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La paroisse de Pleudihen(-sur-Rance) durant la Révolution.

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Renseignements Ecclésiastiques. — Pleudihen, cure du diocèse de Dol, à la présentation du trésorier de ce chapitre, relevait de la grande officialité de Dol et du doyenné de ce nom.

Le seigneur du comté, puis du marquisat de Châteauneuf de la Noë, était à Pleudihen le seigneur supérieur et prééminencier de l'église (cf. Guillotin de Corson, Association Bretonne, t. X, p. 221, Congrès de Saint-Servan, et Archives Loire-Inférieure, B 2105 et 2106). Cependant, le seigneur du marquisat de Coëtquen avait, de son côté, des prétentions à ce titre. Du reste, plusieurs pièces du milieu du dix-huitième siècle semblent bien indiquer que le « général » de Pleudihen reconnaissait les prétentions des propriétaires de Coëtquen comme fondées en droit, et c'étaient les armoiries de ces seigneurs qui occupaient la place d'honneur dans l'église de cette paroisse.

On trouvera une description sommaire de l'ancienne église de Pleudihen, in-Gaultier du Mottay : Répertoire Archéologique du D. des C.-du-N., op. cit., p. 379.

Le chapitre de la cathédrale de Dol était le gros décimateur de cette paroisse, dont il affermait les divers traits de dîmes une somme globale de 6.477 livres. L'abbaye du Tronchet, en Plerguer, possédait elle aussi deux traits de dîmes d'une certaine importance. Sur le montant de ces dîmes, les bénéficiaires étaient tenus d'entretenir et réparer le choeur de l'église, tant comme couverture que lambris, pavés et vitraux, et de payer un traitement au recteur et aux vicaires ; celui de ces derniers estimé 350 livres chacun depuis 1786. Quant à celui du recteur, fixé depuis la même époque à 700 livres, les décimateurs le constituaient en abandonnant à cet ecclésiastique une certaine quantité de dîmes pour une somme à peu près équivalente.

De nombreuses chapelles existaient dans cette paroisse en 1790. L'une des plus connues était celle de Saint-Piat, où l'abbé Prioul, alors recteur de Saint-Solen, avait fondé à perpétuité, le 20 octobre 1692, une messe basse tous les dimanches, ce qui n'empêcha pas ce sanctuaire d'être vendu le 29 avril 1791, avec la maison et le jardin du chapelain, le pré Noble et le pré d'Abas, pour 5.650 l., à une demoiselle Jeanne Roussin. Cependant, dès le 28 février précédent, les habitants du village de Saint-Piat avaient protesté avec énergie contre l'adjudication de cette chapellenie, dont la desservance leur facilitait beaucoup l'assistance à la messe le dimanche. Si bien que le District de Dinan avait proposé au Directoire des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) « que l'acquéreur, au moins provisoirement, fut obligé de laisser célébrer la messe en la dite chapelle ». (Archives de la Ville de Dinan : Reg. du Directoire du District).

Saint-Piat fut rendu au culte entre les années 1804 et 1807, mais la section de territoire sur laquelle était élevée cette chapelle, ayant été réunie à la paroisse de Lanvallay, la fabrique de celle-ci fut autorisée à vendre le vieux sanctuaire de Saint-Piat le 13 septembre 1835. — Sur la légende de Saint Piat, cf. chanoine Desportes : La Bretagne de la Rance au Douron, in-8, Saint-Brieuc, 1914, p. 179. — Sur Saint Piat, prêtre, martyrisé à Tournay, du temps de Maximien, nous ne connaissons que les quelques lignes que lui consacre le martyrologe romain à la date du 1er octobre. On ne peut, prétendent les hagiographes les plus sérieux, accorder grande autorité à ses actes. Son culte était autrefois en grand honneur dans la cathédrale de Chartres, où la chapelle Saint-Piat existe toujours.

Plusieurs autres chapelles sont aussi mentionnées dans les actes de l'ancien état-civil pleudihennais. Voici leurs noms : la chapelle du château de la Bellière, dédiée à saint André, et dans laquelle, nous a fait savoir M. l'abbé Auguste Carré, le très sympathique et très distingué recteur de Pleudihen, l'on célèbre encore la messe à certains jours ; la chapelle de la Vicomté, dite Sainte-Anne des Airettes, que l'on a quelque temps utilisée comme école ; la chapelle de Saint-Lunaire de l'Hostellerie, signalée comme en ruines dès 1687 ; la chapelle des Ponts de Scieux, notée comme valant 45 l. de revenu annuel en 1790, laquelle fut rendue au culte sous le Premier Empire ; la chapelle de la Grande Tourniole, située dans la cour du château de ce nom et dédiée à saint Etienne, sert aujourd'hui de demeurance ; enfin la chapelle du Gué. Deux de ces modestes sanctuaires avaient été consacrés au culte à la fin du XVIIème siècle. C'étaient : la chapelle du Pontpée, bénite le 10 septembre 1680, et celle de la Touche-aux-Bégasses, bénite au cours du mois de janvier 1692.

M. l'abbé Brébel, dans son étude très fouillée et très avertie sur son pays natal, a consacré le chapitre XIème de son volume aux chapelles pleudihennaises ; nous y renvoyons nos lecteurs. A celles que nous venons d'énumérer, il ajoute la chapelle de Mordreuc, dédiée à saint Ouen, mais aujourd'hui en ruines. Une riche propriétaire de Pleudihen avait eu la pieuse pensée de reconstruire ce sanctiaire dans son parc, mais la mort l'a couchée dans la tombe avant d'avoir pu réaliser son dessein. Un fermier a bénévolement recueilli dans son grenier la statue de saint Ouen, autrefois en grande vénération aux alentours. Mentionnons encore, d'après M. Brébel, la chapelle du château de la Touche-Porée, autrefois dédiée à sainte Anne, et que ses propriétaires ont transformée en grange ; la chapelle du Val-Hervelin, dédiée à saint Antoine ; la chapelle de Saint-Magloire, aujourd'hui détruite, ainsi que la Madeleine et celle de Dolet, naguère dédiée à saint Gilles, soit au total seize chapelles qui contribuaient dans le vieux temps à entretenir à Pleudihen la foi et la piété, en facilitant l'assistance aux cérémonies religieuses.

Plusieurs de ces sanctuaires possédaient du reste un revenu affecté à leur entretien. Ainsi, quatre pièces de terre dans la champagne de la Ville-Hamon, dépendaient de la chapellenie des Ponts de Scieux. Elles furent achetées nationalement par Souquet et consorts, le 16 juillet 1799, mais la Jaunais des Ponts-Scieux avait été acquise auparavant par François Noël le 14 décembre 1792. De même encore trois autres pièces de terre constituaient la dotation de la chapelle de la Tourniole, mais à la suite d'âpres procédures, on put obtenir qu'elles ne seraient pas liquidées.

Plusieurs fondations pieuses se desservaient en ce même temps dans l'église paroissiale : entre autres la chapellenie ou prestimonie des Orhans, fondée en 1503 et dont les revenus étaient assis sur une maison avec jardin et le courtil Dom Jean, le tout sis dans le bourg, lesquels furent vendus à Jean Fauvel le 14 décembre 1792. De la même prestimonie, dépendaient encore huit pièces de terre sises dans la champagne de la Fosse-Even, qui furent acquises par Jacques Besnard et François Michel le 30 août 1792 ; s'y rattachait aussi une autre pièce de terre sise dans la même champagne, acquise par Jacques Besnard le 28 août 1793. Enfin, la chapelle Saint-Jacques fut acquise par Louis Louaisel, en prairial an II (Juin 1794).

De la fondation ou chapellenie Dom Pierre Ménard relevaient une maison avec ses dépendances, sise à l'ouest de l'église, acquise par Michel Gernigon le 9 décembre 1791, ainsi qu'une pièce de terre, sise dans la champagne de la Barre, achetée pour 3.000 l. par Mathurin Desvaux, le 11 avril 1792.

Citons aussi la chapellenie ou fondation Dom Michel de Launay, assise sur une maison située au midi de l'église de Pleudihen, avec jardin et dépendances, qui furent acquis par Raoul Champenoir le 12 octobre 1791. En dépendaient encore des terres dans la champagne du Tertre-Isaac, payées 4.600 l. le 16 mai 1792 par Alain Michel, et deux quantités de terre dans la champagne du Châtaignier, acquises le même jour par Jacques Besnard.

Du reste, l'esprit chrétien s'était manifesté autrefois à Pleudihen sous des formes diverses. C'est ainsi que, le 24 novembre 1646, noble homme Jean Pépin, sieur du Gué, et sénéchal de Dinan, époux de dame Marguerite Frostet, demeurant au bourg de cette paroisse, en leur manoir de Sainte-Agathe, « considérant qu'un grand peuple en ceste dite paroisse est mal instruit ès poincts de sa foy », fonda et institua à perpétuité un catéchisme et une messe en l'église paroissiale dudit Pleudihen, le vendredi de chaque semaine ou un jour de feste s'il en échoit ; ledit catéchisme devant se faire en la chapelle Nostre-Dame, et insister spécialement « sur les ivrogneries et blasphèmes qui règnent fort en ce misérable peuple ». Pour l'effet et exécution de ce que dessus, fonda et institua ledit seigneur sur tout son bien, à perpétuité, une rente de 100 livres.

Mais nous ne prétendons pas énumérer ici toutes les fondations charitables de Pleudihen, sur lesquelles on trouvera de nombreux renseignements aux archives des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), série G. L'on y verra entre autres, à la date de 1773, diverses rentes créées en faveur des pauvres de cette paroisse.

La fabrique de Pleudihen possédait aussi en 1789 plusieurs propriétés foncières, entre autres une pièce de terre dite le « Vieux Presbytère », contenant un journal 40 cordes, prisée 1.650 l. et adjugée pour 1925 l. le 11 avril 1792 ; une autre dite le « Clos Jean », acquise le 9 décembre 1791 par Toussaint Herpeux ; une autre dite « la Vicairie », contenant 36 sillons, prisée 1.188 l. et adjugée 2.575 l. le 11 avril 1792, à Nicolas Mousson ; enfin, un petit pré sis à « la Gravelle », vendu 705 l. à J.-B. Portier le 8 octobre 1897.

M. l'abbé Brebel a retrouvé et reproduit les statuts de l'ancienne Confrérie de Saint-Nicolas, fondée à Pleudihen dès l'an 1339. Cette paroisse comptait aussi une confrérie du Rosaire, et nous sommes convaincus qu'il devait en exister d'autres encore que nous ignorons. Tout cela fut détruit et emporté par la Révolution Française.

Sur la confiscation du mobilier, des ornements et vases sacrés de l'église et des chapelles de Pleudihen, voir l'Essai sur Pleudihen de M. l'abbé Brebel. Dès le 28 juillet 1794. 21 chapes, 43 chasubles et dalmatiques, 8 devants d'autel, un drap mortuaire, un devant d'autel noir, etc., etc., le tout provenant de l'église de Pleudihen, se trouvaient entassés dans l'ancien couvent des Jacobins de Dinan. La vente de ces ornements, auxquels on avait eu soin d'ôter les galons d'or et d'argent, ainsi que la vente des chaises et bancs de l'église de Pleudihen, produisirent 315 fr. 70 le 20 mai 1794 (Annuaire Malouin et Dinannais), et le 30 juillet de cette même année, le presbytère de Pleudihen, devenu sans usage, fut mis en location.

Quelques jours après, le 24 août 1794, on inventoriait à Dinan, avant de l'envoyer à la Monnaie, toute l'argenterie de l'église de Pleudihen : on trouva 37 marcs, 10 onces, 4 gros d'argent blanc. Un calice, 5 coupes de calice, 6 patènes, 2 coupes et couvercles de ciboire, etc., produisirent 11 marcs, 1 once et 1 demi-gros d'argent doré, auxquels il faut ajouter 17 marcs, 2 gros que pesait un superbe crucifix aussi d'argent doré. On trouva aussi pour 13 marcs, 3 onces de galon d'argent, et 24 marcs, 1 once de galon doré, chiffres considérables et qui témoignent de la richesse de l'église de Pleudihen à cette époque. (Archives Côtes-d'Armor, série Q).

Les autres biens ecclésiastiques de Pleudihen que nous n'avons pas eu l'occasion de mentionner, consistaient en la pièce des Primats à l'abbaye du Tronchet, acquise le 29 juillet 1791, par Toussaint Herpeux ; la métairie du prieuré Saint-Nicolas, à l'abbaye du Tronchet, acquise par Gilles Denoual le 7 décembre 1791 ; une pièce de terre au Champ Glé, dépendance de l'obiterie de Châteauneuf, acquise le 9 décembre 1791 par Nicolas Mousson ; le pré de la Chapelle-Magdeleine, acquis par Hallé le 26 messidor an VI (14 août 1798) ; une quantité de terre dans la champagne de Bourouge, dépendance d'une fondation de Miniac, acquise par Jean-Pierre Carillet le 28 messidor an VIII (17 juillet 1800).

Pour les biens nationaux ecclésiastiques de Pleudihen, se référer aux Archives des Côtes-d'Armor, série 1 Q 1, où l'on trouvera sur les ventes et les acquéreurs une quantité de renseignements que nous avons dû omettre ici.

 

CLERGÉ.LOUIS-RENÉ GEORGELIN, sieur de la Maufredays, recteur, naquit à Saint-Brieuc le 12 juin 1726. Son père, M. René, avocat en Parlement, époux de Jeanne Le Maignoux, de Saint-Brieuc, était originaire de Guérande, mais habitait le manoir des Salles, en Ploufragan, lorsqu'il lui assura son titre clérical.

Ordonné prêtre le 18 septembre 1751, M. Georgelin était vicaire à Ploufragan, quand, sur la démission de M. Audineau, qui avait succédé le 16 mars de l'année précédente à M. Louis Chatton, il fut présenté pour le rectorat de Pleudihen le 19 mars 1764.

D'après des documents conservés aux Archives d'Ille-et-Vilaine, cote C 1361 et 1362, l'abbé Georgelin se dévoua de son mieux pour procurer des secours à ses ouailles au cours des violentes épidémies qui ravagèrent sa paroisse de 1778 à 1783.

Le 20 décembre 1788, ce prêtre apposa sa signature sur une délibération du conseil général de Pleudihen préparatoire à la rédaction des cahiers pour les Etats Généraux (cf. Sée et Lesort, op. cit., III, p. 141). Mais à l'époque de la Constitution Civile, il crut habile de prétexter ses 65 ans, ses infirmités et son désir de prendre sa retraite pour s'abstenir du serment et, conformément au décret du 17 février 1791, rendu par le Directoire des Côtes-du-Nord, il conserva ses fonctions jusqu'à ce qu'on ne procéda à son remplacement. Puis, après l'installation de l'ex-dominicain Fidèle Paris comme curé intrus à son lieu et place, loin d'élever quelque protestation, M. Georgelin vécut avec celui-ci dans la meilleure intelligence, « faisant preuve d'un patriotisme épuré », ainsi que le certifiaient le 30 novembre 1791 les administrateurs du District de Dinan à leurs collègues du Département. Ces messieurs demandaient alors, pour récompenser l'ex-recteur de ses complaisances « et de ses pénibles travaux, une pension de retraite propre à lui procurer une existence honnête à la fin de ses jours ».

Le libéralisme de M. Georgelin lui valut aussi, le 25 octobre 1792, d'être autorisé à séjourner à Pleudihen après la loi du 26 août de cette année, sans être obligé de se présenter chaque jour à l'appel nominal, au lieu d'aller se renfermer à la maison de réunion de Saint-Brieuc, et cela porte le texte officiel « vu sa pétition souscrite par la municipalité et les curé et vicaire constitutionnels de Pleudihen ; la conduite de l'exposant n'ayant pas excité de plainte, et sa maladie étant du genre de celles qui ne permettraient pas son transport » (Archives des Côtes-d'Armor, série L 161, f° 104).

Cependant, les temps devenant de plus en plus difficiles, M. Georgelin, à la suite de la loi du 11 mai 1794, transmise le 22 de ce mois au District de Dinan, fut obligé de se rendre à la fin à la maison de réunion transférée à cette époque à Guingamp. Il y entra le 26 mai 1794 et ne fut libéré qu'au printemps de l'année suivante, en conséquence de l'arrêté pris le 26 mars 1795 dans la ville de Rennes par les représentants Guermeur et Guezno (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 70). Le 11 mai 1795, ce prêtre habitait Ploufragan. La persécution recommençant, on l'obligea, le 6 février 1796, d'aller résider à la nouvelle maison de réunion qui venait d'être créée à Saint-Brieuc, dans l'immeuble Picot-Chappedelaine. (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 102 et 103).

S'étant déclaré atteint « d'un rhumatisme habituel et d'une hypocondrie qui l'oblige à garder la chambre presque tout le temps », M. Georgelin fut autorisé, un peu avant le 14 janvier 1797, vu son état de santé, à sortir de prison pour se retirer à Saint-Brieuc chez sa sœur. C'est là qu'il mourut le 28 novembre 1805, âgé de 79 ans. (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 103, et Archives Etat-Civil, Saint-Brieuc).

JEAN-NICOLAS MARIE, vicaire, appartenait, croyons-nous, à une vieille famille noble, mais alors tombée en roture. Il naquit à Pleudihen le 24 avril 1744 du mariage de Jean-Marie et de Marie Couppé. Ordonné prêtre le 2 avril 1768, cet ecclésiastique reçut le 12 décembre 1772 des lettres de vicaire pour sa paroisse natale. Deux ans plus tard, le 20 novembre 1774, il joignit à ses fonctions la desservance de la prestimonie de la Tourniole, sur la présentation des propriétaires de cette seigneurie.

M. Marie, qui jouissait de la confiance de ses compatriotes, fut désigné par eux comme administrateur de l'obiterie de l'église de Pleudihen, qui de tout temps a été fort importante. Puis, lors de la formation des municipalités, au mois de juin 1790, les électeurs pleudihennais le désignèrent parmi les premiers pour l'un de leurs officiers municipaux. Mais les événements l'obligèrent à se démettre de son mandat dès le 14 décembre de cette même année, et le 29 juillet de l'année suivante, il abandonnait à son tour la gestion de l'obiterie de Pleudihen.

A cette époque, en effet, l'intrus Paris, élu à la cure de cette paroisse le 13 juin précédent, avait été solennellement installé dans ces fonctions le 26 juin suivant, et prétendait s'imposer au respect et à la sympathie de cette population profondément attachée alors à ses prêtres et à sa foi.

Dès cet instant, écrire l'histoire d'un des vicaires de Pleudihen, c'est faire en même temps quasi l'histoire de tous les autres. Aucun d'eux, en effet, ne se pressa d'obéir à l'arrêté du Directoire des Côtes-du-Nord du 18 juin 1791, leur prescrivant, ainsi qu'à tous les insermentés, de s'éloigner à une distance d'au moins six lieues de la localité de leur résidence ; et cela, au grand mécontentement du curé Paris (Pâris) qui, dès le 7 juillet 1791, écrivait plein de rancoeur aux administrateurs du district de Dinan « J'ai sept prêtres dans ma paroisse, que l'on pourrait comparer aux sept péchés capitaux » (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 17).

Il faut reconnaître que les efforts des prêtres pleudihennais pour empêcher leurs concitoyens de verser dans le schisme rendaient à l'intrus Pâris sa tâche difficile. Il ne pouvait y avoir moins qu'une lutte d'influence entre le clergé orthodoxe et le clergé assermenté, et les actes qu'accomplissaient les premiers pour rester fidèles à leur devoir, devaient être regardés par les seconds comme une politique d'agression contre leurs personnes et de révolte contre la loi. Tels sont bien du reste les sentiments dont témoigne la dénonciation suivante, que nous avons relevée à la date du 29 juin 1791 sur le premier registre de délibérations du District de Dinan :

« En ce jour, un des administrateurs déclara en effet en séance à ses collègues, avoir appris que les prêtres de Pleudihen, entre autres Marie, Briand et Souquet, font tout ce qu'ils peuvent pour exciter une révolte contre la loi, qu'ils forment des rassemblements de citoyens sous le prétexte de célébrer la messe, mais en fait pour les détourner d'aller à la messe paroissiale entendre celle du curé constitutionnel ; qu'ils ont dû aussi empêcher de porter à l'église un enfant à baptiser, et qu'enfin, ils doivent, ce jour même, célébrer une grand'messe à la chapelle des Ponts-Cieux ».

Le nouveau régime que venait de se donner la France, ne pouvait se refuser à soutenir ainsi qu'à défendre le clergé qu'il avait lui-même créé et intronisé ; aussi, dès le 7 juillet 1791, le Directoire du District de Dinan envoya-t-il à Pleudihen deux gendarmes porteurs de l'ordre de faire fermer les chapelles de cette paroisse, ainsi que de la mission de prêter main-forte à la garde nationale pleudihennaise pour se saisir des prêtres insermentés de cette localité s'ils ne se conformaient au plus vite à l'arrêté du 18 juin dont nous avons déjà parlé.

A la suite de ces mesures de rigueur, MM. Marie et Briand quittèrent provisoirement Pleudihen et se retirèrent chez M. Le Bau, recteur de la Fontenelle, où ils séjournaient le 30 juillet de cette année. Un de leurs confrères, malade, prenait à la même époque les eaux à Epiniac ; si bien qu'environ deux mois durant, Pleudihen n'a pas d'histoire, mais cette situation ne dura pas.

Il se trouva en effet qu'à la suite de l'acceptation par le roi Louis de la Constitution votée par l'Assemblée Nationale, celle-ci décréta une amnistie, laquelle obligea l'administration du département des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor) à rapporter le 21 septembre 1791 son rigoureux décret du 18 juin précédent. Comme suite, les prêtres insermentés pleudihennais purent reparaître en public, et la chronique de cette paroisse ne tarda pas à reprendre une large place sur les registres du District de Dinan.

C'est ainsi que dès le 1er octobre 1791, cette administration écrit à la municipalité de Pleudihen que « l'amnistie votée par l'assemblée ayant permis à ses anciens prêtres de rentrer, elle apprend qu'ils cherchent encore à égarer les esprits et à susciter des troubles ». Aussi, invite-t-elle en conséquence les autorités locales à surveiller de très près leurs faits et gestes.

Neuf jours plus tard, toujours exactement informées par Pâris de la conduite des prêtres Marie, Le Mée et Briand, les autorités du District prescrivent à celles de Pleudihen de « faire fermer les chapelles où ces ecclésiastiques avaient repris à célébrer, ainsi que de rapporter procès-verbal des actes de ces messieurs, et de ne pas hésiter à les faire arrêter s'ils excitaient des troubles ». Du reste, dès le lendemain, les municipaux pleudihennais promettaient de se conformer bien exactement à ces instructions.

Mais tout cela n'aboutissait pas à grand'chose, et le 11 octobre 1791, les administrateurs du District étaient obligés d'avouer que « les prêtres insermentés ne laissent pas d'avoir de l'ascendant sur presque tous les habitants de Pleudihen, et même sur quelques-uns des officiers municipaux ». Aussi, lorsque les portes des chapelles des Ponts-Scieux, de la Vicomté et du Grand-Pré, où ces ecclésiastiques célébraient habituellement la messe le dimanche, eurent été d'autorité fermées et patte-fichées, ils se mirent à dire la messe dans leurs propres demeures et, là encore, une nombreuse assistance leur demeura fidèle.

Le curé Pâris se voyait presque délaissé dans son église. En même temps que cette situation humiliait son amour-propre et prêtait au ridicule, elle dénonçait à tous la faillite du culte constitutionnel, et cela aux portes même de Dinan. Une solution énergique s'imposait pour conserver quelque prestige à Pâris, ainsi qu'au petit clan de ses partisans. Aussi, sur une nouvelle dénonciation de l'ex-prieur des Dominicains de Guérande, le Directoire du District de Dinan décida-t-il de faire arrêter une bonne fois les prêtres Marie et Briand. En conséquence, le commissaire Elias, envoyé à cette fin, les appréhenda de grand matin dans leurs demeures respectives, le dimanche 18 décembre 1791, et fit aussitôt conduire à Dinan les deux prêtres, que l'on ne tarda pas à diriger l'un et l'autre à Saint-Brieuc, sous escorte de la gendarmerie.

Les autorités du Département ne durent cependant pas trouver pendable le cas de ces ecclésiastiques, car, sans les maintenir en arrestation, elles donnèrent dès le 21 décembre l'ordre de les ramener à Dinan, avec invitation au tribunal de cette ville d'étudier leur affaire.

C'était un blâme indirect aux administrateurs du District, qui avaient agi trop vite en ordonnant l'arrestation des abbés Marie et Briand ; aussi ces messieurs, qui ne voulaient pas paraître avoir fait un pas de clerc, prirent-ils sur eux de décider que « pour leur propre sûreté et être à l'abri des injures que le peuple, aigri par les manœuvres des ennemis du bien public, pourrait bien leur faire, les deux prêtres seraient conduits à la maison d'arrestation civile de la ville de Dinan ».

Ces ecclésiastiques s'y trouvaient encore le 12 janvier 1792, et la justice n'avait toujours rien statué sur leur compte, lorsqu'ils se décidèrent à réclamer, près de Reslou, commissaire du Gouvernement, afin d'obtenir leur liberté : « Ils ont toujours, déclarent-ils dans leur requête, réglé leur conduite de façon à ne pas compromettre leur conscience, ni préjudicier aux intérêts de la société. Ils se sont permis de dresser des autels dans leurs maisons et d'y célébrer la messe, voilà le grand forfait qu'on leur reproche... mais ils n'ont point été saisis en flagrant délit, ni à la rumeur publique... leur arrestation est donc illégale, et l'on n'a pas osé, depuis qu'ils sont en prison, les décréter d'accusation ».

Le commissaire abonda dans leur sens à la suite de leur supplique, et déclara « ne s'opposer à ce que les portes de la prison leur soient ouvertes, si, comme ils l'exposent, ils ne sont point écroués ».

Remis donc en liberté aux environs du 13 janvier, les deux prêtres revinrent à Pleudihen, mais M. Marie, voyant que son ministère était rendu impossible dans cette paroisse, prit le parti, le 5 mars 1792, de se faire délivrer un passeport pour voyager, et, le 21 du mois suivant, il s'exilait à Jersey, par Saint-Malo, sur le bateau « Le Pierre » (Archives Municipales de Saint-Malo, LL 109). Inscrit sur la liste des émigrés le 11 juin 1793, M. Marie vit comme tel le gouvernement faire procéder, le 30 mai 1794, au partage préalable à la mise en vente de ses biens.

Cet ecclésiastique ne revint en France qu'à la pacification religieuse de Bonaparte ; aussi le « ministère caché » que la Semaine Religieuse de Saint-Brieuc, année 1907, assure que « ce prêtre accomplit à Pleudihen », ne peut s'entendre que de la dernière période de l'année 1791.

L'enquête de Boullé indique l'abbé Marie comme « rentré depuis peu de jours à Pleudihen », où l'on ne trouve en effet sa signature sur les registres de cette paroisse que le 3 juillet 1802, et c'est le 2 juin précédent seulement qu'il avait fait sa déclaration de fidélité au gouvernement consulaire.

Nommé officiellement recteur de Pleudihen le 16 janvier 1804, à la réorganisation du nouveau diocèse de Saint-Brieuc, M. Marie ne prit ce titre sur les actes publics que le 21 mai de cette année, après s'être acquitté à Dinan de la prestation du serment de fidélité au nouveau régime. Il mourut en fonctions à Pleudihen le 1er mai 1809, âgé d'environ 65 ans.

Sur les troubles religieux à Pleudihen en 1791 et en 1792, voir les Archives Municipales de Dinan : Registre des Délibérations du Directoire du District du 11 juillet 1790 au 24 janvier 1792 ; Registre de Correspondance du même du 7 juillet 1791 au 1er août 1792,et Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 17 et 24.

MICHEL-JACQUES BRIAND, vicaire, naquit au village de la Gravelle, en Pleudihen, le 13 décembre 1758, du mariage de Malo et de Perrine Desvaux. Il était étudiant en philosophie à la « Chantrerie » de Saint-Malo de l'Isle, quand, pour lui constituer son titre clérical, on lui assura le 30 juin 1778 la possession d'une des prestimonies de sa paroisse, appelée le Tertre-Isaac.

Ordonné prêtre le 19 avril 1783, M. Briand desservit quelques mois la chapelle de la Bellière, pour laquelle on l'avait présenté le 24 août 1787 ; puis, le 1er octobre 1788, il reçut de Mgr. de Hercé des lettres de vicaire pour Pleudihen, en vue de suppléer M. Georgelin, que ses infirmités empêchaient de vaquer à son ministére. Après avoir dû abandonner ses fonctions à la suite de son refus de s'assermenter, il partagea, ainsi que nous venons de le voir, le sort de son confrère, l'abbé Marie, ayant comme lui soutenu les mêmes luttes et combattu les mêmes combats.

Rendu à la liberté aux environs du 13 janvier 1792, l'abbé Briand revint à Pleudihen où, devant les mesures rigoureuses prises par le département des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), le 3 janvier de cette année, il ne crut pas possible de demeurer davantage dans sa paroisse natale. Il prit donc un passeport pour s'en éloigner le 5 mars 1792 et se retira à Saint-Malo, où il fut arrêté chez une demoiselle Le Gros le 26 mai 1792 et mis en prison pour ne s'être pas conformé à l'arrêté du Directoire d'Ille-et-Vilaine du 15 avril précédent. Finalement, l'abbé Briand s'exila à Jersey au mois de septembre suivant.

Deux ans plus tard, le 30 mai 1794, le gouvernement faisait procéder au partage préalable des biens de ce prêtre comme émigré, alors que celui-ci ne s'était exilé qu'à son grand regret et contraint par la loi.

M. l'abbé Brebel assure que l'abbé Briand revint de l'étranger en avril 1796. Un rapport de police du 15 avril 1797 indique de son côté que « l'ex-curé de Pleudihen est rentré ; mais qu'il annonce des opinions très modérées, ou du moins qu'il se montre très circonspect » (Archives Nationales F 7, 7246, n° 7964). Quant à l'enquête de Boullé, elle le signale de son côté « comme domicilié depuis six ans à Saint-Solen » (sic) et le note « apte à faire un vicaire ».

Nous avons relevé, de notre côté, la signature de M. Briand comme curé de Pleudihen le 10 juillet 1800, dès les débuts du plus ancien registre de catholicité de cette paroisse après la tourmente révolutionnaire.

L'abbé Briand demeura vicaire de Pleudihen jusqu'à la mort du recteur, M. Marie. Il lui succéda alors dans ses fonctions le 21 juillet 1809, et les conserva jusqu'à son décès, arrivé le 17 mars 1815, à l'âge de 57 ans.

JEAN-MARIE LEGAIGNOUX, vicaire, né an village de Saint-Magloire, en Pleudihen, le 14 février 1757, du mariage de René et d'Angélique Grison, fut ordonné prêtre le 2 mars 1781, puis, en 1784, il échangea le poste de vicaire à Epiniac pour un de ceux de sa paroisse natale.

Après avoir refusé le serment constitutionnel et adopté la même ligne de conduite que ses deux collègues précédents, il fut obligé d'abandonner sa paroisse devant la persécution religieuse, et de prendre, le 24 avril 1792, un passeport pour s'expatrier au Canada. (Diocèse de Saint-Brieuc., op. cit., I, p. 202). Il ne mit cependant pas son projet à exécution et, le 10 juillet 1792, M. l'abbé Brebel l'a trouvé résidant à Saint-Suliac.

La loi du 26 août de cette année le contraignit à la fin de s'exiler en Angleterre, d'où il revint ensuite à Jersey. Il s'y trouvait dès le mois d'août 1796, époque à laquelle nous le voyons émarger sur le registre de Mgr. de Cheylus pour des secours en argent et en vêtements, jusqu'au mois de mai de l'année suivante. M. Legaignoux dut rentrer en Bretagne peu après cette date, car, d'une part, sa signature figure dès le 3 juillet 1800 sur le premier registre de catholicité de Pleudihen, et, d'autre part, dans son enquête, Boullé l'indique comme vivant depuis cinq ans à Pleudihen et le note comme « propre à faire un vicaire ».

A la réorganisation du culte, M. Legaignoux reprit officiellement son titre de vicaire à Pleudihen ; et le conserva jusqu'à 1815, époque à laquelle il fut nommé recteur de cette paroisse. Démissionnaire en 1821, il mourut prêtre habitué dans son pays natal, le 10 janvier 1845, âgé de 88 ans.

La paroisse de Pleudihen, avec ses 21 prêtres originaires, fournit vers 1925 beaucoup plus de vocations qu'autrefois. Vivaient à Pleudihen comme simples prêtres en 1790, ou y firent du ministère durant la Révolution :

LOUIS-JEAN LE MÉE, né à la Coquenais, en Pleudihen, le 4 décembre 1737, de Jean et de Félicissime Noury, reçut la tonsure le 16 décembre 1762. De 1770 à la Révolution, nous voyons ce prêtre desservir à Pleudihen la prestimonie des Orhans, qui lui valait 500 livres de revenus, ainsi que la chapellenie de Saint-Magloire, qui lui rapportait 400 livres.

M. Le Mée garda vis-à-vis de la Constitution Civile la même ligne de conduite que les prêtres précédents, fut frappé du même ostracisme, dut comme eux s'éloigner de sa paroisse natale, et finalement quitter la France au mois de septembre 1792, si nous nous en rapportons à un certificat du 25 thermidor an IV (12 août 1796), où la municipalité de Pleudihen déclare que Jean Lemée, « prêtre insermenté, est resté dans le pays jusqu'à la fin d'août 1792 ; qu'alors, étant menacé d'arrestation, il fit demander un passeport pour se déporter ; que la municipalité de Pleudihen fut divisée d'opinions pour la délivrance, qu'elle lui refusa par frayeur ; sur quoi ledit Le Mée prit le parti de se déporter et de sortir de France au mois de septembre 1792 » (Archives des Côtes-d'Armor, série Q, contentieux des prêtres, liasse 43).

Après avoir séjourné durant quelque temps à Jersey, d'où il gagna ensuite la Grande-Bretagne, l'abbé Le Mée revint à Pleudihen à la pacification religieuse de Bonaparte. Nous y relevons sa première signature le 29 mai 1802. Boullé, dans son enquête, le note comme rentré en France depuis un an. Il était, dit-on, très infirme lors de son retour, et s'en fut habiter quelque temps chez son frère, aux Bas-Champs. M. Le Mée mourut à Pleudihen, âgé de 78 ans, le 8 mai 1815.

OLIVIER-JULIEN SOUQUET, né au village des Villes-Morvues, en Pleudihen, du mariage de Julien et de Marie Briand, fut ordonné prêtre le 2 avril 1768. Lors de la Révolution, il habitait dans sa paroisse natale, où il enseignait le latin à un certain nombre d'enfants, grâce à une pieuse fondation de Mgr. de Hercé, évêque de, Dol, qui, en 1785, avait dans ce but placé sur les Etats de Bretagne une somme de 6.000 livres au denier vingt, rapportant 300 livres de rente.

Comme les autres prêtres pleudihennais, M. Souquet demeura inébranlable vis-à-vis de la Constitution Civile. Aussi, après avoir vainement tenté de demeurer dans sa paroisse en célébrant la messe le dimanche, dans les chapelles rurales, il dut, bientôt, sous la poussée de la persécution, rendue plus aigüe par l'arrêté du Directoire. des Côtes-du-Nord en date du 23 janvier 1792, prendre un passeport pour quitter Pleudihen le 19 mars de cette année. Il ne s'exila cependant définitivement qu'au mois de septembre suivant avec l'abbé Le Mée.

Nous le voyons ensuite figurer parmi les prêtres qui séjournèrent à Jersey, où il recevait un secours pour subsister à la fin du mois d'août 1796. Le 23 septembre de cette même année, ses parents obtinrent la levée du séquestre dont étaient frappés ses biens. L'abbé Souquet était de retour à Pleudihen à la fin de 1802. Il y mourut âgé de 73 ans le 21 janvier 1313.

LOUIS-MATHURIN NOURY, naquit à Pleudihen le 27 octobre 1758, du mariage de Jean et d'Olive Raoulois. Son titre clérical lui fut assuré le 22 janvier 1785, grâce à la générosité du bon abbé Souquet.

Après avoir été quelque temps chapelain à Tressé, dans le canton actuel de Combourg, M. Noury revint à Pleudihen, où il adopta la même ligne de conduite que ses confrères, et refusa de s'assermenter. Obligé de quitter son pays natal et de prendre un passeport « pour voyager », le 19 mai 1792, il ne quitta cependant définitivement Pleudihen qu'en septembre de cette année, avec M. Souquet. Nous retrouvons ce prêtre à Jersey, où il émarge pour un secours sur les registres de Mgr. de Cheylus, à la fin du mois d'août 1796, puis, dit-on, il aurait ensuite passé en Espagne.

L'enquête de Boullé signale l'abbé Noury comme revenu depuis peu de jours à Pleudihen, où l'on relève en effet pour la première fois sa signature le 3 juillet 1802. A la réorganisation du nouveau diocèse de Saint-Brieuc, M. Noury remplit les fonctions de vicaire à Pleudihen, jusqu'à sa mort, arrivée le 6 janvier 1823, à l'âge de 65 ans.

JULIEN POUSSIN était né à Pleudihen le 8 juin 1761 d'Olivier et d'Olive Brebel. Après avoir été ordonné prêtre à Saint-Malo le 10 juin 1786, il fut d'abord vicaire de Plerguer, où nous le trouvons le 3 avril 1789, représentant son recteur et l'Assemblée du Clergé de Dol, Vicaire de Saint-Remy-du-Plain en 1790, il n'accepta pas plus que M. Hervé, son pasteur, la Constitution Civile du Clergé, si bien que le 27 mai 1792, la municipalité « patriote » de cette localité écrivait à Rennes pour demander au plus tôt le départ de ses deux prêtres. La place n'était plus tenable ; M. Poussin, se conformant aux ordres du Département, dut s'en aller le 2 juillet suivant habiter Rennes, à l'auberge de la « Fleur de Lys ». C'est de là que, voyant l'horizon s'assombrir de plus en plus et n'apparaître aucun espoir de voir cesser sa demi-captivité, M. Poussin demanda, le 18 de ce même mois, mais sans pouvoir l'obtenir, « un passeport pour sortir librement de l'Empire français, attendu les troubles qui existent à Rennes à l'occasion des prêtres non conformistes, et qui lui font craindre qu'on attente à sa vie ».

Cependant, les événements s'étaient précipités à Paris, et leur contre-coup se faisait sentir en Bretagne. Le 14 août 1792, les 250 prêtres rassemblés à Rennes furent internés d'emblée à l'ex-abbaye Saint-Melaine. Puis, le 8 septembre suivant, les autorités départementales, après avoir auparavant prononcé très illégalement leur déportation à la Guyane, les firent, ce jour-là, dès 4 heures du matin, mettre en route pour Saint-Malo, lieu de leur embarquement. L'abbé de Châteaugiron, l'une des victimes, nous a conservé le récit de cet exode. (Cf. Vie de l'abbé Carron, in- 8, Paris, 1866, p. 293-295).

Au cours de ce voyage, se passa à Châteauneuf, la scène qu'a racontée Tresvaux à la page 403, tome Ier, de son Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne (2 in-8, Paris, 1845). A cette étape, « des gardes nationaux aperçurent M. Poussin qui s'entretenait quelques instants avec son père et quelques autres de ses parents venus pour lui dire adieu. Ces gardes lui demandèrent s'il avait fait le serment ». — « Non », répondit-il. « Eh bien, répliquèrent ces barbares, faites-le, ou sortez de là ».

Enfermés dès leur arrivée, le 9 septembre au soir, dans la citadelle de Saint-Malo, les 185 prêtres d'Ille-et-Vilaine devaient être bel et bien déportés à la Guyane. Ainsi que l'a fort solidement démontré M. Delarue au t. VI, p. 261 et sq., de son bel ouvrage sur le District de Dol, seule la considération d'une grosse économie à réaliser fut assez puissante pour faire revenir les administrateurs d'Ille-et-Vilaine sur leur arrêté illégal et les décider à diriger sur Jersey les Confesseurs de la Foi.

Après que l'on se fût emparé de tout le numéraire dont s'étaient munis ces ecclésiastiques pour parer à leurs premiers besoins sur la terre d'exil, et qu'on leur eut remis en retour des traites d'une égale valeur, mais d'un change difficile, les autorités malouines les firent s'embarquer pour Jersey par un temps affreux, le quatorzième jour de septembre 1792 ; mais les éléments, aussi incléments que les hommes, repoussèrent les exilés vers les côtes bretonnes, si bien qu'après avoir failli faire plusieurs fois naufrage, les bâtiments qui les portaient, se trouvant en détresse, durent rentrer à Saint-Malo.

Ils mirent de nouveau à la voile pour leur destination le 17 de ce même mois, et purent cette fois atteindre Jersey sans encombre.

Nous croyons que l'abbé Poussin dut vraisemblablement terminer ses jours en Angleterre, car nous n'avons pas retrouvé son nom parmi ceux des prêtres qui rentrèrent en France à l'époque de la pacification religieuse que détermina le Concordat.

Etait encore pleudihennais par sa naissance, l'abbé HENRI AMELINE, dont nous ferons la biographie à l'article Saint-Samson, dont il était vicaire.

THOMAS-GABRIEL GILLOT, originaire de la ville de Dol, où il naquit du mariage de Gabriel et de Jeanne-Marie Gaïhaut, fut contraint de quitter le couvent des Chartreux d'Orléans à la fermeture de cette maison et déclarait en conséquence, le 27 avril 1791, vouloir se retirer à Trans, dans le canton actuel de Pleine-Fougères. Un an plus tard, ce religieux accepta, bien qu'insermenté, de devenir l'aumônier des hôpitaux de Dol, mais comme il attirait les catholiques fidèles à sa chapelle et les détournait des offices du curé assermenté Guyot de Folleville, le futur « évêque » d'Agra, le district de Dol fit conduire à Rennes, le 3 juin 1792, le trop zélé desservant, et celui-ci dut chercher un logis dans cette ville, où il prit pension à l'auberge des « Quatre-Boeufs ».

Depuis cette époque jusqu'au 1er Mai 1795, nous perdons absolument de vue le père Gillot. A ce moment, après avoir promis soumission aux lois purement civiles de la République, il exerça publiquement les fonctions du culte dans l'église de Pleudihen, remise au culte catholique le 28 avril 1795, en vertu d'un arrêté des représentants du peuple, « sur la pétition individuelle des habitants ». Ce religieux demeura dans ce poste jusqu'au mois de septembre de cette même année, tout en faisant à l'occasion du ministère dans la paroisse voisine de Miniac-Morvan.

Après la loi du 7 vendémiaire an IV (29 septembre 1795), on trouve le P. Gillot circulant du côté de Carfantan et de Miniac-Morvan. Un état du 25 janvier 1798 le signale comme « disparu sans passeport » et le taxe « d'avoir organisé la chouannerie ». L'enquête de Boullé, vers 1802, l'indique comme vivant depuis sept ans à Pleudihen, en qualité de simple prêtre, et le note : « A renvoyer dans son diocèse ». C'est ce que fit en effet ce religieux, qui rentra à Dol vers le courant du mois de novembre 1802 et mourut à l'hospice de cette ville, âgé de 48 ans, le 11 octobre 1805, léguant à cet établissement, ce qu'il possédait.

D'après les auteurs du Diocèse de Saint-Brieuc, op. cit., I, page 206, le P. Gillot fut aidé dans son ministère à Pleudihen par un abbé Josse, lequel n'est autre, croyons-nous, que Mathurin Josse, vicaire à Tressé, dont parle G. de Corson, dans ses Confesseurs de la Foi, op. cit., p. 291, mais dont il déclare ignorer ce qu'il advint de lui dans la suite ; à moins qu'il ne s'agisse d'un autre abbé Noël Josse, vicaire à Quévert.

Cependant, le 17 prairial an IV (5 juin 1796), les membres de l'administration cantonale de Pleudihen se portaient garants qu'ils n'existait à leur connaissance, dans l'étendue de leur circonscription, aucun prêtre, soit régulier, soit séculier, mais nous croyons cette déclaration toute de complaisance et fort loin de la vérité. (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, p 104 et 105).

Notons enfin, pour achever cette étude sur le clergé de Pleudihen, que, le 28 mars 1792, PIERRE GAREL, né dans cette paroisse le 7 avril 1741 et reçu tertiaire recollet à Saint-Servan, le 22 septembre 1769, sous le nom de frère Jérôme, déclara au district de Dinan, vouloir désormais se fixer en son pays natal (Archives des Côtes-d'Armor, série L/v, carton 10). Comme il recevait sa pension pour le premier trimestre 1793, il est vraisemblable qu'il avait dû prêter le serment de Liberté-Egalité. Se rétracta-t-il ? Nous n'en savons rien. Toujours est-il que le frère recollet Pierre Garel, « homme reconnu depuis longtemps comme très dangereux, tant par son incivisme que par son fanatisme », fut arrêté le 23 septembre 1793, entre onze heures et minuit, au village de Livet, et conduit aux prisons de Dinan, par les soins des soldats du bataillon de la Seine-Inférieure, qui reçurent 100 livres pour leur peine, par ordre signé Carrier et Pocholle. (Archives des Côtes-d'Armor, Lm 5, 49).

 

CLERGÉ- CONSTITUTIONNEL. — FIDÈLE-MARIE PARIS, curé, exerçait le 13 juillet 1780 les fonctions d'aumônier au régiment le Royal-Corse, alors en garnison dans le diocèse de Saint-Malo.

A la fermeture de son couvent de Guérande, l'ex-Père Paris partit à pied de cette ville pour s'en venir à Dinan, en compagnie de son jeune collègue François Gouinguené. Leur voyage ne se fit pas sans encombre, et le 27 février 1791, Fidèle Paris faisait devant les membres du District de Dinan le récit de l'agression dont lui et son compagnon avaient été l'objet non loin du bourg de Molac, dans le Morbihan, de la part des paysans « ameutés, dit-il, dans le but. de rétablir sur le siège de Vannes leur ancien évêque, Mgr. Amelot » (Archives Municipales de Dinan).

L'ex-dominicain se fixa avec sa mère au village de la Ville-Piron, en Pleudihen, et attendit les événements. Ils ne devaient pas tarder à se montrer pour lui favorables.

Grâce en effet à ses relations déjà anciennes avec la bourgeoisie dinannaise, les électeurs le choisirent le 13 juin 1794 par 19 suffrages sur 36 exprimés, comme curé constitutionnel de Pleudihen, au traitement de 2.400 livres, qu'il pouvait du reste alors cumuler avec sa pension d'ancien religieux.

L'évêque Jacob signa, quatre jours après cette élection, son institution canonique, mais l'installation de Paris (Pâris), qui se fit au milieu d'un grand appareil, n'eut lieu que le 26 juillet suivant.

En butte aussitôt, dans sa paroisse, à l'animadversion d'une bonne partie des Pleudihennais, qui ne se gênaient pas pour l'appeler « voleur de bénéfice », et répétaient « qu'il était moins dans le cas d'administrer les sacrements que son chien », Paris s'en vengea, ainsi que nous l'avons vu, en se faisant sans relâche le dénonciateur attitré des prêtres insermentés et des catholiques fidèles, et en se montrant en toutes circonstances « patriote fougueux ». Le départ forcé du clergé fidèle n'améliora pas la situation de l'intrus. Le 5 avril 1792, d'après une note du District de Dinan adressée à l'accusateur public, « des particuliers, après avoir commis des indécences dans l'église de Pleudihen, se rendirent ensuite chez le curé, qu'ils insultèrent et menacèrent ». Celui-ci, versant de plus en plus dans la politique, fut élu, le 25 octobre 1792, membre du Conseil général du District de Dinan, puis il se fit nommer, le 3 mars 1793, à Pleudihen, commissaire de la Convention pour la marine. Enfin il fonda, de concert avec quelques autres, le 23 septembre de cette même année, la société populaire dite des « Sans-Culottes de Pleudihen ». Dès lors, Paris était mûr pour rompre toute attache, même avec l'Eglise constitutionnelle. Aussi, précédant de quelques jours les décrets de Le Carpentier, abdiqua-t-il son état et fonctions le 9 ventôse an II (27 février 1794). Il s'en alla ensuite épouser à Rennes, sa ville natale, le 17 ventôse suivant (7 mars 1794), une riche veuve, née Jeanne Morault, épouse Le Monnier, fille d'Auguste et de Roberte Renault.

Peu après, il revint à Pleudihen, où, le 24 mars 1794, il brigua, mais en vain, la charge d'instituteur public. Quelques semaines plus tard, il faisait enregistrer, le 25 germinal (14 avril 1794), par la municipalité de cette commune, un certificat de Le Carpentier lui donnant acte de la remise de ses lettres de prêtrise et de sa renonciation aux fonctions ecclésiastiques. Puis, jugeant son rôle fini à Pleudihen, il se retira avec sa femme à Châteauneuf, en mai 1794, emportant sans droit la bibliothèque qu'un ancien recteur, l'abbé Chatton, avait léguée à la fabrique, et abandonnant à la charité publique, abritée sous la grange de l'ancien presbytère de Pleudihen, sa mère, Guillemette Barthelemy, avec qui sa belle-fille avait eu maille à partir. Devant cette infortune, la municipalité pleudihennaise prit, en février 1795, un arrêté prescrivant de conduire la pauvre vieille à Châteauneuf et de la remettre entre les mains de l'agent national, lequel la ramènerait chez son fils, « notoirement en état de lui procurer la vie et le logement, ainsi que le veut la loi et la nature ».

Nous retrouvons le citoyen Paris, jurant haine à la royauté le 25 vendémiaire an V (16 octobre 1796), et peu après commissaire de police à Rennes en 1797. C'est dans cette ville qu'il achetait le 26 germinal an VI (15 avril 1798), pour 20.900 livres, des bâtiments situés rue Vasselot, et dépendant de la liquidation des Grands Carmes. Le 22 février 1801, le maire Lorin nommait Paris « chef du bureau militaire à la mairie de Rennes ». Nous pensons que l'ex-moine avait perdu son épouse, quand Boullé, préfet des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), le notait vers 1802 « comme instruit, savant même, de bonnes moeurs, propre à remplir dignement des fonctions dans l'Eglise ».

Fidèle Paris mourut à Rennes, rue de Paris, le 9 novembre 1805, âgé de 58 ans. Les registres ecclésiastiques de la paroisse Saint-Pierre, nunc Notre-Dame, où il fut enterré religieusement, nous a signalé M. l'abbé Leray, ne mentionnent pas sa qualité de prêtre.

Voici du reste l'extrait de l'acte de décès de Paris, que nous devons à la complaisance de M. l'abbé Joseph Mathurin, le distingué doyen de Saint-Sulpice de Fougères : « L'an quatorze de la R. F., le 20 brumaire, etc., etc., Fidèle Paris, chef de bureau de la guerre près la mairie de Rennes, et ex-religieux jacobin, veuf de Jeanne Morault, âgé de 58 ans, originaire de Rennes, fils de Jean Paris et de Guillemette Barthelemy, est décédé rue de Paris, le 18 de ce mois, à 11 heures, etc... ».

FRANCOIS-LOUIS GOUINGUENÉ, vicaire, naquit à Saint-Brieuc le 28 juillet 1758, du mariage d'Yves et de Mathurine Demelet. Ordonné prêtre à Saint-Malo en 1784, il était religieux au couvent des Dominicains de Guérande en 1790 (Revue Historique de l'Ouest, XIème année, p. 894).

Appelé au vicariat de Pleudihen par Fidèle Paris, il remplit en même temps en 1792 et 1794 les fonctions d'officier public de cette commune.

Le 10 ventôse an II (28 février 1794), nous le voyons, en digne acolyte de Fidèle Paris, abdiquer son état et fonctions, puis épouser huit jours plus tard (8 mars 1794), Françoise-Perrine D.., née à Tressaint le 20 avril 1759 du mariage de noble homme Julien, sieur des Alleux, procureur du roi et greffier de la juridiction des Chevaliers de Malte à Port-Stablon, en Saint-Suliac, et de Jeanne-Guyoune G... Une petite fille naquit de cette lamentable union. Mon grand oncle, M. le chanoine Le Saichère, de Ploubalay, recteur de Pleudihen de 1847 à 1880, disait l'avoir parfaitement connue.

L'ex-père Gouinguené mourut au bourg de Pleudihen, âgé de 41 ans, le 29 frimaire au VI (19 décembre 1797). Nous ignorons s'il songea à remettre sa conscience en ordre avant de trépasser. Sa veuve, peu désireuse sans doute de continuer à porter son nom, se remaria cette même année.

Nous ferons la biographie de BENOIT THIVENT, le second vicaire constitutionnel de Pleudihen, à l'article Saint-Hélen. (A. Lemasson).

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