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La paroisse de Plouasne durant la Révolution.

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Renseignements ecclésiastiques. — Plouasne, cure de l'ancien diocèse de Saint-Malo, dépendait autrefois de l'archidiaconé de Dinan et du doyenné de Bécherel.

Les titulaires de cette paroisse étaient les apôtres Saint Jacques et Saint Philippe, et cela dès la Révolution, mais au haut Moyen-Age il n'en était pas ainsi, et l'église de Plouasne était dédiée, aux environs de l'an 1130, au vieux saint breton Saint Brienc (Anciens Evêchés de Bretagne, op. cit., IV, p. 403), et c'est vraisemblablement aux moines de Saint-Martin de Marmoutiers, qui possédèrent quelque temps l'église de Plouasne, qu'il faut attribuer le changement du titulaire de ce sanctuaire.

Plouasne comprenait à cette époque dans son territoire les paroisses actuelles de Bécherel, de Saint-Pern, du Quiou et de Longaulnay. Nous renvoyons à la bibliographie très complète que nous venons de donner ceux qui voudraient étudier l'histoire de Plouasne à ce lointain passé. Le compte de 1330 publié par Longnon dans les Pouillés de la Province de Tours, ne parle pas de Plouasne, mais il mentionne le prieuré simple de la Vieille-Tour, situé en cette paroisse. En 1538, Jacques Hersal, son prieur, chanoine régulier de l'abbaye de Beaulieu, en Mégrit, assistait au chapitre tenu en ce monastère. Ce prieuré existait encore en 1723. (Archives Loire-Inférieure, B 761. Voir aussi les pièces concernant le fonds de Beaulieu aux Archives des Côtes-d'Armor, série H).

Les seigneurs barons de Bécherel jouissaient dans l'église de Plouasne des droits de seigneurs supérieurs et prééminenciers. (Cf. Guill. de Corson  Revue de Bretagne, année 1894, p. 104). Lors de la Révolution, par suite de la vente consentie le 8 avril 1750 par le duc et la duchesse de Duras, née Louise de Coëtquen, de la terre et baronnie du Vau-Ruffier, à Louis-René de Caradeuc de la Chalotais, les droits de patron et de seigneur fondateur de l'église de Plouasne appartenaient en 1789 à Anne-Jacques-Raoul de la Chalotais, marquis de Caradeuc, fils du célèbre procureur général, l'ennemi des Jésuites. Le dernier seigneur de Plouasne périt guillotiné à Paris, à la barrière du Trône, le 10 juillet 1794.

A la fin de l'ancien régime, la présentation de la cure de Plouasne dépendait de l'Ordinaire.

D'après le Pouillé de la Bastie, le seigneur de Plouasne, le prieur de Saint-Jacques de Bécherel, l'évêque de Saint-Malo, le prieur de la Madeleine de Broons et quelques autres encore, se partageaient les dîmes de Plouasne. Parmi ces « quelques autres », figurait l'abbaye de Boquen et le recteur de la paroisse. Celui-ci déclarait en 1790 qu'il avait perçu de ce chef, cette année, 1.629 livres, sur lesquelles, après avoir donné 350 livres à son vicaire et payé 18 livres de décimes, il lui restait 1.261 livres nettes et quittes.

La composition de la dîme de cet ecclésiastique nous renseigne sur les cultures en usage à Plouasne à cette époque. Les assolements en avoine tenaient alors la première place : le recteur récoltait en effet 153 boisseaux d'avoine, mesure de Bécherel, estimés 306 livres ; 110 boisseaux de froment pour 748 l. ; 102 boisseaux de seigle pour 459 l. et seulement 4 boisseaux de paumelle, valant 12 l. A cette somme, l'on devait ajouter 104 l. produites par la vente des pailles et quelques menues dîmes, parmi lesquelles les novales et celle des lins et chanvres.

La culture du lin paraît, en effet, avoir été très développée à Plouasne autrefois. Aux environs de 1700, la marquise Belin de la Marzelière, qui possédait la baronnie et les dîmes du Vau-Ruffier, du fait de son mariage avec Louis-Hercule de Coëtquen, comte de Combourg, soutenait qu'il se trouvait alors sur le territoire de Plouasne, plus de 500 journaux de terre ensemencés en lin et en chanvre, sur les 7.000 journaux de terre environ que contient cette localité, et elle obtint le 28 septembre 1701 un arrêt du Parlement de Bretagne obligeant les Plouasnais à lui payer la dîme sur cet article. (Cf. Journal des Arrêts du Parlement de Bretagne, op. cit., t. II, p. 539 et sq.).

L'église de Plouasne, rapporte le Pouillé de la Bastie, est « assez bien quand les réparations seront faites ». Mais, de cette église, il ne subsiste plus aujourd'hui, écrit G. du Mottay, que deux belles fenêtres rayonnantes du XIVème siècle et une belle chaire à prêcher en bois sculpté [Note : Cette chaire, nous a-t-on assuré, n'est plus dans l'église de Plouasne depuis le début du XXème siècle]. (Cf. Répertoire Archéologique et aussi Géographie département des Côtes-d'Armor, auteur et ouvrages cités). Quant au presbytère, il est noté comme « assez passable et pas éloigné de l'église ». Il porte le millésime de 1695 sur un de ses bâtiments.

Le projet de Pouillé manuscrit conservé aux Archives de Saint-Malo sous la cote GG 292, nous apprend qu'il se trouvait autrefois à Plouasne quatre chapelles domestiques qui s'appelaient La Boulaye-Ferrier, La Bertaudière, Launay-Bertrand et le Vau-Ruffier. Longnon, dans ses Pouillés déjà cités, mentionne Launay-Bertrand, vers 1448. Quant à la chapelle du Vau-Ruffier, la seule des quatre citées plus haut qui subsiste encore, elle est aujourd'hui désaffectée, mais les Archives des Côtes-d'Armor, série E 2933, nous apprennent qu'elle avait été fondée en messes le 17 octobre 1427 par haute et puissante dame Philippe Ruffier, fille et unique héritière de Jehan Ruffier, chevalier, et de Saveline Du Guesclin, seigneur et dame du Vau-Ruffier, de Rougé en Tréfumel et de la Ville-Anne. Les jours, mois et an précités plus haut, dame Philippe, pour le repos de l'âme de son époux Raoul IV de Coëquen, maréchal de Bretagne, ainsi que pour celles de ses père et mère et pour elle-même, fonda cinq messes à dire par semaine, à savoir deux à l'église de Plouasne et trois à la chapelle du Vau-Ruffier, et présenta pour assurer ces messes Dom Jehan Hericzon à Mgr. l'Evêque de Saint-Malo, lequel approuva la fondation, qui fut en 1434 définitivement fixée à 25 livres de rente annuelle.

De tout son passé, la chapelle du Vau-Ruffier ne conserve plus maintenant que sa cloche, qui, rapporte le vicomte H. de la Messelière, sert à annoncer l'agonie ou la mort des habitants d'alentour.

Toujours grâce au projet de Pouillé coté GG 292, nous savons qu'il y avait aussi à Plouasne, avant la Révolution, cinq chapelles dites frairiennes. Mais, seules de celles-ci : le Val, dédié à Sainte Madeleine, la Saisonnais ou Cessonnais, dédiée à Sainte Anne, et Lantran, existent encore et sont toujours desservies au début du XXème siècle. Dans cette dernière, on vénère les vieilles statues de Saint Pierre, de Saint Jean-Baptiste et de Sainte Marguerite, et dans la chapelle de la Saisonnais, l'on conserve celles de Sainte Anne et de Saint-Nicolas. Disons aussi, à propos de statues anciennes, que l'église de Plouasne possède une statue de Pierre, représentant, croyons-nous, Saint Pierre sur sa chaire, mais elle est malheureusement gravement mutilée.

Des chapelles frairiennes de la Saudrais et de Saint-Maur, rien ne subsiste plus aujourd'hui. Du reste, dès le 20 novembre 1751, cette dernière chapelle se trouvait dans un tel mauvais état que l'on devait faire acquitter dans l'église de Plouasne les messes qu'avait autrefois fondées au sanctuaire de Saint Maur messire Bertrand Le Filleux. Aussi M. de Saint-Pern du Lattay, sur la seigneurie duquel était située cette chapelle, priait-il l'évêque de Saint-Malo de pourvoir à faire réparer cet édifice, ainsi qu'à faire rendre des comptes à ses anciens trésoriers. La chapelle Saint-Maur, qui mesurait 33 pieds de long sur 22 pieds de large, fut vendue à Jean Crespel comme bien national, le 24 décembre 1791. Six mois auparavant, on avait liquidé dans les mêmes conditions les biens-fonds jadis légués pour pourvoir aux charges de cette chapellenie. Ils consistaient dans les clos ou pièces de la Planche, de la Ville, le clos Auray, la petite Flochée et le Pré Rond, lesquels trouvèrent acquéreurs le 29 juillet de la prédite année, dans la personne du sieur De la Rocheaulion.

Du reste, d'après le Pouillé de la Bastie, l'église de Plouasne possédait elle aussi quelques fondations, « mais elles étaient en petit nombre et leurs titres manquaient en partie ». Cependant, les liquidateurs de la Révolution trouvèrent le moyen de faire mettre en vente et s'adjuger le 6 février 1799 les Champs Paillés, la pièce de la Pâture et la petite Landelle, le tout dépendant de la fondation « des Naudières », puis, le 17 octobre 1800, la prairie de Bétineuc, située près du village du Val, et qui provenait de l'ancienne chapellenie supprimée du Vau-Ruffier, fut acquise par Julien Besnier.

Quant à la fabrique de Plouasne, toujours d'après le Pouillé de la Bastie, elle possédait en terres 25 livres environ de rentes fondées. D'anciens comptes de cette fabrique encore conservés aux Archives de la mairie de Plouasne (en 1925), nous renseignent qu'en 1769, les revenus de l'église de cette paroisse s'étaient élevés à 389 livres, grâce pour une large part aux nombreuses offrandes que faisaient alors les Plouasnais à la maison de Dieu. C'est ainsi que les dons de beurre en pots avaient produit 120 l. d'argent, le fil des commençailles 18 l., le blé noir 9 l. 12 s., 2 jeunes veaux 6 l., 2 agneaux 5 l., un porcelet 2 l. ; quant aux pommes du cimetière, elles avaient rapporté 42 l., ce qui constituait un joli revenu pour le général de la paroisse.

Un autre compte, celui-là de 1784, nous apprend également que cette année, les recettes de la fabrique de Plouasne avaient atteint 500 livres 4 sols, alors que les dépenses n'avaient été que de 179 livres 11 sols. Cette fois encore, les générosités des paroissiens se marquaient par un veau, trois agneaux et deux porcelets offerts à leur église. Quant au lin, au froment, aux « noeuds d'échine » et aux « tourteaux » de beurre recueillis par les trésoriers en charge, leur vente avait produit 129 livres d'argent. A ces revenus « casuels », s'ajoutait l'affermage des champs dits les Grenouillères, le Petit Pré, le Poiltel, le clos Meloin, le Champ de l'Eglise, et le pré de la Maladrerie, propriétés de la fabrique de Plouasne qui, par un bonheur assez rare, furent seulement expertisées, mais non vendues au cours de la Révolution. Lorsque Napoléon Ier les fit rendre à l'église de Plouasne, leur légitime propriétaire, on les estima valoir environ 120 livres de revenu annuel. (Dubreuil : La Vente, etc., op. cit., p. 607).

Nous verrons, en parlant du clergé de cette paroisse, combien l'église de Plouasne fut dévastée au cours de la Terreur. Dès avant le 7 mai 1793, on avait envoyer au District de Dinan une magnifique croix en argent, ainsi qu'un encensoir et sa navette, le tout pesant 18 marcs, 7 onces, 3 gros d'argent blanc. Le marc valant 244 grammes 72 c., l'once 30 gr. 59 c., et le gros 3 gr. 82 c.

Le 20 mai 1794, une vente des ornements de l'église de Plouasne faite à Dinan, avait produit 312 frs. 65. Trois mois plus tard, le 24 août 1794, Yves Hedal, assisté des citoyens Thomas et Berthelot, orfèvres jurés, expertisèrent à Dinan avant de l'envoyer à la Monnaie : un pied de ciboire et son couvercle, six pieds de calice et un ostensoir pesant 12 marcs, 2 gros d'argent blanc ; une Vierge en argent, un calice, six coupes de calice, une coupe de ciboire, sept patènes et un croissant pesant 7 marcs, 1 once, 1 gros d'argent doré ; 4 onces, 2 gros de galon d'argent et 7 marcs, 7 onces de galon d'or. Tout ce métal précieux, qui provenait de l'église de Plouasne, fut expédié à la Monnaie.

Dans le projet de la nouvelle configuration des paroisses étudié en 1792, Plouasne devait être conservé, mais cédait à Bécherel la partie où sont situés les Caradeuc. Il recevait en échange une partie de la paroisse de Saint-Pern. Le chemin qui conduit du moulin du Vau.... au grand chemin de Rennes à Dinan devant lui servir de limite. Plouasne cédait aussi quelques quartiers au Quiou, ainsi qu'à Guenroc.

Disons pour finir que Plouasne était uni autrefois pour les stations des prédications avec Saint-Pern et Tréfumel, et que ses jours d'adorations avaient été fixés par Mgr. des Laurents du 16 au 19 avril de chaque année.

 

CLERGÉ.JULIEN-FRANÇOIS PHÉNICE, recteur, était né à Saint-Briac le 21 novembre 1742, du mariage de Julien et de Jeanne Gugain. On le note au Séminaire de Saint-Servan comme « sachant très bien son chant et passant d'assez bons examens ». Il reçut la prêtrise à Rennes par dimissoire le 4 avril 1767, et remplissait les fonctions de chapelain à la cathédrale de Saint-Malo, lorsque, le 2 mars 1780, décéda à Plouasne M. Yves Bernard, qui administrait cette paroisse comme recteur depuis le 24 septembre 1770 [Note : M. Bernard remplaçait l'abbé René Maudet, choisi au concours le 19 juillet 1752, à la mort de François Lucas, décédé le 2 mai précédent]. Par suite de sa mort, sa cure ayant été mise au concours le 5 avril 1780, ce fut l'abbé Phénice qui l'obtint et qui s'y installa après avoir été confirmé dans son titre par le Pape, le 15 juin suivant.

Les Archives des Côtes-du-Nord, non plus que celles de Plouasne, qui sont les unes comme les autres d'une pauvreté désolante, concernant cette paroisse, ne nous disent rien de la date à laquelle M. Phénice refusa, ainsi que son vicaire, de prêter le serment constitutionnel. Néanmoins, aucun candidat ne s'étant présenté pour le remplacer dans sa cure, le recteur de Plouasne put conserver ses fonctions, pour lesquelles nous le voyons recevoir son dernier traitement en avril 1792. Lors de l'application de la loi du 26 août de cette année, M. Phénice crut devoir y obtempérer et apposa sa dernière signature sur les registres de catholicité de Plouasne le 6 septembre 1792. Nous ne pouvons cependant préciser davantage la date du départ de ce prêtre, car le registre des passeports visés à cette époque par le District de Dinan, demeure introuvable, perdu sans doute qu'il a été, comme tant d'autres pièces, à la mort de l'italien Luigi Odorici.

Le recteur de Plouasne avait, lors de son départ, caché une partie de ses effets chez Julienne Bunoux, au Bas-Bourg, en Plouasne, mais, à la suite d'une dénonciation, une perquisition fit découvrir ce dépôt, et la municipalité dut les placer sous séquestre le 27 mars 1793.

L'abbé Phénice figure sur les papiers de Mgr. de Cheylus comme recevant à Jersey un secours mensuel de 40 livres depuis le mois d'août jusqu'à celui de décembre de l'an 1796. Nous le retrouvons à Plouasne, revenu dans sa paroisse, où il baptisait et mariait le 2 janvier 1799.

Le préfet Boullé, dans son enquête, note M. Phénice comme « susceptible de rester dans sa cure ». Telle ne fut cependant pas la destinée de ce prêtre. Transféré à la cure de Broons le 8 avril 1803, il y mourut en fonctions le 4 juin 1814.

PIERRE BRIAND, vicaire, naquit à Longaulnay le 4 juin 1755, de Joseph et de Marie Sevin-Dandry. Après d'assez faibles études au Séminaire, il reçut la prêtrise à Saint-Malo le 20 septembre 1780. Devenu vicaire de Plouasne, où sa signature figure pour la première fois sur les registres le 17 janvier 1784, M. Briand refusa comme tel de s'assermenter. Puis, après avoir perçu pour la dernière fois son traitement au mois d'avril 1792, cet ecclésiastique s'exila à Jersey au mois de septembre de cette même année, lors de l'application de la loi de déportation « aux ci-devant insermentés réputés fonctionnaires publics ». Mais si Lefebvre d'Anneville, ainsi que l'abbé Gofvry, mentionnent sur leurs listes la présence à Jersey du vicaire de Plouasne en 1793, celui-ci, cependant, n'y demeura pas très longtemps.

Nous avons en effet relevé, le 19 septembre 1792, la dernière signature de M. Briand à Plouasne avant son départ pour l’exil ; or, nous le retrouvons en pleine Terreur revenu et baptisant dans son ancienne paroisse le 24 mai 1794, et, depuis cette époque jusqu'à la pacification de Bonaparte, ce prêtre demeura au milieu des Plouasnais, accomplissant au péril de ses jours un fructueux ministère caché.

Du reste, nous devons dire que ce bon prêtre fut puissamment secondé dans son zèle par le sentiment unanime de l'excellente population plouasnaise, qui, tout le temps du péril, se fit un honneur de dérober son vicaire, ainsi que les nombreux ecclésiastiques réfugiés sur son territoire, à toutes les poursuites dirigées contre eux par le gouvernement révolutionnaire et ses séides [Note : Ce ne fut que le 27 mars 1793 que la municipalité de Plouasne, sur les injonctions réitérées du District, se détermina à fermer les chapelles de la Saisonnais, dont elle s'empara de la pierre sacrée, et celle du Val, dont elle emporta le calice. De toutes les chapelles de Plouasne, celle de Caradeuc demeura seule ouverte au culte].

C'est ainsi que dans la dernière dizaine d'avril 1794, une force armée de deux cents hommes, appuyés d'une pièce de canon, avait été envoyée perquisitionner à Plouasne, avec mission « d'arrêter les jeunes gens de la réquisition fugitifs, ainsi que la horde des prêtres répandus dans cette région ». Corseul, agent national terroriste près le District de Dinan, commandait cette expédition redoutable. Mais, raconte le rapport de ce dernier, ces valeureux sans-culottes rencontrèrent partout à Plouasne, « porte fermée ou maison vide », si bien que leur zèle dut se borner à renverser dans cette commune « tout ce qui sentait le fanatisme », ainsi qu'à faire « disparaître tous les attributs absurdes de la Religion Romaine qui se trouvaient dans la ci-devant église », que du reste ils engagèrent la municipalité à transformer au plus vite en Temple de la Raison.

Ceci fait, et devant « l'impossibilité de verbaliser contre toutes les maisons où ils avaient été », à moins de s'éterniser dans la commune, ce dont, crainte des chouans, ils n'avaient nulle envie, les démagogues dinannais rentrèrent en leur ville, remportant comme trophées de leur expédition « des ornements et autres ustensiles ecclédiastiques » qu'ils avaient trouvés de-ci, de-là, au cours de leurs perquisitions.

A la pacification du printemps de 1795, une demande pour ouvrir au culte l'église de Plouasne fut accordée le 7 mai de cette année à la requête de Joseph Méal, Julien Morin, Jean Renard, Jean Germinal et Jean Gernigon, tous habitants de la prédite paroisse. Il est donc vraisemblable que l'abbé Briand put y célébrer publiquement la messe jusqu'au mois de septembre suivant, date à laquelle il plut aux Conventionnels de rouvrir de nouveau en Bretagne la persécution religieuse dans toute son acuité.

Mais quelles que fussent les difficultés de l'heure, le vicaire de Plouasne continua de demeurer fidèle à son poste, protégé du reste jusqu'à la fin par la municipalité de cette localité, sur laquelle les autorités de Dinan donnaient les renseignements suivants le 4 octobre 1796 : « Depuis plus de huit mois, la municipalité de Plouasne ne semble retrouver son existence que pour constater les délits commis par les soldats républicains ou donner des certificats de résidence à des prêtres réfractaires déportés, on censés l'être ».

Nous ignorons pourquoi M. Briand ne figure pas sur l'enquête du préfet Boullé. Mgr. Cafarelli le maintint vicaire de Plouasne à la réorganisation des paroisses, et l'y garda jusqu'à 1807, date à laquelle il le transféra à Broons pour occuper les mêmes fonctions sous son ancien recteur.

Nommé recteur de Ruca le 1er mars 1812, l'abbé Briand y décéda en fonctions le premier mars 1815, âgé de 59 ans.

Fut nommé recteur de Plouasne, le 16 janvier 1804 : M. HENRI-JOSEPH AMELINE, ancien vicaire de Saint-Samson-Jouxte-Livet, dont nous avons publié la biographie à l'article Saint-Samson.

Vivaient alors à Plouasne : MM. PIERRE BRIAND, déjà vu, et FIACRE BRIAND, son frère, ainsi que JEAN ROQUET, ancien religieux, que nous verrons plus loin.

Vers 1925, Plouasne ne compte que huit prêtres originaires. Ils étaient plus nombreux autrefois ; voici leurs noms :

JOSEPH PELLÉ, né au village de Tieubry le 27 mars 1738, de François et de Marie Colliaux, lequel fit d'abord ses études en vue d'entrer dans le clergé du diocèse de Saint-Malo. On le jugea au Séminaire « médiocre à ses examens, mais chantant passablement ». Il reçut la prêtrise le 22 septembre 1764 au séminaire de Saint-Méen. Se sentant ensuite la vocation religieuse, l'abbé Pellé prit l'habit chez les fils de Saint-Elie, et, lors de la Révolution il était carme au couvent de Ploërmel. A la fermeture de sa maison, ce bon moine ne s'assermenta point et revint habiter son pays natal.

Le 1er décembre 1792, lorsque les membres du Directoire des Cotes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) étendirent à tous les ecclésiastiques insermentés de ce département les dispositions de la loi du 26 août précédent, et leur prescrivirent, soit de se déporter à l'étranger, s'ils étaient valides, soit de venir se renfermer dans la maison de réunion créée à Saint-Brieuc, si lesdits ecclésiastiques étaient sexagénaires ou infirmes, le P. Pellé n'obéit point à ces ordres cruels, mais il parut de moins en moins en public. Du reste, il était déjà touché à cette époque par le mal qui devait l'emporter. Le P. Pellé mourut en effet au village de Tieubry, en Plouasne, à l'âge de 55 ans, le 4 février 1793. Nous avons trouvé qu'il baptisait en cette paroisse les 9 et 12 novembre 1792.

L'abbé Joseph Pellé, neveu du précédent, naquit à Plouasne en 1787, devint recteur de Trédias en 1820 et trépassa le 18 février 1852.

JEAN-PIERRE–FRANCOIS ROQUET naquit à la Saudrais, en Plouasne, le 27 mars 1743, du mariage de Julien et de Marguerite Le Marchand. Le jeune Roquet fit ses humanités à Rennes et commença ensuite son séminaire dans son diocèse d'origine, où on le jugea « très faible ». Il s'en fut après chez les cisterciens, où il fit profession en 1769 à l'abbaye de Notre-Dame de Boquen, sise en Plénée-Jugon.

Lorsque l'Assemblée Constituante eut fermé cette maison en 1791, le P. Roquet rentra d'abord à Plouasne, puis s'en fut à Guitté, d'où il demandait au Directoire des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), le 7 juillet 1792, la permission de se retirer au milieu des cisterciens de l'abbaye de Saint-Aubin des Bois, en Plédéliac, qui avaient loué leur monastère et continuaient d'y résider. Dans sa requête, cet excellent religieux apporte comme raison « qu'il ne peut en conscience vivre dans sa famille, vu les engagements par lesquels il s'était librement lié vis-à-vis des autels ».

Malheureusement pour lui, les religieux de Saint-Aubin, afin de pouvoir continuer la vie monastique, prêtèrent le serment de Liberté-Egalité prescrit par la loi du 14 août 1792, serment sur la licéité duquel le Saint-Siège ne s'est jamais prononcé, mais que le P. Roquet, tutioriste, suivant en cela du reste la majorité des prêtres bretons, ne voulut pas jurer. Il dut donc, au bout de quelques semaines, quitter ses nouveaux confrères, et nous le retrouvons baptisant à Plouasne le 27 septembre 1792, ainsi que du 2 octobre au 2 novembre de cette année [Note : Le dimanche 12 octobre 1702, le P. Roquet célébra à Plouasne une messe à laquelle assistèrent des fidèles de plus de 10 paroisses. (Archives d'Ille-et-Vilaine, L 441)]. Le 22 de ce dernier mois, le P. Roquet baptisait encore dans sa paroisse natale et continua de faire du ministère caché auprès de ses compatriotes jusqu'au 28 décembre suivant. Nous savons aussi qu'il se trouvait toujours à Plouasne le 27 juillet 1794, mais après cela c'est la nuit complète sur le compte de ce bon moine jusqu'à l'enquête de Boullé, qui le note vers 1802 comme « à peu près impotent, et résidant à Plouasne depuis 12 ans, insermenté non déporté ».

Le P. Roquet décéda chapelain de Saint-Sébastien, en Ploubalay, au village de la Hamonais, le 8 juin 1816, âgé de 76 ans.

GUILLAUME-JOSEPH MORIN naquit à la Ville-Oger, en Plouasne, le 23 mars 1748, de Guillaume et de Marie Picouays. Après avoir étudié au collège de Dinan, où il était en philosophie en 1765, le jeune Morin reçut la tonsure le 16 septembre 1767, et fut noté au séminaire comme « un bon sujet à ses examens, ayant de la voix ».

L'abbé Morin ayant ensuite entré au noviciat des Eudistes et fait profession dans cette congrégation, fut successivement professeur de théologie à Lisieux, à Caen et à Rouen. Il devint après supérieur du séminaire de Domfront en 1780, puis de celui de Rennes en 1784. C'était, écrit le P. Dauphin dans son intéressante Histoire des Séminaires de Rennes et de Dol, in-12, Rennes, 1910, p. 110, « une nature franche, énergique et parfois un peu brusque », qui joignait « à une éminente piété, une science profonde ». Le refus du P. Morin de prêter serment l'obligea à quitter le Grand Séminaire de Rennes le 16 juin 1791. Après un court séjour à Plouasne, ce religieux revint ensuite à Rennes, où une sentence du Tribunal criminel d'Ille-et-Vilaine le condamna à la déportation, le 6 octobre 1792.

Enfermé en conséquence dans l'ex-couvent de la Trinité, transformé en prison à l'usage du clergé fidèle, le P. Morin fut transféré le 12 octobre 1703 au Mont Saint-Michel, où 195 ecclésiastiques du département d'Ille-et-Vilaine furent alors incarcérés. Rendu à la liberté au mois de janvier 1795, sur arrêté du représentant Legot, l'ex-supérieur du séminaire de Rennes, raconte le P. Dauphin, demeura dans les cantons de Pleine-Fougères et de Pontorson, faisant du ministère caché. Ayant été expulsé de Saint-Broladre en 1802 par mesure de police, le P. Morin rentra à Rennes où, de concert avec le P. Blanchard, il reprit à s'occuper de l'éducation des clercs. Nommé vicaire général honoraire le 18 octobre 1803, par Mgr. de Maillé de la Tour-Landry, et vicaire capitulaire à la mort de ce prélat, le P. Morin, qui, d'après Guillotin de Corson, remplissait depuis 1803 les fonctions de supérieur de la section de théologie au séminaire de Rennes, fut confirmé par Mgr. Enoch dans son titre de vicaire général, qu'il conserva jusqu'à sa mort, arrivée à Rennes, rue de Fougères, le 11 novembre 1810, à l'âge de 62 ans et 7 mois.

JOSEPH-MARIE CHAUVIN naquit à Plouasne le 7 septembre 1753, du mariage de Jean-Gilles, sieur du Chastel, et de Angélique Ecolan. Il fit ses études latines à Saint-Malo de Beignon, ainsi qu'une partie de son séminaire. On le note comme « ayant un peu de voix et de chant, et passant de très bons examens ». Il fut cependant différé pour sa prêtrise en septembre 1779, comme « ayant besoin d'épreuves » (Archives d'Ille-et-Vilaine, G 79).

Nous retrouvons l'abbé Chauvin à Longaulnay, où il desservait une petite prestimonie. Il y prêta, le 27 février 1791, avec le recteur Joseph-Julien Sevin, fidélité à la Constitution, à l'exception de ce qui concernait le spirituel, pour lequel ils jurèrent l'un et l'autre « soumission inviolable à l'autorité de l'Eglise ». M. Chauvin prit un passeport pour s'exiler comme insermenté le 7 septembre 1792. Il le fit viser cinq jours plus tard à Saint-Malo avant de s'embarquer pour Jersey, île où les listes publiées par L'Estourbeillon, op. cit., signalent sa présence. Ce prêtre revint à Longaulnay le 1er fructidor an V (18 août 1797). Il s'y trouvait encore le 22 mai 1800 (Archives Nationales, F 7, 5151). Nous ignorons ce qu'il advint de lui dans la suite. Cet ecclésiastique était le frère de Jean-Augustin-Anne-Marie Chauvin, né à Plouasne le 3 juillet 1750, ordonné prêtre le 29 mai 1779, et dont nous ne savons s'il vivait encore lors de la Révolution. Leur soeur Thérèse Chauvin était clarisse à Dinan en 1792.

GEORGES-JOSEPH TOSTIVINT naquit aux Naudières, en Plouasne, le 26 janvier 1760, du mariage de Robert et de Renée Chantrel. Nous le trouvons élève du collège des Laurents en 1774, et nous savons qu'il reçut le sacerdoce à Saint-Méen le 18 septembre 1784.

Lors de la Révolution, M. Tostivint était prêtre de choeur dans l'église Saint-Malo de Dinan, mais il dut quitter cette paroisse après l'installation du clergé constitutionnel. Son refus de s'assermenter l'obligea de s'exiler à Jersey lors de l'application de la loi du 26 août 1792. Ce prêtre passa ensuite en Angleterre, où nous le voyons à Portsmouth en avril 1793, implorant des secours pour pouvoir subsister.

Nous n'avons aucun autre renseignement sur cet ecclésiastique, qui ne figure pas sur l'enquête du préfet Boullé. M. Tostivint occupait le poste de vicaire à Saint-Sauveur de Dinan lorsqu'il succéda en 1815 à M. Belleville dans son rectorat de Plumandan. Il y mourut en fonctions, âgé de 61 ans, le 26 mai 1821.

MATHURIN LEVREL, fils de Pierre et de Jeanne Bodin, naquit au village de Lautran, en Plouasne, le 30 juillet 1761. Après avoir étudié au Collège de Dinan et mérité la note bien à son examen de diaconat, M. Levrel reçut cet ordre le 18 septembre 1790.

Nous ne sommes pas bien fixé sur les faits et gestes de cet ecclésiastique au cours de la Révolution ; un rapport de police du mois d'octobre 1796 signale un M. Levret caché depuis longtemps aux environs de Broons. D'autre part, dans sa (Généalogie de la) Maison Ferron, p. 315, le général Alain de Ferron signale un abbé Jean Lesvré, chapelain du Fournet, en Saint-Judoce, qui célébrait un mariage dans ce château le 27 octobre 1800, mais nous ne savons s'il y a vraiment identité entre ces prêtres et celui qui nous occupe, et dont le nom ne figure pas sur l'enquête de Boullé. Ce qui est certain, c'est que Mathurin Levrel, du village de Lantran, en Plouasne, fut ordonné prêtre à Paris le 11 mars 1797, nous a fait savoir M, le chanoine Jacquet, archiviste de cet archevêché. Il est sûr également qu'il devint recteur de Rouillac en 1818 et qu'il y décéda eu fonctions le 22 juillet 1821, âgé de 61 ans.

JOSEPH TOSTIVINT naquit au village de Launay-Chapelle, en Plouasne, le 1er avril 1762, de Joseph et de Perrine Levrel.

Il fut admis à la tonsure et aux mineurs en septembre 1785. On le note à cette occasion « bon pour le latin et assez bien pour la philosophie ». Lors de son diaconat, en septembre 1788, on le juge « de bonnes moeurs, examens passables ». Ordonné prêtre le 6 juin 1780, M. Tostivint, qui n'était vraisemblablement pas pourvu d'un poste au moment de la Révolution, ne prêta pas le serment constitutionnel et, d'après la liste rédigée par Gofvry, il se serait exilé à Jersey, lorsqu'on appliqua la loi du 26 août 1792.

Cependant, cet ecclésiastique ne fit dans cette île qu'un assez bref séjour, car nous le retrouvons baptisant à Plouasne le 12 janvier et le 2 décembre 1794, ainsi que le 15 janvier 1795 et en 1797. Nous le perdons de vue après cette époque. Nous n'avons pu trouver trace de son décès sur les tables décennales de sa commune natale.

JEAN-MARIE-TOUSAINT SAUDRAIS, né à la Ville-Guihé, en Plouasne, le 28 février 1764, du mariage de Julien et d'Anne Collet, reçut après d'assez bons examens le sous-diaconat le 29 mai 1790.

Bien que non assermenté, l'abbé Saudrais ne s'exila pas, et nous le voyons baptiser dans sa paroisse natale le 27 août 1793. Il s’y trouvait encore en 1797, et avait alors reçu la prêtrise sans que nous puissions dire où et quand il s'était fait ordonner. Nous croyons que c'est lui que Guill. de Corson, à la p. 382 de ses Confesseurs de la Foi, mentionne comme ayant fait du ministère à Médréac. L'abbé Saudrais travailla aussi à Tréfumel en 1798 et 1799. Boullé, dans son enquête, rédigée vers 1802, nous apprend que cet ecclésiastique vivait à cette époque à Broons, depuis 18 mois, en qualité de curé d'office, et note sa « grande régularité ». Ce prêtre fut nommé en 1810 vicaire à Ploubalay avec résidence à Trégon. Il devint le premier recteur de cette localité lorsqu'elle fut érigée en paroisse vers 1820. C'est là qu'il mourut en fonctions le 18 mars 1837, âgé de 73 ans.

JULIEN PELLOUAS, né au village de la Cour, en Plouasne, le 14 juin 1764, du mariage de Pierre et de Mathurine Lemarchand, obtenait le prix de version en cinquième au collège de Dinan en 1780. Il mérita la note assez bien pour ses examens de Séminaire et fut jugé par ses professeurs comme « s'exprimant difficilement, mais d'une très bonne conduite ». M. Pellouas reçut le diaconat le 18 septembre 1790. Nous le perdons de vue après cette époque. Son décès ne figure pas sur les tables décennales de sa commune natale.

Etaient encore originaires de Plouasne : les frères BRINDEJONC, nés au Val, de maître Jean et de Marie Herambourg, dont JEAN, l'aîné, aura sa biographie à l'article Vildé-Guingalan, dont il était recteur, et EUSTACHE, son cadet, à l'article Guenroc, où il vivait prêtre habitué. Citons aussi RENÉ BUREL, dont nous avons déjà parlé à propos des aumôniers de la ville de Dinan.

Ainsi, lors de la Révolution, Plouasne comptait trois religieux, six prêtres séculiers et trois clercs dans les ordres sacrés, soit en tout douze ecclésiastiques, dont pas un, grâce à Dieu, ne versa dans le schisme constitutionnel qui accumula tant de désastres sur l'Eglise de France à cette époque.

Firent du ministère à Plouasne au cours de la Révolution :

Le Père CLAUDE-JEAN-MARIE CORDELIER, auquel l'abbé Carron, dans les Confesseurs de la Foi de l'Eglise gallicane, t. III p. 249, et le P. Dauphin, dans l'Histoire des Séminaires de Rennes et de Dol, op. cit., ont consacré des notices auxquelles nous emprunterons les principaux éléments de sa biographie.

Né dans la paroisse de Saint-Etienne de Rennes en 1746, M. Cordelier entra chez les Eudistes en 1771. Après avoir été Supérieur du séminaire de Lisieux de 1780 à 1784, puis de celui de Domfront, ce religieux dirigeait les missions du diocèse de Rennes depuis 1786 lorsque survint la Révolution.

Chassé de Rennes comme insermenté, le P. Cordelier se réfugia d'abord au presbytère de Saint-Pern, au temps de Pâques 1792. Il n'y fit qu'un court séjour et se fixa ensuite à Plouasne, dont il fit comme son quartier général, rayonnant de là dans tous les environs jusqu'à Landujan, et bravant dans son zèle pour les âmes les terribles lois de proscription des 21 et 23 avril 1793, ainsi que celle du 21 octobre de cette même année.

La persécution religieuse commençait à se modérer quand, dans une de leurs battues, le soir du 6 décembre 1794, des gardes nationaux de Bécherel surprirent le P. Cordelier chez Yves Le Forestier, qui lui donnait asile à sa ferme de la Mare d'Abas, et l'emmenèrent avec eux prisonnier, ainsi que la jeune fille de ce bon paysan, appelée Rose. Seul des trois, Yves Le Forestier put se dérober par la fuite au sort qui l'attendait. On saisit aussi chez lui un calice en étain, des boites à saintes huiles, un missel romain, ainsi qu'une aube en toile de chanvre.

Note : Le 16 frimaire an III (7 décembre 1794), Guillermin, capitaine de la première ccmpagnie des grenadiers de Rhône et Loire en station « à Becherele », arrivait à sept heures du matin au bourg de Plouasne et se rendait immédiatement chez Yves Le Forestier vivant avec sa fille à la Marre d'En-Bas où ils cultivaient une petite ferme. On les accusait de cacher des prêtres et la police venait y perquisitionner. Bientôt des objets compromettants furent découverts : « un calice en fer-blanc, une boite dite aux huiles, en plomb ou étain, un missel romain et une aube de toile ». Mais de prêtres, on n'en avait point trouvé, bien que évidemment quelques-uns devaient fréquenter la maison. On se mit donc en embuscade et le soir, quand Claude-Jean Marie Cordelier, ex-sacriste du Grand Séminaire de Rennes, âgé de 47 ans, croyant tout danger écarté, se présenta pour savoir ce qui s'était passé, Guillermin rentra subitement et l'arrêta. « Citoyens, écrivit-il pour annoncer sa capture, je vous envoie un praitre qui et Claude Cordelier natif de Rennes avec la fillée de la maison ou nous l'avon arrêtée, le maître de la maison ou le praitre se retiret se sauver. Je vous diray qui dizet ta messe dans sete maison nous savon trouvée depuis la chazuble jusqu'à saint zuile » (sic). Le lendemain Briot-Champmorin, juge de paix à Bécherel, interrogeait le prisonnier, accusé sans preuve d'avoir au mois de mars 1793 pris part au soulèvement à l'occasion duquel le tocsin avait été sonné, puis on le dirigeait avec la fille Le Forestier, âgée de 37 ans, vers Rennes, où tous deux étaient internés le 18 à la prison Saint-Michel. Le 19, l'abbé Cordelier subissait au « temple de la Loi » un nouvel interrogatoire par lequel l'accusateur apprenait que l'inculpé qui n'avait pas voulu s'exiler, quoique insermenté, menait une vie errante depuis un an et demi, se retirait « momentandment » à la Marre, sans y dire la messe, que les ornements, qui avaient été saisis appartenaient à un oncle de Rose Le Forestier, nommé Bouttin, prêtre de Tréfumel, à l'exception d'un livre, d'une soutane, du, calice et de l'aube. Claude Cordelier sortit de prison le 17 nivôse (6 janvier 1794) et Rose Le Forestier le 27 frimaire an III (17 décembre 1794).

Interrogé le 7 décembre par le juge de paix de Bécherel, le P. Cordelier déclara sans détour à ce magistrat qu'en dépit des lois en vigueur, il vivait depuis trois ans sur le territoire de Plouasne, où il avait exercé publiquement son ministère jusqu'au mois de mars 1793, date de la fermeture de l'église de cette paroisse, préférant, lui dit-il, s'exposer à subir toutes les rigueurs des lois de sa patrie que de jouir à l'étranger de la bienveillance de ses ennemis. Cependant, le P. Cordelier eut grand soin d'ajouter que, loin d'avoir jamais poussé les Français à la guerre civile, il avait au contraire, lors de la marche des armées vendéennes sur Granville, trouvé moyen d'arrêter le tocsin à Plouasne, ce à quoi quatre gendarmes présents n'avaient pu réussir.

Malgré toutes ses déclarations, le Confesseur de la Foi fut conduit à Rennes et incarcéré à la prison de la Porte Saint-Michel. Heureusement pour lui que les esprits étaient alors tournés vers la tolérance, car, quelques mois plus tôt, il eût été pour la guillotine une proie assurée. Du reste, il n'échappa pas quand même à la mort. A peine entré dans la prison, le P. Cordelier tomba victime d'une maladie endémique qui régnait en ce lieu. Autorisé, sur les instances de sa famille, à se faire soigner au milieu des siens, il y expira le 9 janvier 1795.

Les habitants de Plouasne se doivent de garder à la mémoire de ce saint prêtre, qui trépassa victime de son dévouement pour les âmes, un souvenir reconnaissant.

D'après le registre des baptêmes effectués durant la Révolution, registre qui fut rédigé vers 1805 sur les ordres de Mgr. Cafarelli, et dont nous tenons la gracieuse communication de M. l'abbé Hême, ancien recteur de Plouasne, travaillèrent dans cette localité au cours des mauvais jours :

MM. Joseph Cintré, vicaire du Bois-Gervilly, en 1793, 1794, et le 1er septembre 1795 ; François Le Mée, recteur de Ménéac, en 1793, 1797 et 1798. Ce prêtre ayant été mis en arrestation en septembre 1795, obtint le 15 octobre suivant des municipalités de Plouasne et de Saint-Pern des certificats de séjour dans ces localités depuis septembre 1792, qui lui firent rendre la liberté ; — François-Marie Lesvier, prêtre de Bécherel (où François et Marguerite Toxé lui avaient donné le jour le 24 août 1748), étant venu à Plouasne sans passeport, y fut arrêté en mai 1799 par une colonne mobile qui l'emmena à Dinan, où il fut incarcéré le 28 dudit mois par ordre de Mattat, commandant cette place. Conduit peu après à Saint-Brieuc, l'on dut, le 2 juin suivant, le faire soigner à l'Hôtel-Dieu de cette ville, « vu qu'il n'avait l'usage ni de ses bras, ni de ses jambes » ; — Jean Bougault, prêtre de Broons, le 21 mars 1794 et le 16 février 1795 ; — Pierre Le Forestier, recteur de Sévignac, le 15 novembre 1794 ; Pierre-Julien Levrel, eudiste, que nous verrons à l'article de la Chapelle-Blanche ; — Pierre Thiengou, du Bois-Gérault, en Médréac, ordonné prêtre le 24 septembre 1757, lequel fut mis à mort pour la Foi au bourg de Médréac, le 23 mars 1796 ; — Julien Regnault, prêtre de Saint-Thual ; — Peste!, qui pourrait bien avoir été Guillaume Pestel, vicaire à Tinténiac ; — Louis Janvier, prêtre de Quédillac ; — enfin Pierre-Laurent Frin, prêtre de Miniac-sous-Bécherel, que nous voyons baptiser à Plouasne les 18 avril 1794, 28 octobre 1795 et 25 juillet 1796, et dont on lira la biographie à l'article Tréfumel, paroisse où il trouva la mort. Nous aurions aussi aimé à parler du dominicain René-Jean Loysel, de Dinan, qui fit du ministère à Médréac et à Plouasne en 1797 et 1798, et décéda dans cette dernière localité le 29 floréal an XI (19 mai 1803), âgé de 60 ans, mais l'impossibilité de reconstituer pour l'instant sa fiche, dont nous avons égaré les éléments, nous oblige à renvoyer sa biographie à l'article Jugon, dont il était natif.

Parmi les premiers Plouasnais qui reçurent le sacerdoce, les années qui suivirent la Révolution, citons MM. Pierre Rioche, né dans cette paroisse le 24 janvier 1788, lequel mourut vicaire de Broons le 4 mars 1814, et Jean-Marie Caresmel, né le 17 mai 1788, ordonné prêtre le 19 décembre 1812, lequel devint recteur de Plévenon le 20 mai 1820, puis de Trélivan le 1er octobre 1822, et de Lanrelas en 1836, il mourut le 7 juillet 1852.

 

CLERGÉ CONSTITUTIONNEL. — Non seulement, comme nous venons de le voir, Plouasne ne donna le jour à aucun prêtre jureur, mais, de plus, l'attachement des Plouasnais à l'orthodoxie était si bien connue qu'aucun curé assermenté n'osa venir s'installer au milieu d'eux. C'est ainsi que l'abbé Bobé, vicaire constitutionnel à Saint-Sauveur de Rennes, fut élu curé de Plouasne par 37 voix sur 38 le 17 septembre 1792, mais il crut prudent de refuser ce dangereux honneur, et Jacques-René Le Poitevin, dont nous avons parlé à l'article Lanvallay, élu curé de Plouasne le 29 novembre de cette même année, jugea meilleur pour sa sécurité d'adopter lui aussi la même ligne de conduite que son confrère et s'excusa de ne pouvoir accepter. (A. Lemasson).

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