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Jeanne Courtel, après les Apparitions de la Vierge.

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Le 11 septembre 1652, Mgr de la Barde, son enquête terminée, eut pu dire comme Mgr de Ginoulhac, à propos de la Salette (19 septembre, 1855) : « La mission (de l'enfant) est finie : celle de l'Eglise commence ».

Chargée de transmettre à l'autorité les volontés de la Vierge, Jeanne Courtel avait vu l'évêque bénir la première pierre de la chapelle demandée ; son rôle terminé, elle reprend place dans le troupeau des fidèles, et aucune faveur ne la signale désormais à l'attention ; mais le fait d'avoir été la confidente de la Vierge ne la dispense pas des peines ni des luttes ; elle a vu la Mère de Dieu, ici-bas, elle doit gagner le Paradis comme les autres.

Elle continue de séjourner du moins pendant un an et demi, chez ses parents. Ceux-ci s'appliquent à compléter son instruction religieuse et c'est, croyons-nous, au cours de l'année qui suivit les apparitions qu'elle fit sa première communion, sa double infirmité l'en ayant empêchée jusqu'alors ; elle fut confirmée par l'évêque de Saint-Brieuc, soit le 30 septembre 1653, à Plémet, soit à la Prénessaye, le 15 mai 1654.

Le samedi 4 avril 1654, « Jeanne Courtel fille Jean » fut marraine de Jean Courtel, fils Alain et Jeanne Cadro, de Querrien ; elle ne signe pas encore, pourtant elle a treize ans moins huit jours ; nous ne la voyons plus reparaître avant 1660, mais alors elle sait manier la plume.

Dans le troisième quart du XVIIème siècle, seule des filles de sa condition, Jeanne signe au registre paroissial ; certains en concluent qu'elle entretint des relations suivies avec Guyonne de la Tronchaye et les demoiselles Daën, qu'elle résida même longuement au manoir de la Ville-Hercoët, près du bourg de la Prénessaye.

Lorsque Jeanne Courtel est de nouveau marraine en 1660, elle a dix-neuf ans ; elle porte toujours des bas de frise, des cotillons de berlinge, des brassières de frise blanche, doublées de toile, des « devantières » de frise ; toutefois, capot a remplacé le béguin.

Comme sa mère, comme les jeunes personnes de son temps, elle est devenue et demeure filandière, ce qui ne l'empêche pas de mener ses moutons au pâturage, de vaquer aux soins du ménage, d'aider son père dans les travaux des champs ; elle ne mène pas une vie de recluse : elle se mêle aux manifestations religieuses : grand'messes, chant solennel des Litanies, processions, adorations, etc..., et prend volontiers part aux réjouissances qui accompagnent baptêmes, fiançailles et mariages.

De 1660 à 1675, son nom paraît une douzaine de fois aux registres paroissiaux, elle est huit fois marraine ce qui prouve en quelle estime on la tenait ; à deux reprises, on la qualifie : « honorable fille », car elle sort du commun. Elle n'est point « damoiselle » comme les filles nobles, mais on la met au rang des filles de la bourgeoisie locale.

Le 17 décembre 1660, elle « nomme » un enfant de son quartier : Jean Collin et trace son nom pour la première fois sur le registre baptistaire. Son écriture est haute, bien formée quoiqu'un peu tremblée.

De mai 1661 à mai 1666, nous ne trouvons point son nom, sans doute à cause de ses deuils successifs : en 1662 meurt son oncle Yves Marquer, en 1663 sa tante Jeanne Gillon, père et mère de François et Françoise Marquer qu'elle affectionne ; en 1662 encore, elle perd son oncle Jean Marquer ; le 1er février 1665, son père Jean Courtel.

Le 20 mai 1666, elle tient sur les fonts du baptême une petite fille qu'elle nomme, par déférence pour le parrain : Julienne. Le prêtre est missire Jean Audrain, installé depuis un mois comme recteur.

De 1666 à 1675, les registres signalent au moins une fois par an sa présence.

Lors du baptême, en 1667, de Jeanne Andrain, fille Thébault, la Voyante a pour compère Me Jean Le Corgne, de Saint-Sauveur, époux de Jeanne Audrain, sœur du sacriste de Notre-Dame.

Le 1er février « honeste fille » Jeanne Courtel est marraine de Jeanne Basset, fille de Jacques Basset, commerçant à Querrien, qui vendait de la « chandelle, des clous et de la farine ». Le compère est Me Julien Compadre, notaire, résidant à Querrien.

En 1669, elle assiste au mariage de sa cousine Françoise Marquer avec Julien Viaux, « tissier », de Doulcan ; en 1670, de François Marquer, son cousin germain, « tissier de son métier », avec « honorable fille Julienne Radenac », petite-fille d'écuyer Jean Hervieu, procureur royal ; en 1671, de François Boscher « commis de la part de MM. de la Chasse et Saint-Laurent à régir et gouverner les mineurs », demeurant au village de Querrien, avec damoiselle Julienne Le Bammois ; car à cette époque l'industrie du fer établie dans le pays dès la plus haute antiquité, prend un essor considérable et change la physionomie du bassin du Lié.

L'année précédente, elle assistait, en compagnie de Guyonne de la Tronchaye, dame de Launay-Cosquer, damoiselles Marie de Coëtlogon et Sylvie Daën au baptême de Simone Le Floch.

L'année 1674 nous montre « honorable fille » Jeanne Courtel nommant un enfant : Louis, chez Me Julien Compadre, époux de Marguerite Famichon ; ce Me Julien, notaire, bâtit en 1681 la maison encore debout de la ferme de la Cour, à Querrien. Jeanne fut en relations constantes avec sa famille.

Et voici que sonne l'heure du mariage.

Au mois de mars 1670, Marguerite, duchesse de Rohan, vend à écuyer René de Farcy, sieur de la Daguerie, et à ses associés : François de Farcy, écuyer, sieur de Saint-Laurent, Jacques de Farcy, écuyer, sieur de Painel, et Jeanne de Cahideuc, épouse de François d'Andigné, seigneur de la Chasse, — propriétaires des Forges de Paimpont depuis 1653 — en la forêt de Loudéac, « les bois et superficies de trois cantons des Déserts, du Coin et du Breil aux porcs s'entrejoignan, pour l'usage des forges du Vaublanc moyennant la somme de cent douze mille livres ». — Par le même acte, la duchesse de Rohan donne « faculté audit sieur de la Daguerie de faire faire des ouvertures de terre dans les trois cantons de ladite forêt et dans les terres vagues du dit Loudéac, et même dans la lande de la Ferrière, sous la seigneurie de la Chèze, pour y prendre mine pour y faire fer pendant l'exploitation desdits bois », compris dans les cantons précités de la forêt (Arch. des C.-du-N., série E).

Ces industriels construisent les barrages et les fourneaux de Vaublanc et de Querrien. Les ouvriers affluent. L'un d'eux, homme instruit qui possède du bien, désigné sous le titre de « Maitre Damien Saullier, sieur de la Motte » est « commis aux Forges pour M. de Saint-Laurent », nous dirions contre-maître ; la tradition le fait originaire de Broons. Il s'installe au village de Querrien ; entendant l'éloge de la fille de Jeanne Marquer, témoin de sa conduite édifiante, il demande sa main ; sur l'avis de sa vieille mère, sur le conseil du recteur, elle consent.

Le mariage fut célébré en l'église de Saint-Sauveur-le-Haut, le lundi 25 février 1675. Missire Jean Audrain, premier sacriste et premier chapelain de N.-D., recteur de la Prénessaye, reçut le consentement des époux ; Missire François Le Clerc, chapelain de St-Sauveur, célébra la messe et donna la bénédiction nuptiale. La cérémonie groupa toutes les notabilités du village : écuyer Julien d'Estuer, écuyer Bertrand Collet, seigneur des Hayes, époux d'Yvonne d'Estuer et Me Julien Compadre, notaire, aux côtés de Jeanne Marquer, alors âgée de soixante-quatorze ans.

Aux actes officiels, les époux Saullier seront qualifiés « honorables gens ». Jeanne eut plusieurs enfants à Querrien même :

1° Guillemette Saullier, née et baptisée le 22 septembre 1676, eut pour parrain, Joseph-Joachim Riou, chevalier, seigneur de Brambuan et les Gravelles, originaire de Saint-Jean de Saint-Méen, et marié, depuis le 2 août précédent, à damoiselle Sylvie Daën, dame de Launay ; pour marraine, Guillemette Daën de la Ville-Hercoët. Signèrent au registre, outre le père, le parrain et la marraine, Guyonne de la Tronchaye, Renée-Jeanne Daën et Suzanne Le Veneur. Guillemette mourut le 8 octobre 1676 et fut inhumée à Saint-Sauveur.

2° Jeanne Saullier, née le 26 octobre 1677, baptisée le 27. Parrain : Me Julien Compadre ; mourut en bas âge.

3° Autre Jeanne Saullier, née le 14 juillet 1679, baptisée le 15. Celle-ci vivra ; 4° Gabrielle Saullier, née le 22 décembre 1680, baptisée le 23. Le parrain fut n. h. Jean Héron de la Roncelière, directeur des Forges du Vaublanc.

Au cours de l'année 1681, le ménage Saullier-Courtel quitta le village de Notre-Dame pour s'établir au manoir de la Ville Hercoët. Me Damien Saullier, sieur de la Motte, sur la proposition que lui en avait faite Joachim Riou, veuf de Silvie Daën, décédée le 27 octobre 1680 à Saint-Méen, était devenu fermier, c'est-à-dire régisseur, avec pouvoirs très étendus, des terres et seigneuries de la Ville-Hercoët et Launay-Latouche, en la Prénessaye [Note : « Comme fermier de la Ville-Hercouët et de Launay-Latouche, j'ay ressu les vantes de l'acquéreur sy devant y dénommé dont je quittte ledit acquéreur sans préjudice aux autres droits seigneuriaux et aux frais que je réserve, le 29 janvier 1690. D. Saunier 1690 ». A. p. P.].

Jeanne Marquer ne vécut pas longtemps chez sa fille, elle mourut le 16 décembre 1681, âgée d'environ 80 ans.

5° Le 17 mai 1682, Jeanne Courtel mettait au monde un fils auquel fut donné le nom de Cyprien. Son parrain fut missire Cyprien Brieuc, futur chapelain de Notre-Dame de Toute-Aide ; il mourut deux mois plus tard et fut enterré en l'église de la Prénessaye, le 20 juillet 1682.

Pendant son séjour à la Ville-Hercoët, Jeanne Courtel continua de fréquentes relations avec les familles de son quartier d'origine, les Compadre, les Corgne, les Marquer, et s'en créa d'autres, dans le voisinage du manoir, en particulier avec les époux Lefebvre qui demeuraient dans leur maison de la Rue Verte, bâtie en 1678, près du bourg de la Prénessaye, et toujours debout.

Elle eut à son service : 1° Julienne Courtel, l'une de ses nombreuses filleules, qu'elle maria en 1686 avc un « linottier » du nom de Fauvel, demeurant à la métayrie du Haut-Bosq ; 2° Guyonne Courtel dite : « servante chez Me Damien Saullier à la maison de la Ville Hercoët » qui convola en 1689 avec Louis Courtel, « tailleur » de Querrien ; 3° Guillemette Courtel, petite orpheline, qui était née et possédait quelques biens à Querrien ; 4° Elle donna, chez elle, asile à son cousin germain Jacques Marquer, « monsnier », lequel épousa Jeanne Dagorne en 1688.

A quel moment précis Jeanne quitta-t-elle la Ville-Hercoët pour rentrer à Querrien ? Elle y était installée de nouveau au début de l'année 1698, ayant séjourné une quinzaine d'années à la Ville-Hercoët.

D'après un égail de 1688 « Me Damien Saullier et honorable femme Jeanne Courtel » possédaient dans le fief Tanguetz, à proximité du village de Querrien et à droite du chemin qui conduit à Saint-Sauveur-le-Haut : 1° Les Etoubles du nord ou Dumont ; 2° trois parcelles dans les prés de Lizambran ; 3° une petite partie de la Lande Rambault, au total : 68 ares 992 de terre labourable, 6 ares 484 de lande et 18 ares 24 de pré. Sur ces terres, il était dû à la seigneurie du Tertre : une godelée de froment et un sol cinq deniers d'argent (Arch. des C.-du-N., série E. — Le Tertre).

Ce n'était qu'une faible partie des immeubles leur appartenant. Leurs héritiers paieront, en cette qualité, pour l'année 1728, 24 sols de rente à la seigneurie de la Chèze ; or les quatre tenues Connan, Vrot, Courtel et Dolo de Querrien, assez grandes pourtant, ne payaient que 29 sols, preuve que les biens des époux Saullier étaient relativement importants ; ils provenaient, pour la grande partie, de l'héritage de Jean Courtel et Jeanne Marquer, père et mère de Jeanne Courtel, et, pour le reste, d'acquets faits en communauté.

D'autre part, le qualificatif « sieur de la Motte », joint au nom de Me Damien Saullier indique qu'il possédait, de son chef, un certain avoir.

Des cinq enfants, il ne restait, en 1698, que deux filles : Jeanne et Gabrielle.

Jeanne Saullier épousa le 10 février 1698 dans l'église de la Prénessaye « noble homme Julien Saffray, sieur de Quilliampe, procureur, âgé d'environ 28 ans, demeurant à la ville et paroisse de Loudéac ». Le ménage Saffray-Saullier habita Querrien pendant vingt-huit ans ; Me Julien Saffray y exerça la profession de notaire et rédigea de nombreux actes.

Julien étant mort le 4 mars 1726, Jeanne Saullier épousa, le 27 janvier 1727, Julien Le Mercier, sieur du Gouetneuf, du village de Dugouët, en Trévé. Elle mourut dans cette paroisse le 25 avril 1639 et fut enterrée le lendemain dans l'église de Trévé.

Quant à Gabrielle Saullier, elle épouse, le 7 mars 1707, Jean Audrain, de Querrien, a plusieurs enfants à Querrien même, puis disparaît entre 1716-1720.

Jeanne Courtel signe pour la dernière fois en l'année 1702, le 24 avril, à l'occasion du mariage de Gervais Berçon « travaillant sur les forges du Vaublanc », avec Jeanne Ruffin, Me Damien Saullier, son mari, Me Julien Saffray, son gendre, et n. h. Julien d'Estuer, son vieil ami, étaient présents. Cette signature indique que les forces de la messagère de Marie déclinent : plus que sexagénaire, peut-être eut-elle le pressentiment qu'elle n'écrirait plus son nom sur les registres de la Prénessaye.

Elle avait désiré terminer sa vie dans le village où elle avait vu le jour, près du sanctuaire de Notre-Dame, sorti de terre sur une demande que la Vierge l'avait chargée de transmettre. Connue Nicolazic avait sollicité d'être inhumé à l'endroit même où il avait découvert la statue de sa bonne Maîtresse sainte Anne, Jeanne voulut être inhumée dans le sanctuaire de Notre-Dame. Cette faveur insigne, qui n'avait été octroyée pas même aux chapelains, lui fut accordée, Missire Pierre Louesdon étant chapelain.

« Honorable femme Jeanne Courtel, âgée d'environ soixante-trois ans, mourut dans la communion des saints le huitième jour d'octobre 1703 ; les sacrements de Pénitence et d'Eucharistie lui furent administrés durant sa dernière maladie. Le lendemain de son décès, son corps fut inhumé dans la chapelle de Notre-Dame de Toutes-Aides par permission de Monseigneur l'Evêque de Saint-Brieuc, accordée à la prière de Missire René Ermange, recteur de ladite paroisse de la Prénessaye. Présents étaient à l'enterrement : Jacques Basset et Jeanne Flageul qui ne signent. Louis Danet, prêtre » [Note : La tombe de la voyante se trouve exactement à l'entrée du chœur].

Mgr Louis-Marcel de Coëtlogon, petit neveu de Sébastien de Coëtlogon, vicomte de Méjusseaume, qui donna l'hospitalité à Mgr de la Barde, le 11 septembre 1652, pouvait avoir six ou sept ans au moment des Apparitions ; il est permis de penser qu'il entendit parler des merveilles de Querrien par ses père et mère, qui étaient présents, le 15 septembre 1652, en compagnie de René et Sylvestre de Quengo (lesquels avaient accompagné Mgr de la Barde quatre jours auparavant jusqu'à Querrien), au baptême de Thihault le Mintier, à Plouguenast.

En marge de l'acte de décès, une main anonyme écrivit : Jeanne Courtel... baptisée ici le 14 mai 1641, fille d'Yves Courtel et de Jacquette Le Breton.

Confusion regrettable de la première Jeanne Courtel — la voyante —, fille de Jean et de Jeanne Marquer, avec une autre Jeanne Courtel, fille d'Yves et de Jacquette Le Breton, née un mois plus tard.

Me Damien Saullier décéda le 16 avril 1712 et fut inhumé en l'église de la Prénessaye, Chanteau 1er, le 18 avril.

(Abbé Le Texier).

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