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L'HISTOIRE DE PLÉLO

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HISTOIRE ANCIENNE DE PLÉLO.

La commune de PLELO est située à 16 kilomètres de SAINT-BRIEUC, son chef-lieu d'arrondissement et à daux kilomètres de CHATELAUDREN, son chef lieu de canton. Sa superficie est de 4354 hectares. Sa population est de d'environ 4400 habitants (vers 1856-1867). Elle est bornée par CHÂTELAUDREN, PLOUAGAT, BRINGOLO, TRESSIGNEAUX, TREGUIDEL, LANTIC, TREGOMEUR, TREMUSON, PLERNEUF et PLOUVARA, traversée par le chemin de fer de l'Ouest, la route impériale de PARIS à BREST, la route départementale de SAINT-BRIEUC à MORLAIX, les chemins : vicinaux de PORDIC à PLOUVARA, de LANVOLLON à QUINTIN, de CHATELAUDREN à BINIC, arrosée par les rivières du LEFF et de l'IC, qui n'y font pas tourner moins de treize moulins, ceux du Val, à fouler, de la VILLE GEFFROY, à SAINT-QUAY, de GOELLO, de la VILLE BALIN, de la VILLE FREHOU, de SAINT-BIHY, de TOURNEMINE, de KERBIEU, de BACHELAY, du TEMPLE et de GESLIN. On y trouve encore le moulin à vent de CHATEAU GOELO et le moulin à eau du même lieu, mû par le ruisseau des SALLES. Plutôt plaine que montagne, le sol de PLELO n'en est pas moins très accidenté, surtout aux environs du LEFF et de l’IC. Il est aux abords de ces cours d'eau tel site pittoresque, tel gracieux point de vue que ne dedaigne pas le crayon du touriste, voire les pipeaux du poète.

PREMIERE VERSION :
La commune toute entière présente trois versants principaux et faciles à distinguer : l'un incliné de l'Est à l’Ouest descend sur le LEFF, le second en sens opposé de l'Ouest à l'Est s'incline sur l'IC, et enfin le troisième remontant de l'IC et se dirigeant de l'Est à l'Ouest se prolonge dans les communes de TREGOMEUR, TREMUSON et PLERNEUF. Sur la crête qui sert de démarcation aux deux premiers, nous pouvons citer comme points culminants CREHAQUIN, la VILLE BALIN, SAINT-BIHY, TREMARGAT et SAINT-QUAY. Ces deux derniers points sont comme les extrémités d'un vaste plateau qui s'étend des côtes du LEFF à celles de l’IC. Sur les sommets qui séparent PLELO de TREMUSON et de PLERNEUF, le bassin de l'IC et celui du GOUET, nous rencontrons SAINT UREAU, CHATEAU-GOELO et le SOURDOUE. Dans le sens du dernier versant descend le ruisseau dit de l'ETANG-PAVE, ou de la VILLE ERIO qui se rend au LEFF en traversant le bourg ; le second versant est de trop faible étendue pour présenter un cours d'eau même des plus minimes.

Dans le troisième, nous trouvons le ruisseau de la VILLE NEUVE qui court vers l'IC après avoir formé l'étang qui porte son nom. Le ruisseau des SALLES qui fait tourner le moulin de CHATEAU GOELLO et enfin l'étang de la VILLE FREHOUR qui communique directement avec la rivière. A une époque encore peu éloignée, les pièces d'eau abondaient sur le sol de la commune : il y avait l'étang de la VILLE GEFFROY, l'étang de la VILLE BALIN, l'étang de la VILLE AUBERT, l'étang de BEAUCHAMP etc... On a fini par s'apercevoir qu'il valait autant remplacer ces marais bons tout au plus à constater le droit de vivier, par des prairies sinon excellentes du moins plus lucratives.

Outre les bois de BEAUCHAMP et de SAINT-BIHY, de TREMARGAT, de CHATEAU GOELLO, dont l'importance est incontestable, la commune de PLELO présente une foule de bosquets d'arbres disséminés ça et là ; ou plutôt PLELO tout entier n'est qu'une forêt dans laquelle on a pratiqué de nombreuses éclaircies. Tel serait l'aspect qu'il offrirait à l'observateur dont l'oeil pourrait l'embrasser dans toute son étendue. Les habitants de la commune sont pour ainsi dire amoureux des arbres, ils ne peuvent se résigner à en abattre et s'ils en ont besoin, ils préférent en acheter à haut prix que d'employer ceux qui se perdent à leur porte. " Quand le bois chée, la terre tremble " disent-ils, pour exprimer que qui abat son bois ne tardera guère à vendre son champs. Les essences que l'on rencontre le plus fréquemment sont, dans la commune : l'orme, le chataignier et le chêne . Le bois de SAINT-BIHY renferme quelques sapins et celui de BEAUCHAMP, une assez grande quantité de bouleaux : ce dernier est de beaucoup le plus important, il n'a pas moins de deux à trois lieu de circuit.

SECONDE VERSION :
Le LEFF et l'IC partagent la commune en trois versants faciles à distinguer : le premier qui descend vers le LEFF en cheminant de l'Ouest à l'Est renferme le ruisseau de la VILLE ERIO qui traverse le bourg ; le second qui court vers l'IC en sens contraire est trop peu étendu pour donner naissance à un court d'eau digne d'être mentionné. Enfin, le troisième qui remontant de l'IC se prolonge à l'Ouest jusque sur les communes de TREMUSON, TREGOMEUR et PLERNEUF donne naissance au ruisseau des SALLES et à celui de la VILLE NEUVE. Sur la crète qui sert de ligne de séparation aux deux premiers versants surgissent les antiques manoirs de la VILLE BALIN, de SAINT-BIHY, de TREMARGAT et de KERPRAT. Les sommets qui séparent PLELO de PLERNEUF et de TREMUSON, le bassin de l'IC de celui du GOUET, nous présente comme points culminants le SOURDOUE, CHÂTEAU GOELLO, SAINT UREAU, BERNIER etc... A une époque encore peu éloignée, le sol de la commune était parsemé d'une infinité de pièces d'eau : il y avait les étangs de la VILLE GEFFROY, de la VILLE BALIN, de la VILLE AUBERT, de BEAUCHAMP etc... Ces marais, bons tout au plus à constater avant 1889 l'existance du droit de vivier, ont fait place à de vertes et fertiles prairies.

Le territoire de PLELO est excessivement boisé : vaste forêt dans laquelle de nombreuses éclaircies auraient été pratiquées, tel serait l'aspect qu'il présenterait à l'observateur dont l'oeil pourrait l'embrasser dans toute son étendue. On y remarque notamment les bois de CHÂTEAU GOELLO, de SAINT-BIHY, de TREMARGAT et surtout de BEAUCHAMP. Ce dernier dont l'importance est incontetable n'a pas moins de trois lieues de circuit, et la coupe qui s'y pratique tous les ans est une des plus grandes ressources de la population ouvrière des environs. C'est PLELO qui fournit de bois de chauffage tous le littoral de SAINT-BRIEUC à SAINT-QUAY.

 

AGRICULTURE.

La grande étendue de la commune engendre la grande variété du terroir, de première qualité aux environs de SAINT-QUAY et du bourg ; inférieur, assez fertile encore dans la partie qui tire sur PLERNEUF et TREGOMEUR ; il est marécageux dans la partie qui incline sur CHATELAUDREN. Quoiqu'elle soit attachée aux pratiques routinières du vieux système, l'agriculture semble être entrée depuis quelques temps dans une sérieuse ère de progrés. L'introduction et l'énergique développement de la culture des racines fouragères et des prairies artificielles ont donné un nouvel essor à l'élevage du bétail qui est depuis fort longtemps la principale préocupation des cultivateurs. La fabrication du cidre qui fit naguère la richesse du pays semble au contraire tendre à diminuer de plus en plus. Quelques années peu heureuses ont fait peur aux fabricants et arrêté en partie, au moins, les spéculations. La culture du blé s'est en général substituée à celle du seigle qui, il y a seulement une vingtaine d'années dominait encore. Une cause qui arrêtera pendant longtemps les progrés réels de l'agriculture, c'est la courte durée des baux. Les trois-quarts du sol appartiennent à des propriétaires forains dont l'intérêt est de faire les baux le plus court possible, ce qui paralyse les améliorations du fermier, craignant toujours d'améliorer au profit de son futur propriétaire. Un autre obstacle, c'est la cherté de la main-d'œuvre. Depuis un certain nombre d'années, la plus grande partie de la jeunesse émigre vers le centre de la FRANCE et l'invention des machines n'a remédié que d'une manière fort inefficace à cette disette de bras.

Quoique l'agriculture soit l'occupation de l'immense majorité des habitants, elle n'est pas la seule industrie de la commune. Depuis quelques années, le nombre des commerçants s'est considérablement développé ; on trouve une foule de menuisiers, de maçons, de charpentiers et surtout de tourneurs et de chaisiers. Cette dernière industrie a pris même dans la commune un développement réellement surprenant. PLELO fournit tant à la marine marchande qu'à la marine militaire un nombre considérable d'hommes ; en revanche, les engagements volontaires dans l'armée de terre sont excessivement rares.

 

PROGRES.

Quoiqu'invinciblement attachée à tout ce qui tient aux habitudes du vieux temps, la population de PLELO n'est pas restée stationnaire au milieu du mouvement qui entraîne notre siècle vers le progrès. Depuis quelques années, son bien-être matériel et moral s'est considérablement développé. La richesse des habitants s'est accrue ; leurs dépenses augmentant en raison directe de l'augmentation de leur fortune, ont semé dans les classes ouvrières une aisance dont jusque là elles avaient été privées. Des maisons confortables furent bâties ; elles ont remplacé sur tous les points de la commune les vieilles demeures qui étaient fort décrépites et rendues malsaines. L'instruction qui était à de rares exceptions près inconnue au commencement du XIXème siècle est maintenant (vers 1867) considérablement répandue. L'école des garçons contient une centaine d'élèves ; celle des filles environ 150 et la salle d'asile abrite près de 200 enfants. Dans ce calcul n'entre pas les enfants qui vont demander aux communes avoisinantes les bienfaits de l'enseignement que l'éloignement du toit paternel ne leur permet pas de venir chercher au chef-lieu de leur commune. Que serait-ce donc si le mauvais état des chemins n'était un obstacle insurmontable pour un grand nombre de petites jambes ! Que sera-ce quand le bienfait de la gratuité ouvrira les portes de l'école à ceux que l'éxiguité de la bourse de leurs parents en tenait éloigné.

 

LE BOURG.

Le bourg de PLELO est situé à mi-côte sur le chemin vicinal de CHATELAUDREN à BINIC, à deux kilomètres environ de la première de ces deux villes. Il y a quelques années à peine, ce n'était que la réunion d'une vingtaine de maisons de piètre apparence, toutes couvertes de chaumes et disséminées sur le chemin de l'ORME DU PUITS. Maintenant, c'est un coquet assemblage de maisons neuves et riantes irrégulièrement disposées autour d'une place très spacieuse. Il est fâcheux qu'à côté du milieu même de ce nouveau bourg surgissent encore les restes de l'ancien. L'agglomeration contient environ huit cents âmes vers 1867 : elle peut se diviser en quatre parties principales : le bourg proprement où s'assemblent des maisons groupées autour de l’église ; le bas bourg assis au bas du côteau formé par le ruisseau de la VILLE ERIO ; l'ORME du PUITS qui constitue la plus populeuse et la plus pauvre partie du bourg et enfin, la rue de FRIDAIE qui se prolonge fort loin sur la route de BINIC. Ce quartier est déjà le plus commerçant et ne tardera guère à devenir le plus important de tous.

 

EGLISE DE PLELO.

L'église située au milieu de la place principale et entourée du cimetière n'a guère d'apparence extérieure. C'est un édifice qui date, pour la plus grande partie, au moins du Xème siècle. La nef et les bas-côtes avec leurs pleins cintres et leurs énormes piliers carrés accusent d'une manière certaine l'époque romane dans sa plus grande lourdeur. Le chœur et la chapelle SAINTE ANNE datent environ du XVème siècle, si l'on en juge par les ogives qui séparent les deux autels et surtout par les fenêtres flamboyantes auquel ils sont adossés ; la maîtresse vitre est un chef-d'œuvre de sculpture : impossible de trouver rien de plus fin, de plus gracieux, de mieux fait. C'est une véritable dentelle de pierre. Les motifs qui la décore et qui reproduisent les principales scènes de la Passion ne sont pas non plus à dédaigner. L'autel du Rosaire doit être postérieur d'un siècle environ aux deux autres : cette date attestée par son style, l'est aussi paraît-il par des titres conservés dans la famille de QUELEN. Quoiqu'il en soit, l'ensemble de l'église, quoiqu'assez régulier est disgracieux au suprême degré. Ajouter à cela que le vaisseau est de moitié trop petit, que les couvertures tombent de vétusté, que les murailles sont lézardées en plusieurs endroits, et il sera facile de se convaincre que ce n'est point par orgueil que la commune de PLELO s'est décidée à rebâtir son église. Le nouveau plan, dû à Monsieur MAIGNAN, architecte à SAINT-BRIEUC, est de style ogival rayonnant et, s'il est exécuté, les habitants de PLELO auront un temple vraiment digne de la richesse et de l'importance de leur commune.

La reconstruction de l'église a nécessité la translation du cimetière déjà trop petit. Le conseil municipal, autorisé par décret imprimé, a ordonné l'achat d'une parcelle de terre située à environ 400 mètres du bourg sur la route de SAINT-BRIEUC et les travaux de clôture doivent commencer dans le plus bref délai.

L'intérieur de l'église si peu intéressant sous le rapport archéologique ne laisse pas d'offrir quelque chose digne de remarque. Derrrière l'autel de la Vierge se trouve un tableau du Rosaire autour duquel dans une espèce de guirlande sont tracées toutes les scènes de la Passion. Ce tableau, d'une exécution assez remarquable a du être donné à l'église de PLELO par la duchesse d'AIGUILLON. Il en est de même de la statue en albâtre de la Vierge, située au même autel et dont la pierre et la vitalité d'invention font véritable chef-d'œuvre. Quant au tableau de l'autel qui représente Jésus Christ crucifié, il ne mérite aucune espèce de remarque : ce tableau porte un écusson des familles du comte de QUELEN, ce qui indique soin origine. Le retable porte la date 1575. A l'origine, il a du être un morceau de sculpture assez remarquable : mais les couleurs sont passées et les boiseries perdues de vers. Les fonds-baptismaux qui présentent une piscine en marbre assez remarquable date seulement d'il y a quelques années : ils ont remplacé une espèce d'auge en granit qui était réellement pitoyable. Le pavé de l'église est composé presque tout entier de pierres tombales timbrées de différents écussons. Quant au trésor de l'église, il est d'une richesse surprenante pour une commune rurale. On y rencontre une croix et un encensoir d'argent qui, au dire des connaisseurs, sont de vrais chefs-d'oeuvre d'orfèvrerie. La légende raconte que pendant la tourmente révolutionnaire, ces riches présents de la dernière dame de PLELO furent sauvés de la fureur des modernes vandales par la présence d'esprit du sacristain qui les a enfouis dans un lieu voisin de l'église. La fabrique de PLELO possède encore um calice en vermeil d'un assez grand prix et plusieurs ornements fort estimés dont l'un en drap d'or est l'œuvre et le présent de Madame la comtesse de QUELEN.

Quoique l'on ne puisse rien affirmer exactement, il est problable que le presbytère date de la fin du XVIIème siècle. C'est une habitation trés confortable, située à une légère distance de l'église et offrant tous les avantages, que l'on peut désirer d'un pareil établissement.

L'école des filles, ou le couvent, est composée de deux maisons ne formant qu'un seul corps de logis, mais datant de diverses époques. La première a été construite il y a une quarantaine d'années ; la seconde ne date que de 1856. Tel qu'il est, l'établissement offre toutes les conditions désirables d'espace, d'hygiène, de propreté et même d'élégance. Nous n'en pouvons malheureusemnt pas dire autant de la mairie et de l'école des garçons. La mairie et le logement de l'instituteur sont compris dans une maison couverte en chaumes et qui demandé les plus urgentes réparations. Les plafonds en terre sont crevés en plusieurs endroits. Les couvertures laissent filtrer l'eau comme un crible et la terre du jardin étant au niveau du premier étage, le rez-de-chaussée est réellement inondé en cas d'orages. La mairie proprement dite est située au premier étage. On y trouve différents documents assez importants : les registres d'état civil depuis 1600, une collection complète du bulletin des lois, une autre des actes administratifs et de vieux registres fort intéressants pour les détails historiques que l'on y rencontre. Malheureusement, de toutes ces collections, la première seule est bien tenue : les autres sont abandonnées à la poussière, qui ne s'est pas fait faute de les recouvrir d'une couche de l'épaisseur du doigt. Il y a une dizaine d'années, on se décida à rebâtir la mairie et des travaux furent entrepris qui ont été conçus avec une telle impéritie qu'ils n'ont abouti à rien. On a construit une maison avec un rez-de-chaussée et un grenier seulement plutôt que de dépenser quelques mille francs de plus et de faire quelque chose de présentable. Quoiqu'il en soit, il serait à désirer que le plus promptement possible, on transféra les archives de la commune au-dessus de la classe des garçons ; ce local est plus convenable.

Outre l'église, la commune de PLELO possède les chapelles de SAINT NICOLAS, SAINT BLAISE et SAINT JEAN. La première est encore plus ancienne que l'église : elle est très spacieuse et n'offre d'ailleurs rien de remarquable. Elle est entourée d'un cimetière sur la barrière duquel on remarque une croix supportant un écus chargé d'un croissant. A SAINT NICOLAS se tient le dimanche une assemblée à laquelle accourt la présence des communes de PLELO, PLERNEUF et TREMUSON. L'agglomération qui existe autour de la chapelle de SAINT NICOLAS est très considérable : la distance où elle se trouve du bourg, le mauvais état des chemins qui y conduisent, la proximité des gros villages de BERNIER, SAINT UREAU et la VILLE PIED ont maintes fois fait naître l'idée de former une commune à part : ce qui existait probablement à une époque très reculée. Nous sommes convaincus qu'il arrivera nécessairement un jour où cette distraction aura lieu. Si l'on considère l'immense étendue de la commune de PLELO, la situation du bourg qui est placé sur la lisière même de la commune, on est obligé d'avouer, tout esprit de clocher mis de côté, que cette distraction ne serait pas à regretter.

La chapelle de SAINT BLAISE, située à environ deux kilomètres du bourg n'offre absolument rien de remarquable : l'agglomération qui l'entoure est de bien moins d'importance que celle de SAINT NICOLAS mais le pardon qui sy tient le premier dimanche du mois d'août est encore plus considérable. SAINT BLAISE est un véritable petit SAINT JACQUES de COMPOSTELLE. Des milliers de pélerins provenant surtout des cantons de LANVOLLON, PONTRIEUX, PAIMPOL, GUINGAMP, LA ROCHE DERRIEN même, TREGUIER, PLOUHA viennent pieusement se baigner dans la fontaine de SAINT BLAISE dont l'eau bienfaisante est censée les guérir des maux de tête, des maux de dents, des maux de jambes, voire même des rhumatismes.

La petite chapelle de SAINT JEAN, à quatre kilomètres environ du bourg, est le plus gentil morceau d'architecture religieuse qu'offre la commune de PLELO. Admirablement située sur une hauteur qui domine la vallée de l'IC, entourée d'un bouquet d'arbres au milieu desquels elle se cache comme un nid de fauvettes, elle est svelte et élancée comme ...... du chevalier du Temple qui la fit construire. Ce petit édicule est entièrement tapissé d’écussons : à l'extérieur les armes de QUELEN ne sont pas moins de huit fois, et à l'intérieur, au dessus du chœur, une dizaine d'écussons apparaissent encore, sur l'un desquels est gravée la croix du Temple ; sur l'autre la croix de Malte. Le 24 juin, il y a un pardon à SAINT JEAN ; mais il est loin d’être fréquenté comme ceux de SAINT BLAISE et de SAINT NICOLAS.

Outre ces trois chapelles qui appartiennent à la commune et les chapelles privées des manoirs dont est tapissé PLELO, nous pouvons citer encore celle de SAINT QUAY et de SAINT AVID. La première appartient à la famille du PLESSIS de GRENEDAN. Elle est dans un état de délabrement réellement pitoyable. La famille BOTHEREL fonda naguère une rente de deux cents boisseaux de blé pour les prêtres de PLELO à condition qu'une messe matinale serait dite tous les dimanches dans cette chapelle. Cette fondation subsiste encore et est d'une utilité incontestable aux habitants de ce quartier populeux qui est éloigné du bourg de plus d'une lieue et demie.

La chapelle de SAINT AVID appartient à la famille CORBEL qui est propriétaire de la VILLE BALIN. Une assemblée s'y tient tous les dimanches, que la proximité de CHATELAUDREN rend très gaie et très animée. Cet édifice est très spacieux et d'une propreté assez bien entretenue.

Les principaux villages de PLELO sont par ailleur les LOGES, la VILLE GARE, LISSINEUC, CREAQUIN, la VILLE FUMEE et la RUE de PLELO. Outre les chapelles que nous avons citées, la commune de PLELO est encore très intéressante sous le rapport archéologique à cause de la multitude des castels qui parsèment son territoire. Et nous citerons, sans plus de détails pour le moment : TREMARGAT, BEAUCHAMP, KERPRAT, la VILLE GEFFROY, le PERRON, la VILLE BALIN, LISSINEUC, CHATEAU GOELO, et surtout le superbe château de SAINT BIHY, l'antique maison seigneuriale de la commune.

Si PLELO est riche de souvenirs du Moyen-Age, on n'en peut dire autant de l'époque romaine et surtout celtique. Pas le moindre petit de ces monuments druidiques, si communs cependant en bretagne, pas le moindre petit mûr romain, pas la moindre petite monnaie romaine.

Quelques circonstances nous portent cependant à croire que le territoire qui forme aujourd'hui PLELO n’était pas complètement inhabité à l'époque romaine. Il y a quelques années, on trouva dans un champ voisin de la VILLE GEFFROY six ou sept de ces vases de terre dans lesquels les romains enfermaient les cendres de leurs parents décédés. Chacun de ces vases était couvert d'une pierre plate et tous, régulièrement enfouis dans le sol, ne formaient qu'une seule ligne. Etait-ce là la nécropole, ou pour employer un mot moins prétentieux, le cimetière des ancêtres des plélotains actuels ?

Quoiqu'il en soit, la première fois que PLELO apparaît, c'est dans une charte du Xème siècle conservée à la bibliothèque de l'arsenal qui indique comme propriétaire de cette terre un certain CANDIDUS, CANDEDUS ou CANDUS. Il existe un grand nombre de familles bretonnes qui portent le nom de GUEN, qui dans le langage breton a la même signification que CANDIDUS en latin : faudrait-il inférer de là que l'individu que les moines appelaient CANDIDUS était salué par ses vassaux du nom de GUEN ? Toujours est-il que le dit individu "LE BLANC", ‘’CANDIDUS’’ ou ‘’GUEN’’, comme on voudra, est qualifié propriétaire ‘’parochiae vulgo plelou’’. Quel est l'éthymologie de ce mot PLELOU qui jusqu'au siècle dernier le nom de PLELO ? Tout porte à croire que cette commune est dans le même cas que PLOUFRAGAN, PLEUDANIEL et la plus grande partie des communes bretonnes dont le nom commence par PL. Ces deux lettres représentent le latin PLEBS, le Breton PLOE qui tous deux signifient peuple, tribu, famille et par extension territoire. Quant à la seconde partie à sa syllabe lo ou plutôt lou, faut-il dire avec M. DERIE qu'elle vient du breton, fier, orgueilleux et que le mot PLELO signifierait tout simplement peuple fier, peuple orgueilleux, éthymologie qui justifierait ce semble le vieux dicton : vantar, comme un gars de PLELO ? Faut-il dire au contraire que cette syllabe est le nom du Bienheureux LO qui aurait passé par PLELO en accompagnant SAINT GERMAIN en Angleterre ou alors d'un autre saint du même nom mais moins connu ; ou bien encore celui d'un tiern, d'un chef de tribu, auquel cas PLELO signifierait peuple de LO. Ou bien enfin faut-il abandonner complètement ce système et en adopter un autre que la consonnance rend vraissemblable ? PLELOU viendrait du breton plejou, plaids, plaidoierie, plaidoyer et indiquerait que dans un temps plus ou moins reculé cette paroisse servait de rendez-vous aux vassaux et aux .... des paroisses environnantes qui venaient y vider leurs procès. Outre la consonnance, ce qui viendrait à l'appui de cette opinion, c'est l'étendue et l'importance de la commune de PLELO. L'amour propre d'un plélotain l'inciterait à opter pour cette dernière éthymologie : mais en historien impartial nous devons montrer le côté tout orgueil de nation pour discuter sérieusement pour peser avec de consciencieuses balances les raisons qui militent en faveur de chaque système. Nous l'avons déjà dit : la consonnance si semblable, nous pourrions dire identique PLELOU et plejou ; l'importance et l'étendue de PLELO et de fortes preuves à l'appui vont dans ce sens. Mais à quel titre PLELO avait été choisi comme le siège des assises de toutes les paroisses environnantes. Aussi loin que nous pouvons remonter à l'aide des titres, PLELO fait partie de la baronnie ou plutôt de la seigneurie de QUINTIN et autrement de la baronnie d'AVAUGOUR. La fondation de cette dernière tenait à CHATELAUDREN et non à PLELO, et quand PLELO a eu sa justice à part, quand il a été séparé de la baronnie de QUINTIN vers le XIVème ou le XVème siècle probablement, il y avait longtemps qu'on l'appelait PLELOU. Tout ce que l'on pourrait donc supposer, c'est que PLELOU, du temps des druides ou à l'époque gallo-romaine était le rendez-vous des plaideurs : mais alors où se tenaient ces assemblées, ces mallum ? Comment se fait-il que n'en soit restée aucune trace matérielle ? Comment aurait-il pu arriver qu'une réalité aussi importante soit détruite entièrement d'une manière si complète à la fin de l'époque barbare. Entre les deux autres opinions, on peut hésiter plus longtemps : toutes deux ont de fortes raisons à donner, toutes deux ont des analogies à mettre en ligne. D’un côté l'usage, presque constant de désigner les paroisses par le nom de leur fondateur soit spirituel soit temporel : l'exemple de PLOUFRAGAN qui signifie le peuplement, le peuple de FRACAN ; PLEUDANIEL qui veut dire clair comme le jour, la terre de DANIEL ; de l'autre l'habitude non moins certaine de désigner les grandes paroisses par un nom en rapport avec leur importance : les exemples non moins frappants de PLOEUC, de PLEUDIHEN, de PLOUEC, lesquels signifient vraissemblablement peuple grand, peuple fier, peuple orgueilleux, se contrebalancent et interdisent aux ethymologistes de se prononcer. Quant à nous qui n'avons pas la prétention de l'être nous laisserons la question en suspens et nous ne nous prononcerons pas. Cependant, si nous étions tenus de prendre parti, nous nous rangerions dans le camp des défenseurs du second système et cela à cause du vieux proverbe : vantard comme un gars de PLELO. Vox populi, vox dei : les traditions se trompent moins souvent que les ethymologies.

Quoiqu'il en soit, il est bien certain qu'en l'an de grâce, CANDIDIUS était dominus parochiæ vulgo PLELOU. Il avait un vaste domaine, mais un domaine dont il est bien difficile de nous faire une idée. Une forêt, démembrement d'une partie intégrante de cet océan de bois qui couvrait alors la Bretagne et dont LOUDEAC, MALAUNAY, BEAUCHAMP sont les restes. PLELO n'offrait alors que de rares villages, composés de chaumières en terre couvertes de pailles et autour desquels quelques arpents de terre seulement étaient cultivées. ll est probable qu'à cette époque reculée, les FONTAINES de KERPRAT étaient la principale agglomération de PLELO : c'est du moins l'opinion de M. LE CLEC'H, opinion que justifie assez le mode de conception de ce village composé de maisons bâties avec des milliers de petits cailloux perdus dans des masses d'argile. Une route traversait vraisembablement la paroisse : celle de SAINT BRIEUC à LANVOLLON. Mais au lieu de suivre la ligne directe quelle suit aujourd'hui, arrivée au temple, elle suivait pendant un assez long espace ; passant par les lieux ou se trouve aujourd'hui la VILLE ANDON, l'ORME du PUITS, les FONTAINES de KERPRAT, SAINT QUAY, TRESSIGNEAUX pour arriver de là à LANVOLLON. Comme les ponts étaient encore à peu près inconnus, du moins sans existence en Bretagne, les piétons passaient dans un bac, les cavaliers et les charettes traversaient à gué.

Il est probable que ce fut CANDIDIUS ou au moins son fils ou son successeur qui présida à la construction de l'église, c'est-à-dire de la partie qui date de l'époque romaine : c'est à dire de la nef et les bas-côtés. Il y a bien une fenêtre ogivale percée dans le pignon, mais cette fenêtre a pu être percée ou du moins modifiée depuis : au reste tous les caractères de l'architecture romane du Xème siècle ressortent dans les gros piliers et les pleins-cintres de la nef : nous voyons donc que c'est à cette époque que l'on doit en faire remonter la construction. Il est infiniment probable que le granit entre dans sa construction est sorti des carrières de la MEAUGON. Que les habitants de PLELOU se fassent une idée de ce qu'étaient à cette époque les voies de communication et les moyens de traction de la pierre et ils s'estimeront fort heureux des légères corvées que leur impose et que leur imposera la reconstruction de leur église.

Après avoir fait cette première apparition en compagnie de l'antique CANDIDIUS, PLELOU disparait pendant quelque temps, mais pour réapparaître deux siècles plus tard, cette fois d'une manière beaucoup plus certaine. L'an de Jésus-Christ 1225 Maître GUILLAUME le BORGNE, sénéchal de GOELOU, après avoir pendant de longues années sagement administré comme il convient à un intégre intendant et à un magistrat consciencieux les biens de Haut et Puissant ALAIN comte de GOELLO son maître, tomba malade un jour et finit par s'apercevoir que Dieu allait lui demander compte à son tour de l'administration de son âme. Afin de parfaire en digne sénéchal les choses d'ici bas avant de passer à celle de là-haut il songea à faire son testament. Les notaires n’étaient genre fort communs à cette époque : les prêtres recevaient donc les dernières volontés de leurs pénitents au lit de mort. Un sénéchal ! et un sénéchal de GOELLO ! cela valait bien la peine que le haut clergé se dérangeat ! En conséquence un beau matin les habitants de CASTEL-AUDREN virent arriver à dos de mule révérent père en Dieu GUILLAUME, évêque élu de SAINT BRIEUC, lequel après avoir fait observer à maître LE BORGNE qu'il était temps de penser à Dieu consentit à consigner préalablement sur parchemin ses ultimes volontés.

- Reverend père, lui dit maître GUILLAUME, j'ai une sœur qui maints services m'a rendus : je voudrai bien lui donner la moitié de mes moutons, des troupeaux qui mugissent dans mon étable et des mules qui pietinent dans mon écurie. - Soit fait comme vous l'entendez, maître GUILLAUME. - Très révérend père, j'ai un ami qui toute ma vie durant me fut fort attaché : pour ne pas laisser ses services sans récompense, je donne à mon dit ami GEFFROY JAGORET, la terre que j'afferme à JUHELOU de la paroisse de PLELOU. - Ainsi soit, maître GUILLAUME, mais, il est temps de penser à Dieu ! - Très révérend père, malgré ma réputation de vertu, j'ai failli une fois dans ma vie : j'ai là-bas une certaine fille, fruit d'un amour illégitime…. - Oh ! Maître GUILLAUME ! Faites vite pénitence. - A dite fille, je donne LX livres pour s'établir. - Et à Dieu, pécheur, que donnez-vous pour le salut de votre âme. - Très saint père en Dieu, il y a par CHATELAUDREN une léproserie qui n'est pas bien riche. Je veux lui donner ces livres pour soigner les pauvres ladres. - Nous aurons soin de veiller à l'utilisation de ce leg : mais laissez moi vous dire que vous êtes bien coupable. - Que vous dites vrai ! Révérend ! Mon âme a grand besoin de prières. Je veux donc que mes héritiers fournissent aux frères de BEAUPORT et à ceux de BONREPOS la somme de soixante livres chacun. - Mes abbayes sont déjà bien riches, mon fils ! - Oui ! Révérend père, je sais que la cathédrale du bien heureux TUGDUAL, patron de mon diocèse est bien pauvre : lui donne X livres. - SAINT BRIEUC est aussi un grand saint ! - Mettez également X livres pour SAINT BRIEUC : et comme il est bien juste que ces deux églises ne soit pas seules, marquez XX livres pour toutes les églises et pour tous les ponts de GOELLO ! - Ainsi sera maître GUILLAUME. Espérons que Dieu aura pitié de votre âme ! - Point n'est tout, révérend ! Le comte ALAIN fut toujours bien bon pour moi ! Moi aussi je fus toujours pour lui un digne intendant : mais j'ai remarqué que jamais il ne regardait scrupuleusement mes comptes : je ne veux point me montrer oublieur envers lui. Testez, je vous prie envers les très nobles ALAIN comte d'AVAUGOUR et GEFFROY seigneur de QUINTIN qui là attendent. - Cher maître, vous avez pu voir par les comptes reçus de votre .... aïeul qu'il était dans mes dettes de XIX mille sous tournois : je vous remets IX mille de ces sous en reconnaissance de votre bonté pour nous. Inscrivez révérend. Quant aux dix mille autres l'escarcelle d'un chevalier batailleur point n'est toujours pleine. Un petit arnoyement vous epargnera la peine de régler un compte avec mes héritiers. Cédez leur la dîme de PLOUAGAT et celle des moulins de PLELOU pour que la somme soit acquitée. - C'est fait comne vous le dites, Maître GUILLAUME !

Et le révérend évêque élu coucha le tout en beaux et gothiques caractères sur la plus longue feuille de parchemin qu'il pu trouver et, quand Maître GUILLAUME LE BORGNE eut rendu à Dieu sa belle âme d'intendant, le dit parchemin fut déposé aux archives de BEAUPORT où il existait encore en 1792, flanqué de deux annexes, en parchemin dont l'une contient une décision de la somme de XV livres entre les églises de GOELLOU dans laquelle il appert que PLELOU eut pour son église et ses ponts la somme de une livre et dix sous et dont l'autre nous fait assavoir que le seigneur HENRI d'ALVAGOR, connétable de France de quinze ans était libéré de la somme de dix mille sous tournois que son père devait à son intendant GUILLAUME LE BORGNE.

Et voilà comment nous savons qu'au commencement du XIIème siècle, la paroisse de PLELOU faisait partie du comté de GOELLO ; qu'elle était dejà fort riche en moulins dont la dime produit X livres par an. Et qu'on ne se fasse pas illusion sur l'importance de cette somme à l'époque où Maître GUILLAUME LE BORGNE répendait ainsi ses libéralités sur les églises et les ponts de GOELLO ; le cheval se vendait vingt-cinq et trente sols ; le boisseau de froment trois et quatre deniers de sorte que pour six livres, prix moyen d'un boisseau actuel, on pouvait en avoir trois cent soixante. On voit que la valeur de l'argent a augmenté de près de trois cents fois. On voit donc que les dix livres que produisait la dîme des moulins de PLELO vaudrait maintenant trois mille six-cent francs, et que la livre dix sous donnée à l'église de PLELO représente une valeur de cinq cent quarante francs. Les moulins compris dans la convention conclue entre GUILLAUME LE BORGNE et les seigneurs de GOELLO étaient : GOELLO, SAINT QUAY, le moulin à FOULER, le VAL, KERBIEU, BACHELAY, le TEMPLE et RICHARD. A cette époque, la paroisse de PLELO était beaucoup plus étendue que nous la voyons actuellement. Elle se prolongeait jusqu'au bourg de TREGOMEUR par les fiefs de la DEMI-VILLE et de LIFFIAC - et jusqu'à l'église SAINT MAGLOIRE parce qu'on appelait les annexes de CHATELAUDREN. Il est même probable qu'à une époque fort reculée PLELO s'étendait de ce côté jusqu'au LEFF et que CHATELAUDREN était contenu tout entier dans sa circonscription. Quand l'agglomération qui se forma autour du château du roi AUDREN fut devenu plus considérable on en fit une paroisse à part. D'un autre côté, PLELO contenait-il le village de SAINT NICOLAS et de la VILLE PIED ? Des raisons que nous exposeront plus loin portent à croire le contraire. Quoiqu'il en soit, nous ne voyons plus mentionner PLELO jusqu'à la guerre de succession du duché. Il est fort concevable que la lutte entre BLOIS et MONTFORT fut d'autant plus violente à PLELO que cette paroisse faisait encore partie du comté de GOELLO, apanage de JEANNE de PENTHIEVRE. Des traditions connues dans le peuple nous montrent les anglais s'emparant du manoir de la VILLE ANDON et y faisant un séjour prolongé. Les anglais ne furent-ils pas les partisans de MONTFORT, vus de fort mauvais oeil par les vassaux de JEANNE la BOITEUSE et du vertueux CHARLES de BLOIS.

Toujours est-il que la renommée du vaillant connétable lui attira bien des hommes d'armes de la terre de PLELO. Dans les montres de BERTRAND du GUESCLIN, nous rencontrons en foule des noms plélotains. Dans les montres que le duc de MOLINES fait en Espagne ou à Paris, nous notons les noms de JEHAN PERCEVAUX, JEHAN COLLET, ESTIENNE BOTHEREL, JEHAN GESLIN, JEHAN le BIGOT, GUILLAUME de PLEYLOU, JEHAN et GEFFROY CORBEL, PERRINET le VILLOUX, PIERRE GUEGUEN, Alain GUYOMARD, tous habitants de PLELO, les trois premiers chevaliers, les autres escuyers. D'autres plélotains suivaient les bannières de Robert de BEAUMANOIR, le vainqueur de Mi-voie, pour lors au service de Charles V : tel Geffroy Le BORGNE, Jehan GESLIN le jeune, escuyers.

La guerre de succession de Bretagne se termina en 1380 par le traité de GUERANDE. La noblesse de Penthièvre fut appelée à ratifier ce traité qui privait Jeanne LA BOITEUSE de l'héritage de son aïeul. Nombre d'hommes d'armes de PLELO qui suivaient la batailleuse comtesse ratifièrent le traité, les uns à SAINT-BRIEUC, les autres à la ROCHE DERRIEN où se trouvait alors la veuve de Charles de BLOIS. Les enfants de la comtesse de BLOIS, héritiers de l'ambition et des prétentions de leur mère, matés d'ailleurs par l'orgueilleuse Margot DE CLISSON ne tardèrent pas à ourdir les plus nombreuses ..... contre le duc Jean V, fils et successeur du conquérant. Ils résolurent de s'emparer sur une route de la personne du duc et une fois maître de sa personne le contraindre bel et bien à leurs restituer leur héritage. Philippot DE TRIAC alla rejoindre avec cinquante hommes d'armes Olivier DE BLOIS qui entrait en Bretagne par le LOROUX-BOTEREAU. Le guet-apens dressé contre le duc se rendant à BEAUPORT ayant manqué son effet, les conspirateurs se dirigèrent de nouveau vers NANTES où était de retour le souverain breton. Philippot DE TRIAC, qui connaissait parfaitement le pays leur servit de guide. Il les mena camper la première nuit dans le bois de BEAUCHAMP ou plutôt de SAINT BIHY. Olivier coucha au manoir de la DEMI-VILLE, avec plusieurs gentilhommes. Le lendemain, la caravanne reprit sa route. Chacun couvrait ....... dans lequel Jean V fut fait prisonnier. Les penthièvres se voyaient triomphants ; ils étaient perdus. La noblesse bretonne fut scandalisée de tant de noirceur et de perfidie. Le vicomte de ROHAN, lieutenant général du duché et l'épouse du malheureux Jean V dirigèrent si bien les opérations militaires que le malheureux prince fut rendu à la liberté tant et si bien que ses adversaires prirent à la hâte la route de FLANDRE où ne les attendaient pas de meilleures destinées. Le duc de Bretagne redevenu le maître confisqua tous les biens de ses ennemis et en gratifia ses libérateurs. Il avait préalablement exigé un serment de fidélité de toute la noblesse des états enlevés à Olivier et à ses frères. Ces serments furent reçus par des commissaires marchant de bourgs en bourgs et se rendant à la demeure de chaque gentilhomme. Le serment fut prêté à PLELO par : Alain DE MORDELLES, Jéhan BOTHEREL, Guillaume GESLIN, Geffroy HALNAUT, Gilles et Olivier LE PAGE, Guillet GESLIN, Jehan LE BORGNE, Eon DE MORDELLES, Nicolas TUAL, Jehan BOTHEREL, Jéhan COURSON, Guillet DE LA LANDE, Guillaume BIGOT, Alain PERCEVAUX, Geffroy BOTHEREL, Hervé DE QUELEN, Sevestre DE BOISGELIN, Perrot TUAL et Nicolas POENCES.

Jusqu'ici, la paroisse de PLELO n'a pas eu une existence séparée de la baronnie d'AVAUGOUR ou plutôt du comté de GOELLO ; mais en 1511 nous trouvons PLELOU, baronnie possédée par la famille de la TREMOILLE : comment fut opérée cette distraction ? A quelle époque la paroisse a-t-elle été érigée en baronnie ?. Quand et comment a-t-elle passée dans la famille de la TREMOILLE ? Nous n'en savons rien : doit-on dire que le duc Jean V après la confiscation de PENTHIEVRE vers l'an 1437 en aurait gratifié un la TREMOILLE quelconque ou bien doit-on reculer plus loin cette érection et admettre que ce fut le roi Charles VIII qui, pour gratifier le vainqueur de ST. AUBIN, lui fit ce petit cadeau au dépend de sa très chère épouse la duchesse Anne ? Nous ne saurions certainement nous prononcer. Toujours est-il que c'est vers cette époque que l'on doit faire remonter l'augmentation de l'église par la construction du chœur. Nous avons déjà dit que la maîtresse vitre offrait tout le caractère du style flamboyant du XVème siècle. Serait-ce le nouveau baron de PLELOU qui, en don de joyeux avénement aurait gratifié la paroisse de ce petit morceau d'architecture : nous sommes portés à le croire. L'adjonction de SAINT NICOLAS à PLELO sous le rapport spirituel aurait-elle nécessité cet agrandissement : nous n'en savons absolument rien.

Toujours est-il qu'en l'an 1511, PLELOU formait une baronnie appartenant à la famille de la TREMOILLE et dépendant du duché de PENTHIEVRE voire même partage de la baronnie d'AVAUGOUR. PLELO avait haute basse et moyenne justice ; la paroisse était une prééminence dépendant de l'abbaye de BEAUPORT et produisant, suivant le pouillé de 1519, dix livres de revenus. Les appels de la juridiction étaient portés à la barre de GOELLO à SAINT-BRIEUC à laquelle elle ressortissait directement. Quant au lieu où on rendait la justice, nous n'en savons absolument rien. A une époque très rapprochée de nous, l'auditoire était situé au lieu dit L'ILOT dans une bâtisse appartenant au sieur PRIMAULT et il n'y a encore que quelques années l'on voyait en cet endroit qualifié du nom d'audience. PLELO étant une haute justice, avait patibulaire : le lieu où il était situé nous est complètement inconnu. Il en est de même du manoir qui servait de chef-lieu au fief. Malgré toutes nos recherches, il nous a été impossible de trouver un manoir auquel on put attribuer ce titre : la baronnie avait-elle été un de ces fiefs sans demeure comme on en connait quelques-uns ou bien doit-on en placer le siège au lieu dit LA COUR DE L'ETANG voisin de l'église et dont les constructions indiquent l'antique importance ; mais alors pourquoi ce manoir a-t-il été dans la suite, et dès le XVIIème siècle pendant que PLELO appartenait encore aux LA TREMOILLE, séparé de leur fief ? Les principaux fiefs de la baronnie étaient : le bourg, autrement dit VILLE ERIO - VILLE DANIEL, la VILLE FUMEE, la VILLE ALHEN, TREGONAN, les LOGES, SAINT GOUENO, BERNIER et CREAQUIN. Les barons de PLELO possédaient let moulins de BACHELAY, de TOURNEMINE, de GOELLO, à FOULER et du VAL ainsi q'une multitude pour ainsi dire inombrable de terres ccnvenancières sur toute l'étendue de la commune. Ils étaient fondateurs et premiers prééminenciers de l'église de PLELO et de la chapelle SAINT GOUENO, aujourd'hui SAINT BLAISE.

Nous avons dit que la paroisse de PLELO était un prieuré-cure dépendant de l'abbaye de BEAUPORT : c'est même dans cette circonstance que l'on doit chercher l'origine du pélerinage de SAINT BLAISE. Les bons moines de BEAUPORT avaient tant et tant de fondations à soutenir qu'ils avaient un amour très prononcé pour l'argent. En apercevant les populations voisines de leur abbaye vouer leur aumônes dans le tronc du tout puissant SAINT BLAISE, ils rirent dans leur barbe en pensant que tout cela tomberait dans leur escarcelle.

Les barons de PLELOU que les soucis politiques appelaient ailleurs et qui n'avaient point dans leur baronnie de résidence digne de leur gloire et de leur nom ne faisaient à PLELOU que de rares apparitions pour y recevoir les hommages et les aveux de leurs vassaux. Les vassaux étaient d'un nombre réellement incroyable. PLELO est couvert de ces antiques manoirs féodaux dont plusieurs ne sont qu'une simple maison couverte de chaume et entourée d'une métairie d'hectares de terres. Ces manoirs aujourd'hui transformés en métairies étaient la résidence de cette noblesse petite et pauvre mais courageuse qui suspendait son épée teintée du sang des ennemis du roi au dessus de l'âtre pour conduire la charrue en attendant une occasion de reprendre le fer, à l'exemple de CINCINNATUS. On ne comptait pas à PLELO moins d'une soixantaine de maisons nobles : toutes les terres dont le nom commence par les mots VILLE- et KER- étaient la résidence d'un petit hobereau qui estimait sa noblesse au pair de celle de ROHAN ou de VITRE. Un ancien nous dit que PLELO comptait cinquante-deux VILLE et une demie VILLE auxquels on doit ajouter encore plusieurs manoirs dont le nom ne comprenait pas cette désinence : TREMARGAT, SAINT BIHY, BEAUCHAMP, CHATEAU GOELLO etc...

EN 1540, la duchesse de MARTIGUES, faisant pour très haut et très puissant seigneur Marie-Gilles de la TREMOILLE, chevalier seigneur marquis de ROYAN, baron d'APREMONT et de PLELOU, afféage le moulin du VAL à escuyer François LE BORGNE, sieur de la VILLE BALIN et ce pour et moyennant six cent écus.

Quelques années après commence les guerres de la Ligue que la férocité du ligueur Guy EDER rendit odieuse à nos contrées. C'est un miracle si les habitants de PLELOU ne se fussent pas ressentis des horreurs de la guerre : le duc de MERCOEUR arrivant à SAINT-BRIEUC en 1590 imposa une contribution à toutes les paroisses environnantes et PLELO dut fournir pour sa part la somme de cent-soixante livres, somme très considérable pour l'époque et qui équivaut à au moins quatre mille neuf cents francs de notre monnaie actuelle (vers 1867). Le pays, si riche alors que les ligueurs l'appelaient un petit Pérou, ne fit aucune difficulté au moins armée pour acquitter la contribution forcée dont il était frappé par les courageux défenseurs de la foi catholique qui ne se laissaient point prier de piller le trésor et les archives de la cathédrale de SAINT-BRIEUC. C'est la seule fois que nous voyons PLELO apparaître dans les guerres de la ligue.

En 1610, haute et puissante Dame Anne Hurault [Note : Née en 1583, décédée le 16 avril 1635, fille de Philippe le Chancelier Hurault (1528-1599), comte de Cheverny, et de Anne de Thou, mariée le 10 septembre 1592 avec Gilbert de la Trémoille, marquis de Royan, décédé le 25 juillet 1603], dame douairière de la TREMOILLE, agissant pour son fils messire Philippe de la TREMOILLE [Note : Né en 1596 et décédé le 8 août 1670, marié en 1622 avec Madeleine de Champrond, décédée en 1644], chevalier seigneur marquis de ROYAN, baron d'APREMONT et de PLELOU, sénéchal de POITOU et gouverneur de POITIERS vint visiter la baronnie de PLELOU et reçut l'hommage de ses vassaux et comme François LE BORGNE n'avait pas encore payé, elle fit casser l'afféagement.

En 1620, Haute et Puissante Dame Catherine d'Olonnes, épouse et procuratrice de Gilles de la Trémoille, marquis de Royan, comte d'Olonnes, baron de Plélou, Craon et Apremont vint à Plélou et reçut dans l'église l'hommage de ses vassaux.

Le prince de la Trémoille n'avait grande raison de tenir à la seigneurie de Plélou : mais vers cette époque, il devint propriétaire de la baronnie de Quintin, ce qui arrondissait ses propriétés. Malheureusement, Quintin n'était qu'un membre d'Avaugour, et le baron d'Avaugour exigeait hommage de son vassal. Le duc de la Trémoille était trop fier pour prêter le serment devant autre que le roi ! Un procès eut lieu : mais le Parlement de Paris par un arrêt du 16 mai 1637 le débouta de ses prétentions, déclarant que les baronnies de Quintin et de Plélo relevaient en partage de celle d'Avaugour et lui devaient ainsi droit de parage et de rachat. Les la Trémoille préférérent vendre leur propriétés que de se reconnaître les vassaux des valais de Bretagne. Nous ne savons pas au juste à quelle époque intervint l'acte de vente. En 1659, Louis de la Trémoille et Catherine d'Olonnes son épouse produisent un aveu de tous ceux qui avaient des terres sous la mouvance de leur baronnie de Plélo ; mais en 1670, la baronnie de Plélo appartenait à Marie Maurille de Bréhand, chevalier, conseiller du roi en son Parlement de Bretagne, baron de Mauron, seigneur du Plessix et de Galinée et à Louise de Quélen, dame de Saint-Bihy sa campagne. Par ce mariage du seigneur de Mauron avec l'héritiere de Saint-Bihy et par l'achat de la baronnie, le manoir de Saint-Bihy devint le chef-lieu et le manoir seigneurial de Plélo.

La famille de Bréhand, ainsi, substituée à celle de la Trémoille dans la commune de Plélo, était une des plus anciennes de Bretagne, Sans parler du fabuleux Bréolyn dont elle prétendait descendre, son origine certaine remonte à Génitus de Bréhand qui fit en l'an 1000 une donation au prieuré de Léhon. En 1080, Briand de Bréhand, dit le vieux, qui se qualifiait ‘’Brientenuun primus et primogénitus’’, fit une donation au prieuré de Lamballe et devint vicomte de Poudouvre. Nous rencontrons autre Guillaume son fils, Normand son petit-fils qui assista à la fondation du prieuré de Saint-Martin de Lamballe - Guillaume, fils de Normand qui était présent à la fondation du prieuré de Jugon ; Moisan, fils de Guillaume qui se fit moine à Saint-Aubin-des-Bois en 1196. Aubin, fils de Moisan qui assista à l'enterrement de son père dans ce monastère et devint le plus célèbre de tous ; Guillaume de Bréhand qui partit en 1270 pour la croisade de Saint-Louis et qui mourut de la peste sous les murs de Tunis. Il avait épousé Alix de Rohan. La maison de Bréhand comparut en outre à toutes les montres et réformations de 1426, 1432, 1441, 1456 et 1541 et enfin 1668. A cette dernière nous trouvons Maurille, baron de Mauron et de Plélo - Jean, son fils, seigneur de Galinée et François, seigneur de la Lande. La famille de Bréhand portait "de gueules au léopard passant d'argent’’, avec pour devise : "Foi de Bréhand vaut mieux qu'argent‘’.

 

AUTRE TEXTE.
Outre les possessions de Saint-Biny, Tressigneaux et Loursière, elle possédait dans le Porhoët de vastes domaines dont la seigneurie de Mauron, érigée en comté par Charles IX en faveur de Jean de Bréhand. Le fils de ce Jean de Bréhand, René de Bréhand fit reconstruire le château de Saint-Bihy qui jusqu'alors n’avait été qu'un manoir, qu'une tour féodale. Les travaux furent commençés en 1684. Les maçons recevaient six liards par jour et le boisseau de blé leur était vendu 16 sols. Le plan primitif était un T gigantesque, mais l'aile droite et le pied du T furent seuls construits à cette époque, c'est à dire avant le commencement du XVIIème siècle. Le manque d'argent empêcha bientôt les constructions.

En 1660, le sire de Bréhand prêta hommage à Catherine d'Olonnes [Note : Catherine Henriette d'Angennes de La Loupe est une courtisane française née en 1634, baptisée à La Loupe le 18 juin 1634, comtesse d'Olonne par son mariage avec Louis de La Trémoille (1626-1686, fils de Philippe de la Trémoille, né en 1596, décédé en 1670, et de Madeleine de Champrond, décédée en 1644), le 1er mars 1652, morte à Paris le 13 juin 1714, fille de Charles Claude d'Angennes (décédé en 1660) et de Marie de Raynier (décédée en 1679)] qui lui donna un aveu pour ses terres de Plélo, c'est-à-dire pour le fief de Saint-Bihy qui contenait alors : le manoir et métairie de Saint-Bihy, la Rue Neuve, la Saudre et les Tronchets. Le fils de René de Bréhand y ajouta par argent la Ville Andon et la Ville au Fêvre. Comme on le voit les sires de Saint-Bihy s'aggrandissaient de jour en jour. Il répugnaît à leur orgueil de Bréhand d'être obligé de prêter hommage. Enfin, ils agirent tant soit par orgueil soit par fraude, soit autrement que Louis de la Trémoille leur vendit en 1663 la baronnie de Plélo avec tous ses droits seigneuriaux, honorifiques, féodaux et autres. Dès lors le fief de Saint-Bihy et la baronnie de Plélo ne forment plus qu'une seigneurie dont le chef-lieu est Saint-Bihy.

 

REPRISE DU TEXTE.
Maurille de Bréhand, acquéreur de la baronnie de Plélo était conseiller au Parlement de Bretagne et résidait le plus souvent à Rennes. Néanmoins, il venait toujours passer l'été dans son manoir de Saint-Bihy. C'est pendant l'un de ses voyages qu'il fût parrain de l'une des cloches de Plélo, qui de son nom fût appelée Maurille-Louise. Il y avait grande liesse et grand rassemblement de noblesse au bourg de Plélo à cette occasion : les registres de la mairie en font foi.

Le vieux manoir de Saint-Bihy n'était plus en rapport avec la richesse de son propriétaire : en 1684, Maurille de Bréhand commença le superbe bâtiment que l'on admire encore aujourd'hui. Bâti dans le style Louis XIV, l'édifice n'a qu'un seul étage, sans mansarde : il est d'une sobriété un peu monotone peut-être. Trente ouvertures ornent la façade principale ; le bâtiment tout entier présente la forme d'un T : malheureusement, il n'a jamais été complétement terminé. La sévérité de son architecture, la longueur et la régularité de sa façade, la largeur de ses ouvertures donne à cet édifice vu de l'autre côté de la prairie qui se déroule devant lui un aspect imposant et monumental... Il eut à regretter que la négligence ou l'avarice laisse périr un tel monument qui fait encore l'orgueil de la commune de Plélo.

Maurille de Bréhand ne fit que commencer l’œuvre dont il avait donné le plan. Il mourut en 1692 et fut inhumé dans l'église de Plélo près de l'autel du Rosaire dans l'enfeu des aïeux de son épouse. Louise de Quélen ne lui survécut pas longtemps et la baronnie de Plélo avec toutes les autres terres exceptée la terre de la Lande passa à leur fils ainé Jean-René-Almaric de Bréhand. Ce seigneur fut le plus puissant et le plus riche de toute la famille. Aux baronnies de Mauron et de Plélo, qu'il tenait de son père, aux chatellenies de Tressigneaux, Saint-Bihy et Loursière, héritage de sa mère, il jouta en 1698 la Baronnie de Kerouzéré en Léon, par héritage de Marguerite de Bréhand, sa tante, épouse de Mr de Poulpry ; en 1718 la baronnie de Pordic par achat sur Marguerite de la Rivière. En 1700, il s'était rendu acquéreur de la terre de la Ville-Pied sur la famille de Coislin du Cambout.

Cette terre appartenait depuis nombre d'années à la famille du Halgouët : elle fut portée dans celle de Coislin dans le milieu du XVIIème par le mariage de Magdeleine du Halgouët avec le duc de Coislin du Cambout : lors de la réformation du domaine en 1682, les seigneurs de la Ville-Pied refusèrent d'abord d'en donner aveu et ne s'y résolurent qu'après maintes chicanes et tergiversations. Dans ce texte, la Ville-Pied est qualifiée de fief s'étendant jusque dans la commune de Plédran et celle de Langueux, ne relevant aucunement de la baronnie de Plélo mais seulement de celle de Penthièvre . Le comte de Coislin et son épouse s'attribuent le droit de haute, basse et moyenne justice que depuis un siècle et demi les seigneurs de la Ville-Pied faisaient exercer dans la chapelle de Saint-Nicolas. Le procureur du roi s'élève contre cette prétention et demande la suppression de la juridiction non mentionnée au minu de 1477. Sur ces conclusions, les commissaires réformateurs firent défense et expresse inhibition au seigneur et dame de Coislin de rendre la justice à Saint-Nicolas ; les condamnèrent à mil cinq cents livres d'amende pour l'avoir rendue sans droits, enjoignant au sénéchal de la Ville-Pied de cesser immédiatement ses fonctions ; confisquèrent les registres et autres papiers de justice ; ordonnèrent aux habitants de la Ville-Pied et Boisveloux de venir plaider à Saint-Brieuc à la barre royale de Gouélo dont ils étaient vraiment justiciables, expresses défenses et prohibition au dit seigneur et dame de Coislin et à leurs représentants de porter à l'avenir le titre de seigneur de la Ville-Pied, entendu que ce n'était pas fief mais seulement terre. Cependant et malgré cette rude sentence, les sièges des juges demeurèrent dans la chapelle de Saint-Nicolas où on les voyait encore il y a une soixantaine d'années (au début du XIXème siècle) : bien plus, les seigneurs et dame de Coislin ne se firent pas faute de porter encore le titre de seigneur de la Ville-Pied jusqu'à son acquisition en 1700.

Outre la Ville-Pied, la famille de Bréhand s'était encore aggrandie dans Plélo de plusieurs autres terres. Le fief de Saint-Bihy ne comprenait à l'origine que le manoir, ferme et moulin de ce nom, les métairies de la Saudre les Tronchets et la Rue-Neuve, une tenue convenancière près de cette dernière. Maurille et Almaric de Bréhand y ajoutèrent la Ville au Fêvre, la Ville Andon, Kerbieu, Tombelaine et plusieurs autres petits fiefs qui dans l’origine appartenaient à des propriétaires particuliers.

Enfin, entre 1700 et 1704, Jean-René-Almaric de Bréhand considéra ses terres de Plélo comme assez importantes pour acheter leur élection en comté. Cette érection fut obtenue sans peine et la baronnie de Plélo fut érigée en comté avec adjonction des terres et seigneuries de Tressigneaux, Tréméloir, Loursière, Saint-Bihy, la Ville aux Fêvres, biens et dépendances, la Ville-Pied, etc... La paroisse de Tréguidel et la baronnie de la Ville-Mario furent encore adjointes au nouveau comté, mais à titre d'arrière fief seulement. Les seigneurs conservèrent leur justice particulière. En 1714, le comte de Plélo s'intitulait majestuesement " Haut et Puissant seigneur René-François-Almaric de Bréhand, chef de nom et d'armes de Bréhand, comte de Plélo, baron de Mauron, Pordic, et Keruzoré, seigneur de Galinée etc ... colonel de cavalerie du régiment de Plélo, chevalier des ordres du Roi etc...".

Il est inconcevable que l’immense fortune de ce seigneur lui rapportaient si peu même pour l'époque. Les biens de la famille de Bréhand dans les communes de Plélo et Pordic équivaudraient actuellement (vers 1867) à un capital de 4.500.000, lesquels devaient valoir à l'époque environ 1.500.000 livres. Si à ce revenu on rapporte le produit des droits de lods et ventes, de la dîme et autres droits féodaux aujourd’hui abolis, on arrive à un capital de 2.000.000 qui devaient fournir au moins 60.000 livres de rente. Le comte de Plélo retirait à peine de toutes ces propriétés 20.000 livres de revenu annuel. Il est certain que le grand nombre de tenues convenancières louées à vil prix sont pour beaucoup dans ce résultat, mais on doit surtout l'attribuer à la rapacité des intendants auquels la famille de Bréhand confiait d'ordinaire l'administration de ses domaines. Aussitôt après la mort de sa mère, Almaric de Bréhand fit un procés à Rucrard ? intendant de sa mère, lui réclamant une somme de 60.000 livres. Français Daumesnil se fit une fortune colossale dans le poste de régisseur du comté de Plélo.

Si René de Bréhand n'était pas heureux dans l'administration de ses biens, il était frappé de bien plus grands malheurs dans l'intérieur de sa famille. D'un premier mariage il n'avait eu qu'un fils, Louis-Robert-Hippolyte de Bréhand, en faveur duquel il se démit du comté de Plélo. Cet enfant devait être le héros du XVIIIème. Colonel du régiment de son nom, il épousa Louyse de la Vrillère Saint-Florentin [Note : Louise-Françoise Phélypeaux de La Vrillière, comtesse de Bréhan de Plélo, née en 1707 et morte en 1737, fille et sœur de ministres, épouse puis veuve de l'ambassadeur Louis de Plélo mort à l'attaque de Dantzig, est une dame de la cour de Louis XV. Elle est la fille de Louis II Phélypeaux, marquis de La Vrillière, secrétaire d'État de Louis XV, conseiller du roi en tous ses conseils, et de Françoise de Mailly. Elle est la sœur de Louis Phélypeaux de Saint-Florentin, ministre et secrétaire d'État, et la belle-sœur de Jean Frédéric Phélypeaux de Maurepas, ministre d'État et secrétaire d'État], belle-sœur du fameux ministre des affaires étrangères Maurepas. En 1730, il fut nommé ambassadeur de France au Danemarck. Bientôt recommença la guerre de Pologne ; après la mort du roi Auguste II, Stanislas Leckzinski, beau-frère du roi Louis XV avait reparu dans ce royaume que les armes étrangères secondées par les plus ...... lui avaient enlevé malgré l'amour et les suffrages de ses sujets. Cette fois encore, la fortune déserta ses étendards. Vaincu et poursuivi à distance, il fût obligé de se réfugier dans la ville de Dantzig que l’armée russe vint bientôt assiéger. Le roi, ou plutôt son ministre le cardinal Fleury sortit de son inertie et vint en aide au roi Stanislas : trente mille russes assiégeaient Dantzig : le ministre envoya 1500 cavaliers du régiment de Plélo, sous les ordres du brigadier La Motte pour délivrer cette ville et pour sauver le roi de Pologne. C'était 1500 victimes livrées pour ainsi dire sans défense au feu moscovite.

Quand le jeune comte de Plélo, alors agé de trente-trois ans apprit à Copenhague que ses compagnons d'armes allaient mourrir si près de lui pour l'honneur de la France et le service du roi, son sang breton bouillonna dans ses veines. Rien ne put le retenir, ni les larmes de son épouse, ni les pleures de ces enfants que dans une lettre touchante il recommanda aux soins et à l'amitié de son oncle ; ni même le devoir qui lui recommendait de rester cloué au poste où l'avait plaçé la confiance de son souverain : son sublime oubli du devoir devait d'ailleurs être bientot effacé par la chevaleresque bravoure et la glorieuse mort du héros.

Le comte de Plélo arriva sous les mûrs de Dantzig quelque jours après son régiment et il fut plaçé immédiatement à la tête de ses compagnons. Retranchés derrière trois lignes de fortifications, munis d'une artillerie formidable, neuf milles russes avaient dressé leurs tentes entre les français et Dantzig. Pour vaincre ces forces imposantes, pour délivrer Dantzig et Stanislas, Plélo avait 1500 hommes, sans artillerie, sans argent, sans pain. Plélo n'hésita pas. Le 2 juin 1747, jour même de son arrivée sous les murs de Dantzig, il se rue sur les retranchements russes, il enfonce et culbute les ..... sur son passage : la première ligne de retranchement est au pouvoir des français - En avant ! A moi les gars de Plélo, s'écrie le jeune guerrier ! A nous la seconde ligne. La seconde ligne est prise. Les russes sont au mur de Dantzig qui vomissent sur eux une pluie de balles et de mitrailles. En avant ! En avant ! Nous avons le choix d'entrer dans Dantzig ou de choir au champ d'honneur ! Le jeune héros n'avait pas terminé ces paroles qu'il tombe frappé de dix balles en pleine poitrine. Anéanti par la mort de leur chef, ses compagnons d'armes déposent les armes en demandant de pouvoir garder le corps de leur chef.

Conduits à Saint Pétersbourg, où ils furent traités d'ailleurs avec toute l'urbanité digne de leur courage, ils revinrent bientôt en France, en portant avec eux la tête et le bras de leur chef qui furent inhumés l'année suivante dans l'église de Plélo à côté des restes de Maurille de Bréhand, son grand-père.

Type de cette brûlante noblesse de la cour de Louis XIV, bravant la mort en souriant, Louis Robert Hippolyte de Bréhand - Plélo a gravé son nom dans la cire de l'histoire à la place où sont venus depuis s'inscrire Boissy d'Anglas et ... Comme celui-ci, avantureux et outrepassant les ordres de son chef ; comme celui-là se livrant avec la plus grande insouciance à une mort certaine ; comme tous les deux, il est tombé de la mort des braves au champ d'honneur ; comme tous les deux, il restera le modèle de la bravoure et du courage insouciant des français.

La mâle voix qui encourageait les gens de Plélo à la mort glorieuse sous les murs de Dantzig a sussuré une élégie intitulée "Le champ des oiseaux", publiée dans le recueil dit "Le portefeuille de l'honnête homme".

De son épouse Louise-Félicité de Saint Florentin, il avait eu avant son ambassade au Danemark : Louis-Bihy-Almaric de Bréhand et deux filles ; à Copenhague naquirent quatre-autres filles, dont deux jumelles postumes. Les deux filles étaient mortes avant le départ de leur père pour la mort et pour la gloire. Les deux jumelles revinrent en France avec leur mère. Sur le bateau, on embarqua une nourrice et une chèvre. Le lait manquant pendant le voyage, les matelots les nourrirent avec du vin : l'une des enfants mourut en touchant la terre de France. L'autre succomba à l'âge de neuf ans au couvent de Saint Augustin à Paris. Le garçon, héritier du grand nom de son père mourut quelques années après, à l'âge de douze ans de la petite vérole ; sa soeur cadette ne tarda pas à le suivre dans la tombe qui semblait vouloir engloutir toute la famille. Une seule fille échappa à la mort : c'était Louise-Félicité de Bréhand de Plélo.

Le nom de Plélo n'était pas éteint pour cela : le vieux seigneur de Plélo, le comte Almaric de Bréhand-Mauron c'était remarié quelques temps avant la mort de son fils à Radegonde de la Boissière, dont il avait eu deux enfants - René-François et Bihy-Almaric. La fille du comte de Plélo n'en était pas moins une des plus riche héritière du royaume. En 1740, elle fut mariée à Emmanuel-Armand du Plessix-Richelieu, duc d'Aiguillon, duc d'Agenois, fils aîné du duc d'Aiguillon, pair de France.

Quelques années après, le vieux comte de Plélo mourut, et ses biens furent partagés entre ses fils et sa petite fille. Les deux premiers reçurent les baronnies de Mauron et de Kerouzéré - et la duchesse d'Agenois, comme représentante de son frère, aîné de la famille, conserva le lot principal, composé du comté de Plélo, de la baronnie de Pordic et de la seigneurie de Boeuvres.

Le duc d'Agénois avait pendant sa jeunesse combattu pour l'indépendance de Gènes et avait été inscrit au livre d'or de cette république. Devenu duc d'Aiguillon par la mort de son père, il racheta en 1743 du duc de Chaulnes la lieutenance générale de Bretagne dont le duc de Penthièvre était gouverneur titulaire, et ce pour la somme de six cent mille livres. Il n'entre point dans notre projet de montrer le gouvernement du duc d'Aiguillon, les services forcés qu'il rendit à la Bretagne, le trajet de presque toutes les routes qui la sillonne aujourd'hui les tracasseries qu’il fit aux bretons et que ceux-ci lui rendire avec usure ; les quolibets, les sarcasmes et la moquerie dont l'accabla le célèbre procureur général Caradeuc de la Chalotais qu'il avait odieusement poursuivi ; le procès immense que lui intentèrent les Etats de Bretagne devant le parlement de Paris, procès qui se termina par son rappel de Bretagne et sa nomination au ministère des affaires étrangères : nous nous contenterons de dire ce qui "touche spécialement à l'Histoire de Plélo".

La première chose que fit le duc d'Aiguillon nommé gouverneur de Bretagne fut de venir visiter le domaine de sa femme. Le vent de ses exploits, les honneurs dont il avait été l'objet avait paraît-il simplement exalté les esprits. Quand il arriva à Plélo, se fut une grande ovation. Le clergé, la noblesse le peuple en liesse l'accueillirent en son chateau de Saint Bihy, et Maître Frélaut, recteur de Plélo lui adressa le petit speech dont la teneur suit : "Monseigneur, votre clergé de Plélo vient vous faire la révérence et vous témoigner la joie que cause au cœur de tous vos sujets votre présence au milieu de nous. Les lauriers que vous avez si glorieusement moissonnés au péril de votre sang et de notre bonheur ont été le sujet de nos alarmes pour devenir celui de notre joie. Plus notre inquiétude pour vous a été vive, plus la sérénité que votre retour apporte a été agréable. Nous regardons ce jour comme un de nos plus beaux jours, celui qui nous fait connaître l'aimable seigneur sous la protection duquel nous avons l'avantage de vivre. Prolongez votre séjour pour prolonger notre bonheur et agréez le respect de vos humbles sujets ". Ce furieux amateur d'antiennes, Maître Frélaut, était aussi un véritable harangueur ; après le château, l'église. Quand le duc et la duchesse d'Aiguillon y entrèrent, il renouvela son speech en ces termes : "Après avoir rendu les devoirs privés de vénération et de respect qui ne sont communs avec tous vos sujets, permettez que, dépositaire des sentiments de mon peuple, j'en sois ici l'organe public et que dans ce lieu ou vous venez rendre à Dieu avec tant d'édification l'hommage que vous lui devez, vous receviez celui que mes ouailles vous doivent. Oui, Monsieur, le peuple dont le cœur fait la plus précieuse portion de votre domaine ne peut contenir sa joie à la vue du plus aimable des seigneurs. Alarmés des dangers auquel votre zèle héroïque pour la gloire du roi vous a si souvent exposé, plus ses prières ont été vives, plus son allégresse est grande. Les brulants honneurs qu'une république illustre a déféré à ses libérateurs pour éterniser sa reconnaissance et leur gloire ont excité nos transports, mais la crainte en altérait la joie et des cœurs dans lesquels vous êtes mieux gravés que dans le livre d'or génois n'ont pu voir sans un secret murmure le salut d'une terre devenir le prix d'un sang dont la conservation fait leur bonheur. Le ciel sensible..".

Maître Antoine Frélaut, qui avait pris soin de léguer à la postérité ces doux discours entre un acte de décès et un acte de baptême n'a pas pris le soin de tourner la feuille de sorte que nous n'avons que la moitié de sa pathétique harangue ! Quelle perte ! mon dieu . Il désirait de toute force passer à la postérité. Il consacre toute une page du même registre à nous raconter qu'il naquit à Uzel, qu'il fut sous-diacre, diacre et prêtre à Tréguier, Rennes et Saint-Brieuc, qu'il entra à Beauport, qu'il fut nommé recteur de Plélo, qu'il fit réparer le presbytère et construire les bâtiments en chaine qui environnent la cour. Il taquinait aussi les muses : à preuve… ‘’ La chanson faite à madame de Portzamparc de Guingamp qui voulait rompre ses voeux après trente et un ans de profession ". Mentionnons que Maître Frélaut nous a aussi légué une recette pour faire le bon maigre et une pièce en vers respectueusement intitulée "Le pater de Lous XV ...’’.

La duchesse d'Aiguillon fit présent à l'église de la statue de la Vierge, de l'encensoir et de la croix d'argent dont nous avons parlé par ailleurs. Le duc d'Aiguillon ne fit pas de longs séjours à Saint-Bihy : son caractère méfiant et inquiet, la haine que lui avaient voué les bretons, le mintinrent sans cesse sur ses gardes. Il fit creuser autour de Saint-Bihy de larges et profondes douves qui donnent au château de Maurille de Bréhand auquel celui-ci n'avait jamais songé! L'usage monstrueux que le duc d'Aiguillon fit de certains droits féodaux ne tardèrent pas à le rendre odieux aux habitants de Plélo qui l'avaient d'abord si chaleureusement accueillis, et le soir à la veillée on raconte encore les faits épouvantables auquels il se livra et la terreur qu'il inspirait à tous. Cependant, les habitants de Plélo n'hésitèrent pas à combattre à ses côtés à Saint-Cast : sous la conduite de Boisgélin de Kerdu et de la Lande de Calan, une foule de plélotains prirent part à cette glorieuse victoire digne des plus beaux faits de la Bretagne.

Cependant, la haine des bretons finit par l'emporter sur les intrigues et l'influence du duc d'Aiguillon. Il fut rappelé en 1771, mais nommé quelques années après ministre des affaires étrangères. Louise de Bréhand-Plélo quitta le château de ses aïeuls, qu'elle ne devait plus revoir. Quelques temps auparavant, elle fut appelée à recueillir une succession qui tripla son immense fortune. Son oncle maternel, le célèbre Maurepas mourut sans postérité et elle recueillit ses biens consistant en domaines immenses situés en Bourgogne et en Lorraine. La fortune de la duchesse d'Aiguillon ne s'élevait pas à moins de 500 000 livres de rente et le duc son mari en avait au moins 300 000. Malgré cette immense fortune, il ne pouvait faire face à ses dépenses. Il paya 600 000 livres au duc de Chaulnes la lieutenance générale de Bretagne ; il avait eu à soutenir contre les bretons un procès ruineux qui n'aboutit à rien et chaque jour son luxe royal faisait de nouvelles brêches à sa fortune. Aussi, quans il mourrut, il laissa des dettes sans nombre : 200 000 livres à Mr de Quélen, fils de son précédent régisseur, 100 000 à Mr d'Auteuil, 200 000 à Mr de ...

Le duc d'Aiguillon laissait deux enfants : Emmanuel-Armand [Note : Armand Désiré de Vignerot du Plessis de Richelieu, fils d'Emmanuel Armand de Vignerot du Plessis de Richelieu, duc d'Aiguillon (1720-1788) et de Louise Félicité de Bréhant de Plélo (1726-1796), né le 13 août 1761, décédé le 4 mai 1800 à Hambourg, marié le 1er février 1785 avec Jeanne de Navailles (1770-1818)] et Innocente-Aglaé [Note : décédée en 1776, elle était la fille d'Emmanuel Armand de Vignerot du Plessis de Richelieu, duc d'Aiguillon (1720-1788) et de Louise Félicité de Bréhant de Plélo (1726-1796), mariée le 18 novembre 1766 avec Joseph Guigues de Moreton de Chabrillan (1744-1793)]. Les deux héritiers abandonnèrent à leur mère la fortune paternelle, à condition qu'elle en paye les dettes. La duchesse commenca par remanier ses intendants. Dans ses terres de Bretagne on s’était conduit plutôt en propriétaire qu'en intendant. A convenant des terres à vils prix à ses parents, arrachant des forêts entières sans en rendre aucun compte, il s'était fait au dépens de ses maîtres une fortune colossale ... La duchesse lui intenta un procès en restitution de 60 000 livres, tandis que lui en demandait 100 000 dont il se disait en avant. Nous ne connaissons pas l'issue de ce procès, mais aussitôt qu'il fut commençé, un agent de la duchesse vint en Bretagne et institua pour nouveau régisseur M. Corbel, notaire à Plélo. Celui-ci dut s'engager à fournir 60 000 livres annuelles à sa commettante, sans préjuger des sommes qui pourraient lui rester en caisse. L'ordre commençait à se rétablir dans les finances de la duchesse quand survint la révolution de 1789.

Le duc d'Aiguillon embrassa les doctrines nouvelles : on le vit à coté des Chatillon, des Montmorency et des Noailles réclamer l'abolition des droits féodaux aussi bien que le dernier député du tiers. Il avait épousé Jeannette de Navailles [Note : Jeanne Victoire Henriette de Navailles de Montaud, née le 5 mai 1770 et décédée le 7 juin 1818, fille de Louis François de Navailles (1746-1800), mariée le 23 janvier 1785 avec Armand Désiré Le Général d'Aiguillon Vignerot du Plessis de Richelieu (1761-1800), fils d'Emmanuel Armand du Plessis de Richelieu et de Louise Félicité de Bréhan de Plélo] dont il avait un jeune fils : Emmanuel-Armand (né le 11 octobre 1788 et mort jeune), et dont il vivait séparé depuis longtemps. Sa sœur, mariée à un seigneur dauphinois, le marquis de Chabrillan, était morte depuis longtemps ainsi que son mari, laissant deux enfants: Hippolyte et Fortunée.

Les droits féodaux ne furent pas rachetés comme le demandait le duc d'Aiguillon, ils furent tout simplement abolis et cette abolition sans indemnisation fit une large brêche à la fortune de cette famille. La loi qui ordonnait la suppression des titres féodaux causa dans Plélo une véritable émeute. Les trois quarts de la fortune des comtes de Plélo consistait en tenues convenancières et les droits attachés au domaine congéable furent considérés comme relevant du droit féodal. Une foule de peuple se précipita vers le château de Saint-Bihy en réclamant la destruction immédiate de tous les titres qui s'y trouvaient. Le caissier Mr Corbel qui avait prévu le cas s'était empressé de séparer les titres réellement utiles de ceux qui n'étaient que purement féodaux. Ceux-ci furent livrés et on les brûla sur la place publique de Plélo, tout le monde dansant autour.

Cependant la Révolution n'avait pas tardé à s'éloigner des idées du jeune duc d'Aiguillon : il émigra à Hambourg. Un de ses neveux, Fortuné, suivit son exemple. Hippolyte resta dans ses terres en Dauphiné. La duchesse d'Aiguillon demeura à Rueil où elle possédait une maison de campagne et Henriette de Navailles vint avec son fils se retirer en sa compagnie. Au surplus, Louise de Bréhand ne survécut point à la Révolution ; elle mourut à Rueil le 7 floréal an III.

La fortune revenait pour moitié à son fils et pour moitié à ses petits-fils dont l'un avait émigré. Le fils et le petit-fils étant ainsi sans droits, la république était fondée à se dire héritière pour les trois quarts, et Hippolyte de Chabrillan pour l'autre quart. Un arrêté du directoire déparmental fit ordonner la mise en vente du château de Saint-Brieuc, des métairies de la Saudre, de la Rue Neuve, de la Ville au Fêvre, de la Ville Andon, de la Ville Aubert, de Kerbieu, de Tombelaine, et de tous les biens domaniaux qui appartenaient à la duchesse d'Aiguillon dans les communes de Plélo, Pordic et Tressigneaux.

Le château de Saint-Bihy, acheté par une compagnie changea quatre fois de maître pendant deux ans et fut enfin racheté par M. Corbel qui agissait pour Henriette de Navailles. Agissant toujours d'après la même demande, il racheta successivement la Ville au Fêvre et la Saudre. Malheureusement, le jeune duc d'Aiguillon mourut sur ces entrefaits au Mans oû il vivait avec sa mère et M. Corbel qui ne savait plus au nom de qui agir cessa toute démarche .

Cependant, le premier consul parut, et avec lui le calme : les de Chabrillan reparurent et se firent rayer ainsi que leur oncle de la liste des émigrés et firent lever le séquestre mis sur les biens de leur grand-mère. Ils recommencèrent leurs relations avec M. Corbel qui fit tous ses efforts pour reconstituer leur fortune ou au moins pour leur en assurer les débris. Les créanciers du duc d'Aiguillon qui n'avaient point osé prendre la république à partie n'hésitèrent point à se montrer à nouveau : de Chabrillan et ceux-ci durent renoncer faute d'argent à racheter tous les biens de leur famille. Leur oncle le duc d'Aiguillon était mort à Hambourg en 1800.

Sur ces entrefaits, M. Corbel fut assasiné à Paris alors qu'il était allé en députation à la tête du corps électoral des Côtes-du-Nord . Les Chabrillan ne purent trouver les 44 000 milles francs nécessaires pour rembourser à Mlle Corbel les débours que son frère avait fait pour acheter Saint-Bihy et les alentours. Les choses demeurèrent en l'état jusqu'en 1821. A cette époque, ils proposèrent une transaction à Mlle Corbel. Ils céderont tous leurs biens sur Saint-Bihy à M. de Quélen envers lesquels ils n'étaient pas encore entièrement libérés. Celui-ci s'engagea à les tenir pour quittes et à payer les 44 000 milles francs dus à Mlle Corbel à condition que Saint-Bihy leur restât.

Qand aux autres biens de Madame d'Aiguillon, M. Fortuné de Chabrillan auxquels ils échurent en dernier les a vendu en 1844 à M. du Clézieux pour une somme de 400.000 milles francs.

Nous avons commencé cette partie par l'histoire des barons et des comtes de Plélo : nous devons continuer par leurs vassaux. A tout seigneur tout honneur : commençons par ceux qui finirent par l'emporter. La première fois que nous avons pu trouver Saint-Bihy mentionné comme fief, c'est sur la fin du XIVème siècle: il appartenait alort à Guillaume de la Lande. Ce fief était-il depuis longtemps dans cette famille ou y était-il venu, comme on le dit, d'une libéralité faite par le duc de Bretagne à un seigneur de la Lande ? Nous n'en savons absolument rien. Toujours est-il que la famille de la Lande est une famille trés ancienne et qu'elle a rempli auprès des ducs bretons les fonctions les plus élevées.

 

AUTRE TEXTE.
Survint la Révolution de 1789. La suppression des droits féodaux et seigneuriaux fit une large brêche dans la fortune de la duchesse d'Aiguillon. Elle commença à avoir les yeux sur sa fortune : un de ses agents vint en Bretagne et comme le bail finissait avec son régisseur, elle songea à le remplacer.

Maître Corbel notaire à Plélo fut désigné pour son successeur. Dans cette nouvelle main, les affaires de la duchesse d'Aiguillon prirent une autre face : le nouveau régisseur s'engageait à trouver la somme de 60 000 livres de rente annuelle, sans préjudice des sommes qui pourraient lui rester en caisse à la fin de chaque année ; il répara tous les bâtiments d'exploitation, et surtout la métairie de Saint Bihy dont les étables menacaient de s'effondrer sur le bétail et qui était tenue par Jean Desbois qui n'avait pas craint d'abattre de nombreux arbres sur la lisière du bois de Saint Bihy et que Maître Corbel fit remplacer.

Malheureusement, les événements politiques vinrent entraver ses améliorations. D'abord la loi de l'abolition de la féodalité et celle qui ordonnait de détruire tous les titres féodaux jetèrent une immense agitation dans la population de Plélo. Un grand nombre d'habitants de Plélo se présentèrent au château de Saint Bihy demandant qu'on leur livrât tous les papiers de la ci-devant duchesse d'Aiguillon : Maître Corbel, prévoyat ce qui allait arriver, avait eu le temps de chercher et de cacher tous les titres, de sorte que les papiers réellement féodaux furent seuls enlevés. On les transporta sur la principale place du bourg où ils furent brûlés au milieu des acclamations du peuple.

Bientôt après parut la loi sur les Emigrés. Tant que la duchesse d'Aiguillon vécut, cette loi ne put avoir aucun effet sur ce qui concerna ses propriétés, car Louise de Bréhand n'avait point émigré ; elle avait seulement quitté Paris et vivait retirée avec un de ses petits-enfants. Cependant, elle ne devait pas tarder longtemps à rejoindre ses aïeux et elle mourut à Rueil le 7 floréal an VII de la république.

De son mariage avec le duc d'Aiguillon elle avait eu deux enfants : Louis-Armand, duc d'Aiguillon et Innocente Aglaé Daphnis Richelieu qui épousa le marquis de Chabrillan. Le premier, après avoir suivi de parti du duc d'Orléans dans les trouble qui précédèrent la journée du 4 août, avait eu peur des excés de la révolution et avait émigré à Hambourg. Depuis longtemps déjà il vivait séparé de son épouse Henriette de Navailles dont il n'avait eu qu'un fils, Emmanuel d'Aiguillon.

Quand à la marquise de Chabrillan, elle était morte depuis longtemps ainsi que son mari quand éclata la révolution. De ses deux enfants, Hippolyte et Fortuné, le second disparut à la mort de sa grand-mère, et l'autre se maria dans le Dauphiné dans les propriétés de son père. A la mort de la duchesse d'Aiguillon, sa fortune revenait pour moitié à son fils et pour moitié à ses deux petits-fils. Or la République s'étant substituée aux droits du fils et de l'un de ses petits-fils prétendait aux trois-quarts de la succession et se mit aussitôt en devoir de se les approprier. Un arêté du directoire départemental des Côtes-du-Nord fit mettre en vente successivement le château de Saint Bihy, les métairies de la Saudre, de la Rue Neuve, la Ville Andon, la Ville Aubert, Kerbieu et tous les vieux domaines que possédait la duchesse d'Aiguillon dans les communes de Plélo, Pordic et Tressigneaux.

Le château de Saint Bihy fut d'abord acheté par un agent d’une compagnie formée pour spéculer sur les biens nationaux, puis dans l'espace de deux ans, il changea quatre fois de maître. Enfin Maître Corbel, qui n'avait pas cessé ses relations avec la jeune duchesse d'Aiguillon le racheta pour elle d'avec un dénommé Derrien et ce pour la somme de 18 000 livres. Agissant toujours, dans les mêmes intentions et d'après les mêmes ordres, il travailla à reconstruire la fortune de la famille d'Aiguillon et racheta successivement d'avec leur premiers acquéreurs la Ville aux Fêvres, la Saudre et la métairie de Saint Bihy. Malheureusement sur ces entrefaits, le jeune Emmanuel qui vivait auprès de sa mère mourut ainsi que Henriette de Navailles - et Maître Corbel, ne sachant plus au nom de qui agir cessa ses efforts.

Cependant, le premier consul avait paru et les Chabrillan se firent rayer de la liste des émigrés ; ils obtinrent que le séquestre mis sur les biens de leur grand-mère fût levé. Ils renouèrent leurs relations avec Maître Corbel qui recommença ses efforts pour relever leur fortune ou du moins leur en assurer les débris, toutes les grandes métairies ayant été vendues.

D'un autre coté, un autre obstacle surgit encore : les créanciers du duc d'Aiguillon, qui n'avaient point osé prendre la République à parti n'hésitèrent pas à se jeter sur les de Chabrillan, et ceux-ci durent renoncer faute d'argent à reconstituer la fortune de leurs ancêtres. Grâce à la fermeté de Maître Corbel et avec les mesures qu'il prit, ils conservèrent ce qui leur était demeuré en Bretagne. Malheureusement, dans un voyage qu'il fit à Paris avec l'évêque de Saint Bricuc, il fut assassiné à la porte de son ami Rupérou conseiller à la cour de cassation.

On eut dit que la fortune s'attachait à suivre les pas des héritiers de la duchesse d'Aiguillon : leur oncle Armand d'Aiguillon était mort à Hambourg leur laissant toute sa fortune. Magré cela, ils ne purent trouver assez d'argent pour rembourser à la sœur de M. Corbel les 44 000 francs que son frère leur avait avancé pour l'achat de Saint Bihy et de ses dépendances. Ils prirent alors une mesure déplorable : une transaction intervint : Mlle Corbel céda les acquisitions de son frère à Messieurs de Chabrillan pour la somme qu'ils lui avaient couté et ceux-ci les vendirent sur le champ à Mr de Quélen, à condition qu'il en payerait le prix de 44 000 francs à Mlle Corbel et que lui et ses frères les acquiteraient complètement de la dette de 98 000 livres que nous avons citée plus haut.

Quand aux autres biens de Madame d'Aiguillon, M. Fortuné de Chabrillan les vendit en 1844 à M. du Clézieux pour la somme de 400 000 francs.

ANNEXE I : COPIE ET TRADUCTION DU TESTAMENT DE GUILLAUME LE BORGNE, SENECHAL DE GOELLO. (d'après Géslin et Barthélemy, "Anciens évêchés de Bretagne", T. IV, p 84).

(F. Corbel, vers 1867).

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