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Note sur la chapelle Notre-Dame de Kerfaoues en Ploubezre.

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La chapelle Notre-Dame de Kerfaoues, classée monument historique, et son riche mobilier ont attiré dès longtemps l'attention des historiens de l'art breton [Note : Gaultier du Mottay, Répertoire archéologique du département des Côtes-du-Nord, p. 277 (Mémoires de la Société archéologique et historique des Côtes-du-Nord, 2ème série, t. I, Saint-Brieuc, 1883-1884). — Léon Palustre, La Renaissance en France, 11ème livraison, Paris, A. Quentin, 1885, p. 32 et 33. — Abbé Guillotin de Corson, Récits de Bretagne, 3ème série, p. 275, Rennes, 1898. — Kerfons, Lannion, imprimerie Mauger, 1936. — R. Coufron, Répertoire des églises et chapelles du diocèse de Saint-Brieuc et Tréguier, Saint-Brieuc, 1940, p. 357-358. — H. Waquet, L'art breton, Grenoble, 1942, t. I, p. 107, t. II, p. 80]. S'il est donc inutile de revenir en détail sur ce monument, son étude soulève cependant encore quelques points que nous nous proposons d'examiner ici.

Chapelle Notre-Dame de Kerfaoues ou Kerfons en Ploubezre (Bretagne).

Rappelons tout d'abord que, construite en forme de tau dans un lieu isolé [Note : Kerfaoues, en breton : la maison des hêtres. La chapelle est souvent dite par déformation Kerfons] au fond de la vallée du Guer à cet endroit très encaissée, elle-est une fondation ancienne des seigneurs de Coëtfrec. Détruite pendant la guerre de Succession du duché ainsi que l'église paroissiale, comme l'indiquent deux bulles d'indulgences des 21 juillet 1387 et de fin mars 1389, elle fut reconstruite dans le premier quart du XVème siècle et remaniée par Guillaume de Penhoët après que la seigneurie de Coëtfrec eut été érigée en sa faveur en baronnie le 13 juin 1451.

En 1559, l'aile sud dédiée à saint Yves fut construite dans le style Renaissance par René-Claude de Saint-Amatour et Claude de La Touche-Limousinière, sa femme.

Cette dernière chapelle, n'ayant aucun rapport avec les monuments contemporains de la Renaissance édifiés dans les Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) à Guingamp, Bulat-Pestivien, Bourbriac, a surpris tous ceux qui l'ont étudiée. Il est, en effet, fort curieux de rencontrer dans ce lieu perdu un monument d'un style extrêmement précoce, puisque ses fenestrages sont nettement inspirés de ceux de l'église parisienne de Saint-Eustache dont la première pierre, rappelons-le, fut, posée le 19 août 1532. Palustre a, d'autre part, indiqué que certains détails s'apparentaient étroitement à ceux des parties basses de la façade de la cathédrale de Rennes commencées par les architectes Vincent Rabaud et Robert Jarde, le 15 septembre 1541 ; comment, expliquer ce fait ?

A la suite de Gaultier du Mottay, tous les auteurs ont répété qu'à droite du maître-autel de Notre-Dame de Kerfaoues se trouvait une tombe avec inscription gothique d'une lecture difficile, tombeau d'une dame Margelye Goulamelarge. Intrigué par ce nom étranger à la Bretagne, nous avons examiné cette inscription, constaté qu'il y avait eu faute de lecture et que la tombe portait en réalité le nom de Marquise de Goulaine, décédée en 1531, femme de Regnard de la Touche-Limousinière et mère de Claude de la Touche.

Or l'on sait précisément combien la Maison de Goulaine contribua à l'introduction du style Renaissance dans toute la Bretagne. Elle était d'ailleurs alliée aux d'Espinay dont les travaux à Champeaux de 1551 à 1553 précédèrent de très peu ceux de Kerfaoues. Aussi, nul doute, à notre avis, que l'architecte de ce charmant édifice soit venu, comme l'avait pressenti Palustre, d'Ille-et-Vilaine ou d'Anjou.

D'autre part, la pièce principale du riche mobilier de Notre-Dame de Kerfaoues est son jubé en bois sculpté et peint, l'un des plus beaux de Bretagne. Sa tribune est décorée de quinze panneaux représentant, outre les douze apôtres du Christ, sainte Barbe et la Madeleine, tribune supportée par des arcs soutenus par des angelots tenant entre leurs mains des écussons soigneusement rabotés à la Révolution.

Ce jubé ne porte ni date ni inscription. Il a été daté par quelques auteurs du XVème siècle, le plus généralement du XVIème siècle sans preuve déterminante.

Chapelle Notre-Dame de Kerfaoues ou Kerfons en Ploubezre (Bretagne).

Or un acte nous permet aujourd'hui de préciser l'époque de sa construction (Archives départementales des Côtes-d'Armor, E. 1644). Un ouragan ayant détruit en 1769 l'une des verrières de la chapelle, le gouverneur fit mettre soigneusement de côté tous les morceaux afin de faire dresser l'état des prééminences, qui fut exécuté le 10 septembre 1771 par un expert héraldiste, François Bahic de Lannion.

Celui-ci mentionna dans la verrière les armes de Bretagne, d'Avaugour, de Coëtmen, de Penhoët et du Parc et ajouta que ces mêmes armes se voyaient également sur le jubé, très précieuse indication. Elles permettent, en effet, d'attribuer le jubé soit à Guillaume de Penhouët, chambellan du duc François Ier et vivant encore en 1470, ainsi qu'à sa femme Béatrix de Coëtmen, soit plutôt à leur fils Jean, époux de Béatrix Péan dont les armes étaient écartelées du Parc et de la Roche-Jagu, ces dernières semblables d'ailleurs à celles de la Maison de Coëtmen de sa belle-mère.

Ce Jean, baron de Coëtfrec en 1475, était décédé en 1489. Or l'examen du jubé de Kerfaoues indique qu'il est légèrement postérieur à celui de Saint-Fiacre du Faouët daté très exactement par une inscription de 1480 et qu'il convient ainsi de le dater d'entre 1481 et 1489.

Une objection peut cependant être faite. Le jubé de Lambader en Plouvorn est certainement du même atelier que celui de Kerfaoues, entre autres les ajours si particuliers de l'escalier s'y retrouvent identiques, mais il lui est postérieur de quelques années ainsi que le montrent les panneaux légèrement plus tardifs ; or le jubé de Lambader est daté par tous les auteurs de 1481.

Cette dernière indication ne semble cependant pas à retenir, car ce jubé ne porte aucune date et aucun acte d'archives n'autorise à le dater avec cette précision. S'il a bien eu comme donateurs Marc de Troerin et sa femme Isabeau de Kermellec dont il porte les armes, et si ceux-ci furent bien mariés en 1481, rien ne permet de dater le jubé de l'année de leur mariage, Marc de Troerin étant encore mentionné en 1524.

En résumé, l'introduction du style Renaissance à Kerfaoues paraît due à la Maison de Goulaine et le jubé de la chapelle, tout gothique, doit être daté des environs de 1485. Celui de Lambader, exécuté par le même atelier, doit, par comparaison, être reporté à la fin du XVème siècle et enfin celui de la chapelle Locmaria en Belle-Isle-en-Terre, également voisin de ceux-ci, aux toutes premières années du XVIème siècle.

(René Couffon).

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