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Prêtres réfractaires de Plestin.

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Joseph PEN ou PENNEC.

Joseph-Marie Pen (ou Pennec), naquit à Plestin-les-Grèves le 16 avril 1761, du mariage de Joseph et de Marie-Alexine Henry. N'ayant pu nous procurer de pièce officielle concernant cet ecclésiastique, nous transcrivons les renseignements que nous a aimablement transcrits, pris sur le cahier de paroisse de Plestin, M. l'abbé Le Huérou-Kérisel, curé-doyen.

« M. Pen finit ses humanités de bonne heure et devint durant qu'il étudiait la théologie, maître de conférences de philosophie. N'étant encore que sous-diacre, il professait la cinquième en 1784 et 1785. Trois ans plus tard, il enseignait alors la philosophie. Après les vacances de 1788, il prit à faire du ministère à Morlaix. L'abbé Pen se trouvait encore dans cette ville lors de la Révolution. Ayant refusé le serment, il se retira à Plouézoc'h (Finistère), chez Madame Cécile Bernard de Basseville, au château de Kerfanefas ».

Le 24 floréal an III (13 mai 1795), il fit sa déclaration de vouloir vivre paisible, conformément à l'arrêté des représentants Guezno et Guermeur, du 6 germinal de cette même année.

C'est au château de Kerfanefas que M. Pen fut découvert par les patriotes de Morlaix, au moyen d'un limier, dressé à la chasse à l'homme. Condamné à la déportation par le département du Finistère, Manseau indique que cet ecclésiastique arriva à l'île de Ré le 17 novembre 1799. Il mourut à l'hôpital de la Citadelle de l'île de Ré le 29 janvier 1800. Il avait alors environ 38 ans.

ACTE DE BAPTÊME DE L'ABBÉ JOSEPH PEN.
Extrait du registre des baptêmes de Plestin-les-Gréves pour l'année 1761.
« Joseph-Marie Pen, fils naturel et légitime de Joseph Pen et de Marie-Alexine Henry, ses père et mère, du bourg de Plestin, né le seixième jour du mois d'Avril, l'an mil sept cent soixante et un, a été baptisé par moi soussigné, prêtre. Les parrain et marraine ont été : Joseph Pen et Yvonne Le Caër, qui signent ». Signé Jean-François Henry, prêtre.

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M. Augustin LE CLEC'H.

Né à Plestin-les-Grèves, vicaire de la dite paroisse de 1780 à 1791, arrêté à Morlaix le 20 juin 1794, guillotiné à Brest le 1er juillet 1794 [Note : Les documents qui forment le dossier de l'abbé Le Clec'h sont entièrement extraits des Archives Nationales, W. 543. Nous avons aussi reproduit des notes concernant M. Le Clec'h que nous avons prises dans le Diocèse de Saint-Brieuc pendant la Période révolutionnaire. Nous avons de même utilisé une étude de feu M. Le Bihan parue en 1913 dans les Mémoires de la Société d'Emulation des Côtes-du-Nord. — Guillon, dans ses Martyrs de la Foi, tome II, p. 440, et tome III, p. 489, aux articles Clec'h et Leblanc, donne les détails essentiels de l'arrestation, du jugement et de la mort de ces deux personnages. — Tresvaux du Fraval (op. cité), tome II, p. 5, consacre à son tour une dizaine de lignes à leur mémoire].

Augustin Le Clec'h, nous a écrit M. Le Huérou-Kerisel, curé-doyen de Plestin, naquit dans cette paroisse vers le 15 février 1739, du légitime mariage de Guillaume et de Marie Marec. Il fut baptisé le surlendemain et fut tenu sur les saints fonts par noble homme Augustin Billy, négociant à Morlaix, et par honorable demoiselle Marie Barret. Lorsque la Révolution éclata, Augustin Le Clec'h remplissait les fonctions de vicaire à Plestin depuis 1780. C'était un prêtre très instruit, docteur en droit canon, en même temps que très aimé et très vénéré par ses vertus dans tout le pays.

Mis en demeure, en février 1791, de prêter serment à la Constitution civile du clergé, il s'y refusa avec les autres vicaires, ses confrères. « Il désirait, dit-il, remettre à un autre temps un serment qui demandait la maturité et des réflexions ».

Pressé de nouveau le 4 octobre de cette même année, de prêter serment, l'abbé Le Clec'h et les autres vicaires répondirent catégoriquement :

« Nous sommes citoyens, et, en cette qualité, nous sommes corps et biens, pour contribuer de tout notre pouvoir au bien de la patrie. Mais nous désirons vivre et mourir dans notre opinion religieuse et le premier des droits de l'homme est de n'y être point inquiété, quand on se comporte en citoyen. Nous sommes attachés à la foi de nos pères, que nous croyons être la foi de Jésus-Christ et celle de la Sainte Eglise apostolique et romaine. C'est dans cette foi que nous avons été baptisés, et c'est d'elle que nous avons notre opinion religieuse que notre conscience nous oblige de suivre. C'est cette conscience qui nous commande de finir avec M. le curé la communication in divinis que nous regrettons » [Note : Extrait du Registre des Délibérations municipales de Plestin du 4 octobre 1791. Cité par le Diocèse de Saint-Brieuc pendant la Période révolutionnaire, tome II, p. 175].

Le curé avec qui les vicaires de Plestin venaient de rompre, s'appelait Guillaume Rouat ; il était à la tête de la paroisse de Plestin depuis 1780. Voici comment le livre de la paroisse de Plestin résume le rôle odieux joué par cet individu, traitre à ses engagements, durant les mauvais jours de la Révolution. « Il fut très complaisant pour les hommes au pouvoir, prêta tous les serments qu'on lui demanda, livra l'argenterie, les vases sacrés et les ornements de son église, et encouragea par son exemple ses paroissiens à la spoliation. Il se porta témoin contre l'abbé Clec'h, son ancien vicaire, devant le Tribunal révolutionnaire de Brest. Il mourut après le Concordat, à Plouaret, dans l'état d'aliénation mentale ».

Rouat, pour se venger de ses vicaires, leur refusa d'abord de dire la messe, tant dans l'église de Plestin que dans les chapelles paroissiales, sous prétexte « qu'ils troublaient ainsi les consciences et lui faisaient perdre la confiance de ses ouailles ». Il les poursuivit même de ses dénonciations et les força à quitter Plestin et à se cacher pour se soustraire à la persécution.

Le 2 décembre 1793, on apposa les scellés sur les maisons des ci-devant vicaires Thomas, Le Clec'h et Adam (Diocèse de Saint-Brieuc, etc , op. cité. II, p. 178). Dès lors, l'abbé Le Clec'h fut réduit à errer un peu partout. Il vint chercher asile chez son neveu M. Huon, notaire royal à Lannion. Ce refuge était des plus précaires, écrit M. Le Bihan. Déjà M. Huon lui-même avait été incarcéré pour avoir recueilli des prêtres et favorisé les aristocrates. Aussi fut-il bientôt dénoncé de nouveau, si bien que pour échapper au péril, il dut sans tarder chercher une autre retraite pour le prêtre proscrit, en attendant qu'il fût loisible à l'abbé Le Clec'h de passer aux îles anglaises.

Cette occasion se présenta bientôt. M. Huon put louer un bateau qui devait partir de Trébeurden et conduire son oncle [Note : L'abbé Le Clec'h avait trois nièces. L'une était supérieure de la Communauté des Carmélites de Morlaix, l'autre des Dames de Lanmeur. En 1780, il avait marié la troisième, qui était restée orpheline fort jeune et dont il était le tuteur, à M. Huon, grand-père de M. Huon de Penanster, sénateur des Côtes-du-Nord. M. Le Clec'h était aussi l'arrière-grand-oncle de M. Louis 0llivier, de Guingamp, père de M. L. 0llivier, ancien député des Côtes-du-Nord. (Note reproduite d'après M. Le Bihan)] à un sloop à la veille de partir pour l'Angleterre et qui se trouvait mouillé en rade de Morlaix.

L'appareillage eut lieu dans l'après-midi du 1er messidor an II (19 juin 1794). Mais assailli par le gros temps à la hauteur des Triagos, par le travers de la baie de Saint-Michel-en-Grève, le frêle esquif fut forcé de gagner la côte et débarqua son passager non loin de Plougasnou. Ne connaissant personne en ce lieu auquel il pût demander asile et, par suite, sa situation pouvant devenir extrêmement périlleuse, l'abbé Le Clec'h, chargé d'un pauvre paquet contenant ses effets et quelques menus objets, prit aussitôt le chemin de Morlaix, distant de 15 kilomètres. Il arriva dans cette ville vers 10 heures du soir et s'en alla frapper à la porte de la maison portant le numéro 977 de la rue des Vignes, où demeuraient trois femmes qu'il connaissait. Ces personnes originaires de l'Acadie ou Nouvelle-Ecosse, étaient la veuve Sylvain Le Blanc, née Anne Le Prince, âgée de 80 ans, sa fille Anastasie, de moitié plus jeune qu'elle, et sa nièce, Marthe Levron, âgée de 26 ans seulement. Anne Le Prince avait encore une autre fille qui n'habitait pas avec elle et qui avait été autrefois Carmelite dans le couvent dont la nièce de M. Le Clec'h était supérieure ; aussi n'hésita-t-elle pas à recevoir le pauvre abbé, malgré tout le péril auquel elle et les siens s'exposaient en donnant asile à un prêtre réfractaire. Du reste ce danger était plus proche qu'on ne pouvait le prévoir et M. Le Clec'h ne devait pas profiter longtemps de l'hospitalité qu'on lui accordait.

Par une fatalité extraordinaire, deux commissaires de la municipalité de Morlaix, employés à relever le nom des personnes indigentes de la ville, pénétrèrent dès le lendemain soir dans la maison habitée par la veuve Le Blanc et d'autres ménages ouvriers. Sa fille n'eut pas plutôt aperçu les deux personnages officiels que, pressentant un malheur et perdant la tête, elle gravit quatre à quatre l'escalier conduisant à la mansarde où se trouvait logé leur hôte, afin de prévenir celui-ci du danger qu'elle croyait le menacer. Les deux commissaires, intrigués par une fuite si précipitée à leur aspect, n'eurent rien de plus pressé que de s'élancer sur les pas d'Anastasie Le Blanc et arrivèrent ainsi au réduit dans lequel l'abbé Le Clec'h était caché.

Lui faire subir un interrogatoire sommaire, puis, devant ses réponses, mettre le prêtre proscrit en état d'arrestation, fut l'affaire de quelques instants, à cette époque où tout le monde était plus ou moins suspect. Si bien que lorsqu'ils se retirèrent, les deux commissaires emmenaient avec eux deux prisonniers : l'abbé Augustin Le Clec'h et la fille d'Anne Le Prince, Anastasie Le Blanc. Du reste, nous possédons le procès-verbal où les deux agents du pouvoir ont consigné le récit de leur exploit. Nous le reproduisons ci-contre.

PROCÈS-VERBAL DE L'ARRESTATION D'AUGUSTIN LE CLEC'H le 20 juin 1794 (Archives Nationales W. 543).

« Le deux messidor, deuxième année de la République, une et indivisible, Nous, Germain Pitel, officier municipal de la commune de Morlaix, district dudit lieu, département du Finistère, et Nicolas-Antoine Gousselin, Commissaires nommés, pour le relevé à faire des citoyens indigents de la section de la Maison Commune ; ce à quoi nous nous sommes occupés de jour. Et en faisant notre tournée dans la rue des Vignes, avons entré sur les six heures du matin [Note : Il faut lire soir, et non matin. Du reste les deux commissaires ont pris soin de rectifier l'heure à la fin de leur procès-verbal] dans la maison numéro 977, pour prendre les noms des personnes indigentes, s'il s'en était trouvé ; avons entendu certain bruit, ce qui nous a décidé à monter beaucoup plus vite et suivre une femme qui montait avec précipitation. Arrivés dans la mansarde, y avons trouvé un particulier, auquel le citoyen Pitel a demandé d'où il était et s'il avait un passeport. Nous a répondu que non et la personne que nous avons suivie et qui étoit entrée dans la chambre en mansarde, en même tems que nous, lui avons demandé si elle connaissoit cet homme. Nous a repondu que non et qu'il étoit chez elle que depuis hier soir. Aux quelles paroles, le citoyen Pitel lui a dit qu'elle avoit grand tort de donner azille à des personnes qu'elle ne connaissait pas. En conséquence les avons sommé tous les deux de nous suivre jusqu'à la maison commune, où étant rendus, l'agent national près la Commune les a fait conduire au Directoire du District. Tel est notre rapport, que nous affirmons sincère et véritable. (Sur les six heures du soir, en interligne, approuvé) ». Signé : PITEL, Officier municipal. GOUSSELIN, Commissaire.

Quand les commissaires de la municipalité de Morlaix amenèrent leurs prises au Directoire du District, celui-ci se trouva embarrassé. Les administrateurs, pour justifier cette arrestation, eussent désiré des renseignements plus explicites. En somme, on ne possédait contre Augustin Le Clec'h que son propre témoignage et celui-ci était insuffisant au point de vue de la loi pour le faire condamner. Pour obtenir de nouvelles preuves de culpabilité, on décida donc d'envoyer perquisitionner au domicile de la veuve Leblanc. A cette fin, on délégua le juge de paix Jezéquel, accompagné de son greffier et de deux. administrateurs du district. Voici le procès-verbal qu'ils rapportèrent de leurs investigations, lesquelles prirent fin par l'arrestation de la veuve Leblanc et de Marthe Levron, sa nièce.


PROCÈS-VERBAL DE LA PERQUISITION OPÉRÉE CHEZ LA VEUVE LE BLANC le 20 juin 1794, à la suite de l'arrestation d'Augustin Le Clec'h.

Extrait des minutes du greffe de la Justice de Paix de la commune de Morlaix, district dudit nom, département du Finistère.

« L'an deux de la République Française, une et indivisible, ce jour, deux messidor, Nous, Maurice Jezequel, juge de paix de la commune de Morlaix, ayant pour adjoint le citoyen Nicolas Geoffroy, notre greffier, demeurant séparément en cette commune, Grande Rue, section des Halles ; sur le réquisitoire de l'administration du Directoire du District de Morlaix, assisté des citoyens Werchin et Guillaume, fils aîné, administrateurs dudit Directoire, nous nous sommes transportés jusques et en la rue des Vignes où demeuroit Anne Le Prince, veuve de Silvain Le Blanc, avec sa fille et sa nièce ; où étant rendus, nous avons interpellé ladite veuve Le Blanc de nous déclarer s'il n'est pas vrai qu'on avoit saisi et arrêté chez elle un prêtre réfractaire qui avoit été constitué prisonnier avec sa fille ?

A répondu qu'à la vérité cet homme, absolument inconnu d'elle, se présenta hier au soir, environ les neuf à dix heures du soir, se qualifiant de pauvre malheureux prêtre obligé de fuir et qu'elle le croit du côté de Lannion.

En conséquence, les mêmes citoyens Werchin et Guillaume, fils aîné, ont requis que perquisition seroit par nous faite des effets de ce prétendu ecclésiastique.

Etant montés dans une chambre au premier étage au-dessus, aussi sur le devant, dans laquelle loge la citoyenne Samson, à laquelle ayant fait injonction de faire également ouverture des armoires et coffre, nous n'y avons encore rien aperçu, mais ayant passé dans l'appartement vis-à-vis, sur le derrière, dans une cour au delà, nous avons trouvé dans ladite cour une boette à calice sans couverture, dans un endroit absolument à découvert et susceptible de se trouver mouillé si elle n'avait été mise depuis l'arrestation de la fille Le Blanc et du prétendu prêtre.

Poursuivant nos perquisitions dans le petit jardin au-dessus et sous un tas de fagots, avons trouvé un grand sac plein de hardes que nous avons jugé appartenir à ce prêtre. Poursuivant nos recherches dans le même endroit, avons trouvé une pierre sacrée et 4 cierges, mais vainement avons-nous cherché le calice. Passant ensuite de cet appartement dans une mansarde donnant sur le devant, nous avons trouvé une grosse montre [Note : Cette montre, écrit M. Le Bihan, fut restituée à la famille du Confesseur de la Foi lors de la Restauration. Elle appartient par la suite à M. Huon de Penanster, arrière petit neveu de M. Augustin Le Clec'h] en argent à deux boettiers que la nièce de la veuve Le Blanc nous a déclaré pouvoir appartenir à ce prêtre, ainsi qu'une veste de berlinge, quelle a dit également paroitre être à lui. D'après quoy, ayant examiné le contenu en la poche, nous n'y avons trouvé que des chemises d'homme et un beverlet brun.

Conférant ensuite avec les citoyens administrateurs, nous avons arreté que ladite veuve Le Blanc et sa nièce seroient constituées prisonnières, pour sur le tout être referé à l'accusateur public près le Tribunal révolutionnaire, séant à Brest, pour avoir sa décision sur cette arrestation.

De quoi, nous avons declaré à ladite veuve Le Blanc et à sa nièce que non seulement nous allions apposer le scellé sur les appartements qu'elles occupent, mais encore sur le grenier où elles ont réfugiées une quantité de meubles et effets ci-devant appartenons aux religieuses Carmélites de cette commune, pour la conservation de leurs dits effets. Les interpellant de nous declarer l'une et l'autre si elles ont eu soin de réferer à l'administration du District ou au bureau municipal qu'elles avaient en leur possession et disposition les effets desdites ex-religieuses ?

Répondent unanimement que ces religieuses ayant été prévenues par la Municipalité même de leur arrestation, elles avoient les effets qu'elles laissoient chez elles et qu'elles ne se croyoient point obligées à déclaration.

En conséquence, avons apposé une bande de scellés, sçavoir sur la porte de la première chambre, sur celle de la mansarde au 3ème étage, aussi sur le devant sur la porte du grenier, vis à vis sur le derrière et encore sur une grande armoire dans la chambre du second étage sur le derrière. De la garde desquels scellés, nous avons chargé Joseph Louvrier, demeurant dans la même maison que ladite veuve Le Blanc.

De tout quoy, nous avons rapporté notre présent procès verbal, sous nos seings, ceux des citoyens administrateurs et celui dudit Joseph Louvrier, lesdits jour mois et an que devant. Signé sur la minute : Verchin, Guillaume fils aîné, Joseph Louvrier, Jezequel, juge de paix et Geoffroy ». Pour copie conforme : GEOFFROY, JEZEQUEL, juge de paix.

A cette époque néfaste, écrit M. Le Bihan, on ne perdait pas de temps pour commettre un assassinat juridique. A peine le procès-verbal de perquisition était-il déposé au district par le juge de paix Jezequel, que le Directoire, malgré l'heure avancée de la soirée, procédait sur le champ à l'interrogatoire de l'abbé Le Clec'h. La séance ne prit fin qu'à une heure du matin. Nous publions in-extenso le procès-verbal qui nous en est demeuré. On remarquera quelle scrupuleuse franchise l'abbé Le Clec'h apportait dans ses réponses et combien il craignait de trahir la vérité.

INTERROGATOIRE DE L'ABBÉ CLEC'H, par les membres du Directoire du District de Morlaix, le 20 juin 1794.

« L'an deux de la République Française, une et indivisible, le 2 Messidor au soir, un homme dit être prêtre réfractaire et une fille, chez laquelle on a dit qu'il avoit été trouvé, ont été amenés au Directoire par une garde et ayant été dit que la découverte de ce prêtre avoit été faite par le citoyen Pitel, officier municipal ; celui-ci prié de passer au Directoire, y est venu avec le citoyen Gousselin, qui l'accompagnait lors de l'arrestation du prévenu. Le citoyen Pitel a été invité à rapporter son procès-verbal et à le faire passer sur le champ à l'administration, et provisoirement le Directoire a fait constituer les deux prévenus en la maison de détention et chargé les citoyens Verchin et Guillaume, deux de ses membres, d'accompagner à l'instant le juge de paix, requis à cet effet, pour une vérification dans la maison où avoit été trouvé ledit prêtre, laquelle maison, ledit Pitel a dit être celle de la veuve Leblanc, rue des Vignes.

Sur les dix heures, le procès-verbal de cette vérification rapporté à l'administration, et, le citoyen Pitel ayant précédemment rapporté le sien, le Directoire a fait comparoitre devant lui le prêtre en question ; lequel interrogé de ses prénoms, nom, profession, lieu de naissance et de domicile ; a dit se nommer Augustin Clech, être originaire et domicilié cy-devant de Plestin, district de Lannion, département des Côtes-du-Nord (aujourd'hui Côtes-d'Armor), prêtre, simple desservant en l'église dudit Plestin.

A lui demandé depuis quand il étoit dans la maison où il a été trouvé ce jour à Morlaix ?
A répondu qu'il y est depuis deux jours.
Interrogé si la maison dont est cas, lui avoit été indiquée comme retraite où s'il la connaissoit comme telle ?
A dit qu'il avoit une sœur cg-devant Carmélite, qu'il savoit qu'une fille de cette maison l'était aussi et, qu'en conséquence, il avoit cru qu'il y serait bien reçu.
A lui demandé d'on il étoit venu dans cette maison ?
A répondu qu'il arrivait des campagnes où il étoit errant.
Questionné sur le point de savoir s'il avoit fait le serment ?
A dit que dans les premières assemblées primaires, il avoit fait le serment civique, mais qu'il n'a pas prêté le serment prescrit aux Ecclésiastiques.
Interrogé s'il n'a pas été sommé de faire ce dernier serment et s'il ne l'a pas refusé ?
A dit que la municipalité de Plestin le lui avoit demandé et qu'il avoit refusé de le faire, croyant qu'il n'y estait pas tenu, attendu qu'il n'était pas fonctionnaire public.
A lui représenté la montre et hardes saisies, comme lui appartenant et interpellé de déclarer s'il les reconnoit pour être à lui, notamment la veste de berlinge ?
A répondu que rien ne lui appartient que la montre.
A lui représenté la boête à calice et les cierges et à lui demandé s'ils servoient à son usage dans la maison dont est cas ?
A répondu ne pas les connoître, non plus qu'une pierre jadis dite sacrée, à lui représentée.
Interrogé s'il avoit fait quelque fonction de son ministère dans la maison ?
A répondu que non.
Lecture a lui donnée et interpellé de signer, a déclaré le faire.
Interrogé avant les signatures, si à son arrivée une jeune personne, nommée Marthe le Blanc, était à la maison ? (Il faut lire Marthe Levron).
Ledit Clec'h a repondu que non, qu'il ne connoit pas cette jeune personne, à moins que ce ne soit une qui est arrivée cet apres midy de la campagne.
A lui demandé comment il s'étoit annoncé dans cette maison et comment il y avoit été reçu ?
A dit qu'il s'étoit annoncé comme frère de la Clec'h, Carmélite, qu'il avoit témoigné le désir de la voir : qu'on lui avoit répondu que cela ne se pouvoit pas pour le présent et qu'il étoit resté là, espérant la voir dès les premiers jours, par ce qu'elle est à l'hôpital de Morlaix.
Interrogé qu'elles étoient les personnes qui se trouvoient à la maison à son arrivée ?
A répondu qu'il n'y avoit que la mère et la fille. Ensuite a dit, que rectifiant sa réponse à l'interrogatoire relatif à Marthe Leblanc, il déclare que la jeune personne dont on entend lui parler sous ce nom, étoit présente lors de son arrivée chez la veuve Leblanc, qu'il ne la vit qu'un moment et que le lendemain, elle dut s'absenter et qu'elle n'est revenue qu'aujourd'hui, environ une demie heure avant qu'il ait été arrêté »
. Signé : Augustin CLEC'H, prêtre.

« Au-dessous desquels interrogatoires, auxquels il a été procédé pour suppléer au deffaut de preuves dans les procès-verbaux du citoyen Pitel et du juge de paix que l'homme arrivé fut un prêtre réfractaire ; le crime de Clec'h et de son recelé étant actuellement caractérisé, le Directoire renvoit à statuer en séance demain et l'agent national appelle sur les mesures ultérieures à prendre à l'égard de tous les impliqués dans cette affaire, et provisoirement a fait reconstituer ledit Clec'h dans la maison de détention et l'y a fait écrouer ainsi que la mère, la fille et la nièce Leblanc. Fait et clos environ une heure du matin, ce 3 messidor, sous les seings des administrateurs et du secrétaire ». Signé : GUIOMAR ; VERCHIN ; GUILLAUME, fils ainé ; André ROZEC ; BRIANT, secrétaire.

Après les déclarations fournies par l'abbé Le Clec'h, il n'y avait plus d'hésitation possible pour les administrateurs du District de Morlaix. En sa qualité de prêtre réfractaire demeuré en France en violation des décrets, Augustin Le Clec'h était justiciable du tribunal révolutionnaire de Brest. C'est ce qui fut décidé le lendemain par l'arrêté ci-dessous.

ARRÊTÉ DU DIRECTOIRE DE MORLAIX RENVOYANT L'ABBÉ LE CLEC'H ET LES FEMMES LE BLANC ET LEVRON devant le Tribunal révolutionnaire de Brest, le 21 juin 1794.

District de Morlaix. Extrait des Registres des délibérations.
« Du 3 Messidor, l'an 2ème de la République française, une et indivisible. Séance du Directoire tenue par le citoyen Guiomar, vice-président, assisté des citoyens Verchin, Rozec, Guillaume, fils aîné, administrateurs ; présent : Jean-Marie Saillour, agent national. Vu le procès-verbal de l'arrestation faite hier par les citoyens Pitel, officier municipal et Gousselin, d'Augustin Le Clec'h, prêtre réfractaire, trouvé sui la commune de Morlaix, chez la veuve Le Blanc, et de la fille de ladite veuve ; Procès-verbal et perquisition aussi d'hier chez la même veuve Le Blanc et d'arrestation de la dite veuve et de sa nièce, rapportés par le juge de paix de Morlaix, en présence de Werchin et Guillaume aisé, administrateurs ;

Et les interrogatoires subis aussi hier par devant le Directoire par Augustin Clech ; L'Agent national, ouï le Directoire, considérant que le caracthère de prêtre réfractaire sur lequel les procès-verbal de l'officier municipal et du juge du paix, n'offroient pas des preuves assez précises, est désormais fixé par les interrogatoires qu'a subi ledit Clech ; Que d'après cela, le crime, le recelé de cet homme chez la veuve le Blanc est entièrement caractérisé. Considérant que la nièce de la veuve le Blanc, quoiqu'ayant un commerce hors la maison de sa tante et simplement pensionnaire et en chambre chez cette tante, n'est pas exempte d'être suspectée de participation plus ou moins griève au recelé. Pour amener le prompt jugement des prévenus, et lequel, au terme des dispositions du décret du 19 floréal, appartient concurremment au tribunal Révolutionnaire et au tribunal criminel du département, Arrête que lesdits prévenus seront demain, suite et diligence de l'Agent national, remis avec le procès-verbal des citoyens Pitel et Gousselin et celui des interrogatoires de Clec'h, par original, et la copie du procès-verbal du Juge de paix par lui déposée à l'Administration, aux mains de la Gendarmerie Nationale, pour les prévenus être conduits à Brest à la disposition de l'accusatenr public près le Tribunal Révolutionnaire, et les pièces déposées au bureau du même accusateur public, rapportant les gendarmes à l'administration descharge du tout. Faict et arreté lesdits jour et an ». Signé : GUIOMAR, vice-président ; CEVENNES, suppléant et secrétaire.

Aussitôt cette décision prise, l'agent national du District de Morlaix s'empressa de faire le nécessaire pour le transfert à Brest des quatre prisonniers et rédigea à cette fin la réquisition suivante :

RÉQUISITION POUR FAIRE CONDUIRE LES QUATRE INCULPÉS AUX PRISONS DE BREST, le 21 juin 1794. LIBERTÉ, EGALITÉ, FRATERNITÉ.
Mort aux Tyrans et aux traîtres.

« L'Agent National près le district de Morlaix, requiert le Commandant de la gendarmerie Nationale à la résidence de Morlaix, de faire conduire de brigade en brigade, jusqu'à Brest, les dénommés cy-après : Augustin Glec'h, demeurant ci-devant à Plestin, district de Lannion, département des Côtes-du-Nord, prêtre réfractaire. La veuve Le Blanc, Anasthasie Leblanc, sa fille, et Marthe Levron, sa nièce, toutes les trois de la commune de Morlaix ; lesquels seront mis à la disposition de l'accusateur public près le Tribunal révolutionnaire, auquel seront remises également les pièces à la charge desdits prévenus dénommés ci-dessus. A Morlaix, le 3 messidor de l'an deuxième de la République, Française une et impérissable ». Signé : SAILLOUR, Agent National.

Le voyage de l'abbé Le Clec'h et de ses compagnes s'accomplit prestement. Ils arrivèrent à Brest le 23 juin et furent immédiatement incarcérés à la prison du Château, ainsi qu'en fait foi l'acte d'écrou ci-joint. « Les ci-devant nommés : Augustin Clech, la veuve le Blanc, Anasthasie le Blanc, sa fille et Marthe Levron, sa nièce, détenus du 5 Messidor (23 juin 1794), an 2e de l'Ere républicaine ». Signé : C. KAUSS.

Aussitôt les inculpés rendus à Brest, l'accusateur public se mit en devoir de convoquer les témoins nécessaires pour constater l'identité des prévenus, en même temps que pour déposer sur les circonstances de leur arrestation. Si le dossier de l'abbé Le Clec'h ne contient plus les dépositions qui furent produites en la circonstance, il renferme néanmoins la liste des témoins qui furent mandés tant de Morlaix, que de Plestin. Fidèle à notre méthode, nous reproduisons intégralement ces pièces à la suite les unes des autres.

SIGNIFICATION DES ASSIGNATIONS DES TÉMOINS AUX DÉBATS, le 26 juin 1794.
Affaire de Clec'h, prêtre réfractaire, de la veuve Le Blanc, sa fille et sa nièce. Le 8 Messidor, an 2 de la République.
I.
« En vertu de la cédule délivrée par le citoyen Président du Tribunal, le cinq du présent, j'ai, Maréchal des logis de la gendarmerie nationale, à la résidence de Morlaix, donné assignation au citoyen Pitel, officier municipal, demeurant à Morlaix. Au citoyen Verchin, administrateur du district, demeurant à Morlaix. Au citoyen Nicolas Goussalde [Note : Gousselin. Beaucoup de ces noms sont défigurés], demeurant à Morlaix. Au citoyen Guillaume, fils aîné, demeurant à Morlaix. Au citoyen Louviers, demeurant à Morlaix. Au citoyen Louis Gaivarch, demeurant à Morlaix. A la citoyenne Marie-Cécile Sainson, demeurant à Morlaix, A comparoir, le 13 Messidor, 8 heures du matin, etc. Le 8 Messidor, 2e année Républiquaine ». Signé : GUÉRIN, maréchal des logis.

II.
« J'ai, gendarme national, à la résidence de Lannion, donné assignation : Au citoyen Jacques Adam, demeurant à Plestin. Au citoyen Pierre Chambon, demeurant à Plestin. Au citoyen Jean-Louis Teurnie, demeurant à Plestin. Au citoyen Joseph Raoul [Note : Il doit s'agir de Guillaume Rouat], demeurant à Plestin. A comparaître le 13 Messidor, huit heures du matin ».

RÉCÉPISSÉ DES ASSIGNATIONS DES TÉMOINS PAR L'AGENT NATIONAL DE MORLAIX. Il avise l'accusateur public de Brest de l'envoi des pièces à conviction, le 27 juin 1794. ÉGALITÉ, LIBERTÉ, FRATERNITÉ.
Force au Gouvernement Révolutionnaire.

« Morlaix, le 9 Messidor, an 2ème de la République Française, une et indivisible. L'Agent National près le district de Morlaix au Citoyen accusateur public près le Tribunal Révolutionnaire, séant à Brest. CITOYEN, Aussitôt la réception de la lettre, j'ai fait remettre aux témoins ci-dénommés les sept copies d'assignation qui leur étaient destinées. Voici l'original, revêtu de toutes les formalités.

Les 6ème et 7ème témoins sont les nommés Louis Gaivarch et Marie-Cécile Samson, les deux plus proches voisins de la veuve le Blanc, puisqu'ils demeurent dans la même maison. Je soupçonne que ces deux individus doivent avoir connaissance du séjour du prêtre chez la veuve le Blanc. Je prends le parti de te faire passer de brigade en brigade les pièces de conviction, dont il est fait mention dans le procès-verbal rapporté par les administrateurs Verchin et Guillaume aîné. Je désire d'avoir mis dans cette affaire toute la célérité qu'exigent les mesures révolutionnaires. Salut et fraternité ». Signé : SAILLOUR.

En même temps que l'accusateur public s'occupait de réunir les témoins, il rédigeait son acte d'accusation contre les prévenus. Il s'y borne à énoncer simplement les faits à la charge des inculpés. Mais la seule justification de ces faits suffisait à cette époque, nous le savons, à entraîner la mort.

Cet acte d'accusation fut remis aux membres du tribunal révolutionnaire le jour même où il fut dressé. Ceux-ci sans désemparer, dit M. Le Bihan, rendirent un arrêt qui renvoyait les accusés devant ce même tribunal pour le mardi suivant, à 8 heures du matin.

ACTE D'ACCUSATION DE DONZÉ-VERTEUIL, CONTRE L'ABBÉ LE CLEC'H ET LES FEMMES LE BLANC ET LEVRON, le 27 juin 1794.
« Acte d'accusation contre Augustin Clec'h, prêtre exerçant ci-devant en la commune de Plestin, district de Lannion, Anne le Prince, veuve de Sylvain le Blanc, Anasthasie le Blanc, sa fille et Marthe Levron, sa nièce, toutes trois domiciliées à Morlaix. Joseph-François-Ignace Donzé-Verteuil, accusateur public près le Tribunal Révolutionnaire séant à Brest, établi à l'instar de celui de Paris. Expose que le 2 Messidor, présent mois, un officier municipal et un autre citoyen de Morlaix ont trouvé en la demeure de la veuve le Blanc, dans la même commune, Augustin Clec'h, qui y étoit réfugié. Le même jour, le juge de paix, son greffier et deux administrateurs du district de Morlaix ayant fait perquisition au domicile de la veuve le Blanc, commun à sa fille et à sa nièce, ils y ont trouvé des hardes et linge à usage d'homme, une grosse montre en argent, déclarée par Marthe Levron, pouvoir appartenir à Clec'h, une boette A calice, 4 cierges et une pierre d'ardoise, ditte sacrée.

Interrogé au Directoire du District de Morlaix, le particulier trouvé chez la veuve le Blanc, a dit se nommer Augustin Clec'h, être prêtre, simple desservant en l'église de Plestin, n'avoir pas prêté le serment prescrit aux ecclésiastiques, bien que la municipalité de Plestin lent invité à le faire ; qu'il étoit depuis deux jours dans la maison de la veuve le Blanc, et que, lorsqu'il y étoit arrivé, il y avait la veuve le Blanc, sa fille et sa nièce.

Et dans le procès-verbal du juge de paix, la veuve le Blanc interpellée de déclarer s'il n'étoit pas vrai qu'on eut saisi et arrêté chez elle un prêtre réfractaire qui venait d'être constitué prisonnier avec sa fille, a répondu qu'à la vérité cet homme à elle absolument inconnu, s'était présenté la veille chez elle, environ les 9 à 10 heures du soir, se qualifiant pauvre malheureux prêtre obligé de fuir, et qu'elle le croyait du côté de Lannion.

Ainsi d'un côté, arrestation au domicile de la veuve le Blanc, de sa fille et de sa mère, d'un prêtre réfractaire sujet à déportation, non déporté, trouvé sur le territoire de la République et aveu de son refuge dans cette maison.

D'un autre côté, récelé de ce prêtre réfractaire dans le domicile commun à la veuve le Blanc, à sa fille et à sa nièce, prouvé par la confession de la veuve le Blanc, prouvé matériellement par l'arrestation faite chez elle de la personne d'Augustin Clec'h, et récelé commis sciemment, puisque la veuve le Blanc déclare qu'en arrivant chez elle, Clec'h, qu'elle ne connaissait point, s'etoit annoncé pour un malheureux prêtre obligé de fuir, récelé enfin d'objets servants à l'exercice du Culte Romain et qui feraient présumer celui d'un prêtre chez la femme le Blanc, si Augustin Clec'h n'y eut pas été arrêté.

D'après cet exposé, l'Accusateur public a dressé la présente accusation tant contre Augustin Clec'h, prêtre non assermenté, sujet à déportation, aux termes de la loi du 30 Vendemiaire, non déporté et trouvé sur le territoire de la République, que contre la veuve le Blanc, Anasthasie le Blanc, sa fille et Marthe Levron, sa nièce, pour avoir recelé en leur domicile à Morlaix, dans les premiers jours de Messidor, ledit Augustin Clec'h, ses effets et quelques uns à l'usage du culte Romain, connaissant ledit Clec'h pour un malheureux prêtre obligé de fuir, cas prévus par la loi du 30 Vendemiaire et par celle du 22 Germinal dernier. Requiert qu'il lui soit donné acte de la présente accusation qu'il porte contre les dénommés, détenus dans la maison d'arrêt, dite le Château de Brest, etc. Fait au cabinet de l'accusateur public, le neuf Messidor, l'an deuxième de la République Française, une et indivisible ». Signé : DONZÉ-VERTEUIL.

« Au nom de la République. Le tribunal faisant droit sur le réquisitoire de l'accusateur public, lui donne acte de l'accusation portée contre les dénommés. Fait et jugé en la chambre du Conseil du Tribunal Révolutionnaire séant à Brest, le neuf Messidor, l'an deux de la République Française une et indivisible, par les citoyens Ragmey, président, Pasquier, Palis et Lebars, juges qui ont signé ». Signé : RAGMEY, président ; PASQUIER ; LE BARS, fils ; PALIS.

Ce fut le 1er juillet 1794 que M. Le Clec'h et ses compagnes de captivité comparurent devant le tribunal révolutionnaire [Note : « Ici se place, dit M. Le Bihan, un détail curieux qui ressort de ce fait, qu'au lieu de faire sortir simplement les détenus pour les conduire au tribunal, la gendarmerie signa leur levée d'écrou. Aux yeux de la gendarmerie et du gardien-chef de la prison, étant donnée l'accusation, la condamnation à mort ne faisait aucun doute. Le registre d'ailleurs portait cette mention : « sortis pour aller à la guillotine ». M. Le Bihan ajoute : « Je tiens ces renseignements du docteur Corre aujourd'hui décédé, qui a pu voir le registre d'écrou »]. Les juges tenaient leurs séances dans la chapelle de l'ancien séminaire des aumôniers de la marine. L'affaire fut bientôt expédiée. L'âge avancé de la veuve Le Blanc n'était pas un titre à plus d'humanité à son égard. Le jugement se termina donc par trois condamnations à mort et un acquittement, celui de Marthe Levron, que l'on jugea n'avoir vraiment pas eu sa part de responsabilité dans le recelé de l'abbé Le Clec'h. Voici, du reste, l'arrêt qui fut rendu [Note : M. Le Bihan, dans son étude déjà signalée concernant l'abbé Le Clec'h, reproduit aussi la teneur de sa condamnation. Son texte est un peu différent de celui que nous donnons, quoiqu'étant substantiellement le même. Nous ne savons où il a puisé ce document, car il n'indique pas ses sources].

JUGEMENT CONDAMNANT L'ABBÉ LE CLEC'H ET LES FEMMES LE BLANC A LA PEINE CAPITALE, le 1er juillet 1794.

« Séance du treize Messidor de l'an deux de la République Française, une et indivisible.
Entre l'accusateur public, demandeur contre Augustin Le Clec'h, âgé de cinquante-six ans, prêtre, natif de la commune de Plestin, District de Lannion, y demeurant.
Marie-Marthe Levron, âgée de vingt-cinq ans, marchande, native de Morlaix, y demeurant.
Anne le Blanc, âgée de quatre-vingt ans, tricoteuse, native d'Accadie, demeurant à Morlaix.
Anasthasie le Blanc, âgée de trente-huit ans, tricoteuse, native d'Accadie, demeurant à Morlaix.
Vu par le Tribunal Révolutionnaire l'acte d'accusation dressé par l'accusateur public contre les dénommés cy dessus.
La déclaration des témoins portant qu'il y a identité entre Augustin Clec'h et l'accusé qui leur a été présenté à l'audience pour être ledit Clec'h.
La déclaration du jury portant à l'égard d'Anne le Blanc, Anastasie le Blanc et Marie-Marthe Levron, qu'il est constant qu'à Morlaix le deux Messidor dernier, il a été commis un recelé de prêtre réfractaire, qu'Anne le Blanc, Anastasie le Blanc sont convaincus d'être auteurs et complices dudit recelé et que Marie-Marthe Levron n'est pas convaincue d'être auteur, ni complice dudit recelé.
En conséquence, le Tribunal l'acquitte des accusations portées contre elle et ordonne sa mise en liberté sur le champ.
Après avoir entendue l'accusateur public sur l'application de la loi, Au nom du peuple français. Le Tribunal ordonne que ledit Augustin Clec'h sera livré dans les 24 heures à l'exécuteur des jugements criminels pour être mis à mort, conformément aux articles dix, quatorze, quinze et cinq de la loy du 30 Vendémiaire de l'an 2 de la République, dont lecture a été faite. Condamne Anne le Blanc, Anastasie le Blanc, sa fille, à la peine de mort, conformément aux articles 2 et 3 du décret de la Convention Nationale du vingt-deux Germinal de l'an deux de la République dont lecture a été faite. Déclare les biens desdits Clec'h, Anne Le Blanc, Anastasie Le Blanc acquis et confisqués au profit de la République, conformément à l'article 2 du titre 2 de la loi du dix mars dernier, dont lecture a été faite. Ordonne qu'à la diligence de l'accusateur public, le présent jugement sera exécuté dans les vingt-quatre heures, sur la place du Triomphe du Peuple de la commune de Brest et qu'il sera imprimé et affiché dans toute l'étendue de la République et imprimé en breton dans l'étendue du département du Finistère. Fait et prononcé en l'audience publique, le treize Messidor, par Pierre-Louis Ragmey, président, Jean-Cornillé Pasquier, Joseph Pasquier, Maurice Le Bars, juges qui signent le présent avec le greffier »
. Signé : GABON, greffier.

Le jugement avait été rendu le 13 Messidor au matin. L'exécution eut lieu le même jour à midi. On passait en ce temps-là du tribunal à l'échafaud. La justice révolutionnaire était expéditive. Voici le procès-verbal d'exécution qui fut rédigé à cette occasion.

PROCÈS-VERBAL CONSTATANT L'EXÉCUTION DE L'ABBÉ LE CLEC'H ET DES FEMMES LE BLANC, le 1er juillet 1794.

« L'an deux de la République Française une et indivisible, le treize Messidor, à la requête du citoyen Accusateur public près le Tribunal révolutionnaire établi à Brest, lequel fait élection de domicile en son cabinet, sis en la ci devant église du Séminaire, à Brest, où siège le dit Tribunal, pour l'exécution du jugement rendu par le Tribunal du jourd'huy contre Augustin Clec'h, la veuve Le Blanc et sa fille, qui les condamne à la peine de mort pour les causes énoncées au dit jugement ; je me suis, moi huissier, au dit Tribunal, soussigné, transporté en la cidevant église du Séminaire, en un lieu où avait été déposé les susnommés après leur jugement, et ai remis les dits condamnés à l'exécuteur des jugements criminels et à la force armée appellée à cet effet ; lesquels les ont conduits sur la place dudit cidevant Chateau, où sur un échafaud dressé sur ladite place, lesdits susnommés ont, en ma présence, subi la peine de mort, ce jourd'hui, heure de midi. De tout quoi, j'ai fait et rédigé le présent procès-verbal pour servir et valoir ce que de raison ». Signé: LE LIEVRE, huissier. « Enregistré gratis à Brest le même jour ». Signé : LE CAM.

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