de Louis de Rohan-Chabot, marié en 1645 à Marguerite de Rohan ; le Bienheureux Père Maunoir et le Recteur de Mûr, Guillaume Galerne, attirent à Saint-Guen la servante de Marie, Catherine Daniélou ; le même Père Maunoir bénit, à cinq lieues de La Prénessaye, la première pierre de la chapelle Saint-Elouan devant 30.000 personnes.

A Saint-Brieuc, Mgr Denis de la Barde, venu du Gâtinais en passant par Paris, où il noua des relations spirituelles avec saint Vincent de Paul, MM. Ollier, Abély, Bossuet, Lamoignon, le prince de Conti, le baron de Renty, avait entrepris une étude sérieuse sur l'état du protestantisme dans son diocèse, principalement à Quintin ; il combattait le Jansénisme, en sévissant contre le savant Théologal du Chapitre, Noulleau ; il jetait les bases du Séminaire de Saint-Brieuc.

En la semaine qui suit le douzième dimanche après la Pentecôte, le jeudi quinzième jour d'août 1652, vers six heures du soir, la petite Jeanne Courtel, âgée de 11 ans 4 mois et un jour, conduit le troupeau de son père, un peu au-dessous du village dans une pâture située à l'est du chemin vers Doulcan, qu'on appelait, en raison des sources de sa partie basse, les Fontenelles ; en saison chaude, ce lieu humide, quasi marécageux, procure encore un peu d'herbe.

C'est l'Assomption, et bien qu'il ne soit pas question de dogme, en France la fête est d'obligation depuis Charlemagne ; certainement Jeanne ce matin assista à la Messe ; sans doute elle retourna aux Vêpres et participa à la Procession qui, depuis le vœu de Louis XIII, se déroule dans toutes les paroisses, sa mère n'ayant pas manqué de lui faire expliquer au mieux l'importance de la solennité.

Désireuse de commémorer l'entrée corps et âme de Marie au ciel l'enfant s'agenouille, tire son chapelet et commence de prier. Soudain un coup de vent la secoue, l'oblige de se lever ; elle a l'impression qu'une personne arrivant de la direction de Querrien vient droit sur elle ; elle se retourne, et voit tout près, mais au-dessus du sol, portée par un nuage brillant, une femme dont la tête s'entoure d'une brillante auréole ; ses traits admirablement purs s'éclairent d'un sourire indicible.

Pour l'enfant c'est une « demoiselle », donc une personne de noblesse ou de haute bourgeoisie, « habillée toute en satin blanc... fort agréable et belle ».

Bientôt elle parle : « Charmante bergère, donne-moi l'un de tes moutons blancs ». Merveille ! pour la première fois de sa vie, l'enfant perçoit le son et le sens d'une parole humaine ; merveille plus étrange, pour la première fois elle articule des syllabes, forme des mots, assemble des phrases ; elle répond « avec respect » : « Ces moutons ne sont point à moué (moi), ils sont à mon père, s'il veut vous en faire un présent, j'y consens volontière ». A cette déclaration candide la « Dame » remercie d'un sourire : « Retourne vers tes parents et pour moi demande-leur un agneau ».

« Mais qui gardera mon troupeau, pendant mon absence ? »« Moi-même ».

Pleinement rassurée, la fillette jette sa gaule de « pastourelle » et gravit en courant la montée du village.

Or la maison de Jean Courtel et de Jane Marquer était pleine de monde : des parents, des voisins venus en visite, une « compagnie », dit la complainte, des témoins amenés par la Providence.

Jeanne apparaît : sans embarras, avec aisance, elle explique pourquoi elle a abandonné son troupeau, pourquoi elle revient. Stupéfaits, saisis de crainte, les assistants, qui tous connaissent l'enfant, son infirmité, se regardent affolés : la muette parle ! Bientôt à la terreur succède l'allégresse.

Les amis se lèvent, sortent et jettent à tous les échos le mot magique : « Miracle ! Miracle ! ». Tout le village accourt. On entoure la bergère, on la presse de questions, l'émotion est à son comble.

Surprise du trouble qu'elle cause, Jeanne veut répondre sans délai à la « Dame » qui a dit : « Va-t'en, ne tarde guère », et rappelle l'objet de sa démarche.

Heureux de voir disparaître l'humiliation qui pèse sur sa maison, transporté de reconnaissance, Jean Courtel s'écrie : « Retourne à tes moutons. Quant à la Dame, nous ne lui donnerons pas un agneau. Nous lui donnerons tout le troupeau ».

La petite revient vers les Fontenelles et d'aussi loin qu'elle aperçoit l'Apparition, elle crie : « Nous vous donnerons tout le troupeau ».

La dame sourit, s'incline, disparait, Jeanne reste seule au champ des Fontenelles qui désormais portera le nom de « champ de l'Apparition ».

Tel est le récit traditionnel, rassemblé et transmis dans la vieille complainte de Notre-Dame de Toute-Aide.

Ce miracle prouvait nettement que la « Visiteuse » puissante et bienfaisante vient et agit de par Dieu ; mais quel est son nom ? La raison profonde de son intervention se borne-t-elle à la guérison d'une fillette ? Les parents décident de consulter le Recteur ; on ira le lendemain dès le matin, car il se fait tard.

Olivier Audrain, fils de Guillaume et de Yvonne Ruellan, né à la Prénessaye, en 1609 ou 1610, (donc âgé de 42 ou 43 ans), après d'excellentes études littéraires en divers collèges de Bretagne, se rendit à Paris, y conquit les grades de bachelier et de licencié ; à ce titre de « licencié en droit canonique de la Faculté de Paris » messire Olivier dans les pièces officielles ajoute celui de « Notaire apostolique », ou « notaire public de la cour romaine », probablement conquis à Rome.

Au mois de juillet 1637 — à 27 ans — il fut nommé recteur de la paroisse de « Notre-Dame et Saint-Mathurin de Moncontour » ; recteur en titre pendant deux ans et trois mois, il ne résida que d'octobre 1637 à octobre 1639.

Sur sa demande Messire Olivier Audrain fut transféré à la Prénessaye par Mgr Etienne de Vilazel, évêque de Saint-Brieuc ; il avait sollicité le poste parce qu'il y avait de la famille et des biens importants à administrer.

Le recteur Messire François Guillemot venait de mourir ; on s'était hâté de l'enterrer le jour même, 2 octobre 1639, car il succombait à une « peste », maladie contagieuse qui devait emporter 32 paroissiens dans les trois derniers mois de 1639. Six jours plus tard le nouveau pasteur prenait possession et commençait son dangereux ministère.

Parmi les collaborateurs dont Messire Olivier s'assura le concours, citons son propre frère, Messire Alain Audrain, qui exerça le ministère du 20 août 1641 au 22 juillet 1650 et habitait avec sa mère au « logis au-dessus de la Prénessaye » ; il fit le voyage de Rome à l'occasion du grand Jubilé décidé par Innocent X, y mourut le 28 décembre 1650 et fut enterré à Saint-Yves des Bretons.

Missire Ol. Audrain avait encore d'autres parents dans sa paroisse : 1° Une soeur : Jeanne Audrain, mariée à Mathurin Allot ; 2° Un frère : Gabriel Audrain, époux d'Olive Allenic ; 3° sa mère : Yvonne Ruellan, qui mourra le 10 mai 1654, après avoir reçu l'extrême-onction des mains de son propre fils, le Recteur.

Bien que le bénéfice ne fût pas très lucratif, Missire Ol. Audrain passait pour un bourgeois cossu (Archives des Côtes-du-Nord ou Côtes-d'Armor, série E).

Dans sa paroisse, il possédait cinq maisons dont deux à Malabry, une au bourg, une à la Ville-Prenée, une autre à Launay et environ 110 journaux de terre tant en prés, vergers, labours plantés ou non plantés que ajoncières, noës, landes et taillis.

Le presbytère où il habitait, situé proche le grand portail de l'ancienne église et à quelques pas de la fontaine Saint-Jean-Baptiste, a subi des modifications mais demeure.

C'est là que Jeanne Courtel, accompagnée de quelques hommes de Querrien, vint trouver le Pasteur, le vendredi 16 août 1652. Il n'est pas sûr que l'arrivée de la voyante et de ses guides bénévoles ait causé une vive surprise au Recteur de la paroisse.

En effet, les fréquentes absences de Messire Ol. Audrain que l'on constate aux registres de la Prénessaye, depuis le mois d'avril précédent, surtout celles du dimanche 4 août et de la veille de l'Assomption pourraient avoir été consacrées à une enquête discrète sur des faits extraordinaires : plaintes mystérieuses comme à Nazareth, pluies d'étoiles comme à Sainte-Anne d'Auray, flammes de feu comme à Querrien même le 10 septembre suivant, qui auraient servi de préparation et de conclusion à la venue de la « Dame habillée toute en satin blanc ».

Quel accueil, Messire Ol. Audrain fit-il aux visiteurs ? Réservé certainement, mais non maussade.

Quand la petite Jeanne, sourde et muette la veille encore, s'avança pour conter en un langage simple mais précis l'Apparition dont elle avait été favorisée, Missire Ol. Audrain, ému jusqu'au fond de l'âme, eut peine à retenir ses larmes ; il congédia les visiteurs en recommandant la discrétion et la prudence ; il n'appartenait pas à un prêtre, fut-il recteur, de porter un jugement sur les faits, l'évêque seul pouvait se prononcer.

Jeanne et ses compagnons regagnèrent leur village, persuadés que l'affaire n'en resterait pas là.

(Abbé Le Texier).

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