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CAHIER DE DOLÉANCES DE PLÉLAN-LE-GRAND EN 1789

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Subdélégation de Plélan. — Dép. d'Ille-et-Vilaine, arr. de Montfort, chef-lieu de canton.
POPULATION. — En 1793, 3.056 hab. (Arch. Nat., D IV bis 51) ou 4.500 hab. (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série L). — Le premier chiffre doit comprendre uniquement la population de Plélan ; dans le second, on a dû englober celle de sa trève, Treffendel.
CAPITATION (avec Treffendel). — Total en 1770, 3041 l. 11 d., se décomposant ainsi : capitation, 2.020 l. 10 s. ; 21 d. p. l. de la capitation 176 l. 15 s. 11 d. ; milice, 269 l. 11 s. 9 d. ; casernement, 494 l. 3 s. 3 d. ; frais de milice, 80 l. (Ibid., C 3981). — En 1778, 1.011 articles, dont 448 inférieurs à 3 l. (Ibid., C 3982).
VINGTIÈMES (avec Treffendel). — En 1787, 3.265 l. 6 s.
FOUAGES (avec Treffendel). — 63 feux 3/4 1/6 1/40. — Fouages extraordinaires, 1.213 l. 17 s. 10 d.

OGÉE. — Ce territoire est coupé par plusieurs vallons. On y voit des terres de bonne qualité, des prairies, beaucoup de landes, et la forêt de Paimpont, qui s’étend en partie dans ce territoire.

PROCÈS-VERBAL. — Assemblé électorale, le 5 avril 1789, au lieu ordinaire des délibération, sous la présidence de Godefroy- Pierre Joubaire, procureur fiscal de Plélan (voir la note 1 qui suit), en l'absence du juge ; adjoint, le sieur Sevoy, contrôleur des actes. — Députés : Allaire, du Gué (voir la note 2 qui suit), procureur fiscal, bachelier en droit ; Mocudé, des Landelles ; Broussais, du Pont.

Note 1 : Sur la seigneurie de Plélan. Voy. GUILLOTIN DE CORSON, Grandes seigneuries de Haute-Bretagne, 1ère série, p. 341-346.

Note 2 : Charles-François Allaire était, en 1789, procureur fiscal de plusieurs juridictions, notamment de celles de l'abbaye de Paimpont, et, au dire d'un de ses amis, « ce qui était rare, quoiqu'il fit son devoir, il était aimé de ceux qu'on apelait autrefois vassaux » (Lettre de S. Codet, juge à la Cour d'appel de Rennes, au préfet d'Ille-et-Vilaine, 19 décembre 1807). Il a présidé, le 5 avril, l'assemblée électorale de Saint-Péran, et il s’est opposé à l’insertion de certaines demandes des membres de cette assemblée dans le cahier de la paroisse, ce qui a provoqué une autre réunion, officieuse, où le cahier a été rédigé conformément au vœu des habitants. Elu, en 1790, chef de la garde nationale de Plélan, il forma un corps de 600 hommes, qu’il exerça avec beaucop de zèle, et parmi lesquels se recrutèrent plus de 280 hommes des premiers bataillons d’Ille-et-Vilaine ; il prit part, à la tête de cette garde, à un combat contre Puisaye, Agent nationale en 1793, il fut nommé agent municipal par le représentant Boursault en 1794. Notaire à Plélan, premier suppléant du juge de paix en l’an X, il fut maire de cette commune depuis l’an VIII jusqu’au renouvellement municipal de 1807, où, sur la proposition du sous-préfet Maudet, il fut remplacé (Arch. d’Ille-et-Vilaine, série H, fonds de l’abbaye de Paimpont, liasse 9, série M, dossiers des maires et adjoints ; série T, dossiers des demandes de bourses dans les lycées [lettre d’Allaire, en date du 29 floréal an XII, sollicitant une bourse pour l’aîné de ses quatre fils et donnant à ce propos son curriculum vitae)].

Le président de l'assemblée déclare que, le cahier de doléances ayant été rédigé, « presque toutes les voix se sont élevées pour y donner une entière approbation ». Cependant on lit à la fin du procès-verbal : « Nous a été représenté que, sans nous en donner connaissance, une partie des habitants s'était retirée dans un cabaret pour y donner un cahier particulier de doléances, ce qui a sursis à notre commission et donné lieu à la majeure partie des habitants au cahier ci-joint de se retirer, auparavant de l'avoir souscrit, de quoi nous avons donné acte aux soussignés et autres ne le sachant faire, eux le requérant ». — Comparants (3) (d'après les signatures du cahier) : Jan Frotin ; Mocudé, des Landelles ; François Launay, délibérant ; Broussais ; Allaire ; Sauvage ; Gortais ; Gautron, syndic militaire ; Sauvage ; Allaire, prêtre (4) ; Sevoy, receveur des domaines du Roi ; Charles Frotin ; Mocudé ; Le Conte, avocat ; Lesausse ; Pierre Flambard ; Salmon, du bourg ; Sinac, (?) [François Sinaut] ; plusieurs signatures illisibles.

Note 1 : Nous avons rétabli la qualité des membres du général de la paroisse (délibérants) à l'aide d'une délibération de ce général en date du 8 juin 1788 (Ibid., C 4889).

Note 2 : Jean-François Allaire, qui demeurait au bourg de Plélan, était chapelain de la chapelle de Thélin (Ibid., série G, fabrique de Plélan).

 

Cahier de charges, pour être présenté par les soussignants à la commune de la ville et paroisse de Plélan-le-Grand, aux fins du règlement du 16 mars dernier, le 5 avril 1789 [Note : Les passages en italique sont empruntés aux Charges d’un bon citoyen de campagne].

Le Roi nous appelle à ses conseils, afin que nous puissions éclairer Sa Majesté sur les maux et sur l'amélioration dont notre sort peut être susceptible ; il veut que nous concourions tous, sans distinction de rang et de fortune, à la nomination de nos représentants ou députés aux Etats généraux ; empressons-nous de répondre à ses vues justes et bienfaisantes ; il n'est point de moyens plus sûrs que de lui faire un tableau fidèle, exact de nos doléances et de nos souhaits.

La commune a arrêté :

— De demander l'abolition de la corvée pour l'ouverture et entretien des grandes routes, qui pèse sur les seuls habitants des campagnes (voir la note qui suit).

Note: La tâche de cette paroisse, sur la route de Rennes à Vannes et à Lorient, était, en 1788, longue de 1.586 toises et celle de sa trêve de Treffendel était longue de 608 toises ; le centre de chacune de ces tâches se trouvait à une lieue du clocher (Arch. d'Ille-et Vilaine, C 4883).

— De demander l'abolition de la milice, qui enlève aux laboureurs des enfants utiles et même nécessaires, tandis que de simples domestiques de gens privilégiés, gens souvent inutiles et sans aveu, en sont exemptés (voir la note qui suit).

Note : La paroisse de Plélan dut, pendant la période 1781-1786, fournir 10 miliciens, conjointement avec sa trêve de Treffendel, à raison de 2 par an, sauf en 1784 en 1786, où elle n’en fournit qu'un. En 1781, sur 257 jeunes gens participant au tirage, 230 furent exemptés ou reformés ; en 1784, il y en eut 177 sur 218, et, en, 1786, 312 sur 317 (Ibid., C 4704).

— La suppression des fuies et garennes, dont les habitants désolent les moissons et ravagent les campagnes ; qu'il soit défendu aux domestiques et gardes de porter des armes à feu et d'avoir des chiens de chasse.

— La suppression des corvées et servitudes féodales odieuses en elles-mêmes ; elles donnent lieu à des vexations et à la dévastation de nos campagnes (voir la note qui suit).

Note : Tous les manoirs de la paroisse relevaient de la chatellenie de Plélan ; le seigneur de Beaulieu devait chaque année « quatre campanes à faucon et un gant à fauconnier » ; le seigneur de Francmont « quatre vernelles d'argent et quatre campanes à faucon, à la mi-août » ; le propriétaire de la tenue Brillo « une paire de gants blancs, le premier jour de l'an, à l'issue de la messe du matin » ; les vassaux de la Rivière devaient faire la hue pendant les chasses du seigneur et porter ses lettres de Plélan à Lohéac, moyennant quoi ils jouissaient de droits d'usage dans une partie de la seigneurie de Brécilien. Dans le fief du Mariage, tenu en juveigneurie de la seigneurie de la Muce en Baulon par le propriétaire de la seigneurie de la Chèze d'Erbrée, toutes les filles non mariées devaient payer au seigneur de la Chèze, le 15 août, 18 deniers, une demi-buce d'avoine et une poule ; le sieur de la Prévôtaye devait, le 1er janvier, « un arc de couldre blanche encordé » et douze flèches non ferrées, mais empennées et munies de cire verte (GUILLOTIN DE CORSON, Grandes seigneuries de Haute-Bretagne, 1ère série, pp. 345-346). Les vassaux du fief de Thélin rendaient au seigneur de Plélan un aveu collectif, dans lequel ils reconnaissaient tenir de lui prochement « en sa terre et seigneurie de Plélan, une tenue d'héritages nommée le fief du Telain, contenant environ 2.500 journaux de terre » ; ils lui devaient une rente annuelle et solidaire de 47 l. 9 s., et « chaque demeurant en maison lui appartenant une buce d’avoine et une geline » ; tous ceux qui avaient des bœufs, charrettes et chevaux devaient certaines corvées ; ceux qui n’en avaient pas étaient chargés de la garde des prisonniers ; tous devaient une fois la semaine le « devoir de hue au temps de la semaison et porchaison », moyennant quoi ils jouissaient de droits d’usage dans la forêt de Brécilien, au quartier de Lohéac, et ils étaient autorisés à y nourrir leurs porcs en certaines saisons et à y saisir les animaux étrangers. Ils se réunissaient trois fois par an, le mardi de Pâques, le jour de Saint-Armel (16 août) et le jour de Saint-Etienne (26 décembre), à la fontaine Bodin, pour délibérer sur les choses nécessaires à la garde et défense de leur tenue. Le mardi de Pâques, ils élisaient un « homme teneur audit tenant pour faire la levée et cueillette des rentes et devoirs et faire les frais de justice » ; puis ils nommaient deux tenanciers pour conduire et présenter leur élu au seigneur de Plélan (GUILLOTIN DE CORSON, Pouillé, t VI, pp. 368-369).

— Qu'il ne soit plus levé à l’avenir que deux impôts, l’un réel, l'autre personnel ; qu'ils soient également répartis sur tous les sujets du Roi, de quelle qualité qu'ils soient, dans un seul rôle, en proportion de l'aisance et de la fortune.

— La suppression des fouages, casernement, franc-fief et autres droits, auxquels l'ordre du Tiers seul est assujetti.

— Que l'égail et répartition des subsides et impositions qui seront levés par la suite se fasse dans les paroisses et par les habitants ; qu'à cet effet, il soit nommé, dans l'assemblée générale des propriétaires habitués de la paroisse, deux personnes en chacun des deux premiers ordres, et quatre dans le dernier, lesquels, en présence du juge, procureur fiscal et greffier de l'endroit ou arrondissement, procéderaient au dit égail par procès-verbal et sans frais, auquel égail, dont le serait publiquement annoncé, pourraient comparaître tous intéressés et y faire les représentations convenables.

— Que les charges et contributions que devra porter la province soient désormais versées directement au trésor royal ; que la réception et l'attouchement sur les lieux s'en fit sans rétribution par les receveurs des bureaux des domaines qui seraient établis près les bailliages, lesquels les feraient parvenir de la même manière que leurs autres recettes.

— Que, dans les assemblées particulières de cette province, le Tiers ait un nombre égal de représentants à celui des deux premiers ordres réunis, et que les voix s'y comptent par tête ; que la moitié au moins des députés soient pris dans les campagnes et que Plélan soit le chef d'un district.

10° — Que le Tiers ne puisse être présidé que par un membre de son ordre sur l'élection qu'il en serait fait au scrutin.

11° — De demander la suppression de toute loi qui nous exclurait de parvenir à tous emplois civils et militaires, également que de toutes celles qui mesureraient les peines pour crime de même nature, à raison de la naissance.

12° — De solliciter le franchissement des rentes féodales au taux et sur le pied de leur valeur fixée par notre Coutume, et que le franc-alleu soit de droit public.

Cet article est de la plus grande importance et procurerait le soulagement le plus salutaire pour la classe plébéienne et surtout pour la portion du peuple la plus indigente, sur laquelle il pèse davantage, et particulièrement en cette paroisse où nombre d'infortunés payent en redevance féodale plus que le revenu de leur terre.

Pour le plus mince droit un infortuné se trouve souvent accablé sous le poids des frais de poursuite, qui surpassent quelquefois au centuple le principal demandé, et ce poids est d'autant plus rigoureux qu'il se renouvelle annuellement.

Une autre raison doit déterminer à insister sur cette demande : dans la majeure partie de fiefs, les rentes sont solidaires et revanchables ; les seigneurs ne s'attaquent qu'aux plus aisés, sûrs d'être bien payés ; ceux-ci, pour ne pas perdre, reportent aux pauvres, ce qui introduit une espèce de guerre intestine entre les divers propriétaires et associés.

13° — De demander qu'il soit créé des juridictions royales dans toute la province ; les avantages qui en résulteraient sont incalculables ; la diminution de degrés de ressort jusqu'à une décision souveraine, degrés qui se comptent en quelques endroits au nombre de quatre ou cinq, la longueur de l'instruction que nécessite le passage de ces différents degrés, longueur qui tient dans l'incertitude les fortunes les mieux établies, fait éloigner ou manquer des établissements avantageux, entraîne presque toujours un fatal abandon de succession. Les frais considérables de déplacement pour les villes éloignées, les longues absences qu'ils entraînent, et qui détournent des travaux, des affaires et de la culture des terres, semblent promettre à la Nation le succès d'une réclamation aussi juste ; de solliciter que Plélan soit un lieu d'établissement (voir la note qui suit).

Note : Au bourg de Plélan, se tenait la haute juridiction de la Chèze ; au château du Breil-Houssoux, la moyenne justice de cette seigneurie et la haute justice du Clos et de la Chevollerais ; au gué de Plélan, les hautes justices de Plélan, des Brieux, de treize fiefs de Brécilien, de Beauvais, la moyenne justice de la Villescerfs, la base justice de Beaulieu et la maîtrise particulière des eaux, bois et forêts de Brécillien (Arch. d’Ille-et-Vilaine, C 1818).

14° — Demander l'abréviation de la procédure en matière d’injures vervales et d'endommagement de bestiaux, la procédure ordinaire entraînant des frais immenses pour de minces objets.

15° — Demander qu'il soit libre de moudre où l'on voudra, et d’avoir chez soi des meules à bras sans en rien payer, chose essentielle dans cette paroisse (voir la note qui suit).


Note : Des vassaux du moulin de la Chèze ayant prétendu se servir de moulins à bras en s’appuyant sur l’arrêt du Parlement du 21 août 1751, ils furent poursuivis par le meunier ; le seigneur ne voulut pas accepter leur offre d’abonnement et ils furent condamnés, par sentence de la juridiction de la Chèze, en date du 10 mai 1752, à payer le droit de moûte. Le Présidial de Rennes, devant lequel fut porté cette sentence, appointa les vassaux à informer que les moulins étaient en chômage pendant un quart de l’année, qu’ils étaient humides, n’étant pas carrelés, et que les grains étaient endommagés et pourris, enfin qu’ils n’étaient pas garnis de poids justes et étalonnés. Le 27 mai 1755, le Parlement rendit un arrêt ordonnant que la sentence du 10 mai 1752 serait exécutée et que le marquis de Montigny, seigneur de la Chèze, tiendrait ses moulins en bon état et garnis de poids étalonnés. Les motifs de cet arrêt étaient : 1° que les vassaux ayant suivi les moulins pour leurs autres grains, malgré l'allégation du chômage, ils devaient les suivre pour les blés noirs, étant même prouvé qu'il en avait été moulu à ces moulins, sans que jamais il en eût été refusé ; qu'ainsi ils ne pouvaient pas forcer le seigneur ni son meunier d'accepter l'abonnement ; 2° que le chômage ne dispense de la suite du moulin qu'après que les mouteaux ont attendu l'eau pendant trois jours et trois nuits, et le vent pendant vingt-quatre heures, suivant l'art. 386 de la Coutume ; 3° que si les grains étaient endommagés ou si les poids n'étaient pas justes, l'art. 385 donne au vassal l'action pour le dommage et n'exige pas même d'autre preuve que son serment ; 4° que si ces moyens des vassaux pouvaient être admis pour les blés noirs, ils devraient l’être également pour tous les autres grains, ce qui entraînerait bientôt l'anéantissement de la suite de moulin, qui est un droit naturel du fief (POULLAIN-DUPARC, Journal des audiences et arrêts du Parlement de Bretagne, t. IV, pp. 325-326), En 1789, ces moulins étaient loués 600 l. par an. Quand l'Assemblée nationale eut supprimé les banalités, le meunier réclama une diminution de 400 l. par an sur le prix de son bail, savoir : 300 l. « pour dédommagement du produit des meules à bras, suivant le rôle d'abonnement des détreignables », et 100 l. pour le défaut de suite de moulin. Par jugement du 27 décembre 1792, le tribunal du district de Montfort octroya au meunier une réduction de 100 l. par an sur son bail depuis Noël 1789, somme offerte par le propriétaire, et lui accorda un délai d’un mois pour opter entre cette réduction pour l'avenir et la résiliation du bail (Arch. d’Ille-et-Vilaine, série L, Tribunal du district de Montfort, liasses des jugements).

16° — Charge Messieurs les députés aux Etats généraux de vérifier l'état des finances et prendre les mesures les plus sages pour assurer leur bonne administration, travailler à diminuer les frais de recouvrement, supprimer les pensions ruineuses et multipliées dans l'Etat ; demander la destruction des corps inutiles et le retranchement de ceux qui sont trop nombreux, et l'assurance du retour périodique des Etats généraux, et faire toutes demandes et réquisitions avantageuses, qui n’auraient pas été prévues.

[22 signatures, dont celle du président Joubaire].

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Il y a eu à Plélan une autre assemblée ; c'est sans doute celle à laquelle fait allusion le procès-verbal de l'assemblée officielle. — C'est de cette assemblée qu'émane le cahier suivant. Comparants (d'après les signatures) : Mathurin Roux, délibérant ; Julien Duault ; Julien Coignard ; Godefroy Treluyer, délibérant ; Jean Paitremont, trésorier en charge ; Pierre Morin ; Julien Cotte, délibérant ; Joseph Berhault, délibérant ; Guillaume Du Bois ; Joseph Colin, délibérant ; Alexis Erussard, délibérant ; Jo. Roux ; Jean-Marie Paviot ; Jean Collin ; Guillaume Chaussé ; Joseph Thomas ; Joseph Jégu ; Amant Collin ; Joseph Catherine, délibérant ; Pierre Houssais ; Guillaume Bernard ; Jo. Guyot ; René Bernard ; Julien Gorlay ; Jean Chaussé ; Joseph Rivière ; Jo. Roux ; J. Aiant ; Jean Percevaux ; Joseph Rolland ; V. Cotto ; Jo. Paviot ; Jean Crublé.

Du dimanche cinq avril mil sept cent quatre-vingt-neuf.

Le public de la paroisse de Plélan-le-Grand, s'étant assemblé au pied de la croix du cimetière de la dite paroisse pour délibérer et représenter les plaintes les plus grièves de notre paroisse et pour obéir aux ordres et ordonnances que notre Roi nous demande pour la conservation de tous nos biens,

SIRES,

[1] Nous vous payons dans notre paroisse, pour vos rôles de capitation, fouages et vingtièmes, la somme d'environ dix mille livres ; nous ne nous plaignons point de cette somme ; au contraire, nous sommes très contents ; ce qui nous gène le plus, c'est qu'il nous faut payer aux seigneurs de notre paroisse plus de vingt mille livres par an, pour les avoines, rentes, poules, corvées, dîme, mouture, etc. ; nous demandons que tous vos rôles soient réunis dans un seul rôle et que les gens nobles paient également que nous, suivant les biens qu'ils possèdent.

[2-3] §§ 1 et 2 des Charges d'un bon citoyen de campagne.

[4] Des impôts et billots, des commis des cuirs qui sont cause qu'on ne peut plus porter de souliers ; il nous faut la plupart ne porter que des sabots, parce que cette marchandise est d'un prix infini et les pauvres gens ne peuvent en avoir.

[5] Dans notre paroisse de Plélan-le-Grand et Treffendel, sa trêve, il n’y a que huit traits qui sont très petits, et nous sommes ruinés, à cause de ces avoines, dans les traits du Tellain, la Rivière et du Mariage, deux boisseaux de grosse avoine par chaque cheminée fumante par chacun an ; dans le trait de Mérignac, si un père de famille arrive à mourir et laisse six ou sept enfants, ils payent tous chaque deux boisseaux de grosse avoine, également que la mère, et quelqu’un de ces gens qui n’ont pas plus de cent sols de rente et une petite maison pour se loger, le seigneur a tout le revenu de ces pauvres gens ; dans celui des Brieux, on paie six boisseaux de grosse avoine par chaque cheminée fumante ; dans le trait de Castonnet en la Chèze, trois boisseaux de grosse avoine, aussi par chaque cheminée fumante ; dans Castonnet en Lohéac, deux boisseaux de grosse avoine aussi par cheminée ; et, dans celui de Derval en Treffendel, six boisseaux de grosse avoine par chaque maison tombée ou non et tous les ans ; c'est ce qui met le peuple de notre paroisse à la mendicité.

[6] Les moulins de notre dite paroisse, situés pour la plupart sur des ruisseaux ou petites rivières qui tarissent aux moindres sécheresses ; que les pluies cessent durant quelques jours, qu'il survienne d'autres accidents, et, comme il est défendu d'avoir des meules à bras, même pour y suppléer, et qu'on ne vend pas de pain dans nos campagnes, il faut mourir de faim. Eh ! Qui n'y éprouva en tous temps l'insolence et la friponnerie de ces meuniers, qui, sachant que les vassaux ne peuvent aller ailleurs faire moudre leurs grains, exigent de l'argent, outre ce qu'ils prennent en nature, pour leur rendre encore plus de son que de fleur ? Il nous faut payer pour ces petites meules à bras quinze sols par chaque personne par chacun an, que nous avons bien du mal à tourner, et encore c'est perdre du grain ; cela est bien désagréable pour tous les habitants de notre paroisse, qui n'ont pas encore quelquefois de grain.

[7] Si un pauvre homme a besoin de vendre son bien pour nourrir lui, sa femme et ses enfants, cet homme a du bien dans un fief où il paye six ou quatre boisseaux d'avoine par chacun an aux seigneurs, les rentes et la dîme en outre ; il ne peut trouver à vendre son bien à cause des rentes de leurs dits seigneurs et il est contraint, lui et sa famille, d'aller au pain, et ceux qui ramassent vos rôles, comment voulez-vous qu'ils soient payés, quand ces pauvres gens sont ruinés ? Les seigneurs prennent l'avoine à la grande mesure ; il en faut cinquante livres pour faire un boisseau ; ils prennent la dîme en outre au trente-six et treize javelots (voir la note qui suit). Il y a bien la moitié des gens de notre paroisse ruinés qui vont au pain. On leur doit de l'avoine menue suivant nos anciens aveux ; quand on va la leur mener aux greniers de leurs seigneuries, il faut que ce soit de grosse avoine, ou bien ils ne la reçoivent pas, et il nous faut la payer à quel prix qu'ils veulent. Ils ont des fermiers ou comptables qui ne demeurent point sur les lieux ; quand ils viennent dans notre paroisse, on y va pour les payer ; ils nous disent qu'il n'ont pas le temps ; ils nous disent de revenir en huit ou quinze jours, qu'ils s'y trouveront, et, pendant ce temps, ils nous envoient à tous des copies qu'il nous faut payer trois livres pièce. Dans une petite tenue qui se monte à douze boisseaux d'avoine, ils ont envoyé vingt-deux copies en deux ans, et ces gens qui avaient leur argent prêt à donner et une autre tenue où on payait six boisseaux d'avoine pour tout le village, à présent ils ont eu le malheur de perdre leurs titres ; ils en payent à présent six boisseaux par chaque cheminée fumante ; cela est bien désagréable pour ces pauvres gens, et cette avoine qu'on paie, c'est une chose bien injuste, et les frais qu'ils font aux pauvres gens les mettent tous à la mendicité.

Note : Un tiers de la dîme appartenait au recteur, les deux autres aux seigneurs (Arch. d'Ille-et-Vilaine, série G, Pouillé du diocèse de Saint-Malo), La dîme du Fief-Briand dépendait de la seigneurie des Brieux (GUILLOTIN DE CORSON, Grandes seigneuries de Haute-Bretagne, 1ère série, p. 121).

[8] Ces rachats qu'il y a dans certains fiefs de notre paroisse, qui, donnant aux seigneurs tous les fruits des biens d'un père de famille dans l'année qu'il meurt, mêlent bientôt et confondent les cris du besoin avec le deuil des orphelins ; c'est ce qui est encore bien désagréable dans notre paroisse.

[9] Ces lods et ventes, attribuant aux seigneurs une portion du prix de l'héritage, qui n'est souvent aliéné par son vassal que pour lui payer la valeur de prestations en fruits, qu'une stérilité générale avait refusées à ses travaux ; cela est encore bien injuste.

[10] Cet aveu qu’un vassal incertain et du fief et de charges, grévant le patrimoine, qu’il recueille sans titre, doit rendre au premier seigneur qui l’exige avant de l’instruire, qui le ruine en frais, si l’aveu renferme des omissions, qui s’empare enfin de l’héritage de ce malheureux vassal si la mort [l’a] privé de témoins attestant que ses aïeux l’ont possédé quarante années ; dans notre paroisse des gens, qui n'ont que trois ou quatre livres de rentes, il leur faut rendre aveu aux seigneurs, dont leurs procureurs ruinent ces pauvres gens en frais pour l’impunissement de leurs aveux jusqu’à trois ou quatre fois.

[11] Pour la corvée qu'il nous faut faire dans notre paroisse dont nous n'avons jamais été récompensés aucunement, nous demandons que les nobles la fassent également que nous pour les grands chemins.

[12] Nos aieuls avaient planté tous les communs de paroisse ; à présent, les seigneurs ont fait abattre tous les arbres, qui ne leur appartenaient point ; ils devaient être à nous, puisque les communs nous appartiennent ; encore, ils ne voulaient pas nous vendre du bois ; ils aimaient mieux le brûler à tas pour faire de la cendre, et ces arbres qui nous faisaient un bien considérable à cause des glands que produisaient ces arbres, avec quoi nous engraissions nos bêtes, qui nous épargnait beaucoup de grain.

[13] Comment les seigneurs de notre paroisse, qui ont des biens considérables, ne payent pas plus qu'un pauvre homme qui a vingt ou trente livres de rente ? Et ils devraient au moins payer au grand de leurs biens et vivre de leurs rentes, puisqu'il nous faut bien, nous, vivre de nos rentes, sans que nous payerions tant de rentes aux seigneurs comme nous payons ; c'est ce qui met le peuple de notre paroisse à aller au pain.

[14] Nous nous plaignons dans notre paroisse que nos seigneurs ont des fuies et garennes pour manger nos levées, et nous n'avons pas encore la permission de porter des fusils ni d'armes à feu pour garder nos maisons et nos mouches à miel ; quand ils savent que nous avons des armes à feu, ils les envoient prendre par les cavaliers de la maréchaussée ; nous demandons, Sire, d'avoir chaque notre arme à feu pour garder nos levées des bêtes de forêt et des bêtes féroces ; c'est ce qui est plus utile.

[15] Les membres de justice des seigneurs de notre paroisse nous pillent et nous ruinent de leur côté ; ils ne craignent rien ; ils sont tous les maîtres dans notre paroisse, parce que les seigneurs ne leur disent rien ; quand ils peuvent avoir la dent sur une personne, ils la mettent à aller au pain, lui font vendre tout ce qu'elle peut avoir ; si un collectteur va quand ils font la vente de ce pauvre homme, pour se faire payer sur ses rôles, ils ne veulent pas encore le payer, parce qu’ils veulent tout avoir pour eux ; rien que pour une copie seulement, ils prennent dix-sept livres quatre sols sans aucune procédure, avec quittance représentée ; les greffiers, quand il meurt des pères de famille laissant cinq ou six enfants à nourrir, ils vont mettre le sceau, font inventaire ensuite, vont à dix heures du matin, s'en retournent à quatre heures du soir, sont deux heures à dîner ; ce sont-ils des journées faire, à vis que nous, pauvres paysans, pour cinq sols par jour, il nous faut travailler depuis six heures du matin aux six heures du soir, au lieu qu'un greffier a cent sols par jour, et quelquefois met un renvoi, il a dix livres ? C'est-il gagné, en vérité ? Ils font vente ensuite ; la vente se monte à deux ou trois cents livres ; encore ils n'ont pas assez d'argent de la dite vente pour payer les greffiers ; il faut encore au tuteur en donner de son argent pour payer le restant, et ces pauvres mineurs, leur faut aller au pain, ou bien aux parents les nourrir, et quelquefois les parents qui sont pauvres ; cela est bien désagréable pour ces pauvres parents qui ont bien de la peine à avoir du pain.

[16] Dans notre paroisse, il y a plusieurs Messieurs qui ont des chiens et vont à la chasse dans nos champs avec leurs chiens, ouvrent les brèches, ne les ferment point, parcourent nos champs avec leurs chiens, font des torts considérables à nos champs avec leurs chiens, font des torts considérables à nos levées ; si nous les trouvons dans nos champs pour les opposer d’y chasser, encore ils nous disent : « Si tu veux mourir, dis une parole ». Encore il nous faut nous retirer et ne dire rien ou bien mourir ; les bestiaux y passent manger nos levées, et après il nous faut payer le dommage ; nous vous demandons, Sire, que pour tous dommages faits par les bêtes, il ne faudra point de procès ni d’assignation ; nous voudrions seulement que six prudhommes pour juger le dommage, qui s’assembleront les dimanches après la grande messe.

[17] Nous vous demandons que notre paroisse soit franche, ou bien il nous faudra mourir de faim, parce que nous sommes tous ruinés par les procureurs de notre paroisse. Nous ne pouvions vous la porter plus vite à cause des Messieurs de notre paroisse ; il nous fallut encore dimanche la faire ailleurs, parce que nous ne pouvions la faire avec eux ; encore ils voulaient nous la déchirer ; nous avions attaché l'ordonnance à la porte de l'église ; ils la firent prendre et l'emportèrent ; il nous fallut prendre un jeune garçon pour nous la faire ; encore ils voulaient le faire mettre en prison ; nous vous demandons que le jeune homme soit récompensé.

SIRE,

Ayez égard à la présente vous présentée par la commune de notre paroisse ; nous ne cesserons de bénir le Seigneur pour la conservation de votre illustre personne et de toute votre cour, et nous sommes tous prêts de prendre les armes pour son service, aussitôt que vous nous le commanderez ; vous savez bien que nous nous sommes toujours bien combattu pour votre Royaume, comme des vaillants soldats et nous avons nommé pour députés les personnes d'honorables gens Mathurin Roux, de Couettedouant ; René Eon, des Chataigniers, et Joseph Rolland, de la Haye de Castonnet.

Ainsi signé sur l'original resté aux archives de la fabrique de Plélan.

[33] signatures, dont 2 autographes, celles de Mathurin Roux et de Joseph Rolland].

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DÉLIBÉRATION DU GÉNÉRAL ET DE LA COMMUNE du 1er février 1789.
(Arch. commun. de Rennes, Cart. des Aff. de Bretagne, L).

[Après avoir entendu un violent discours prononcé par un de ses membres contre l'attitude de la Noblesse (voir la note qui suit), notamment dans l'affaire du 27 janvier à Rennes, l'assemblée déclare persister dans sa délibération du 14 décembre précédent] et ajouter que c'est à tort que l’on a affecté de distinguer dans l'Ordre du Tiers plusieurs classes, que cette distinction, qui ne tend qu'à semer la division, est absolument inconnue des comunes, qui n’en admettrent d’autre que celle que les vertus et les talents établissent, rejetant l’opinion qui voudrait rendre toute autre distinction et considération personnelles héréditaires.

Note : L'extrait conservé aux Archives communales de Rennes porte un certain nombre de ratures et de surcharges contemporaines, peut-être écrites de la même main que le reste du texte, et destinées à atténuer la violence de la version primitive. Par exemple, dans cette phrase : « elle [la noblesse] ne craint point de se souiller des crimes les plus horribles » on a raturé les mots « se souiller des crimes les plus horribles », pour les remplacer en interligne par l’expression plus douce « tout oser ».

Que, pour éloigner toute distintion dans l'Ordre du Tiers, la commune de Plélan désirerait (si le vœu d'ailleurs de la pluralité des autres communes n’était contraire) qu’ils n’y eût aucune exclusion ; les députés étant élus par la commune réunie, il n'est pas à craindre que celle-ci s'abuse sur le choix de ses représentants.

Soutenant la commune de Plélan qu'il est essentiel que les habitants des bourgs et campagnes soient appelés à voter dans l'Ordre du Tiers, cette paroisse, qui est le chef-lieu d'une subdélégation et qui forme un canton considérable tel qu'il suffisait au prince, lors de l'établissement des municipalités, pour lui en accorder le droit, demande à députer aux Etats ; qu'en tous cas elle soit le chef-lieu d'un district de dix mille, pour lequel il doit être nommé un député ; demande qu'un des pouvoirs de MM. les procureurs-généraux syndics ne soit confirmé, ces messieurs s'étant, malgré les brillantes qualités qu'on se plaît à leur reconnaître, montrés uniquement gentilshommes, étant essentiel qu'il y ait un de Messieurs les procureurs-généraux-syndics pris dans l'Ordre du Tiers.

Qu'en cas qu'il soit procédé à l'élection d'un conseil des Etats, Me Le Chapelier soit recommandé.

Que, dès cette tenue, le Tiers soit composé d'un député sur dix mille ; que les voix soient comptées par tête et non par Ordre.

Que MM. les recteurs des campagnes soient admis dans l’Ordre de l’Eglise, lorqu’ils auront dix ans de sacerdoce et qu’ils seront nés Bretons [Note : Les mots en italique sont empruntés aux délibérations du Tiers, des 22-27 décembre, dont le reste de la délibération s’est inspiré].

Que toutes corvées aux grands chemins ou féodales soient converties en une prestations en argent.

Que le tirage au sort soit aboli ; qu’au cas qu'il ne le soit pas, les domestiques des ecclésiastiques et des gentilshommes n'en soient plus exempts, étant en général le plus en état de servir et absolument inutiles à l’agriculture.

Qu'il n'y ait plus qu'un seul rôle pour la levée de toutes les impositions, telles qu’elles soient, pour les Ecclésiastiques, les Nobles et le Tiers, les égailleurs étant communs pour l'égale répartition.

Qu’il soit défendu aux domestiques des seigneurs de porter des armes, ce qui est contraire à toutes les lois et préjudiciable aux laboureurs, dont ils désolent les moissons, tandis que ceux-ci n'ont pas la liberté de les défendre sans s’exposer à des amendes.

L'assemblée adhère aux arrêtés du Tiers des 22-27 décembre 1788 et à celui des dix paroisses de Rennes du 19 janvier, réclame un châtiment sévère contre les fauteurs des scènes des 26 et 27 janvier, choisit pour son député M. Béziel, avocat et sénéchal, et le charge de remettre un extrait de la présente délibération à la municipalité de Rennes et aux étudiants en droit, qu'elle félicite de leurs efforts généreux en faveur de la liberté [Note : Le membre de phrase contenant les félicitations aux étudiants en droit a été raturé].

[51 signatures, dont celles du recteur Vétier ; du curé Fouyot ; des prêtres Allaire et Saillart ; du procureur fiscal Joubaire ; de Béziel, avocat et sénéchal ; d'Allaire et de Mocudé, des Landelles].

(H. E. Sée).

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