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LA SEIGNEURIE DE LA MALLERIE (arrière fief du Plessis-Balisson).

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I- Le Château vers 1913.

Le château de la Mallerie se compose en 1913 d'une vaste maison moderne construite, nous a-t-on dit, dès le début du XIXème siècle et dont les toits élevés et les cheminées énormes constituent le principal ornement. A l'une de ses extrémités sont accolés de vieux bâtiments qui ont subi tant de retouches qu'ils sont à la fin demeurés sans aucun style. Tout cela est renfermé au fond d'une cour close, encore entourée de douves profondes à moitié pleines d'eau qui font le tour de la propriété. Çà et là au dehors, quelques restes d'avenues qui contiennent de beaux arbres malheureusement fort éclaircis. Signalons aussi dans la cour d'intéressants débris de pierres sculptées, ainsi qu'un bénitier en granit qui remonte assez haut ; le tout provenant, paraît-il, de la chapelle voisine de Saint-Sébastien, à qui l'on a fait subir une restauration assez récente.

 

II- Le Château de la Mallerie, en 1712.

Nous ne pouvons douter que la Mallerie ne fit autrefois partie de la châtellenie du Plessis-Balisson, car les premiers aveux que nous possédons du Plessis, mentionnent toujours parmi ses vassaux nobles les seigneurs de la Mallerie. Cependant, il faut attendre les débuts du XVIIIème siècle pour retrouver une description de cette propriété. Nous l'avons puisée dans un aveu rendu en 1712 pour la terre et seigneurie du Plessis-Balisson (Archives des Côtes-d'Armor, E 167).

On y parle de « la maison principale de la terre de la Mallerie située en la dite paroisse de Ploubalay, qui consiste en un grand corps de logis avec des bâtiments et dépendances au côté de la porte du dit lieu ; en une tour dans laquelle sont la montée de taille pour le service de la dite maison ; une grande tour au dedans de la maison où il y a un puits ; grand et petit portail de pierres de taille pour l'entrée de la dite cour, au côté de laquelle vers orient un corps de logis composé de la boulangerie, fournil, écurie et chambre ; au bout duquel hors l'entrée de la dite cour un autre logement servant d'étable et pressoir. Au côté occidental de l'entrée de la dite cour un logis en forme de pavillon, dans le premier étage duquel est la chapelle de la dite maison et vers l'occident de la dite cour est le jardin dans lequel il y a un colombier et refuge à pigeons bâti en rotondité.

La dite maison, cour et jardin, enceinte de douves et fossés contenant trois journaux 41 cordes. La basse-cour et entrée au bout de laquelle est un bois de haute futaye derrière le jardin, le tout s'entretenant. A la maison de la Mallerie est attachée le droit de banc dans l'église de Ploubalay dans le chanceau juxte au côté de l'Evangile ».

 

III- Succession des seigneurs de la Mallerie.

Nous ne connaissons le nom d'aucun des seigneurs de la Mallerie avant l'an 1513. A cette date CHARLES DE MARS et sa femme possédaient la terre noble de la Mallerie et y avaient quelques rotures adjointes [Note : Les du Matz portaient " d'argent fretté de gueules de six pièces, au chef échiqueté d'or et de gueules ". Ils virent leur noblesse reconnue comme d'ancienne extraction chevaleresque le 20 et 24 mars 1671]. (Bib. N. Ms fr. 22320 f° 701. Réformations de la Noblesse dans l'évêché de Saint-Malo).

On trouve encore cité ces deux personnages en qualité de vassaux nobles du Plessis-Balisson dans deux aveux rendus par Pierre Marec au duc de Penthièvre l'an 1527 et 1538. (Archives des Côtes-d'Armor, E 106 et E 568).

Les registres paroissiaux de Ploubalay rapportent aussi le 3 juin 1522, le baptême de Françoise, fille de noble écuyer Charles de Mars et de Françoise Ferron son épouse.

Etait-ce aussi leur fils ce MATHURIN DE MATZ que nous trouvons mentionné dans un aveu de 1555. (B. Nle. Ms. 70. C. Duchesne), comme étant alors sous la tutelle de Charles de Matz son garde naturel ; la chose en a tout l'air. Quelques années plus tard, en 1567, nous voyons le 13 août, Mathurin du Matz, sieur de Saint-Agathe et de la Mallerie, faisant baptiser sa fille Louise, née de son mariage avec Perrine du Cambout. Le 1er mars 1570, il leur naquit aussi une autre fille appelée Julienne, à cause de sa marraine Julienne du Boisjean, dame du Poncornou.

A la suite de quel arrangement la terre de la Mallerie passa-t-elle alors dans la famille du Cambour. C'est ce qu'on ne trouve nulle part. Toujours est-il que c'est de René de Cambour que par contrat du 27 janvier 1573, Julien du Breil de Rays, acquit pour la somme de 8.000 livres la terre et maison de la Mallerie où ses successeurs et peut-être lui-même transportèrent leur résidence.

La terre de la Mallerie devait demeurer plus d'un siècle et demi dans la famille de son nouvel acquéreur. Nous ne répéterons point ici ce que nous avons déjà dit ailleurs des du Breil de Rays. Bien que les du Breil aient habité assez souvent le château de la Mallerie et que quelques-uns même y aient rendu le dernier soupir, ou trouve cependant de leur temps sur les registres de Ploubalay les noms de plusieurs locataires qui occupèrent temporairement cette demeurance, entre autres : Messire Olivier de Tronguidy, écuyer sieur du Demaine, demeurant à la Mallerie, y décédé, inhumé le 18 octobre 1641 dans l'enfeu de Rays.

Pierre Bougie sieur de la Vallée, décédé à la Mallerie, inhumé le 28 mars 1676, à l'âge de 40 ans.

Quand Charles du Breil vendit en 1747 la terre et comté de Rays à messire Henri Baude de Saint-Père et à ses associés, la Mallerie fut de plus en plus délaissée par les nouveaux acquéreurs.

En 1757, on y voit mourir un certain Le Texier, ancien marchand à Rennes, puis c'est la nuit sur son histoire jusqu'en 1787.

A cette époque, Jean-Georges Baude ayant afféagé sa seigneurie du Plessis à maître Toussaint Briot pour une rente qui s'élevait tant en nature qu'en espèce à la somme de 7.692 livres tournois, le nouveau propriétaire transporta sa résidence au château de la Mallerie où il passa les mauvais jours de la Révolution, non sans y jouer aux débuts un certain rôle.

 

IV- La Mallerie et la Révolution.

Vers le milieu de l'année 1792, la Bretagne travaillée par la Rouërie et ses affidés s'agitait un peu partout dans les campagnes. Toussaint Briot comme tant d'autres s'affilia aux conspirateurs et travailla dans ses environs à recruter des adhérents. Mais si précautionneux put-il être, quelque chose avait transpiré de ses démarches, et dans le désarroi général qui régnait alors, on s'alarmait d'autant plus que l'on était moins renseigné. Ainsi se répandirent les bruits les plus fantastiques sur ce qui se passait au château de la Mallerie. Les révolutionnaires de Ploubalay en furent informés comme les autres, mais ignorant au juste de quoi il s'agissait ils égarèrent facilement leurs soupçons et dans leur crainte de voir échapper des coupables, ils agrandirent sans trop y regarder le cercle de leurs dénonciations, si l'on en juge par la lettre suivante adressée le 17 juin 1792, par les Administrateurs du Directoire du District de Dinan au juge de paix du canton de Ploubalay [Note : Nous extrayons toutes ces pièces du 1er Reg. de Correspondance du D. du D. de Dinan, du 7 juillet 1791 au ler août 1792, conservé à la mairie de cette ville. Voici la lettre que le Directoire de Dinan écrivait à celui de Saint-Malo ; elle porte elle aussi la date du 28 juin. Son contenu ne nous apprend rien de nouveau, sinon le nom d'un des dénonciateurs, le citoyen Hamard, curé constitutionnel de Pleurtuit. « M. le Maire de cette ville nous communique à l'instant une lettre du curé de Pleurtuit dont nous vous envoyons copie. Vous verrez qu'il annonce des rassemblements d'hommes suspects aux lieux de la Mallerie et Beauvais. Cette première terre appartient au sieur Briot et est située en Ploubalay. L'autre appartient au sieur Lesnard et est située en Pleurtuit qui est de votre arrondissement. Pour dissiper les attroupements que l'on nous signale et parvenir à en faire punir les auteurs, nous prenons le parti d'envoyer un détachement de 100 hommes de troupes de ligne à la Mallerie. Il part ce soir pour arriver de suite. Nous nous empressons de vous en prévenir afin que vous puissiez de votre côté prendre les mesures que vous jugerez convenables pour déconcerter !es projets du sieur Lesnard. Vous pourrez faire partir sur le champ un détachement chargé de faire les perquisitions dans la demeure de cet homme et qui se concertera avec celui que nous faisons partir pour empêcher les troubles dont on nous menace, d'éclater dans les paroisses de Ploubalay et de Pleurtuit »] ; elle est très significative à cet égard :

« Nous avons reçu la lettre que vous nous avez adressée le 25 courant. Nous craignons comme vous quelque évènement malheureux pour votre canton. Quant au Bois de la Motte, ce ne peut être qu'un faux bruit, parce que aujourd'hui nous avons un commissaire à faire l'inventaire des effets mobiliers, qui nous aurait instruit s'il y avait quelque attroupement. Vous nous avez fait part de votre lettre à monsieur l'officier de la gendarmerie qui vous envoie deux cavaliers déguisés. Vous donnerez aux gendarmes les instructions et les ordres que vous jugerez convenables pour parvenir à connaître le vrai ou le faux des bruits que vous nous annoncez ».

Ce que fut le rapport des deux gendarmes déguisés, nous pouvons nous en faire idée par les mesures que se décida à prendre le District de Dinan. Il organisa le lendemain vers la Mallerie une véritable expédition militaire et se hâta d'en informer l'administration du Département par la lettre ci-jointe en date du 28 juin :

« Nous venons d'être instruits qu'il se forme des rassemblements de personnes suspectes et ennemies de la Constitution à la maison de la Mallerie située en Ploubalay et appartenant au sieur Briot, violemment soupçonné d'enrôler pour l'armée des émigrés. Ils doivent avoir lieu la nuit et les maisons où ils se font, doivent contenir des dépôts d'armes, d'argent et d'argenterie volée aux églises. Le sieur Lesnard demeurant à Beauvais, en Pleurtuit, doit être complice de Briot. Sa maison comme celle de ce dernier sert de point de ralliement.

Pour nous informer parfaitement de la vérité de ce rassemblement dangereux et déconcerter les projets coupables de ceux qui en sont les auteurs, nous prenons le parti d'envoyer un détachement de troupes de ligne sur les lieux et nous écrivons en même temps au District de St-Malo pour le prévenir de faire ce qui dépends de lui et concourir avec nous pour dissiper les attroupements qui se forment à Pleurtuit qui est de son ressort.

Déjà nous avions appris que le sieur Briot cherchoit à embaucher les citoyens de sa paroisse et ceux des paroisses voisines ; nous avions en conséquence dénoncé sur le champ cette découverte au juge de paix de Ploubalay avec prière de faire toutes les visites prescrites par la Loi. Elles ont été commencées, mais il n'y a pas encore assez de témoins pour acquérir une preuve complète contre l'accusé. Le juge de paix nous ayant appris depuis que le bruit courroit dans la paroisse qu'il y avait un rassemblement de 800 hommes à la Mallerie, nous avons fait partir deux gendarmes déguisés qui ont pris des informations sur les lieux et nous ont appris qu'il y avoit une grande fermentation parmi le peuple qui suivant divers bruits ne tarderoit pas à éclater. Pour la prévenir nous nous déterminons à faire partir un détachement. Une lettre écrite à M. le Maire de Dinan dont nous vous envoyons copie, nous a fait prendre ce parti sans délai ».

Briot fut-il prévenu à temps de l'expédition nocturne qu'on préparait contre lui. Eut-il le temps de prendre ses précautions, les avait-il prises d'avance, ou plutôt le fameux rassemblement de huit cents hommes qu'on prétendait exister à la Mallerie n'existait-il que dans l'imagination troublée des dénonciateurs ? Toutes ces hypothèses sont permises. En tout cas le commissaire du Directoire revint bredouille et les cent hommes de troupes de ligne qu'on avait envoyé n'eurent pas l'occasion de déployer leur courage.

« Le commissaire chargé de cette expédition, écrivait le 30 juin le Directoire de Dinan au Directoire de Département, nous a rapporté avoir fait toutes les perquisitions possibles sans avoir trouvé rien de suspect, mais que d'après les renseignements qu'il avait pris, cette démarche était absolument nécessaire pour intimider les traîtres et les fanatiques qui règnent dans ce canton et arrêter les progrès d'une fermentation dangereuse. Nous vous ferons passer par le premier courrier son rapport ».

Ainsi qu'on le voit, le Directoire un peu confus de son échec cherchait à disculper son entreprise auprès de l'administration centrale, mais ses explications semblent embarassées. Certes la disproportion entre l'effort déployé et le résultat atteint était considérable ; aussi peut-être reçut-il un blême du Département pour avoir agi trop vite sur la foi de mauvais racontars.

Du reste l'accusateur public des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) siégeant à Saint-Brieuc, saisi lui-même de cette affaire, n'épargna pas les reproches à la municipalité de Ploubalay, laquelle, paraît-il, avait pris l'affaire en mains après l'insuccès de l'expédition que nous venons de narrer. Comme il arrive toujours en pareil cas, la municipalité s'était portée à un excès de zèle et ses agents avaient dû commettre des violences que rien ne justifiait et dont l'accusateur public la blâme vertement.

« Je reçois, leur écrit-il à la date dut 12 juillet, votre lettre du 4 de ce mois ce matin et la renverrai au Département aujourd'hui et je suis très persuadé que le Département et le District de Dinan n'approuveront pas les excès commis à la Mallerie chez le sieur Briot... Par les actes d'accusations qui me sont remis, vous ne me désignez aucun coupable et votre enquête ne ressemble à rien. Vous vous plaignez d'un rassemblement et vous ne désignez ni chef de bande ni bandit... et vous voulez qu'on les punisse quand on ne les connaît pas et qu'on ne désigne ni coupable ni témoins. Faites des recherches plus exactes, cachez-les au sieur Briot et quand tout sera mis en règle, que les coupables seront connus et désignés par un acte d'accusation, je les poursuivrai avec autant d'activité que de fermeté ». Signé : BESNÉ (Archives Municipales de Ploubalay).

Ainsi qu'il résulte de ces pièces, le châtelain de la Mallerie avait pu réussir à se disculper. Mais la découverte des papiers de la Rouërie à la Fosse-Hingant, le 25 février 1793, rendit ses efforts inutiles et ne put empêcher son arrestation et celle de son fils Guillaume Briot (Mémoires du Colonel de Pontbriand, p. 15 et 16).

Ils furent cependant relaxés au bout de quelques temps et revinrent à la Mallerie. Mais ils n'y vécurent pas sans être en butte à de multiples tracasseries de la part du nouveau pouvoir. La lettre suivante en donnera un échantillon : Dinan, le 7 pluviôse an 3 (25 janvier 1795). L'agent national Montagnard et révolutionnaire du District de Dinan, à la Municipalité de Ploubalay : « Républicains, En même temps que je dois surveiller vos opérations, mon devoir m'oblige de vous faire observer les lois avec l'exactitude digne des Républicains et je vous dois les conseils d'un ami sur leur exécution. L'analyse de vos opérations pendant le mois de nivôse, m'a appris que vous aviez commis deux erreurs que vous vous empresserez de réparer.... La seconde consiste dans l'envoi d'une force armée et d'un commissaire en garnison chez Briot. L'article 13 de la loi du titre 7 du 21 pluviôse, prononce contre ceux qui refusent l'honorable mission de verser les secours de la patrie dans le sein de l'indigence la déclaration de suspicion ; l'article 11 du titre 2 de la loi postérieure du 13 prairial oblige le commissaire distributeur qui par négligence ou mauvaise intention retarde les bienfaits de la loi, à un dédommagement envers les indigents qui ne peut être moindre du tiers de la somme réclamée. Les dispositions de la loi doivent suffire pour vaincre l'opiniatreté de ceux qui refusent de remplir un devoir aussi respectable, et si vous aviez médité la loi, vous vous seriez épargné une erreur que Briot pourrait vous rendre coûteuse en vous faisant payer les frais de la garnison. Il ne faut, mes amis, jamais vouloir être plus sage que la loi, c'est une règle générale dont j'espère vous ne vous écarterez pas davantage. Si, comme je le pense, Briot est un des plus forts contribuables de la commune, parmi lesquels seuls ils doivent être pris aux termes de l'art 6 du titre 7 de la loi du 21 pluviôse, et s'il persiste dans son refus, en conformité de l'art 11 du titre 2 de la loi du 13 prairial, l'agent national le fera payer le dédommagement ordonné par la loi et rendra compte de la conduite ultérieure de Briot à l'administration ». Signé : CHARLES BESLAY (Archives Municipales de Ploubalay).

Toussaint Briot mourut le 30 août 1812, à l'âge de 83 ans dans son château de la Mallerie qu'il avait fait reconstruire et dont ses descendants conservent encore au début du XXème siècle la propriété. (A. Lemasson).

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