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LE RETRAIT DE LA MER AU PAYS DE PLESTIN AU Xème SIECLE

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Un siècle environ après que tous ces évènements s'étaient passés dans le pays de Plestin, un nouveau phénomène marin se produisit : celui que l'on appelle en géologie le phénomène des plages soulevées. Le sol du littoral, qui s'était affaissé au VIème siècle, du fait de la constitution volcanique du sol breton, se souleva de nouveau, faisant reculer la mer à la limite que nous lui voyons aujourd'hui.

Succédant de près au terrible souvenir du passage de la vague saxonne, cet évènement contribua à frapper et à terrifier l’âme populaire et à lui faire croire à la proximité plus ou moins immédiate du cataclysme mondial de la fin du monde dont on parlait partout et qui devait se produire pour l'an 1000.

En quelques jours la mer regressa, abandonnant toutes les vallées de le pointe du Séhar à celle de Locquirec, laissant derrière elle le terrain tel que nous le voyons.

Au pied du grand Hirglas, une plage immense de sable fin s'étendait. Le Rocher Rouge tout couvert d'algues et de goémon, dressait ses arêtes vives ; d'un bout à l'autre de la lieue de grève, courait une vieille chaussée, nettement visible par portions, avec au milieu une croix de granit, recouverte elle aussi, de goémon et de coquillages, que les eaux de basse-mer laissaient entièrement à nu et que celles de haute-mer venaient submerger chaque jour.

Dans la baie du Douron, les rochers du Lièvre et de la Roche Rouge, peu élevés, rongés et attaqués par les eaux marquaient la limite de la rivière que l'on voyait à mer basse contourner gracieusement les hautes falaises de Locquirec.

Désormais des dunes bordaient les champs du Varcq et du Rugunay. Une pointe de sable blanc, très large, marquait le tournant du Douron à partir de son confluent avec le ruisseau de Traoudour on dénomma cette pointe, Beg-an-Enez Gwen, la pointe de l'Ile Blanche.

En face d'elles le Douron formait à mer basse un mince filet d'eau, courant en méandres sur une large étendue de sable et de vase. Sables et vases étaient peu consistants et mouvants ; mais on y trouva un gué sûr qui fut dénommé Toul-ar-c'hirri, le gué des charrettes ou Toul-an-Héry.

La pointe de l'Armorique était entourée d'un chapelet de baies et de criques dont les rochers s'avançaient en mer à la Pointe de Terre et à celle de Porz-Mellec, laissant entre elles une anse entourée de rochers énormes recouverts de moules et de goémon et formée d'un sable grisâtre, débris de mollusques divers, à travers lequel suintait l'eau douce venant de la source voisine.

Puis c'était la série des criques et anses de Tossen-ar-C'hoz, de la baie des Curés et de Porzmorvan, limitées vers le Douron par les Rochers d'argent. Sur les flancs ouest de la Pointe de l'Armorique le vieille villa romaine avait totalement disparu sous le sable ; on apercevait çà et là, quelques fondements, quelques briques anciennes et on appela ce point : "la cave recouverte" ou le Hogolo.

L'œuvre destructrice de la mer apparaissait surtout violente dans le baie de Saint-Efflam : une longue étendue de dunes s'étalait jusqu'à la voie romaine, jusqu'au pied de le croix de grève. C'était un désert, une nappe d'herbes marines et d'arénaires, une surface considérable qu'il était nécessaire de fixer et de transformer pour opposer à la mer un obstacle infranchissable, au cas où elle voudra regagner son terrain abandonné.

Le retrait de la mer devait donc marquer pour le pays l'ère du renouvellement et de la reconstitution.

Que reste-t-il comme souvenirs dans l'âme populaire de ce fameux cataclysme du VIème siècle qui venait de prendre fin au Xème siècle sur le littoral de Plestin ?

Ce cataclysme qui commença pour la Bretagne, par la destruction de le ville d'Ys à la pointe du Raz en 450, sous le règne du roi Grallon, qui continua par la destruction du littoral plestinais vers 550, et par celle de la baie de Saint-Brieuc vers 650, était encore en pleine action dans la baie du Mont Saint-Michel à partir de 710 et devait durer jusqu'en 1630.

Quatre siècles avaient suffi dans le pays de Plestin pour détruire le souvenir précis de faits passés. La tradition n'en parle pas et ce souvenir serait entièrement perdu si l'étude du littoral plestinais n'avait point permis d'en constater l'existence. Il en reste cependant de vagues réminiscences, peu précises sans doute, mais qui se rettachent néanmoins à ce phénomène marin : les voici.

C'est tout d'abord la légende naïve de la princesse du Yaudet. Parmi les monstrueux rochers de la côte que la mer a, en regressant, laissés, déchiquetés et découpés, se cache, dit-on, au fond d'une anse une grotte peu profonde et peu faite pour attirer les regards. Dans cette grotte est enfermée depuis 12 à 15 siècles (ce qui correspond à l'époque du cataclysme), une princesse du pays de Lexobie, d'une merveilleuse beauté, ayant avec elle d'immenses trésors. Elle n'est point morte ; elle dort par l'effet d'un enchantement qui prendra fin le jour où un célibataire à l'âme inaccessible à la peur viendra le délivrer et l'épouser.

Mais le grotte est défendue par un énorme dragon couvert d'écailles et vomissant des flammes.

Les jeunes gens du Yaudet sont certainement braves ; mais jusqu'à présent il ne s'en est trouvé aucun pour tenter l'aventure.

Dans le baie de Saint-Efflam, on entendait autrefois les vieux s'écrier en montrant la vaste nappe de sable : " Il y avait autrefois là, à la place de cette grève, une ville immense qui a été engloutie ". Si on leur demandait de préciser, ils restaient dans le vague et vous indiquaient une zone allant du rocher des Triagoz au Grand Rocher en passant par l'entrée de la baie de Lannion.

N’est-ce donc pas ce souvenir de destruction qui s'est transformé en la légende de l'existence sous le grand rocher d'un palais merveilleux plein de richesses et d'attractions, qui s'ouvre le jour de la Pentecôte et qui reste ouvert pendant que sonnent à l'église de Saint-Michel-en-Grève les douze coups de minuit ? C'est la naïve légende qu'Émile Souvestre a narrée dans son Foyer Breton et dont le personnage est Pipi Scoarn, le jeune homme de Plestin, pris d'envie de posséder les richesses englouties sous le Grand Rocher pour épouser une jeune et jolie Pennerez du pays, mais qui malheureusement resta sous les pierres, parce qu'il s'attarda à admirer et à désirer ce qu'il voyait, pendant que le 12ème coup de minuit retentissait lugubre au clocher de Saint-Michel et que le grand Hirglas se refermait.

N'est-ce-pas ce souvenir du cataclysme côtier qui est tout entier dans cette croyance populaire que le fin du monde arrivera lorsque la mer aura mis à nu la ville qui se cache dans la baie de Saint-Michel entre la Kroaz Hanter-Lew et l'église.

N'est-ce-pas aussi ce souvenir altéré qui se trouve dans le récit d'un vieux pêcheur de Saint-Michel-en-Grève, racontant en 1856 qu'il y avait quelques années la mer, après un orage épouvantable, se retira bien au delà de ses limites ordinaires, laissant si peu d'eau près de la côte, qu'il distingua parfaitement des pointes de clochers sortant des sables qui parsèment le fond de la grève ?

Mais ce ne sont là que des réminiscences bien vagues, bien altérées, bien lointaines d'un cataclysme et d'un phénomène marin que le Xème siècle aurait pu et dû garder dans la mémoire du peuple par la tradition écrite qu'il dressa pour lui, sous forme de légendes et Vies des Saints.

Le Xème siècle qui créa la légende n'apportait que de bien vagues souvenirs ; le XIIème siècle qui l'écrivit, l'oublia complètement. Le sol seul garda en lui le secret de ce qui s'était passé.

(M. S. J.).

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