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LA REVOLUTION A PLOUNEVEZ-LOCHRIST

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Quand s'ouvrit la période révolutionnaire, Olivier Bonnemez dirigeait la paroisse de Plounévez, assisté dans son ministère par Jean-Marie Perrot Barthélemy Le Gall, et Yves Léon, curés, le premier depuis 1784, les autres depuis 1788, et par Jean Marchaland, prêtre habitué depuis 1775.

Bonnemez, Perrot et Léon, refusèrent le serment à la constitution civile du clergé ; Le Gall et Marchaland le prêtèrent et devinrent curés constitutionnels, le premier de Plouguerneau, le second de Sainte-Sève.

Bonnemez fut arrêté le 13 juillet 1791, par une troupe de gardes nationales, aux ordres de l'aventurier Tuncq, venu de Saint-Pol-de-Léon. Voici comment les choses se passèrent. A Lochrist, comme il avait été prévu, quinze hommes se détachèrent de la colonne en route vers Tréflez, pour se rendre au village de Lanzéon, en vue d'arrêter M. Inisan, recteur de Plouzané. Celui-ci avait réussi à s'éclipser et se tenait caché ailleurs. De dépit, sans doute, nos militaires poussent jusqu'au bourg de Plounévez, arrêtent le recteur et l'emmènent.

Celui-ci déclara cependant « qu'il n'avait éprouvé aucun dommage de la part de la troupe ; au contraire, elle m'a donné des marques d'honnêteté, égard à l'état de souffrance dans lequel je me trouvais ». Le vicaire de Plounévez, Perrot, constata, à sa rentrée, qu'on lui avait dérobé un pistolet à deux coups.

Les officiers municipaux de Plounévez adressèrent, le 15 juillet, la requête suivante au district de Lesneven : « Mardi dernier notre recteur ayant été enlevé par ordre de la municipalité de Saint-Pol et ne sachant quand il nous sera rendu, nous vous supplions, messieurs, de nommer d'office un prêtre pour le service divin de dimanche, où d'autoriser les vicaires qui nous restent à la faire, attendu qu'ils s'y refusent sans votre autorisation, et qu'il serait dangereux de laisser la paroisse sans fonctionnaires, vu les maladies contagieuses qui y règnent et que les vicaires refusent d'administrer les sacrements... ».

Interné aux Carmes de Brest, M. Bonnemez fut élargi quatre jours plus tard et retourna à Plounévez (Peyron, Documents pour servir... , II, p. 38). Le 19 septembre 1792 il y fit son dernier baptême et le 24, ils s’embarquait à Roscoff pour Jersey, muni d'un passeport délivré par la Municipalité. Il débarqua le 20 avril 1801 dans le même port.

Embarqué lui aussi pour l'Angleterre, à Roscoff, le 29 septembre 1792, Jean-Marie Perrot, retourné de l'exil, aborda à Roscoff en même temps que son recteur. Quant à Yves Léon, la mort l'enleva le 6 février 1792, et l'on voit apparaître dès lors sur les registres le nom d'Olivier Francois Moal, qui signe « curé de Plounévez » le 29 février, et administrera son dernier baptême le 24 septembre 1792.

Dans la nuit du 4 au 5 septembre 1792 des voleurs s'introduisirent dans l'église de Plounévez à l'aide d'une fausse clef, par la porte du midi, ouvrirent le tabernacle du maître-autel et s'emparèrent du ciboire avec ses hosties dont quelques fragments furent trouvés dans un coin du cimetière. Ils ouvrirent également les tabernacles des autels de Saint-Jean et de la Nativité sans y rien trouver. A la sacristie, ils enlevèrent croix, encensoir, calice d'argent, bréviaire laïque, un calice à la moderne avec sa patène dorée, un calice à l'antique sur le pied duquel était incrusté un saint André en émail, un soleil en argent, un calice à l'antique fort évasé, la boîte aux saintes huiles et les clefs des fonts baptismaux, trois livres en liards, 120 livres en écus de 6 livres et trois livres en pièces de 24 sous et quelques autres objets.

D'octobre à décembre apparaissent les signatures de quelques prêtres insermentés : Le Sann, curé de Plougoulm (25 octobre), Francois Goachet, curé de Plouzévédé, (8 novembre), J. Floc’h, curé de Saint-Frégant, (13 novembre), J. Méar, curé de Guimiliau, (30 novembre) Yves Nédélee, curé de Guimiliau, (5 décembre).

Le 30 décembre était nommé à Plounévez, comme curé constitutionnel, Barthélemy Le Gall, qui, en conflit perpétuel avec la municipalité de Plouguerneau, y avait été fort malmené [Note : Le 24 mars 1793, au combat de Kergidu, les paysans de Plounévez et de Plouescat étaient commandés par Paul Inisan, de Lanzéon].

A Plounévez il ne fut pas mieux accueilli. Lui-même nous apprend, dans une lettre au district de Lesneven en date du 22 avril 1793, que, le dimanche 14, Jean Piriou, de Plounévez, s'était rendu à Tréflez pour y faire baptiser son enfant, et que le lendemain il retourna dans sa paroisse avec les parrain et marraine, pour le faire inscrire au registre des baptêmes. Ils y furent mal accueillis par le bedeau Jean Corre et par Jean Inisan : « Croyez-vous, citoyens, dirent ces derniers, que votre enfant n'eût pas trouvé l'occasion d'être baptisé ici ? Vous êtes la cause de notre malheur, mais votre tour viendra ». Ils se moquèrent de la marraine qui n'avait que 18 ans, en lui conseillant d'aller passer trois mois aux Ursulines « pour apprendre à vivre ». Le dit bedeau, note M. Le Gall, est absolument contraire à la Révolution, et, si on ne les empêche, « Plounévez va retomber dans le fanatisme ».

Voici les plaintes adressées par M. Le Gall le 9 germinal an II (29 mars 1794) au district de Lesneven. La lettre est datée de Tréflez.

« Je me suis présenté pour demander mon traitement de curé de Plounévez, vous n'avez pas jugé à propos de me l'accorder sans l'avis de votre Conseil... Je trouve que la pièce par laquelle le Conseil Général de Plounévez a arrêté de faire présent de mon traitement à la nation, est insuffisante pour m'en priver.

J'ai été installé à Plounévez au mois de janvier 1793 dans l'intention d'y faire ma résidence, j'y ai appelé des vicaires pour m'aider, mais je n'y ai trouvé ni logement ni pension pour eux ni pour moi. J'ai donc commencé à me retirer à Tréflez distant d'une demie-lieue où j'avais dejà resté 6 ans, je me rendais de là tous les jours à Plounévez et à toutes les heures lorsque j'étais requis.

Jusqu'alors je n'avais éprouvé que très peu de désagréments grâce à la liberté entière que je leur laissais, jusqu'à faire en ma présence des inhumations, sans m'en mêler, n'étant pas requis.

Le mardi de Pâques l'église était absolument remplie à la messe, arrive le lendemain la nouvelle de la défection de Dumouriez et, de son armée, voilà la philosophie qui reprend vigueur et mon église est vide le dimanche suivant. Quelques temps après on apprend que l'armée de Dumouriez l'avait abandonné ; le nombre de mes auditeurs augmente encore, enfin je crus m'apercevoir que mes philosophes suivaient, tous les mouvements des frontières et de la Vendée.

Alors je pris mon parti et je leur annonçai mon intention au prône en ces propres termes : " mes amis, je vous vois flottant entre les deux partis ; plusieurs de vous que je sais être pour le parti contraire sont ici, ils viennent aux offices et sans doute malgré eux. Vous me craignez peut-être, vous n'êtes pas libres, eh bien, je vais vous rendre votre liberté ; désormais je dirai la messe à Tréflez, y viendra qui voudra, mais je ne viendrai ici que quand on me demandera, mais je demande qu'on considère comme nul l'arrêté de Plounévez qui me prive de mon traitement " ».

Le sieur Le Gall, voyant que la convention ne semblait plus avoir grande considération pour les prêtres assermentés eux-mêmes, n'allait pas tarder à se séculariser.

M. Caër a recueilli une tradition selon laquelle M. Modir, qui, ayant d'abord refusé le serment, finit par le prêter, et devint curé constitutionnel de Tréflès, se rendait souvent dans une maison de Keryann-vihan-an-Arvor, que l'on appela longtemps « ti Modir ». II offrait d'aller dire la messe à Lochrist en retour d'honoraires à prix réduit, mais sans succès. Il fut l'objet d'une chanson bretonne satirique.

En 1793 nous constatons la présence à Plonnévez de quelques prêtres insermentés, Laurent Crenn, né à Sizun, curé de Ploudalmézeau, Yves Kérébel, curé de Minihy-Saint-Pol, Yves Grall, recteur de Lanhouarneau, Yves Lostec, curé de Plouider ; en 1794, A. Le Roy, curé de Saint-Servais.

Sous la Terreur, ces ecclésiastiques se tenaient cachés chez d'excellents paroissiens, en qui ils avaient toute confiance. Il y en avait dans la famille Buors à Traonboz, où lorsqu'une perquisition était à craindre, on cachait les ornements sacerdotaux, au fond du berceau où reposait l'enfant, à Châteaufur, à Kervern-vras chez les Quéméner, à Bréhichen chez les Jézéquel, à Lanzéon chez les Inizan, à Luzunen-vras, à Lesvaeoc chez René Lucat, à Kergouall, à La Garenne chez les Berrou, à Kervéanal-liorzou dans la famille Cantinat, à Lescoat-Trémeur chez les Moan. Ce dernier village donnait asile à M. Crenn, dont il reste un registre de baptêmes et mariages [Note : Ce registre mentionne en ses dernières pages 36 enfants de la paroisse baptisés en 1794 par M. Baron, vicaire de Loc-Eguiner-Ploudiry]. Toujours traqués les prêtres n'étaient pas sans inquiétude. Avant de s'endormir ils recommandaient toujours aux fermiers de les éveiller, s'il se produisait le moindre bruit. La fatigue musculaire et nerveuse de ces hommes toujours aux abois était si grande qu'ils dormaient d'un sommeil lourd, malgré les perpétuelles inquiétudes dans lesquelles ils vivaient.

La réaction thermidorienne et le décret de Guesno et Guermeur de mars 1795 amenèrent une éclaircie, et les prêtres catholiques commencèrent à exercer leurs fonctions en public. Jean-Claude Inizan déclara fixer sa résidence à Loc-Maria-Plouzané, François-Marie Kersauzon à Plounévez. A Plounévez, en septembre et au début d'octobre on chantait la grand'messe et on publiait des bans de mariages. Un mariage fut bénit par M. Le Lez, qui l'inscrivit ensuite au registre dont la première feuille avait été « paraphée pour la paroisse de Plounévez » par Toussaint-Yves Le Floc'h, recteur de Sizun qui s'intitulait : « ministre du culte catholique Romain et préposé à la desserte de ladite paroisse » [Note : Cet ecclésiastique avait les pouvoirs de vicaire général]. Ce prêtre habitait Plounévez depuis le 20 avril 1795.

Par la loi du 7 Vendémiaire an IV (29 septembre 1795) la Convention ranima la persécution contre clergé, qui dut à nouveau se cacher.

A Plounévez, Paul Inisan de Lanzéon refusa formellement de faire partie du comité constitué « pour régler les contributions et indiquer la présence des prêtres réfractaires ». C'était donc que les prêtres insermentés se cachaient sur le territoire de la paroisse. Ceux d'entr'eux toutefois qui renonçaient à l'exercice, de leur ministère pouvaient être laissés en repos. A la date du 6 Vendémiaire an VI, (27 septembre 1797), deux ecclésiastiques se présentent à la Municipalité, René Abgrall et Yves Le Floc'h. Le premier, « prêtre de Lanhouarneau, pour se conformer à la loi a déclare être sexagénaire, né le 31 janvier 1736, s'abstenir de toutes fonctions du culte et résider dans sa maison ordinaire à Lanhouarneau ». Le second, prêtre insermenté, ci-devant recteur de Sizun, natif de Lesneven, résidant en cette commune (de Plounévez) depuis le 1er floréal an III, lequel « pour obéir à la loi, s'est fait délivrer un certificat d'infirmité par les citoyens Dépré et Tilleux, lequel certificat constate pour lui l'impossibilité physique de voyager. En conséquence il déclare fixer et continuer sa présence en cette commune, sous la surveillance des corps constitués, promettant de s'abstenir de toutes fonctions de son ministère ».

Le 25 août 1799, une colonne mobile venue de Lesneven arrêta dans un champ près du bourg de Plounévez, Roland Bizien, recteur de Kernouès, qui, cinq jours plus tard, fut condamné à la déportation [Note : Daniel Bernard, Documents et notes sur l'histoire religieuse du Finistère, sous le Directoire, p. 199-200].

Nous sommes renseignés sur l'état des esprits à Plounévez en 1799 par cette réponse de l'agent du canton au questionnaire qu'il devait remplir tous les mois : « ... L'esprit public est un vain mot pour la masse de nos cultivateurs. Vous me demandez d'avoir des discussions et explications fraternelles avec mes administrés. Rien de plus facile s'ils suivaient exactement les décades ; mais ils n'y paraissent point, ne se réunissant que le dimanche, et je ne puis me présenter décemment à leurs réunions. Des prêtres réfractaires, mais soigneusement cachés et travestis, circulent nuitamment dans ce canton. On se donne bien de garde de me transmettre des renseignements sur leur existence et sur les individus qui les recèlent » (Peyron, Documents pour servir..., II, p. 421).

Quelques mois plus tard la persécution se relâcha, et le 4 mai 1800, Michel-Marie Cren, prêtre âgé de 35 ans originaire de Sizun, déclara devant la Municipalité que reparaissant dans la société il fixait son domicile sur la commune de Plounévez. Voici son signalement : « figure ovale, menton rond, yeux roux, taille de 5 pieds 2 pouces (1 m. 72) couleur pâle ». Le même jour se présentèrent devant le bureau municipal Jean Le Lez, prêtre âgé de 33 ans, originaire de Plougoulm, qui avait « la figure oblongue, front, ouvert, sourcils et barbe noirs, yeux roux, nez aquilin, bouche moyenne, menton rond, taille de 5 pieds (1 m. 66) teint brun », puis François-Marie Kersauzon, prêtre âgé de 48 ans, né à Roscoff, qui avait « la figure oblongue, front large, sourcils et barbe gris, yeux roux, nez aquilin, bouche moyenne, menton fourchu, taille 5 pieds et 1 pouce (1 m. 69) teint brun ». Ces messieurs déclarèrent, le premier qu'il établirait son domicile à Plounévez, le second dans la commune de Plourin dont il était recteur.

Quant à Le Floc’h, arrêté par une colonne mobile le 24 février 1799, il avait été interné à Quimper, puis déporté à l’Ile de Ré, où il arriva le 7 mai. Le 18 avril de l'année suivante, il fut libéré (Daniel Bernard, op. cit., p. 162-163). Le 19 juillet 1800, il comparaît, à Plounévez, devant le maire, Paul Inizan de Lanzéon pour renouveler sa déclaration de résidence de l'an VI. Un an, jour pour jour, après cet événement, le 30 messider an IX, il y eut une séance solennelle à la mairie de Plounévez, où « les citoyens Floc’h et Cren, ministres du culte catholique » furent invités à prêter serment à la Constitution de l'an VIII.

(H. Pérennès).

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