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Noël CHAPELLE (ou CHAPEL,suivant sa signature), prêtre mis à mort en 1796 par les colonnes mobiles
dans le territoire du diocèse actuel de Saint-Brieuc.

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348. — Noël Chapelle, fils légitime de Julien et de Julienne Huet, naquit au village du Petit-Bodifé en Plémet, le 21 juillet 1730, et fut baptisé le même jour. Son titre clérical lui fut assuré par son père, le 26 octobre 1753. Il a été impossible de découvrir la date de ses autres ordinations. D’après un carnet épiscopal rédigé en 1770, il reçut le sacerdoce en 1756.

M. Chapel après son sacerdoce ne quitta pas Plémet, localité dans laquelle son nom apparaît de temps à autre sur les registres de catholicité. Après avoir desservi la chapellenie de Saint-Julien des Courtillons, il démissionna de cette charge le 27 septembre 1779. Il reçut, trois ans plus tard, le 28 octobre 1782, le visa pour l’altaristerie de Saint-Vincent alors attachée à l’église de Plémet et grevée de deux messes par semaine. Il en prit possession le 11 novembre suivant et la desservait encore en 1789. Elle lui rapportait 132 livres et, le 11 janvier 1791, il réclamait ses honoraires pour l’année écoulée au district de Loudéac.

349. — L’abbé Chapel n’étant ni recteur, ni vicaire, n’était point obligé à souscrire à la Constitution civile du clergé, ce qui ne l’empêcha pas de manifester pour celle-ci la plus vive aversion. Son attitude énergique lui valut, le 27 septembre 1792, d'être dénoncé au Directoire des Côtes-du-Nord « pour avoir depuis le commencement de la Révolution, manifesté le plus grand mépris pour la Constitution civile du clergé, déclaré que les prêtres assermentés étaient des intrus et des hérétiques et des schismatiques et pour avoir, malgré la défense, de la municipalité de Plémet, confessé chez lui et ailleurs et porté le viatique aux malades, etc., etc. ».

A cette époque, prévoyant le sort malheureux réservé au clergé réfractaire, il tenta de sauver ses biens de la confiscation possible par une vente sous seing privé de son mobilier faite à son neveu Lubin Chapel pour six cents livres. Il le subrogea même par le même acte dans tous ses biens immeubles, situés tant au village de la Maronais et de Saint-Julien qu’au Petit- Bodifé, pour la somme de 5.000 livres. Mais toutes ses précautions, comme on le verra plus loin, demeurèrent inutiles (Arch. de Plémet).

A la suite de ces actes et pour échapper aux poursuites dont il était l’objet, M. Chapel, après avoir eu un instant la pensée de s’exiler à Jersey (Arch. C.-du-N., L m 5, 34), se présenta le 27 octobre 1792 à la maison de réunion des Filles de la Croix pour s’y faire interner, sa qualité de sexagénaire le faisant échapper à la déportation. Malgré cela, il fut compris parmi les prêtres que le Directoire des Côtes-du-Nord voulait embarquer pour les îles anglaises, le 19 avril 1793. Voici le signalement inscrit sur le passeport qu’on lui remit à cette occasion : « Cheveux et barbe noirs mêlés de gris, le front haut, les yeux bruns et enfoncés, le nez court et pointu, la bouche moyenne, la figure pleine, le menton carré, le teint blanc » (Arch. C.-du-N., L m 5, 32). Transféré de Saint-Brieuc à Guingamp au mois d’octobre de cette année, M. Chapel reçut sa liberté le 3 avril 1795. Il déclara lors de sa sortie de prison, vouloir se retirer à sa maison du Petit Bodifé en Plémet, où son mobilier avait été vendu révolutionnairement le 10 août 1794, pour 798 livres et ses immeubles placés sous séquestre, le 11 avril précédent.

350. — A son retour, ce prêtre recommença l’exercice du culte dans l’antique chapelle de Saint-Lubin, le joyau architectural de cette localité, et le 24 avril 1795, il adressait aux autorités une requête tendant à la restitution de ce qu’on lui avait confisqué. Il se dit dans cette supplique « accablé par la vieillesse et les infirmités qui ont encore été accrues par une détention de trente mois, et se trouvant sans ressource pour se procurer même les premiers besoins de la vie. » (Arch. C.-du-N., série Q, contentieux des prêtres).

Nous ignorons si l’on fit droit immédiatement à la prière du malheureux spolié. Nous en doutons, car la loi qui permettait ces restitutions ne fut rendue que beaucoup plus tard. Du reste, le prêtre Chapel n’en avait plus désormais pour longtemps à songer à sa subsistance.

Un jour, raconte l’abbé Guillou à la p. 407 du t. II de ses Martyrs de la Foi, édités en 1821, que « l’abbé Chapel traversait un champ tenant un livre à la main, des soldats « bleus » qui » passaient par là, l’ayant aperçu, fondirent sur lui. Reconnaissant que le livre qui les intriguait était un bréviaire, ils en conclurent que celui qui le lisait était un prêtre et l’assommèrent aussitôt à coups de crosse ».

Tresvaux du Fraval, à la page 50 du tome second de son Histoire de la Persécution précitée, éditée en 1845, reproduit la même chose en les mêmes termes, mais les auteurs du Diocèse de Saint-Drieuc durant la période révolutionnaire, publié en 1895, qui avaient pu se documenter davantage, écrivent avec plus de détails, « que revenant un jour de visiter un malade au village du Hâ, M. Chapel récitait son bréviaire, en traversant un champ à quelques cents mètres de Saint-Lubin, lorsqu’il fut surpris par une colonne mobile qui passait par Saint-Lubin en se rendant au Vaublanc. Le guide qui la conduisait, sachant que M. Chapel résidait dans ce village, craignant que celui-ci ne fut surpris et arrêté, leur fit prendre un chemin détourné. Malheureusement les militaires aperçurent un jeune homme qui courait à toutes forces à travers champs, et immédiatement, mis en éveil, ils détachèrent quelques hommes à sa poursuite. M. Chapel traversait alors un champ nommé la Sente, son bréviaire à la main. Surpris par les soldats, il voulut se débarrasser de son livre de prières en le jetant dans un buisson, mais son mouvement avait été aperçu. Le reconnaissant pour prêtre à ce signe, ils l’assommèrent à coups de crosse sans autre forme de jugement. Ils mutilèrent tellement son corps que l’on fut obligé de transporter ses restes dans un drap de lit dans sa demeure. On l’inhuma dans l’ancien cimetière de Plémet. Ses restes ont été transportés dans le nouveau cimetière, et ses cendres placées auprès de la Croix ».

351. — Ses compatriotes érigèrent sous son nom une croix dite croix de M. Chapel à l’endroit même où il avait été mis à mort. Lorsque cette croix tomba de vétusté, on la changea de place, tout en lui conservant son nom. Elle se trouve actuellement au bord de la route qui conduit à la chapelle Saint-Lubin. La mémoire de M. Chapel était encore très vivante en 1892, écrivent les auteurs des Conférences ecclésiastiques. Il en est de même encore aujourd’hui, spécialement dans le quartier de Saint-Lubin, où ce bon prêtre vécut et acheva ses jours. Des membres de sa famille existent toujours à Plémet qui conservent encore fidèlement le souvenir de son martyre. Ils savent, pour l'avoir entendu dire par leurs parents, qu’il fut mis à mort pour n’avoir pas consenti à prêter serment, « pour avoir refusé de se soumettre » aux mauvaises lois. — Plusieurs prêtres, originaires du village de Saint-Lubin en Plémet ont toujours entendu raconter le même récit traditionnel de sa mort. Il serait facile de citer leurs noms. La tradition précise même le sillon où le cadavre tout mutilé de M. Chapel fut relevé par les habitants de Saint-Lubin.

Sans doute, il est regrettable qu’une tradition si solide ne soit pas confirmée par des documents officiels. Mais rien n'est plus rare dans le diocèse de Saint-Brieuc que des récits de martyrs consignés sur les registres paroissiaux entre 1800 et 1865. Cependant vers cette époque, M. Louail, un des curés les plus distingués qui aient vécu à Plémet, n’hésitait pas à accoler au nom de M. Chapel l’épithète de martyr. La colonne mobile qui a exécuté le chapelain de Saint-Lubin n’a pas non plus rédigé de procès-verbal de son assassinat. On n’y perd pas grand'chose, ces rapports n’étant le plus souvent qu’une suite de mensonges, ainsi qu’on a pu s’en convaincre par ceux que l’on a insérés par ailleurs.

Quant à l’acte de décès de M. Chapel, on ne l’a inscrit à la mairie que cinq jours après son trépas. On n’y fait pas mention de son assassinat. C’est que les officiers d’étal-civil à cette époque, terrorisés par les colonnes mobiles, évitaient de se créer de fâcheuses histoires par des recherches intempestives de la vérité. Très souvent ils n’inscrivaient pas même le nom de la victime, ou ne parlaient pas de son assassinat. Pour M. Chapel, on le déclare, avec cinq jours de retard, décédé dans sa demeure. Ces cinq jours de retard, cas unique dans tout le registre de 1796, suffiraient à eux seuls à donner l’éveil à un critique tant soit peu averti. En tout cas voici la teneur de cet acte :

« Du quinze pluviôse, un quatre, de la République française, une et indivisible (4 février 1796).

Devant nous soussigné Louis-François Charles, officier public de la commune de Plémet, district de Loudéac, département des Côtes-du-Nord ; s’est présenté Lubin Chapel, du lieu du Tertre, commune de Plémet ; lequel nous a déclaré que Noël Chapel, prêtre, est décédé en sa demeure, le trente janvier dernier (vieux style) âgé de soixante-six ans, et inhumé le lendemain au lieu de sépulture.

En présence de Pierre Chapel, du bourg, d’Yves Moisan, du même bourg de Plémet. Lesquels, ont certifié la dite déclaration pour la vérité.

Fait au dit Plémet, sous notre seing et celui du dit Lubin Chapel pour son respect, et pour ce que les autres sus-dénommés ont déclaré ne pouvoir signer, de ce interpellés, les dits jour et an que devant ». Signés : Charles et Chapel.

La béatification de M. Chapel remplirait de joie la population et le clergé de Plémet. Sa lutte contre la Constitution civile, sa longue détention, son dévouement pour les âmes, le tout couronné par une mort héroïque semblent des preuves qui ne sont pas sans valeur et de son martyre matériel et de son martyre formel.

BIBLIOGRAPHIE. — Guillon, Les Martyrs de la Foi (1821), op. cit., II, p. 407. — Tresvaux du Fraval, Histoire de la Persécution révolutionnaire en Bretagne (1845), op. cit., II, p. 50, — Le Diocèse de Saint-Brieuc durant la période révolutionnaire (1895), op. cit., II, p. 224-227. — Aug. Lemasson, Les Actes des prêtres insermentés mis à mort, etc. (1927), op. cit., p. 212-213.

(Archives des Côtes-du-Nord, série L, non cotée. — Archives de Plémet).

(Articles du Procès de l'Ordinaire des Martyrs Bretons).

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